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Informationen zum Dokument  BGer 2C_610/2010  Materielle Begründung
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BGer 2C_610/2010 vom 21.01.2011
 
Bundesgericht
 
Tribunal fédéral
 
Tribunale federale
 
2C_610/2010
 
{T 0/2}
 
Arrêt du 21 janvier 2011
 
IIe Cour de droit public
 
Composition
 
MM. les Juges Zünd, Président,
 
Merkli et Donzallaz.
 
Greffier: M. Vianin.
 
 
Participants à la procédure
 
X.________ Sàrl, agissant par Y.________, recourante,
 
contre
 
Administration fiscale cantonale genevoise, Hôtel des finances, rue du Stand 26, case postale 3937, 1211 Genève 3.
 
Objet
 
Taxation fiscale; irrecevabilité d'un recours déposé par télécopieur,
 
recours contre l'arrêt du Tribunal administratif du canton de Genève, 2ème Section, du 8 juin 2010.
 
Faits:
 
A.
 
Le 1er février 2010, la Commission cantonale de recours en matière administrative du canton de Genève a partiellement admis un recours interjeté par la société X.________ Sàrl (ci-après: la Société ou la recourante), en renvoyant le dossier à l'Administration fiscale cantonale genevoise pour qu'elle rende de nouvelles décisions de taxation en matière d'impôt fédéral direct (IFD) et d'impôt cantonal et communal (ICC) 2003. A la même date, elle a fait de même pour les décisions de taxation IFD et ICC 2005. Ces deux prononcés ont été reçus le 10 février 2010 par le mandataire de la Société, chez qui celle-ci avait élu domicile.
 
B.
 
Dans la soirée du 12 mars 2010, soit le dernier jour du délai, la Société a envoyé par télécopieur un recours contre les deux décisions précitées au Tribunal administratif du canton de Genève. L'acte a en outre été remis à la poste à l'adresse de cette autorité par pli recommandé du lendemain, 13 mars 2010.
 
Le 8 juin 2010, le Tribunal administratif a déclaré le recours irrecevable pour cause de tardiveté: l'envoi par télécopieur du 12 mars 2010, dernier jour du délai, était sans effet, dès lors qu'il ne respectait pas la forme écrite, tandis que l'acte posté le 13 mars était tardif.
 
C.
 
Par écriture parvenue au Tribunal fédéral le 21 juillet 2010, la Société requiert l'annulation de ce jugement et le renvoi de la cause à l'autorité cantonale pour qu'elle rende une nouvelle décision dans le sens des considérants; à titre subsidiaire, elle conclut à ce que le Tribunal fédéral se prononce sur le fond. Elle demande également à être mise au bénéfice de l'assistance judiciaire, en ce sens que la procédure soit gratuite.
 
L'Administration fiscale cantonale genevoise et l'Administration fédérale des contributions concluent au rejet du recours; le Tribunal administratif persiste dans les considérants et le dispositif de son arrêt. La Société a été autorisée à répliquer.
 
Dans son ordonnance du 23 juillet 2010, le Tribunal fédéral a informé la Société que l'octroi de l'assistance judiciaire à une personne morale est en principe exclue, sur quoi celle-ci a effectué l'avance de frais.
 
Considérant en droit:
 
1.
 
Le Tribunal fédéral examine d'office sa compétence (art. 29 al. 1 LTF). Il contrôle librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 136 I 43 consid. 1 p. 43).
 
1.1 Le fait que la recourante n'ait pas qualifié son acte ne porte pas à conséquence, si celui-ci satisfait aux exigences légales de la voie de droit qui lui est ouverte.
 
1.2 Le recours est dirigé contre une décision rendue dans une cause de droit public (cf. art. 82 let. a LTF) et ne tombe pas sous le coup de l'une des clauses d'exclusion à raison de la matière de l'art. 83 LTF. Il est donc en principe recevable comme recours en matière de droit public.
 
1.3 Dirigé contre un arrêt rendu en dernière instance cantonale par un tribunal supérieur (cf. art. 86 al. 1 let. d et al. 2 LTF), le recours a été déposé en temps utile (cf. art. 100 al. 1 LTF) et dans les formes prescrites (cf. art. 42 LTF), par le destinataire de l'acte attaqué, qui a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification (cf. art. 89 al. 1 LTF). Sous réserve des considérations ci-après, il y a donc lieu d'entrer en matière.
 
1.4 Si le Tribunal fédéral applique le droit fédéral d'office (cf. art. 106 al. 1 LTF), il ne revoit pas le droit cantonal en tant que tel, sous réserve d'exceptions non réalisées en l'espèce (cf. art. 95 let. c et d LTF), à moins que son application ne se révèle contraire au droit fédéral, lequel comprend les droits constitutionnels (art. 95 let. a LTF), dont l'interdiction de l'arbitraire (cf. ATF 133 III 462 consid. 2.3 p. 466; 133 II 249 consid. 1.2.1 p. 251 s.). Le Tribunal fédéral n'examine toutefois pas d'office si le droit cantonal viole un droit constitutionnel, mais uniquement si le grief est soulevé et dûment motivé par le recourant (art. 106 al. 2 LTF).
 
1.5 Le jugement entrepris étant un arrêt d'irrecevabilité, la recourante ne peut conclure qu'à son annulation et au renvoi de la cause à l'autorité précédente pour qu'elle entre en matière et statue sur le fond. Il s'ensuit que ses conclusions subsidiaires tendant à ce que le Tribunal de céans se prononce lui-même sur le fond sont irrecevables.
 
1.6 Le fait qu'un recourant soit autorisé à répliquer permet à celui-ci de répondre aux arguments nouveaux formulés dans les observations des autorités, mais non de formuler pour la première fois un grief qu'il aurait déjà pu présenter dans le délai de recours (ATF 125 I 71 consid. 1d/aa p. 77). Admettre le contraire aurait en effet pour conséquence de prolonger les délais légaux, ce qui est expressément prohibé par l'art. 47 al. 1 LTF, et de créer des inégalités de traitement.
 
2.
 
2.1 La recourante dénonce pour l'essentiel l'arbitraire (art. 9 Cst.) de la décision cantonale, ainsi que le formalisme excessif prohibé par l'art. 29 al. 1 Cst. La motivation présentée à l'appui de ces griefs ne satisfait qu'imparfaitement aux exigences de l'art. 106 al. 2 LTF. Dans la mesure où l'on comprend que la recourante reproche au Tribunal administratif de ne pas lui avoir donné la possibilité de corriger le vice affectant le dépôt de son recours (grief de formalisme excessif) et qu'elle estime arbitraire de déduire l'exigence de signature de l'art. 65 de la loi genevoise du 12 septembre 1985 sur la procédure administrative (LPA; RS/GE E 5 10), le Tribunal fédéral peut toutefois entrer en matière, compte tenu également du fait que la recourante n'est pas assistée d'un mandataire professionnel. Peu compréhensibles, les autres griefs sont irrecevables, sous réserve de celui qui a trait aux conséquences de la tentative de dépôt de son écriture le dernier jour du délai auprès du Poste de gendarmerie des Pâquis, lequel a refusé de la prendre en charge.
 
2.2 L'art. 64 LPA a la teneur suivante:
 
"Art. 64 Acte de recours
 
1 Le recours est formé par écrit et adressé à la juridiction administrative appelée à en connaître.
 
2 Le recours adressé à une autorité incompétente est transmis d'office à la juridiction administrative compétente et le recourant en est averti. L'acte est réputé déposé à la date à laquelle il a été adressé à la première autorité."
 
L'art. 65 LPA prévoit pour sa part ce qui suit:
 
"Art. 65 Contenu
 
1 L'acte de recours contient, sous peine d'irrecevabilité, la désignation de la décision attaquée et les conclusions du recourant.
 
2 L'acte de recours contient également l'exposé des motifs ainsi que l'indication des moyens de preuve. Les pièces dont dispose le recourant doivent être jointes. A défaut, la juridiction saisie impartit un bref délai au recourant pour satisfaire à ces exigences, sous peine d'irrecevabilité.
 
3 Sur demande motivée du recourant dont le recours répond aux exigences des alinéas 1 et 2, la juridiction saisie peut l'autoriser à compléter l'acte de recours et lui impartir à cet effet un délai supplémentaire convenable."
 
2.3 Le Tribunal fédéral se montre de manière générale très réticent à admettre le dépôt d'actes de procédure par télécopieur (cf. ATF 121 II 252). Ce mode de faire est en tout cas prohibé s'agissant de saisir le Tribunal de céans (cf. récemment arrêt 2C_177/2010 du 14 avril 2010), dès lors que la forme écrite suppose une signature originale, ce qui n'est pas le cas de celle figurant sur une télécopie. Pour le reste, l'art. 42 al. 1 et 5 LTF énonce expressément l'exigence d'une telle signature, à la différence des art. 64 et 65 LPA.
 
Le cas d'espèce concerne toutefois la procédure cantonale. Là aussi, le Tribunal fédéral a, à plusieurs reprises, relevé que la forme écrite suppose une signature manuscrite (ATF 112 Ia 173; cf. aussi arrêt 1P.692/1999 du 5 janvier 2000 consid. 2b partiellement reproduit in RJN 1999 p. 160 s.). Des considérations analogues ont été émises dans un jugement du 29 janvier 2001, où la Haute Cour a estimé qu'il n'était pas arbitraire de déclarer irrecevable un appel interjeté par télécopieur (arrêt 1P.812/2000 consid. 2, in SJ 2001 I p. 289). Dans un arrêt du 1er mai 2002, le Tribunal fédéral a réaffirmé qu'une télécopie ne remplit pas les conditions de la forme écrite, ce qui n'empêche pas de lui reconnaître un effet interruptif de la prescription, dès lors qu'elle manifeste clairement la volonté de l'administration fiscale de procéder au recouvrement d'une créance (arrêt 2A.546/2001 consid. 3, in RDAF 2002 II p. 392, Archives 73 p. 237, RF 57/2002 p. 638). Récemment, il a réitéré sa pratique en ces termes (arrêt 2A.52/2007 du 26 janvier 2007 consid. 4):
 
"A cet égard, force est de constater que, selon la jurisprudence fédérale, un acte de recours formé par télécopie, n'est pas déposé régulièrement (ATF 121 II 252 consid. 2-4; ASA 72 p. 430 consid. 2.2 p. 431). S'il est envoyé de cette manière le dernier jour du délai, l'irrégularité n'est pas réparable. Certes, les cantons ne sont pas liés par la solution adoptée en droit fédéral pour l'interprétation de leurs propres dispositions de procédure. Toutefois, le Tribunal fédéral a déjà jugé qu'une autorité cantonale qui, dans ces circonstances, déclare un recours irrecevable ne fait pas preuve d'arbitraire ou de formalisme excessif, quand bien même la solution inverse ne serait pas insoutenable (arrêts 1P.812/2000 du 29 janvier 2001 consid. 2 in SJ 2001 I 289 et 5P.438/2005 du 13 février 2006 consid. 2.2)."
 
Un recours envoyé par télécopie ne peut en effet, par définition, contenir de signature originale ou reconnue, mais seulement une copie et n'est, de ce fait, pas admissible (arrêt 9C_739/2007 du 28 novembre 2007 consid. 1.2; Florence Aubry Girardin, Commentaire de la LTF, 2009, no 52 ad art. 42 LTF).
 
2.4 Au vu de ce qui précède, et contrairement à ce que pense la recourante, il n'est pas nécessaire que la loi exclue expressément l'expédition des recours par télécopie, dans la mesure où l'art. 64 al. 1 LPA énonce la règle de la forme écrite et que cette dernière suppose une signature originale. Or, comme cela a été exposé, il n'est ni arbitraire, ni formaliste à l'excès de déclarer irrecevable un recours expédié sous cette forme. Au demeurant, même au plan fédéral où l'art. 42 al. 5 LTF prévoit l'obligation de fixer un délai supplémentaire pour remédier à un vice relatif à la signature - p. ex. lorsque celle-ci fait défaut ou que le mandataire n'est pas autorisé -, cette obligation ne vaut pas en cas d'envoi par télécopieur. Selon la jurisprudence, en effet, une partie qui expédie un recours de cette manière sait qu'elle ne remplit pas la condition de la signature manuscrite, de sorte que son recours doit être déclaré irrecevable, sans qu'il lui soit donné l'occasion de remédier à ce vice (ATF 121 II 252 consid. 4b p. 255; arrêt 9C_739/2007, précité, consid. 1.2; Aubry Girardin, op. cit., no 53 ad art. 42 LTF).
 
Il n'y a donc ni formalisme excessif, ni arbitraire dans la décision du Tribunal administratif qui, d'une part, a considéré que le recours expédié par télécopieur n'était pas valable et, d'autre part, n'a pas fixé de délai supplémentaire à la recourante pour corriger cette irrégularité.
 
2.5 La recourante fait aussi valoir que, le dernier jour du délai, elle a voulu déposer son recours, à l'attention du Tribunal administratif, auprès du Poste de gendarmerie des Pâquis, lequel l'a refusé.
 
Cet argument n'est d'aucun secours à la recourante. D'une part, en effet, ces circonstances ne ressortent pas de l'état de fait établi par l'autorité précédente, lequel lie le Tribunal de céans (cf. art. 105 al. 1 LTF), et n'ont donc en principe pas à être prises en considération. D'autre part, à supposer que cela soit avéré, l'autorité précédente aurait pu, sans tomber dans l'arbitraire, admettre que le sort du recours n'en était en rien changé. En effet, si le délai est réputé observé quand l'écriture est remise en temps utile à une autorité incompétente, il n'en va pas de même lorsque, comme en l'espèce, l'autorité incompétente refuse de prendre possession de l'acte (cf. arrêt U 179/01 du 3 août 2001 consid. 2d). Du point de vue de la prohibition de l'arbitraire - grief qui n'est au demeurant pas motivé conformément à l'art. 106 al. 2 LTF -, il faudrait ainsi constater que la prise en compte de ce fait par l'autorité précédente n'aurait pas modifié l'issue de la procédure (cf. art. 97 al. 1 in fine LTF).
 
Enfin, la recourante n'allègue ni ne démontre que le droit cantonal connaîtrait une norme qui, à l'instar de l'art. 48 al. 3 LTF, admet la validité du recours déposé en temps utile auprès d'une autorité incompétente, et que ladite norme aurait été appliquée de manière arbitraire. A supposer que l'on voie dans cette disposition l'énoncé d'un principe général de procédure découlant des règles de la bonne foi (cf. Jean-Maurice Frésard, in Commentaire LTF, op. cit., no 20 ad art. 48 LTF, avec référence à l'arrêt 2C_98/2008 du 12 mars 2008), le grief devrait également être rejeté et ce pour deux motifs. D'une part, celui-ci n'est à nouveau pas motivé conformément aux exigences de l'art. 106 al. 2 LTF. D'autre part, pour trouver application, ce principe suppose que la saisine de l'autorité incompétente soit le résultat des doutes que la partie peut éprouver sur l'autorité compétente ou de fausses indications sur les voies de droit ou d'indications peu claires (cf. Frésard, op. cit., no 22 ad art. 48 LTF; arrêt 2C_98/2008, précité, consid. 2.3). Si c'est consciemment que le recourant saisit une fausse autorité, il n'y a pas place pour l'application de l'art. 48 al. 3 LTF (cf. arrêt 2D_19/2009 du 10 juin 2009 consid. 2.2). Tel est précisément le cas en l'espèce, de sorte que la recourante ne saurait se prévaloir des règles de la bonne foi.
 
Le grief doit donc, en tant que recevable, être rejeté.
 
2.6 Le recours s'avère ainsi manifestement mal fondé, dans la mesure où il est recevable.
 
3.
 
3.1 La recourante a demandé à être dispensée des frais de la procédure devant le Tribunal fédéral. Dès lors que les personnes morales ne peuvent qu'exceptionnellement bénéficier de l'assistance judiciaire (ATF 131 II 306 consid. 5.2.2 p. 327) et que la cause était en outre dénuée de toute chance de succès, cette requête doit être rejetée.
 
3.2 Succombant, la recourante doit supporter les frais judiciaires (cf. art. 66 al. 1 LTF) et n'a pas droit à des dépens (cf. art. 68 al. 1 LTF a contrario).
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
 
1.
 
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.
 
2.
 
La requête d'assistance judiciaire est rejetée.
 
3.
 
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge de la recourante.
 
4.
 
Le présent arrêt est communiqué aux participants à la procédure, au Tribunal administratif du canton de Genève, 2ème Section, ainsi qu'à l'Administration fédérale des contributions, Division principale de l'impôt fédéral direct, de l'impôt anticipé, des droits de timbre.
 
Lausanne, le 21 janvier 2011
 
Au nom de la IIe Cour de droit public
 
du Tribunal fédéral suisse
 
Le Président: Le Greffier:
 
Zünd Vianin
 
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