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Informationen zum Dokument  BGer 6B_543/2010  Materielle Begründung
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BGer 6B_543/2010 vom 29.11.2010
 
Bundesgericht
 
Tribunal fédéral
 
Tribunale federale
 
{T 0/2}
 
6B_543/2010
 
Arrêt du 29 novembre 2010
 
Cour de droit pénal
 
Composition
 
MM. et Mme les Juges Favre, Président,
 
Wiprächtiger et Jacquemoud-Rossari.
 
Greffière: Mme Gehring.
 
 
Participants à la procédure
 
Ministère public du canton de Neuchâtel, rue du Pommier 3, 2000 Neuchâtel,
 
recourant,
 
contre
 
X.________,
 
intimé.
 
Objet
 
Détention d'armes (art. 4 al. 1 LArm, art. 7 OArm),
 
recours contre l'arrêt de la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal du canton de Neuchâtel du 8 juin 2010.
 
Faits:
 
A.
 
A.a Par ordonnance pénale du 2 décembre 2009, le Ministère public de la République et canton de Neuchâtel a condamné X.________ à douze heures de travail d'intérêt général avec sursis pendant deux ans pour avoir été appréhendé, en fin de soirée du 14 novembre 2009 en ville de Neuchâtel, en possession d'un "couteau artisanal" constitué d'une lame de cutter placé dans un fourreau fabriqué de ruban adhésif.
 
A.b Statuant par jugement du 18 mars 2010 sur l'opposition de l'intéressé, le Tribunal de police du district de Neuchâtel a acquitté celui-ci pour le motif que, à l'instar d'un cutter ordinaire ou de la plupart des canifs, le couteau artisanal litigieux n'entrait pas dans le champ d'application de la loi fédérale du 20 juin 1997 sur les armes, les accessoires d'armes et les munitions (LArm, RS 514.54).
 
B.
 
Par arrêt du 8 juin 2010, la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal neuchâtelois a rejeté le recours formé contre le jugement du Tribunal de police par le Ministère public qui se plaignait d'une application erronée des art. 28a et 33 LArm.
 
C.
 
Le Ministère public recourt au Tribunal fédéral contre l'arrêt cantonal, en concluant à l'annulation de celui-ci et au renvoi de l'affaire à la juridiction précédente.
 
Il n'a pas été ordonné d'échanges d'écritures.
 
Considérant en droit:
 
1.
 
D'après la jurisprudence, la loi s'interprète en premier lieu selon sa lettre (interprétation littérale). On peut cependant s'écarter de cette interprétation s'il y a des raisons sérieuses de penser que le texte de la loi ne reflète pas la volonté réelle du législateur; de tels motifs peuvent découler des travaux préparatoires, du but et du sens de la disposition, ainsi que de la systématique de la loi. Lorsque plusieurs interprétations sont possibles, il convient de rechercher quelle est la véritable portée de la norme, en la dégageant de tous les éléments à considérer, soit notamment des travaux préparatoires, du but de la règle, de son esprit, ainsi que des valeurs sur lesquelles elle repose ou encore de sa relation avec d'autres dispositions; le Tribunal fédéral ne privilégie aucune méthode d'interprétation, mais s'inspire d'un pluralisme pragmatique (cf. ATF 136 III 283 consid. 2.3.1 et les arrêts cités, p. 284).
 
2.
 
2.1 L'art. 4 al. 1 LArm entend par armes, les couteaux dont la lame est libérée par un mécanisme d'ouverture pouvant être actionné d'une seule main, les couteaux papillon, les couteaux à lancer et les poignards à lames symétriques (let. c), de même que les engins conçus pour blesser des êtres humains, notamment les coups de poing américains, les matraques simples ou à ressort, les étoiles à lancer et les frondes (let. d). L'ordonnance du 2 juillet 2008 sur les armes, les accessoires d'armes et les munitions (OArm, RS 514.541) précise que les couteaux dont la longueur totale en position ouverte mesure plus de douze centimètres et dont la lame mesure plus de cinq centimètres sont considérés comme des armes (art. 7 al. 1 let. b et c). La notion d'arme inclut en outre les objets dangereux qui, tels les outils, les ustensiles ou le matériel de sport, peuvent être utilisés pour menacer ou blesser des êtres humains, cependant que les couteaux de poche tels que les couteaux de l'armée suisse et autres produits comparables ne sont pas considérés comme des objets dangereux (art. 4 al. 6 LArm). Par couteaux de l'armée suisse, on entend les couteaux de poche fournis par l'armée, ainsi que les couteaux suisses d'officier aux caractéristiques comparables qui peuvent être obtenus dans le commerce (art. 9 OArm).
 
2.2 La Cour de cassation cantonale a considéré que le couteau artisanal constitué d'une seule lame de cutter et placé dans un fourreau fabriqué de ruban adhésif échappait au champ d'application de la LArm. Se référant à la définition du couteau prévue à l'art. 4 al. 1 let. c LArm qui fixe explicitement les critères retenus pour qualifier "d'armes" différentes espèces de couteaux et poignards, elle a constaté - de manière à lier le Tribunal fédéral (art. 105 al. 2 LTF) - que le "couteau artisanal" litigieux ne pouvait aucunement y être assimilé. Au contraire, celui-ci s'apparentait "manifestement au couteau de poche et autre canif" que l'art. 4 al. 6, 2ème phrase, LArm retranche de la notion "d'objet dangereux" pouvant servir à menacer ou blesser des êtres humains. En procédant ainsi à une interprétation grammaticale rigoureuse, la Cour cantonale se conforme à l'intention de l'auteur de la loi qui a voulu mettre "fin à un excès de réglementation en excluant de la notion d'armes les couteaux de scout par exemple" (FF 2006 III p. 2660).
 
2.3 En définissant clairement la notion de "couteau" à l'art. 4 al. 1 let. c LArm, le législateur a voulu préciser les critères permettant d'assimiler un couteau à une arme et supprimer l'insécurité juridique tenant à une application divergente de la règle dans les cantons. En rendant plus stricte la qualification d'un couteau comme "arme", la définition prévue à l'art. 4 al. 1 let. c LArm a réduit le nombre d'objets assimilés par la loi à des couteaux (FF 2006 III p. 2654, N. 2.1.3). La volonté du législateur historique a donc bien trouvé son accomplissement dans l'adoption de l'art. 4 al. 1 let. c LArm. Il n'y a pas lieu d'en faire une interprétation extensive qui apparaîtrait contraire aussi bien au texte même de la règle, qu'à l'intention du législateur. Il en résulte que l'intimé ne pouvait être puni en vertu des art. 33 ou 34 LArm, lesquels n'érigent pas en infraction le fait de posséder un couteau ne présentant pas les qualités retenues dans la définition des art. 4 al. 1 let. c et 4 al. 6 LArm, tels qu'ils sont explicités de plus au niveau réglementaire (cf. art. 7 et 9 OArm).
 
2.4 Le Ministère public soutient que "le port sur la voie publique, en fin de soirée, d'une seule lame de cutter placée dans un fourreau fabriqué de ruban adhésif" devait donner lieu à une sanction pénale, en vertu des art. 28a et 33 LArm. Pour les motifs développés ci-dessus, cette argumentation doit être écartée dans la mesure où le couteau artisanal litigieux n'est ni une arme, ni un objet dangereux assimilé à cette dernière. De surcroît, la jurisprudence et la doctrine ont clairement posé que la question de savoir si un engin est conçu pour blesser au sens de l'art. 4 al. 1 let. d LArm s'apprécie selon des critères strictement objectifs, à l'exclusion de toute considération subjective. S'il fallait interpréter, par hypothèse, la manière dont un individu aurait pu se servir d'un objet d'usage courant, la loi deviendrait inapplicable en raison de l'insécurité juridique et des problèmes insolubles de preuve qu'entraînerait une telle pratique, laquelle porterait de surcroît atteinte au principe de proportionnalité (ATF 129 IV 348 consid. 2.3 p. 351 et les références, notamment PHILLIPPE WEISSENBERGER, Die Strafbestimmungen des Waffengesetzes, in PJA 2000, p. 158 let. d).
 
2.5 La possession du couteau artisanal litigieux par l'intimé ne tombant pas sous le coup de la LArm, le recours du Ministère public doit être rejeté et la décision de la Cour cantonale, confirmée.
 
3.
 
Vu la qualité du recourant, aucun frais de justice ne sera mis à sa charge. De même, aucune indemnité ne sera allouée à l'intimé, qui n'a pas été invité à se déterminer dans la présente procédure.
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
 
1.
 
Le recours est rejeté.
 
2.
 
Il n'est pas perçu de frais ni alloué d'indemnité.
 
3.
 
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal du canton de Neuchâtel.
 
Lausanne, le 29 novembre 2010
 
Au nom de la Cour de droit pénal
 
du Tribunal fédéral suisse
 
Le Président: La Greffière:
 
Favre Gehring
 
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