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Informationen zum Dokument  BGer 1C_610/2020  Materielle Begründung
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BGer 1C_610/2020 vom 16.09.2021
 
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1C_610/2020
 
 
Arrêt du 16 septembre 2021
 
 
Ire Cour de droit public
 
Composition
 
MM. les Juges fédéraux Kneubühler, Président,
 
Chaix et Hofmann, Juge suppléant.
 
Greffière : Mme Tornay Schaller.
 
Participants à la procédure
 
A.________,
 
recourant,
 
contre
 
Service du paysage et des forêts,
 
Office cantonal de l'agriculture et de la nature (OCAN) du Département du territoire de la République et canton de Genève,
 
rue des Battoirs 7, 1205 Genève.
 
Objet
 
Constatation de la nature forestière,
 
recours contre l'arrêt de la Cour de justice
 
de la République et canton de Genève,
 
Chambre administrative, du 15 septembre 2020
 
(ATA/886/2020 - A/1956/2019-AMENAG).
 
 
Faits :
 
 
A.
 
A.a. En date du 3 mai 2018, A.________ a acquis de la Confédération suisse la parcelle n° 2'163 de la Commune d'Hermance, d'une surface totale de 813 m², sur laquelle est érigée une ancienne douane d'une surface de 170 m².
1
En page 3 de l'acte de vente du 3 mai 2018, sous le titre "Observation - forêt", il est indiqué qu' "il existe une convention signée en 2015, avec entrée en vigueur rétroactive [au] 1 er mars 2015, entre l'Etat de Genève et la Confédération suisse concernant la zone forestière sise sur la parcelle 2'163 d'Hermance, dont l'entretien et la surveillance sont confiés à l'Etat de Genève. A ce sujet, l'acquéreur a pris connaissance de ladite convention qui demeurera annexée au présent acte et déclare reprendre les droits et obligations à la décharge du vendeur".
2
A.b. Par courrier du 31 juillet 2018, la Direction générale de l'agriculture et de la nature du Département du territoire du canton de Genève (devenue l'Office cantonal de l'agriculture et de la nature [ci-après: OCAN]), a informé la Confédération suisse - qu'elle pensait encore propriétaire de la parcelle n° 2'163 sur la foi d'un extrait du registre foncier accessible sur internet - qu'un agent technique et un bureau d'ingénieur procéderaient le 16 août 2018 au relevé de la lisière du cordon boisé se trouvant à l'intérieur ou jouxtant la parcelle.
3
Le relevé des boisés a été réalisé le 16 août 2018 en l'absence de A.________.
4
Le plan correspondant a été mis à l'enquête publique par publication dans la Feuille d'avis officielle de la République et canton de Genève (ci-après: FAO) du 20 novembre 2018.
5
A.c. Par courrier du 20 novembre 2018, l'OCAN a informé A.________, en sa qualité de propriétaire de la parcelle n° 2'163, qu'il avait procédé au relevé des boisés sis sur la commune d'Hermance. Il lui a donné la possibilité de consulter le dossier y relatif et de produire des observations écrites dans un délai de trente jours à compter de la publication dans la FAO. A l'issue de cette phase, une décision relative à la nature du boisement concerné serait prise.
6
Par décision publiée dans la FAO du 4 avril 2019, l'OCAN a rendu une décision en constatation de la nature forestière concernant notamment la parcelle n° 2'163. Cette décision indiquait que le « relevé figurant au plan 28.58 du 27.09.2018, faisant partie intégrante de la présente décision, est considéré comme forêt ». Selon le protocole en constatation de la nature forestière ou non forestière annexé à la décision, les parcelles étaient constituées à 99% d'espèces indigènes (saule, verne [ou aulne], tilleul, érable et frêne) de plus de vingt ans et de 1% de bambou. Le degré de couverture atteignait 80%, avec un sous-bois et sans étage intermédiaire. Les fonctions forestières de structure paysagère, biodiversité et protection étaient indiquées comme significatives, alors que les fonctions de récréation et de production étaient de peu d'intérêt.
7
B.
8
Par acte du 20 mai 2019, A.________ a interjeté un recours à l'encontre de cette décision auprès du Tribunal administratif de première instance du canton de Genève (ci-après: TAPI), en concluant à son annulation et à ce qu'il soit dit et constaté qu'aucune partie de la parcelle n° 2'163 n'est de nature forestière. Le TAPI a rejeté le recours par jugement du 5 février 2020.
9
Le 5 février 2020, A.________ a recouru contre ce jugement auprès de la Chambre administrative de la Cour de justice de la République et canton de Genève (ci-après: Cour de justice), en concluant, préalablement, à la comparution personnelle des parties et à un transport sur place, ainsi que, principalement, à l'annulation du jugement du TAPI et à ce qu'il soit constaté que la parcelle n° 2'163 n'est pas de nature forestière. La Cour de justice a rejeté le recours par arrêt du 15 septembre 2020.
10
C.
11
Agissant par la voie du recours en matière de droit public et du recours constitutionnel subsidiaire, A.________ demande au Tribunal fédéral, principalement, d'une part, de réformer l'arrêt cantonal et la décision de l'OCAN en ce sens qu'aucune partie de la parcelle n° 2163 ne soit considérée comme étant de nature forestière et, d'autre part, d'annuler tout ou partie des art. 2 de la loi fédérale sur les forêts du 4 octobre 1991 (LFo; RS 921.0) et 2 de la loi cantonale sur les forêts du 20 mai 1999 (LForêts; RS/GE M 5 10). Subsidiairement, il conclut au renvoi de la cause à la cour cantonale pour nouvelle décision dans le sens des considérants, afin notamment de respecter son droit d'être entendu.
12
La Cour de justice s'en rapporte à justice quant à la recevabilité du recours et persiste dans les considérants et le dispositif de son arrêt. L'OCAN conclut au rejet du recours. Consultés, l'Office fédéral du développement territorial renonce à prendre position, alors que l'Office fédéral de l'environnement (ci-après: OFEV) estime que c'est à juste titre que la cour cantonale a confirmé le caractère forestier du cordon boisé présent sur la parcelle litigieuse. Le recourant se détermine sur les écritures de l'OCAN et de l'OFEV et persiste dans ses conclusions.
13
D.
14
Par ordonnance du 26 novembre 2020, le Président de la Ire Cour de droit public a déclaré sans objet la requête d'effet suspensif présentée par le recourant, dans la mesure où le recours a un effet suspensif de par la loi.
15
 
Considérant en droit :
 
1.
16
Le recours en matière de droit public est formé contre un arrêt final rendu en dernière instance cantonale, dans une cause de droit public. Il est recevable au regard des art. 82 let. a, 86 al. 1 let. d et 90 LTF. Le recourant, propriétaire de la parcelle faisant l'objet de la constatation de la nature forestière, est particulièrement touché par l'arrêt attaqué et a un intérêt digne de protection à l'annulation ou la modification de celui-ci. Il a dès lors qualité pour recourir au sens de l'art. 89 al. 1 LTF. Les autres conditions de recevabilité sont réunies, si bien qu'il y a lieu d'entrer en matière.
17
Le recours en matière de droit public étant recevable, il s'ensuit que le recours constitutionnel subsidiaire est irrecevable (art. 113 LTF).
18
2.
19
Dans un grief d'ordre formel, le recourant se plaint d'une violation de son droit d'être entendu (art. 29 al. 2 Cst.).
20
2.1. Garanti à l'art. 29 al. 2 Cst., le droit d'être entendu comprend notamment le droit pour l'intéressé d'offrir des preuves pertinentes, d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes et de participer à l'administration des preuves essentielles lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 145 I 73 consid. 7.2.2.1 et les références citées). L'autorité peut cependant renoncer à procéder à des mesures d'instruction lorsque les preuves administrées lui ont permis de forger sa conviction et que, procédant d'une manière non arbitraire à une appréciation anticipée des preuves qui lui sont encore proposées, elle a la certitude que ces dernières ne pourraient l'amener à modifier son opinion (ATF 145 I 167 consid. 4.1 et les arrêts cités). Dans ce contexte, le recourant est soumis aux exigences accrues de motivation de l'art. 106 al. 2 LTF.
21
Le droit d'être entendu est une garantie de nature formelle, dont la violation entraîne en principe l'annulation de la décision attaquée, indépendamment des chances de succès du recours sur le fond (ATF 135 I 187 consid. 2.2; 126 I 19 consid. 2d/bb). Selon la jurisprudence, sa violation peut cependant être réparée lorsque la partie lésée a la possibilité de s'exprimer devant une autorité de recours jouissant d'un plein pouvoir d'examen (ATF 135 I 279 consid. 2.6.1; 116 Ia 94 consid. 2). Toutefois, une telle réparation doit rester l'exception et n'est admissible, en principe, que dans l'hypothèse d'une atteinte qui n'est pas particulièrement grave aux droits procéduraux de la partie lésée; cela étant, une réparation de la violation du droit d'être entendu peut aussi se justifier, même en présence d'un vice grave, lorsque le renvoi constituerait une vaine formalité et aboutirait à un allongement inutile de la procédure, ce qui serait incompatible avec l'intérêt de la partie concernée à ce que sa cause soit tranchée dans un délai raisonnable (ATF 142 II 218 consid. 2.8.1; 137 I 195 consid. 2.3.2).
22
2.2. Le recourant estime d'abord que son droit d'être entendu a été violé, dans la mesure où il n'a pas été informé, en sa qualité de propriétaire, qu'un relevé des boisés allait être effectué sur sa propriété.
23
Par courrier du 20 novembre 2018, l'OCAN a informé le recourant qu'il avait procédé au relevé des boisés sis sur la commune d'Hermance, en lui donnant la possibilité de consulter le dossier y relatif et de produire des observations écrites dans un délai de trente jours; l'office cantonal a précisé qu'à l'issue de cette phase, une décision sujette à recours relative à la nature du boisement concerné serait rendue. Ainsi, il est patent que le recourant a bénéficié de la possibilité de s'exprimer avant que l'OCAN rende sa décision; le recourant ne le conteste d'ailleurs pas. Celui-ci s'est par ailleurs exprimé par écrit à quatre reprises devant les juridictions administratives cantonales. Sous cet angle, son droit d'être entendu a donc été respecté.
24
S'agissant de la question de la violation de la procédure en constatation de la nature forestière prévue par le droit cantonal, elle fera l'objet d'une analyse séparée (cf. infra consid. 4).
25
2.3. Le recourant reproche ensuite aux autorités précédentes d'avoir refusé l'offre de preuve qu'il a proposée, à savoir la comparution personnelle des parties, qui lui aurait permis de trouver un accord avec le Département.
26
Dans l'arrêt attaqué, la Cour de justice a exposé qu'elle considérait être suffisamment renseignée par les pièces figurant à la procédure pour trancher le litige et que les parties s'étaient déjà longuement exprimées en première et deuxième instances. Procédant ainsi à une appréciation anticipée des preuves, la cour cantonale n'a pas violé le droit d'être entendu du recourant.
27
En tout état de cause, il ressort clairement du mémoire de recours déposé céans (p. 11 et 15) qu'en requérant la comparution personnelle des parties, le recourant entend, non pas rapporter l'authenticité d'un fait, mais bien plutôt obtenir la possibilité de trouver oralement un arrangement avec les autorités compétentes. Or, le droit d'être entendu garanti à l'art. 29 al. 2 Cst. ne donne pas à l'administré le droit d'exiger une audition orale ou la mise en oeuvre d'une audience de conciliation.
28
2.4. Le recourant soutient enfin que les juges cantonaux ne pouvaient retenir que les violations de son droit d'être entendu constatées avaient été réparées devant eux, sous peine de porter une atteinte grave à son droit.
29
Devant la Cour de justice, le recourant a soutenu que le TAPI n'avait pas examiné tous ses griefs et ne lui avait pas laissé la possibilité de s'exprimer sur les pièces nouvellement produites au stade de la duplique par l'OCAN. Dans l'arrêt querellé, la cour cantonale a, d'une part, considéré que le TAPI n'avait nul besoin de reprendre tous les griefs du recourant et que les motifs l'ayant conduit à rejeter le recours étaient aisément compréhensibles; elle a, d'autre part, retenu que le TAPI ne pouvait effectivement pas refuser de produire des écritures et en particulier des nouvelles pièces du Département. Les juges précédents ont toutefois jugé que, dans la mesure où la cour cantonale disposait en l'occurrence du même pouvoir d'examen que le TAPI, les (éventuels) vices pouvaient être considérés comme réparés devant eux.
30
Le recourant soutient laconiquement que le raisonnement de la Cour de justice ne peut être suivi sans porter une atteinte grave à son droit d'être entendu. Ce faisant, il ne satisfait pas aux exigences accrues de motivation imposées par l'art. 106 al. 2 LTF. En effet, il ne prétend pas que la cour cantonale ne jouissait pas d'un plein pouvoir d'examen et n'expose pas en quoi il serait concrètement atteint de manière particulièrement grave dans ses droits procéduraux par les vices constatés.
31
En tout état de cause, comme cela ressort des considérants qui suivent, le renvoi constituerait en l'espèce une vaine formalité et aboutirait à un allongement inutile de la procédure. En ce sens, le grief est irrecevable.
32
2.5. Partant, le grief de la violation du droit d'être entendu doit être rejeté dans la mesure où il est recevable.
33
3.
34
Le recourant fait valoir une constatation manifestement inexacte des faits (art. 97 al. 1 LTF).
35
3.1. Le Tribunal fédéral statue en principe sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF), sous réserve des cas prévus à l'art. 105 al. 2 LTF. Selon l'art. 97 al. 1 LTF, la partie recourante ne peut critiquer la constatation de faits que si ceux-ci ont été établis en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF ou de manière manifestement inexacte - en particulier en violation de l'interdiction constitutionnelle de l'arbitraire (ATF 140 III 264 consid. 2.3) - et pour autant que la correction du vice soit susceptible d'influer sur le sort de la cause. Si la partie recourante entend se prévaloir de constatations de faits différentes de celles de l'autorité précédente, elle doit expliquer de manière circonstanciée en quoi les conditions d'une exception prévue par l'art. 97 al. 1 LTF seraient réalisées. A défaut, il n'est pas possible de tenir compte d'un état de fait divergent de celui retenu dans l'acte attaqué. En particulier, le Tribunal fédéral n'entre pas en matière sur des critiques de type appellatoire portant sur l'état de fait ou sur l'appréciation des preuves (ATF 140 III 264 consid. 2.3).
36
3.2. En l'espèce, le recourant fait valoir que les photos produites n'ont pas permis aux instances cantonales de se faire une idée sur la situation réelle et actuelle de la parcelle et que le relevé des boisés réalisé est insatisfaisant. Il considère que le transport sur place et la comparution personnelle des parties lui auraient été injustement refusés tant par le TAPI que par la Cour de justice. Il estime que si cela avait été fait, une procédure de conciliation aurait été mise en oeuvre et aurait abouti à un accord. Il reproche par ailleurs à l'OCAN de s'être contenté d'un extrait du registre foncier accessible sur internet et dès lors dépourvu de foi publique, au lieu de solliciter un extrait certifié conforme du registre foncier. Il expose enfin qu'il n'y a à ce jour point d'arbres en suffisance et qu'il n'existe aucune forêt mais seulement du "gazon arboré".
37
3.3. Le Tribunal fédéral relève, avec l'OCAN, que le dossier produit par ce dernier devant la cour cantonale était composé de 22 pièces, contenant notamment des orthophotos prises à diverses époques, le dossier de défrichement de 2007, les permis de coupe en forêt de 2007 et 2015, le dossier relatif à la procédure de constatation de la nature forestière litigieuse, le plan de gestion pour la sécurisation et la gestion des forêts situées dans le périmètre d'influence des routes nationales de juin 2014 et la fiche de suivi concernant le site "route d'Hermance 8"; le recourant a pour sa part produit un dossier de 16 pièces. Un relevé des boisés a de plus été réalisé in situ par des personnes disposant de connaissances spécialisées. Force est ainsi de constater que le dossier a été instruit à satisfaction.
38
La Cour de céans souligne par ailleurs que le fait qu'il n'y ait à ce jour que peu d'arbres et quelques souches sur la parcelle concernée n'est pas contesté par les autorités intimées. L'argumentation du TAPI et de la Cour de justice se fonde sur le fait que la nature forestière de la parcelle du recourant avait été précédemment dûment constatée et sur le fait que des arbres avaient par la suite illégalement été coupés, ce qui justifierait de s'écarter de la règle selon laquelle il convient en principe d'évaluer la nature forestière d'une parcelle au jour de la décision prise par l'autorité compétente. Dans cette mesure, une vision locale ne saurait être d'une quelconque utilité au recourant.
39
Il en va d'ailleurs de même des nouveaux moyens de preuves offerts par le recourant, à savoir la déclaration sur l'honneur du 28 octobre 2020 de B.________ et les 14 nouvelles pièces déposées avec les déterminations du 31 mai 2021, censées démontrer l'absence de forêt. Nouvelles, ces preuves sont de surcroît irrecevables (art. 99 al. 1 LTF).
40
C'est le lieu de noter que la question de savoir s'il existe des arbres en suffisance pour que la nature forestière puisse être valablement constatée et celle de savoir s'il convient exceptionnellement de reconnaître la nature forestière à une parcelle peu ou pas pourvue d'arbres sont des questions de droit. La mise en oeuvre d'une inspection locale n'a donc pas vocation à modifier l'appréciation des autorités intimées et le grief formulé en ce sens est irrecevable.
41
Aussi, en somme, l'appréciation anticipée des preuves effectuée par la Cour de justice ne prête-t-elle pas le flanc à la critique.
42
S'agissant du reproche formulé à l'encontre de l'OCAN, selon lequel il se serait contenté d'un extrait du registre foncier accessible sur internet, il relève de la question de la violation du droit cantonal de procédure traitée ci-après (cf. infra consid. 4).
43
3.4. Par conséquent, le grief de la constatation manifestement inexacte des faits est rejeté dans la mesure où il est recevable.
44
4.
45
Le recourant se plaint d'une application arbitraire du droit cantonal, plus précisément de la procédure en constatation de la nature forestière prévue par le droit cantonal, à savoir par l'art. 7 du règlement d'application de la loi sur les forêts du 18 septembre 2019 (RForêts; RS/GE M 5 10.01). Il estime que le vice de procédure constaté est irréparable et que la procédure de constatation de la nature forestière doit être annulée pour ce motif.
46
4.1. Dans le Chapitre II Procédures, dans la Section 1 Constatation de la nature forestière, du RForêts, l'art. 7 dispose: Les requêtes sont publiées dans la Feuille d'avis officielle (al. 1). Les requérants sont informés par avis envoyé à l'adresse qu'ils ont indiquée (al. 2). Les propriétaires domiciliés dans le canton sont informés par avis envoyé: a) pour les personnes physiques, à l'adresse indiquée par le registre des habitants; b) pour les sociétés et personnes morales, à l'adresse du siège social; c) pour les propriétaires collectifs, à l'adresse de leur représentant (al. 3). Les propriétaires domiciliés à l'étranger, ceux dont l'adresse est inconnue, ainsi que les destinataires non atteints par l'avis sont réputés valablement prévenus par la publication faite dans la Feuille d'avis officielle; il en va de même lorsque l'enquête publique concerne plus de 50 personnes (al. 4).
47
Aux termes de l'art. 8 RForêts, pendant un délai de 30 jours à compter de la publication de la requête, chacun peut consulter le dossier à l'office cantonal et lui adresser par écrit ses observations.
48
4.2. Le Tribunal fédéral ne revoit l'interprétation et l'application du droit cantonal que sous l'angle de l'arbitraire (ATF 146 II 367 consid. 3.1.5). Une décision est arbitraire lorsqu'elle viole gravement une norme ou un principe juridique clair et indiscuté, ou lorsqu'elle contredit d'une manière choquante le sentiment de la justice et de l'équité. Le Tribunal fédéral n'a pas à déterminer quelle est l'interprétation correcte que l'autorité cantonale aurait dû donner des dispositions applicables; il doit uniquement examiner si l'interprétation qui a été faite est défendable. Par conséquent, si celle-ci ne se révèle pas déraisonnable ou manifestement contraire au sens et au but de la disposition ou de la législation cantonale en cause, elle sera confirmée, même si une autre solution paraît également concevable, voire préférable. De plus, il ne suffit pas que les motifs de la décision attaquée soient insoutenables, encore faut-il que cette dernière soit arbitraire dans son résultat (ATF 144 I 170 consid. 7.3; arrêt 1C_624/2020 du 5 mai 2021 consid. 3). Dans ce contexte, le recours est soumis aux exigences accrues de motivation de l'art. 106 al. 2 LTF.
49
4.3. La réparation d'un vice de procédure en instance de recours n'est en principe pas exclue lorsque celle-ci dispose d'un plein pouvoir d'examen en fait et en droit; elle dépend toutefois de la gravité et de l'étendue de l'atteinte portée au droit d'être entendu et doit rester l'exception (ATF 126 I 68 consid. 2 et les arrêts cités). Elle peut également se justifier en présence d'un vice grave lorsque le renvoi constituerait une vaine formalité et aboutirait à un allongement inutile de la procédure (ATF 133 I 201 consid. 2.2).
50
4.4. En l'espèce, le recourant a acquis de la Confédération suisse la parcelle n° 2'163 le 3 mai 2018 et en a requis l'inscription au registre foncier le 4 mai 2018. Le 31 juillet 2018, l'OCAN, qui ne s'est fié qu'à un extrait du registre foncier accessible sur internet, a avisé la Confédération suisse plutôt que le recourant qu'un relevé des boisés allait être réalisé sur la parcelle concernée. Ledit relevé a ainsi effectivement été réalisé le 16 août 2018, en l'absence du recourant. L'irrégularité de fait est en l'espèce patente: en sa qualité de nouveau propriétaire, le recourant aurait dû être informé de la mise en oeuvre du relevé en question. La question de savoir si l'OCAN a, avec le
51
En effet, comme précédemment établi (cf. supra consid. 2.2), le recourant a suffisamment pu s'exprimer devant les juridictions administratives cantonales. Or, pour attester de la gravité de l'irrégularité de procédure alléguée, il avance seulement avoir été privé de la possibilité de solliciter une conciliation préalable ou une discussion avec l'OCAN. Une telle argumentation est à la limite de la recevabilité, dans la mesure où un administré ne dispose pas d'un droit à la mise en oeuvre d'une audience de conciliation.
52
En tout état de cause, comme cela ressort des considérants qui suivent, le renvoi constituerait en l'espèce une vaine formalité et aboutirait à un allongement inutile de la procédure.
53
Ainsi, l'irrégularité de procédure alléguée peut être considérée comme réparée.
54
La question de savoir si l'OCAN pouvait valablement se fonder sur l'art. 20 de la loi fédérale du 5 octobre 2007 sur la géoinformation (LGéo; RS 20 510.62) pour pénétrer sur la parcelle du recourant et procéder au relevé peut demeurer indécise, attendu qu'elle n'a pas vocation à invalider l'appréciation qui précède.
55
4.5. Par conséquent, pour autant que recevable, le grief est rejeté.
56
5.
57
Dans un moyen intitulé "De l'inapplicabilité des lois fédérales et cantonales, de leur nullité partielle", le recourant soutient que les art. 2 al. 3 LFo et 2 al. 3 LForêts n'appréhendent pas le cas où il n'existerait plus de forêt sur un sol initialement considéré comme forêt; il y voit une lacune proprement dite de la loi que le juge devrait combler et demande dès lors au Tribunal fédéral d'annuler tout ou partie desdites dispositions légales.
58
5.1. La LFo a pour but général la protection des forêts, notamment la conservation de l'aire forestière (art. 1 et 3 LFo). L'art. 2 LFo définit la notion de forêt. On entend par forêt toutes les surfaces couvertes d'arbres ou d'arbustes forestiers à même d'exercer des fonctions forestières (à savoir des fonctions protectrices, économiques ou sociales), sans égard à leur origine, à leur mode d'exploitation ou aux mentions figurant au registre foncier. L'art. 2 al. 2 LFo indique ce qui doit être assimilé aux forêts, alors que l'art. 2 al. 3 LFo exclut de cette notion notamment les groupes d'arbres ou d'arbustes isolés, les haies, les allées, les jardins, les parcs et les espaces verts. Selon l'art. 1 al. 1 de l'ordonnance du 30 novembre 1992 sur les forêts (OFo; RS 921.01), les cantons précisent les valeurs requises pour qu'une surface boisée soit reconnue comme forêt.
59
Dans ce cadre, l'art. 2 LForêts dispose que sont considérés comme forêts les peuplements boisés présentant toutes les caractéristiques qualitatives d'une forêt, exerçant une fonction forestière et répondant aux critères suivants: a) être, en principe, âgés d'au moins 15 ans; b) s'étendre sur une surface d'au moins 500 m² et c) avoir une largeur minimale de 12 m, lisière appropriée comprise (al. 1). Sont également considérés comme forêts: a) les surfaces ne répondant pas aux critères quantitatifs définis à l'alinéa 1, pour autant qu'elles remplissent des fonctions forestières importantes; b) les clairières; c) les cordons boisés situés au bord de cours d'eau; d) les espaces liés à la divagation des rivières dans les zones alluviales; e) les parcelles réservées à cet effet (al. 2). Ne sont pas considérés comme forêts: a) les groupes ou alignements d'arbres isolés et les allées; b) les haies situées en zone agricole, constituées grâce à des mesures d'encouragement, prévues par les législations fédérale et cantonale en matière de compensations écologiques; c) les parcs situés en zone de verdure (al. 3).
60
5.2. En principe, l'autorité forestière compétente pour procéder à une constatation de nature forestière au sens de l'art. 10 LFo doit se fonder sur la situation effective du terrain au moment où elle statue. Dans certaines circonstances, l'existence d'une forêt peut toutefois être admise malgré l'absence de boisement, en particulier lorsqu'il apparaît qu'un défrichement a eu lieu sans autorisation; en effet, la suppression du couvert forestier sans autorisation de défricher ne modifie pas le caractère forestier du terrain concerné; le moment déterminant pour évaluer la nature du boisement n'est alors plus celui de la décision de première instance (ATF 124 II 85 consid. 4d; 120 Ib 339 consid. 4a; arrêts 1C_228/2019 du 29 avril 2020 consid. 2.1.2; 1C_239/2016 du 13 février 2017 consid. 3 et les références citées). L'intérêt à la conservation de la forêt est reconnu de plein droit pour les surfaces d'où la forêt a été éliminée sans autorisation; celles-ci sont assujetties à l'obligation de reboiser et elles continuent ainsi d'appartenir à l'aire forestière (cf. art. 2 al. 2 let. c LFo).
61
5.3. En l'espèce, la conclusion demandant l'annulation de tout ou partie des articles 2 LFo et 2 LForêts est à l'évidence irrecevable, au regard du principe de la séparation des pouvoirs régissant l'activité étatique.
62
Il ressort cependant trois arguments de la motivation apportée par le recourant. Il conteste tout d'abord qu'une constatation de la nature forestière puisse intervenir sur une parcelle dépourvue de boisements (infra consid. 5.3.2). Il avance de plus que dans l'arrêt attaqué (il se réfère à la page 6) la cour cantonale a retenu que le déboisement survenu sur la parcelle concernée serait le fait de travaux antérieurs de la Confédération suisse liés à l'exploitation de la douane et à la mise en place de la station cantonale limnigraphique; il invoque ainsi implicitement sa bonne foi (infra consid. 5.3.3). Enfin, dans son ultime détermination, le recourant conteste aussi l'existence d'une fonction protectrice particulièrement importante dans le cas d'espèce (infra consid. 5.3.4).
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5.3.1. Il convient de relever, à titre liminaire, que la motivation de l'arrêt attaqué apparaît guère satisfaisante sur le fond, dans la mesure où l'on ignore sur quelle base légale la constatation de la nature forestière litigieuse est fondée. A la lecture du protocole de constatation de la nature forestière et du jugement attaqué, qui n'examine pas si les critères quantitatifs sont remplis concernant la parcelle du recourant, l'on comprend - avec l'OFEV - que celle-ci a été considérée comme un cordon boisé situé au bord de cours d'eau au sens de l'art. 2 al. 2 let. c LForêts. Le législateur cantonal a en effet décidé d'attribuer un caractère forestier aux cordons boisés situés au bord de cours d'eau, attendu qu'ils assurent une fonction protectrice des berges ainsi que de conservation de la nature et des structures paysagères (cf. plan directeur forestier cantonal, p. 19, https://www.ge.ch/document/nature-plan-directeur-forestier). Selon l'OFEV, ils exercent une fonction particulièrement importante et peuvent être considérés comme forêt indépendamment de leur surface, de leur largeur ou de leur âge, conformément à l'art. 1 al. 2 OFo). Aucun grief relatif à cette qualification n'a toutefois été soulevé par le recourant.
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5.3.2. Le recourant a en revanche contesté qu'une constatation de la nature forestière puisse intervenir sur une parcelle dépourvue de boisements. Il perd de vue à cet égard que le Tribunal fédéral, de jurisprudence constante (cf. supra consid. 5.2), considère que dans certaines circonstances, l'existence d'une forêt peut être admise malgré l'absence de boisement, en particulier lorsqu'il apparaît qu'un défrichement a eu lieu sans autorisation.
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Or, dans l'arrêt attaqué (pages 6 et 22), la Cour de justice a explicitement constaté que la couverture boisée le long du cours d'eau de l'Hermance, dense entre 1996 et 2015, s'est faite de moins en moins dense pour quasiment disparaître en 2018; elle a explicitement exposé qu'hormis les rares coupes autorisées (quatre arbres en 2007 et vingt-cinq arbres sis sur plusieurs parcelles dont la parcelle n° 2'163 en 2015), rien ne laisse à penser que les autres arbres qui n'apparaissent plus sur la parcelle concernée aient été éliminés légalement. Ainsi, le fait que le boisement présent sur une partie de la parcelle concernée ait quasiment disparu au fil des ans ne lui enlève pas son caractère forestier.
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5.3.3. De plus, l'argument du recourant, selon lequel le déboisement survenu sur la parcelle concernée serait le fait de travaux antérieurs de la Confédération suisse, ne lui est d'aucune utilité. D'une part, contrairement à ce qu'il avance, la cour cantonale n'a jamais fait un tel constat. D'autre part, est seul déterminant en matière de constatation de la nature forestière le fait que le défrichement soit intervenu sans autorisation. C'est bien l'intérêt public à la protection des forêts qui est protégé par les dispositions et la jurisprudence topiques, plutôt que la bonne foi des propriétaires des parcelles concernées.
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5.3.4. Enfin, le dernier argument du recourant ne résiste pas à l'examen non plus. En effet, l'importance du critère qualitatif pour la parcelle litigieuse a été soulignée par l'inspecteur des forêts, qui a estimé que les fonctions de "structure paysagère", "biodiversité" et "protection" étaient significatives. La jurisprudence invoquée à cet égard par le recourant (arrêt 1A.51/2006 consid. 5.1), qui exige que la fonction protectrice reconnue à un boisement soit particulièrement importante, ne lui est d'aucun secours, dans la mesure où la couverture boisée le long du cours d'eau de l'Hermance remplit cumulativement et de manière significative plusieurs fonctions qualitatives de la forêt. De surcroît, comme précédemment exposé, le législateur cantonal attribue d'office une fonction particulièrement importante à tous les cordons boisés situés au bord de cours d'eau.
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A titre superfétatoire, l'on peut relever que l'existence d'une forêt sur la parcelle concernée a toujours été admise et affirmée. En témoignent le fait qu'une autorisation de défrichement ait été accordée en 2007 et un permis de coupe en 2015 ainsi que le fait que la convention signée en 2015 entre l'Etat de Genève et la Confédération suisse concernant la zone forestière sise sur la parcelle 2'163 d'Hermance a été expressément mentionnée dans l'acte de vente du 3 mai 2018, qui a été signé par le recourant, lequel s'est engagé à entretenir et surveiller ladite zone.
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La constatation de la nature forestière effectuée sur la parcelle n° 2'163, propriété du recourant, ne prête donc pas le flanc à la critique.
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Cela étant, la question - soulevée par l'OFEV - de savoir si la végétation présente sur la parcelle litigieuse ne doit pas être considérée comme de la végétation des rives au sens de l'art. 21 de la loi fédérale du 1 er juillet 1966 sur la protection de la nature et du paysage (LPN; RS 451), et dès lors être protégée à ce titre, peut rester indécise.
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5.4. Partant, le grief est rejeté dans la mesure où il est recevable.
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6.
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Il s'ensuit que le recours doit être rejeté dans la mesure où il est recevable, aux frais du recourant, qui succombe (art. 66 al. 1 LTF).
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Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
 
1.
 
Le recours constitutionnel subsidiaire est irrecevable.
 
2.
 
Le recours en matière de droit public est rejeté dans la mesure de sa recevabilité.
 
3.
 
Les frais judiciaires, arrêtés à 4'000 fr., sont mis à la charge du recourant.
 
4.
 
Le présent arrêt est communiqué au recourant, à l'Office cantonal de l'agriculture et de la nature (OCAN) du Département du territoire du de la République et canton de Genève, à la Chambre administrative de la Cour de justice de la République et canton de Genève, et à l'Office fédéral de l'environnement.
 
Lausanne, le 16 septembre 2021
 
Au nom de la Ire Cour de droit public
 
du Tribunal fédéral suisse
 
Le Président : Kneubühler
 
La Greffière : Tornay Schaller
 
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