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Informationen zum Dokument  BGer 4A_589/2008  Materielle Begründung
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BGer 4A_589/2008 vom 12.03.2009
 
Bundesgericht
 
Tribunal fédéral
 
Tribunale federale
 
{T 0/2}
 
4A_589/2008
 
Arrêt du 12 mars 2009
 
Ire Cour de droit civil
 
Composition
 
Mmes et M. les Juges Klett, présidente, Corboz et Rottenberg Liatowitsch.
 
Greffier: M. Ramelet.
 
Parties
 
Société X.________,
 
recourante, représentée par Me Eric C. Stampfli,
 
contre
 
Y.________,
 
intimé, représenté par Me Diane Schasca.
 
Objet
 
contrat d'architecte, honoraires,
 
recours contre l'arrêt rendu le 14 novembre 2008 par la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève.
 
Faits:
 
A.
 
A.a Au printemps 1994, la Société X.________ (ci-après: X.________), dont le siège est désormais à Genève, a chargé les architectes Y.________ et A.________ de réaliser le projet de construction d'un immeuble industriel et administratif sis au rond-point T.________, à Carouge. Ces derniers ont établi un projet dit «V.________» et obtenu les autorisations de construire nécessaires en 1995, lesquelles arrivaient à échéance définitive le 24 mai 2001. Après avoir renoncé à la construction de l'immeuble, X.________ a payé à titre d'honoraires auxdits architectes la somme totale de 250'000 fr.
 
A.b En mai 2001, le capital-actions de X.________ a été racheté par B.________, ressortissant russe. Sont alors devenus administrateurs de la société immobilière C.________, avocat à Genève, et D.________, administrateur de deux sociétés également actives dans l'immobilier.
 
B.________ a souhaité construire l'immeuble qui avait été projeté en 1995 avant l'expiration des autorisations de construire y relatives, car celles-ci permettaient de conserver certains avantages qui auraient pu être remis en question, en particulier au niveau du plan de quartier.
 
Le 18 mai 2001, X.________ a mandaté Y.________ pour l'ouverture du chantier et l'exécution de toutes les prestations d'architecte.
 
Y.________ a immédiatement pris contact avec la police des constructions afin de négocier un possible débordement de la façade sud de l'immeuble au-delà de l'alignement légal. Le 29 mai 2001, il a adressé à X.________ un projet de contrat d'architecte intégrant les normes SIA et prévoyant une prestation d'architecte globale et complète (100%), à fournir par lui-même et A.________; celle-ci devait générer des honoraires d'environ 2'733'040 fr., TVA incluse, à calculer selon la norme SIA 102, édition1984, en pourcentage du coût de l'ouvrage.
 
Il a été constaté que A.________ n'a finalement pas été associé à ce projet de construction.
 
Lors de réunions tenues les 26 juin et 10 juillet 2001, X.________, par le truchement de l'administrateur D.________, a opté pour l'une des variantes du projet présenté par Y.________, laquelle constituait une refonte complète du projet dit «V.________»; la surface du bâtiment avait été augmentée, y compris la surface bâtie en sous-sol, la structure de l'immeuble ainsi que la courbe de la façade sud avaient été modifiées, de même que les matériaux destinés aux façades.
 
Par courrier du 22 octobre 2001, D.________, agissant pour X.________, a confirmé à Y.________ le mandat d'étude et de réalisation de l'immeuble; il a ajouté que le nouveau propriétaire de la société immobilière était libre de tout engagement qu'aurait contracté X.________ avant qu'il en acquiert le capital-actions.
 
Le 8 février 2002, Y.________ a adressé à X.________ une première demande d'acompte sur ses honoraires, laquelle se montait à 215'200 fr. Ce pli était libellé comme il suit:
 
« Note d'honoraires n° 1
 
Données de base
 
Travaux exécutés - projet déposé auprès du DAEL
 
Règlement concernant les honoraires d'architecte selon la Norme SIA 102/1984
 
Catégorie de l'ouvrage: classe V
 
Base de calcul pour déterminer les honoraires
 
Estimation sommaire du coût de construction d'après le volume, et d'après d'autres valeurs d'expérience (SIA 4.1.14)
 
M3 SIA = 26'650 Coût M3 des travaux 715.-/m3
 
Coût estimé des travaux
 
M3 26'650 à CHF 715.- = CHF 19'054'750.- arrondi à CHF 19'000'000.-
 
n 2001 cat. IV = 10.6
 
n cat. V = 10.6 x 1.1= 11.66%
 
facteur de correction = 1.2
 
Estimation globale des honoraires H.T.
 
CHF 19'000'000.- x 13.992 - CHF 2'658'400.- H.T.
 
Prestations exécutées à ce jour
 
Années 2001-2002
 
Le 20% des 100% voir feuille annexée "règlement concernant les prestations et honoraires de l'architecte"
 
Honoraires à ce jour H.T.
 
Le 20% des 100%, soit:
 
2'658'400.- x 20 / 100 = CHF 531'680.- arrondi à CHF 530'000.- H.T.
 
Acompte n° 1 demandé H.T. CHF 200'000.-
 
TVA 7.6% CHF 15'200.-
 
-------------------
 
Total CHF 215'200.- ».
 
X.________ a réglé cet acompte le 28 mars 2002.
 
Le 1er mars 2002, soit avant que ne débutent les travaux de gros oeuvre, Y.________ a remis à D.________ un projet de contrat d'architecte ayant pour base la norme SIA 102, édition 1984; les honoraires d'architecte y étaient estimés à la somme de 2'735'536 fr. Ce projet n'a pas été signé.
 
Le 10 avril 2002, Y.________ a soumis à X.________ un troisième projet de construction, permettant notamment une augmentation de la surface d'exploitation. L'autorisation de construire afférente à ce nouveau projet a été délivrée le 20 septembre 2002.
 
Le 8 juillet 2002, l'architecte Y.________ a requis le versement d'un deuxième acompte de 215'200 fr.; cette demande d'acompte, déterminée sur la base des mêmes éléments que sa précédente note du 8 février 2002, mentionnait que 39% des prestations totales de l'architecte avaient été réalisées. X.________ a payé cet acompte le 28 août 2002, sans émettre une quelconque protestation.
 
Le 19 décembre 2002, Y.________ a adressé à X.________ une troisième demande d'acompte de 538'000 fr., à nouveau calculée de la même manière que les deux notes précédentes; il y était relevé que le 60% de l'ensemble des prestations d'architecte énumérées dans la norme SIA 102 de 1984 avait été exécuté. X.________ n'a pas réagi à réception de cette demande, qu'elle n'a pas réglée. Elle n'a également pas honoré, sans les contester, trois factures de débours de l'architecte des 17 septembre, 10 décembre 2002 et 15 avril 2003, se montant respectivement à 6'537 fr. 50, 2'582 fr. 85 et 3'665 fr. 05, concernant des frais d'héliographie et de photocopies.
 
Le 20 mai 2003, Y.________ a adressé à X.________, à la demande de cette société, un nouveau projet de contrat, daté du 15 mai 2003, se basant, comme le précédent, sur la norme SIA 102, édition 1984; le coût estimé des travaux avait été ramené à 16'900'000 fr., les honoraires d'architecte étant évalués à 2'573'093 fr. Ce dernier projet n'a pas été signé.
 
Le 17 juin 2003, Y.________ a sollicité de X.________ le paiement d'un quatrième acompte atteignant la somme de 322'800 fr., arrêté en fonction de la norme SIA 102 de 1984; dans ce document, il était indiqué que les prestations exécutées par le prénommé représentaient 80% des prestations totales de l'architecte en vertu de ladite norme. Cette demande d'acompte, qui n'a pas été contestée, est restée impayée.
 
Le 3 juillet 2003, X.________, au moyen d'un pli rédigé par l'administrateur C.________, a fait savoir abruptement à Y.________ qu'elle ne partageait pas son point de vue au sujet des prestations qu'il avait effectuées dans les phases d'avant-projet et de projet.
 
Le 20 octobre 2003, Y.________ a envoyé à X.________ une nouvelle facture de débours de 4'003 fr.60, laquelle est restée impayée.
 
Lors d'une réunion tenue le 3 décembre 2003, X.________, par ses administrateurs D.________ et C.________, s'est engagée, en présence de l'architecte Y.________, à acquitter les honoraires d'architecte et les débours restés « en suspens ».
 
Cet engagement est toutefois resté sans suite.
 
X.________, fidèle à sa position, n'a pas honoré, sans les contester, outre une facture de débours de l'architecte datée du 15 décembre 2003, par 798 fr.35, une cinquième demande d'acompte d'honoraires; celle-ci, datée du 22 décembre 2003, portait sur 893'080 fr., se référait au Règlement SIA 102 et relevait que les prestations exécutées atteignaient le 85% de l'ensemble prévu par la norme en cause.
 
A.c Le 6 février 2004, Y.________ a invité X.________ à payer dans les 30 jours le solde de ses honoraires, à concurrence de 1'753'880 fr., ainsi que la totalité des débours, par 17'587 fr. 35.
 
Par courrier du 10 février 2004, X.________, sans fournir d'explications, a contesté les montants réclamés. Le 19 avril 2004, la société immobilière a fait savoir à Y.________ qu'il avait déjà été suffisamment rémunéré dans le cadre du projet «V.________».
 
Y.________ a établi, le 17 mai 2004, une dernière facture de débours, par 847 fr. 75.
 
Le 8 juillet 2004, Y.________ a adressé à X.________ une ultime note d'honoraires ascendant à 259'316 fr.; cette facture, établie selon les mêmes principes que les notes précédentes, mentionnait que les prestations d'architecte avaient été exécutées à 95% du total indiqué dans la norme SIA 102.
 
Ces deux factures n'ont pas été réglées.
 
A.d Le 23 août 2004, alors que les travaux de construction étaient pratiquement terminés, X.________ a résilié le contrat la liant à Y.________.
 
B.
 
B.a Après lui avoir fait notifier une poursuite le 9 décembre 2004, laquelle a été frappée d'opposition, Y.________ a ouvert action contre X.________ le 30 janvier 2006 devant le Tribunal de première instance de Genève. Dans ses dernières écritures, le demandeur a conclu au paiement des sommes suivantes:
 
- 538'000 fr. avec intérêts à 6% dès le 19 décembre 2002,
 
- 322'800 fr. avec intérêts à 6% dès le 17 juin 2003,
 
- 893'080 fr. avec intérêts à 6% dès le 22 décembre 2003,
 
- 259'316 fr. avec intérêts à 6% dès le 8 juillet 2004,
 
- 6'537 fr. 50 avec intérêts à6% dès le 17 septembre 2002,
 
- 2'582 fr. 85 avec intérêts à 6% dès le 10 décembre 2002,
 
- 3'665 fr. 05 avec intérêts à 6% dès le 15 avril 2003,
 
- 4'003.60 avec intérêts à 6% dès le 20 octobre 2003,
 
- 798 fr. 35 avec intérêts à 6% dès le 15 décembre 2003.
 
- 847 fr.75 avec intérêts à 6 % dès le 17 mai 2004.
 
Le demandeur a encore requis la mainlevée définitive de l'opposition formée au commandement de payer notifié à la défenderesse.
 
B.b Par jugement du 6 mars 2008, le Tribunal de première instance a fait entièrement droit aux conclusions en capital du demandeur, mais a modifié le taux et le dies a quo des intérêts moratoires courant sur les différentes sommes accordées. Il a ainsi condamné la défenderesse à verser à son adverse partie ce qui suit:
 
- 538'000 fr. avec intérêts à 5% dès le 18 janvier 2003,
 
- 322'800 fr. avec intérêts à 5% dès le 17 juillet 2003,
 
- 893'080 fr. avec intérêts à 5% dès le 21 janvier 2004,
 
- 259'316 fr. avec intérêts à 5% dès le 7 août 2004,
 
- 6'537 fr. 50 avec intérêts à 5% dès le 17 octobre 2002,
 
- 2'582 fr. 85 avec intérêts à 5% dès le 9 janvier 2003,
 
- 3'665 fr. 05 avec intérêts à 5% dès le 15 mai 2003,
 
- 4'003 fr. 60 avec intérêts à 5% dès le 19 novembre 2003,
 
- 798 fr. 35 avec intérêts à 5% dès le 14 janvier 2004,
 
- 847 fr. 75 avec intérêts à 5% dès le 16 juin 2004,
 
l'opposition de la défenderesse au commandement de payer précité étant écartée à due concurrence.
 
B.c Saisie d'un appel de la défenderesse, la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève, par arrêt du 14 novembre 2008, a confirmé le jugement précité.
 
En substance, la cour cantonale a retenu préalablement, à l'instar du Tribunal de première instance, qu'il n'y avait pas lieu d'ordonner une expertise judiciaire, car les faits que la défenderesse souhaitait établir par ce mode de preuve soit n'étaient pas pertinents pour l'issue de la querelle, soit étaient déjà prouvés par les pièces du dossier. Elle a ensuite admis que les parties étaient liées par un contrat d'architecte global et que la défenderesse avait reconnu, le 3 décembre 2003, être débitrice du demandeur des demandes d'acomptes et factures de débours établies antérieurement à cette date. L'autorité cantonale a reconnu que l'architecte pouvait de bonne foi interpréter l'attitude de la défenderesse comme une acceptation tacite des offres répétées de celui-là de conclure le contrat d'architecte en intégrant la norme SIA 102 de 1984 afin de déterminer les honoraires dus au tarif-coût prévu par l'art. 7.2 de la norme. Du moment que le projet finalement réalisé représentait une refonte complète du projet de 1995, que la défenderesse avait relevé avec netteté ne plus être tenue par ses anciens engagements à l'endroit du demandeur et qu'elle n'avait jamais protesté devant l'absence d'imputation de la somme payée pour le projet «V.________» à réception des deux premières demandes d'acomptes, le demandeur pouvait en inférer de bonne foi que l'acception du nouveau contrat d'architecte global entraînait une rémunération complète, « sans défalcation des montants déjà versés en exécution du contrat précédent ». Niant l'existence de tout défaut de planification, les magistrats genevois ont enfin constaté que les différents acomptes et factures de débours du demandeur avaient été calculés correctement en fonction de l'avancement progressif du chantier.
 
C.
 
X.________ exerce un recours en matière civile au Tribunal fédéral. Elle conclut à l'annulation de l'arrêt cantonal et, cela fait, que la cause soit retournée à la Cour de justice pour qu'elle prenne une nouvelle décision et désigne un expert en lui impartissant les missions suivantes: examiner les notes d'honoraires du demandeur en rapport avec la construction de l'immeuble du rond-point T.________; déterminer le coût de construction de cet immeuble; déterminer le degré de complexité correspondant à la catégorie de l'ouvrage; déterminer la valeur des prestations partielles exécutées par le demandeur; déterminer le facteur de correction et, cas échéant, l'appliquer; déterminer le coût exact et définitif des prestations exécutées par le demandeur; fixer la quotité des honoraires de l'architecte; concilier les parties si faire se peut. Elle requiert encore que le demandeur soit débouté de toutes autres ou contraires conclusions. La recourante sollicite enfin l'octroi de l'effet suspensif.
 
L'intimé propose le rejet du recours dans la mesure de sa recevabilité.
 
Considérant en droit:
 
1.
 
1.1 Interjeté par la partie défenderesse qui a entièrement succombé dans ses conclusions libératoires et qui a ainsi la qualité pour recourir (art. 76 al. 1 LTF), dirigé contre un arrêt final (art. 90 LTF) rendu en matière civile (art. 72 al. 1 LTF) par une autorité cantonale de dernière instance (art. 75 LTF) dans une affaire pécuniaire dont la valeur litigieuse atteint le seuil de 30'000 fr. de l'art. 74 al. 1 let. b LTF, le recours est par principe recevable, puisqu'il a été déposé dans le délai (art. 100 al. 1 LTF) et la forme (art. 42 LTF) prévus par la loi.
 
1.2 Le recours en matière civile peut être interjeté pour violation du droit, tel qu'il est délimité par les art. 95 et 96 LTF. En vertu de l'exception ancrée à l'art. 106 al. 2 LTF, le Tribunal fédéral n'entre pas en matière sur la violation d'un droit de rang constitutionnel ou sur une question afférente au droit cantonal ou intercantonal si le grief n'a pas été invoqué et motivé de manière détaillée par la partie recourante. Pour le reste, il applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF), sans être limité par les arguments soulevés dans le recours ni par la motivation retenue dans la décision déférée; il peut donc admettre un recours pour d'autres motifs que ceux qui ont été articulés, ou à l'inverse, rejeter un recours en adoptant une argumentation différente de celle de l'autorité précédente (ATF 134 III 102 consid. 1.1 et l'arrêt cité). Toutefois, compte tenu de l'exigence de motivation contenue à l'art. 42 al. 1 et 2 LTF, sous peine d'irrecevabilité (art. 108 al. 1 let. b LTF), le Tribunal fédéral n'examine en principe que les griefs invoqués; il n'est pas tenu de traiter, comme le ferait une autorité de première instance, toutes les questions juridiques qui se posent, lorsque celles-ci ne sont plus discutées devant lui (ATF 134 II 244 consid. 2.1; 134 III 102 consid. 1.1).
 
Saisi d'un recours en matière civile, le Tribunal fédéral conduit son raisonnement juridique sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut s'en écarter que si les constatations factuelles de l'autorité cantonale ont été établies de façon manifestement inexacte - notion qui correspond à celle d'arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 134 V 53 consid. 4.3) - ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF), et pour autant que la correction du vice soit susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF). Il appartient au recourant de soulever expressément un grief à ce propos et de présenter une démonstration précise et circonstanciée (art. 106 al. 2 LTF; ATF 134 II 244 consid. 2.2; 133 II 545 consid. 2.2).
 
Aucun fait nouveau ni preuve nouvelle ne peut être présenté à moins de résulter de la décision de l'autorité précédente (art. 99 al. 1 LTF).
 
Le Tribunal fédéral ne peut aller au-delà des conclusions des parties (art. 107 al. 1 LTF). Toute conclusion nouvelle est irrecevable (art. 99 al. 2 LTF).
 
2.
 
2.1 Pour la recourante, l'autorité cantonale a arbitrairement déduit des faits de la cause la conclusion que les parties s'étaient tacitement entendues sur l'applicabilité de la norme SIA 102 à leurs rapports contractuels. Elle fait valoir que les montants qu'elle a versés dans le cadre du projet «V.________» ne se référaient à aucune norme SIA, qu'elle n'a pas signé les projets de contrat des 1er mars 2002 et 15 mai 2003 et qu'elle n'a réglé que les deux premières demandes d'acomptes. La recourante se réfère de plus à quatre courriers qu'elle a adressés au demandeur les 23 mai 2003, 3 juillet 2003, 10 janvier 2004 et 19 avril 2004 - dont elles citent quelques lignes éparses - , écritures qui traduiraient la mésentente qui a constamment régné entre les parties au sujet des honoraires de l'architecte.
 
2.2 Le moyen est hors propos. Selon l'arrêt déféré, il n'a pas été possible de constater la volonté réelle et commune des parties d'intégrer ou non la norme SIA 102 au contrat d'architecte global qu'elles ont conclu en rapport avec l'édification d'un immeuble au rond-point T.________ à Carouge. Confrontée à cet échec, l'autorité cantonale a fait application du principe de la confiance. Elle a ainsi considéré que le demandeur pouvait inférer de l'attitude de la défenderesse que celle-ci avait accepté d'incorporer la norme SIA 102 à leurs rapports contractuels. Elle a fondé cette interprétation normative sur le fait que la société recourante, dotée de deux administrateurs dont l'un est avocat et l'autre un professionnel de l'immobilier, n'a jamais refusé les offres de contrat qui se rapportaient explicitement à la norme en cause, qu'elle a honoré les deux premières demandes d'acomptes d'honoraires alors qu'elles étaient calculées en application de ladite norme et qu'elle s'est abstenue de contester les demandes d'acomptes suivantes, tout en laissant l'architecte continuer à fournir ses prestations.
 
Or l'application du principe de la confiance est une question de droit, qui repose singulièrement sur l'application des art. 1 CO et 2 al. 1 CC (ATF 133 III 61 consid. 2.2.1, 675 consid. 3.3 p. 681 s. et les arrêts cités; 132 III 626 consid. 3.1).
 
La recourante n'élève aucune critique sur le consensus normatif déduit par les juges cantonaux à partir du comportement qu'elle a adopté depuis mai 2001, époque où elle a fait appel au demandeur pour l'exécution de prestations d'architecte.
 
Le moyen doit être rejeté dans la faible mesure de sa recevabilité.
 
3.
 
3.1 La recourante prétend que la cour cantonale a sombré dans l'arbitraire en n'imputant pas sur le montant global des honoraires de l'intimé les deux versements, par 100'000 fr. et 150'000 fr., qu'elle a opérés en faveur du demandeur dans le cadre du projet «V.________» de 1995.
 
3.2 Sur cette question, la Cour de justice a expliqué, au considérant 9.2 de l'arrêt déféré, que le projet de 1995, lequel avait fait l'objet d'un contrat distinct passé avec l'intimé et un second architecte, différait à tel point du projet finalement exécuté que ce dernier constituait une refonte complète du projet «V.________». En outre, la défenderesse avait fait savoir elle-même, par deux fois, qu'elle n'était pas liée, depuis le rachat de son capital-actions par B.________, par ses anciens engagements à l'égard du demandeur et de son associé d'alors. Le demandeur s'était conformé à cette manière de voir en proposant à la défenderesse la conclusion d'un nouveau contrat avec lui seul et en envoyant régulièrement des demandes d'acomptes ne faisant pas état, dans le calcul de sa rémunération, de l'imputation des honoraires reçus pour le projet de 1995. De surcroît, la défenderesse, dont les deux administrateurs ne pouvaient être qualifiés de novices en affaires, n'avait pas émis une quelconque protestation sur la méthode appliquée pour chiffrer les deux premières demandes d'acomptes, qu'elle avait au demeurant réglées. L'autorité cantonale a déduit de l'ensemble de ces éléments que le demandeur pouvait raisonnablement en conclure que son projet de contrat d'architecte global, lequel ne contenait aucune imputation des montants versés en exécution du précédent contrat, avait été accepté par la défenderesse.
 
La recourante ne prend pas position sur ce raisonnement, du reste convaincant, qui repose derechef sur une interprétation objective de l'attitude qu'elle a adoptée notamment à partir de 2001. Elle n'invoque au demeurant la violation d'aucune norme du droit des obligations ou du droit civil, se contentant de clamer l'arbitraire (art. 9 Cst.).
 
La critique, faute de motivation conforme à l'art. 106 al. 2 LTF, est irrecevable.
 
4.
 
4.1 La recourante fait grief à la Cour de justice d'avoir violé l'art. 8 CC en refusant d'ordonner une expertise afin de déterminer les honoraires et frais de l'intimé. Elle déclare, si on la comprend bien, que pour déterminer le facteur de correction prévu à l'art. 7.5 de la norme SIA 102, édition 1984, pour appliquer les « facteurs d'expérience » et pour estimer la valeur des prestations partielles exécutées ainsi que le degré de complexité lié à la catégorie de l'ouvrage, il faut disposer de connaissances particulières, que seul un expert détiendrait.
 
4.2
 
4.2.1 La jurisprudence déduit de l'art. 8 CC un droit à la preuve et à la contre-preuve (ATF 126 III 315 consid. 4a), à la condition qu'il s'agisse d'établir un fait pertinent (ATF 126 III 315 consid. 4a; 123 III 35 consid. 2b), qui n'est pas déjà prouvé (ATF 127 III 519 consid. 2a; 126 III 315 consid. 4a), au moyen d'une mesure probatoire appropriée (cf. ATF 90 II 224 consid. 4b) régulièrement offerte selon les règles de la loi de procédure civile applicable (ATF 126 III 315 consid. 4a).
 
La faculté pour une partie de demander au juge de désigner un expert indépendant découle du droit à la preuve et à la contre-preuve (cf. ATF 109 II 291 consid. 2c p. 295; 102 II 7 consid. 3; FABIENNE HOHL, Procédure civile, Tome I, Berne 2001, p. 219 ss; BERTOSSA ET AL., Commentaire de la loi de procédure civile genevoise, n° 4 ad art. 255 LPC/GE). En effet, lorsqu'un tribunal, qui ne dispose pas des connaissances techniques nécessaires pour se prononcer sur une certaine question, rejette une requête d'une partie tendant à la désignation d'un expert indépendant déposée en temps utile et dans les formes requises, il viole le droit à la preuve de la partie qui supporte le fardeau de la preuve ou le droit à la contre-preuve de la partie adverse (arrêt 4A_52/2008 du 29 avril 2008 consid. 3.4). Chacune de ces parties a en effet un droit découlant du droit fédéral à ce que sa requête visant à établir la preuve à l'aide d'une expertise soit accueillie. Toutefois, ce droit n'existe pas lorsqu'il ressort de la motivation matérielle de manière concluante que les questions techniques étaient compréhensibles pour une personne ne disposant pas de connaissances spécifiques, de sorte que le recours à un expert n'était pas nécessaire (arrêts 4A_249/2008 du 12 décembre 2008 consid. 3.1 et 4C.300/2002 du 18 décembre 2002 consid. 1.1).
 
4.2.2 Il résulte de la formule énoncée à l'art. 8.1.1 de la norme SIA 102 que les honoraires de l'architecte sont calculés à partir de divers paramètres, au nombre desquels figurent le degré de complexité de l'ouvrage, la valeur des prestations partielles à fournir et un facteur de correction.
 
Dans un arrêt rendu très récemment entre les mêmes parties en relation avec la construction d'un bâtiment à la route des Acacias 46 (cf. arrêt 4A_249/2008 du 12 décembre 2008 consid. 3), le Tribunal fédéral a jugé que la détermination du degré de complexité de l'ouvrage, réparti en sept catégories par les art. 7.3, 7.4 et 8.1 de la norme en question, n'exigeait pas des connaissances particulières qui échapperaient aux juges cantonaux. Il a de même considéré que la fixation de la valeur des prestations partielles à fournir en proportion de la prestation totale ne requérait pas un savoir dont seul un expert pourrait se targuer, dès l'instant où, pour arrêter ce facteur, il suffisait d'additionner les pourcentages prévus par l'art. 3.6 de la norme SIA 102 pour chacune des phases de la construction. Cette jurisprudence s'applique en tous points aux données de l'espèce.
 
S'agissant du facteur de correction tenant compte des circonstances qui simplifient ou compliquent la tâche de l'architecte, il est échelonné entre 0.8 et 1.2 par l'art. 7.5 de la norme SIA 102. En l'occurrence, il a été retenu que le demandeur a appliqué le facteur 1.2 dans le cadre des six demandes d'acomptes adressées à la défenderesse. La cour cantonale a estimé, sur la base d'une interprétation objective du comportement de la recourante, laquelle n'a jamais protesté contre l'utilisation de ce facteur alors que l'un de ses administrateurs est un professionnel de l'immobilier, que l'intimé pouvait de bonne foi admettre que la quotité de ce paramètre était acceptée. Il s'agit là d'une question de droit dont la résolution incombe uniquement au juge, et nullement à un expert.
 
Quant aux « facteurs d'expérience », on ne voit pas à quelle disposition de la norme SIA 102 ils peuvent se rattacher. La recourante ne donne d'ailleurs aucune explication à ce propos, d'où l'irrecevabilité de ce pan du moyen (art. 42 al. 1 et 2 LTF).
 
Il suit des considérations qui précèdent que la cour cantonale n'a pas enfreint l'art. 8 CC en refusant de commettre un expert, comme le requérait la défenderesse, pour arrêter les frais et honoraires du demandeur.
 
Le moyen doit être rejeté en tant qu'il est recevable.
 
5.
 
La recourante, invoquant l'art. 97 LTF, allègue pour finir que l'autorité cantonale a établi les faits de façon manifestement inexacte ou en violation du droit. Elle affirme de nouveau que la « valeur d'expérience », le degré de complexité, la catégorie de l'ouvrage et le facteur de correction ont été établis au mépris de l'art. 8 CC, sans expertise.
 
Il a été fait justice de ce grief au considérant 4 ci-dessus. Il n'y a pas lieu d'y revenir.
 
6.
 
En définitive, le recours doit être rejeté dans la mesure de sa recevabilité. Les frais judiciaires et les dépens doivent être mis à la charge de la recourante, qui succombe (art. 66 al. 1 et 68 al. 1 et 2 LTF).
 
La décision sur le fond rend sans objet la requête d'effet suspensif.
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
 
1.
 
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.
 
2.
 
Les frais judiciaires, arrêtés à 17'000 fr., sont mis à la charge de la recourante.
 
3.
 
La recourante versera à l'intimé une indemnité de 19'000 fr. à titre de dépens.
 
4.
 
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des parties et à la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève.
 
Lausanne, le 12 mars 2009
 
Au nom de la Ire Cour de droit civil
 
du Tribunal fédéral suisse
 
La Présidente: Le Greffier:
 
Klett Ramelet
 
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