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Informationen zum Dokument  BGer 1B_186/2009  Materielle Begründung
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BGer 1B_186/2009 vom 15.07.2009
 
Bundesgericht
 
Tribunal fédéral
 
Tribunale federale
 
{T 0/2}
 
1B_186/2009
 
Arrêt du 15 juillet 2009
 
Ire Cour de droit public
 
Composition
 
MM. les Juges Féraud, Président, Raselli et Eusebio.
 
Greffier: M. Parmelin.
 
Parties
 
X.________,
 
recourante, représentée par Me Pierre de Preux, avocat,
 
contre
 
Procureur général de la République et canton
 
de Genève.
 
Objet
 
détention avant jugement,
 
recours contre l'ordonnance de la Chambre d'accusation de la République et canton de Genève du 16 juin 2009.
 
Faits:
 
A.
 
X.________, ressortissante brésilienne née le ***1986, a été arrêtée à Genève le 9 juin 2009 et placée en détention préventive sous l'inculpation d'infraction grave à la loi fédérale sur les stupéfiants. Il lui est reproché d'avoir accepté de transporter, pour le compte d'un ressortissant albanais, 12 kilos de produit de coupage de Saint-Julien, en France voisine, à Genève en échange d'une somme de 600 fr.
 
Le 10 juin 2009, le Juge d'instruction en charge du dossier a ordonné la super-suspension de l'instruction contradictoire de la procédure jusqu'au 30 juin 2009 compte tenu du risque de collusion avec les autres mis en cause.
 
Le 15 juin 2009, il a requis la prolongation de la détention avant jugement de la prévenue pour une durée de trois mois. La Chambre d'accusation de la République et canton de Genève a fait droit à cette requête au terme d'une ordonnance rendue le 16 juin 2009.
 
B.
 
Agissant par la voie du recours en matière pénale, X.________ demande au Tribunal fédéral d'annuler cette décision, de rejeter la demande de prolongation de la détention préventive formée par le Juge d'instruction et d'ordonner sa mise en liberté immédiate. Elle requiert l'assistance judiciaire.
 
La Chambre d'accusation et le Procureur général de la République et canton de Genève concluent au rejet du recours.
 
La recourante a répliqué.
 
Considérant en droit:
 
1.
 
La décision attaquée, qui ordonne la prolongation de la détention préventive de la recourante pour une durée de trois mois, peut faire l'objet d'un recours en matière pénale au sens des art. 78 ss LTF. Formé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) contre une décision qui touche la recourante dans ses intérêts juridiquement protégés (art. 81 al. 1 let. a et b ch. 1 LTF), le recours est recevable.
 
2.
 
La recourante voit une violation manifeste de son droit d'être entendue consacré aux art. 5 § 4 CEDH et 29 al. 2 Cst. dans le fait qu'elle n'a pas eu accès aux pièces essentielles du dossier de la procédure et qu'elle n'a ainsi pas été mise en mesure de s'opposer efficacement à la requête de prolongation de sa détention préventive.
 
2.1 Aux termes de l'art. 5 par. 4 CEDH, toute personne privée de sa liberté par arrestation ou détention a le droit d'obtenir qu'un tribunal statue à bref délai sur la légalité de sa détention et ordonne sa libération si elle est illégale.
 
Selon la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme, toute procédure relevant de cette disposition doit respecter, autant que possible dans les circonstances d'une instruction, les exigences fondamentales d'un procès équitable consacrées par l'art. 6 CEDH, telles que le droit à une procédure contradictoire et à l'égalité des armes entre l'accusation et le prévenu en détention. Celui-ci doit, en particulier, jouir d'une possibilité suffisante de prendre connaissance des dépositions et autres éléments de preuve à la base des soupçons dirigés contre lui pour pouvoir les réfuter utilement. La nécessité d'une conduite efficace des enquêtes pénales peut certes impliquer qu'une partie des informations recueillies durant ces investigations soit tenue secrète afin d'empêcher des suspects d'altérer des preuves et de nuire à la bonne administration de la justice. Toutefois, ce but légitime ne saurait être poursuivi au prix de restrictions importantes apportées aux droits de la défense. En conséquence, des informations essentielles pour apprécier la légalité de la détention doivent être fournies au défenseur d'une manière adaptée à la situation (arrêts de la CourEDH Lietzow c. Allemagne du 13 février 2001, Recueil CourEDH 2001-I p. 371, par. 44, 46 et 47, et Svipsta c. Lettonie du 9 mars 2006, par. 129 et 137).
 
La jurisprudence du Tribunal fédéral consacre des principes analogues en rapport avec la garantie du droit d'être entendu déduite des art. 29 al. 2 et 31 Cst. et, plus particulièrement, du droit d'accès au dossier, qui en constitue l'un des éléments (ATF 129 I 85 consid. 4.1 p. 88; 126 I 7 consid. 2b p. 10). Le droit du prévenu de demander sa mise en liberté provisoire ou de s'opposer à la prolongation de sa détention préventive implique celui d'accéder aux éléments de preuve y relatifs, tels que les résultats de l'enquête de police et des autres mesures d'investigations, de manière à pouvoir contester efficacement la légalité de sa détention (ATF 125 I 394 consid. 5b p. 339; 115 Ia 293 consid. 4-6 p. 299; arrêt 1B_253/2007 du 29 novembre 2007 consid. 3.3.1 in Pra 2008 n. 38 p. 260). Le droit de consulter le dossier n'est toutefois pas absolu. Dans le cas d'une enquête pénale, il peut être refusé en raison d'un risque de collusion, mais l'autorité ne peut alors s'y référer pour motiver une décision de maintien en détention que dans la mesure où elle a communiqué au prévenu les pièces susceptibles d'influer de manière décisive sur cette décision. La communication doit porter non seulement sur les éléments propres à justifier la détention, mais aussi sur ceux qui pourraient autoriser le prévenu à s'y opposer. Au besoin, l'autorité peut supprimer les informations devant impérativement rester secrètes ou n'en révéler que l'essentiel (ATF 115 Ia 293 consid. 5c p. 304; arrêt 1S.1/2006 du 13 février 2006 consid. 2.1).
 
2.2 Informé de sa nomination, le conseil d'office de la recourante a immédiatement pris contact avec le juge d'instruction en charge de la procédure pour prendre connaissance du dossier. Avisé de la mesure de super-suspension de l'instruction contradictoire ordonnée par ce magistrat, il a demandé à consulter les pièces essentielles du dossier de manière à pouvoir, le cas échéant, contester utilement la détention préventive de sa mandante. Le greffe du juge d'instruction a indiqué que seul le procès-verbal d'inculpation de X.________ serait accessible et qu'il serait déposé dans la case réservée à l'étude l'après-midi précédant l'audience consacrée à la demande de prolongation de la détention de la prévenue. Ce document ne s'y trouvait toutefois pas de sorte que lorsqu'il s'est présenté à l'audience, le conseil de la recourante n'avait pas connaissance du procès-verbal d'inculpation de sa mandante. Le fait que celle-ci en connaissait la teneur ne permettait pas d'admettre que le vice était réparé. L'autorité intimée ne saurait se décharger en soutenant qu'elle ne pourrait être tenue responsable de retard dans l'acheminement du courrier aux avocats. Il appartient en effet aux autorités judiciaires de veiller à la coordination de leurs interventions afin de permettre au prévenu d'exercer efficacement ses droits (cf. arrêt de la CourEDH Schöps c. Allemagne du 13 février 2001, Recueil CourEDH 2001-I p. 413, par. 47). Le conseil de la recourante affirme s'être plaint à l'audience de ne pas avoir eu accès aux pièces essentielles de la procédure. Il ne prétend en revanche pas avoir demandé la lecture du procès-verbal d'inculpation de sa mandante et de la requête de prolongation de la détention du juge d'instruction, dont il affirme n'avoir pas davantage eu connaissance, ou sollicité la remise d'une copie de ces documents. La question de savoir si l'on peut lui reprocher de ne pas avoir agi en ce sens, au regard des règles de la bonne foi (cf. ATF 121 I 30 consid. 5f p. 38), peut demeurer indécise, car le recours doit de toute manière être admis pour le second grief évoqué.
 
3.
 
La recourante dénonce également l'absence de motivation suffisante de la décision attaquée.
 
3.1 Le droit d'être entendu garanti à l'art. 29 al. 2 Cst. implique notamment pour l'autorité l'obligation de motiver sa décision. Une règle analogue découle de l'art. 112 al. 1 let. b LTF s'agissant des décisions qui peuvent faire l'objet d'un recours devant le Tribunal fédéral. Selon la jurisprudence, la motivation d'une décision est suffisante lorsque l'autorité mentionne au moins brièvement les motifs qui l'ont guidée et sur lesquels elle a fondé sa décision, de manière à ce que l'intéressé puisse se rendre compte de la portée de celle-ci et l'attaquer en connaissance de cause. L'autorité ne doit toutefois pas se prononcer sur tous les moyens des parties; elle peut se limiter aux questions décisives (ATF 133 I 270 consid. 3.1 p. 277). Saisie d'une demande de prolongation de la détention préventive, l'autorité doit statuer à bref délai. Il est donc admissible, tout spécialement en cas de prolongations successives d'une détention, que l'autorité renonce à une motivation détaillée reprenant l'ensemble des circonstances de fait et en droit; elle peut, au contraire, ne spécifier que les éléments essentiels que la personne détenue peut comprendre sans l'assistance de son conseil. Dans cette mesure, il est admis que l'autorité puisse se borner à adhérer aux motifs de la demande de prolongation de la détention (ATF 123 I 31 consid. 2c p. 34; 114 Ia 281 consid. 4c p. 285).
 
3.2 En l'occurrence, la Chambre d'accusation a considéré que les conditions posées à la délivrance du mandat d'arrêt existaient toujours et a fait siens les motifs invoqués par le juge d'instruction à l'appui de sa demande pour prolonger la détention préventive de la recourante de trois mois. Un tel procédé est en principe admissible à la condition toutefois que la motivation à laquelle il est renvoyé soit suffisante au regard des exigences définies par la jurisprudence précitée et qu'elle ait été communiquée au prévenu. Le conseil de la recourante affirme ignorer la teneur du mandat d'arrêt et de la demande de prolongation de la détention de sa cliente, qui ne lui auraient pas été notifiés ni communiqués d'une autre manière. La question de savoir s'il aurait dû demander une copie de ces documents à l'audience peut demeurer indécise car l'ordonnance de prolongation de la détention ne répond de toute manière pas aux exigences de l'art. 112 al. 1 let. b LTF. Pour ce faire, les décisions susceptibles d'un recours au Tribunal fédéral doivent indiquer clairement les faits qui sont établis et les déductions juridiques qui sont tirées de l'état de fait déterminant (ATF 135 II 145 consid. 8.2 p. 153 et les références citées). Or la décision attaquée ne renferme aucun état de fait. Il en va de même du mandat d'arrêt et de la demande de prolongation de la détention auxquels renvoie la Chambre d'accusation pour justifier la prolongation de la détention de la recourante pour trois mois. Savoir quels sont les faits déterminants revêt une importance particulière dans la mesure où le Tribunal fédéral est en principe lié par ceux arrêtés par la dernière instance cantonale en vertu de l'art. 105 al. 1 LTF. Un état de fait insuffisant empêche l'application des règles de droit pertinentes à la cause. Un tel manquement constitue donc une violation du droit (cf. ATF 135 II 145 consid. 8.2 p. 153). L'ordonnance de la Chambre d'accusation ne contient par ailleurs pas les motifs déterminants de droit nécessaires à apprécier la légalité de la détention. Il en va de même du mandat d'arrêt qui se borne à évoquer les motifs de détention sans autre précision. La demande de prolongation de la détention contenait certes une brève motivation en relation avec chaque motif de détention allégué pour justifier la prolongation de la détention. Il est cependant pour le moins douteux que cette motivation particulièrement sommaire était suffisante au regard de la jurisprudence précitée, s'agissant en particulier des risques de collusion et de réitération. Quoi qu'il en soit, la recourante a pris des conclusions tendant à ce que la détention préventive soit limitée à la durée de l'ordonnance de super-suspension de l'instruction contradictoire, soit le 30 juin 2009. Or, la décision attaquée ne contient aucune motivation permettant d'apprécier les raisons pour lesquelles il convenait de prolonger la détention pour une durée de trois mois, soit la durée maximale prévue par le droit cantonal de procédure. La décision attaquée ne répond donc pas aux exigences de motivation requises en vertu de l'art. 29 al. 2 Cst. (cf. arrêt 1P.379/1997 du 23 juillet 1997 consid. 2c in fine), respectivement de l'art. 112 al. 1 let. b LTF. La décision attaquée doit par conséquent être annulée (art. 112 al. 3 LTF).
 
4.
 
Lorsque le Tribunal fédéral constate que la procédure de prolongation de la détention n'a pas satisfait aux garanties constitutionnelles ou conventionnelles en cause, il n'en résulte pas obligatoirement que le prévenu doive être immédiatement remis en liberté (ATF 116 Ia 60 consid. 3b p. 64; 115 Ia 293 consid. 5g p. 308; 114 Ia 88 consid. 5d p. 93). Tel est le cas en particulier lorsque, comme en l'espèce, la décision attaquée est annulée pour des raisons formelles liées à l'absence d'une motivation en fait et en droit suffisante et que l'existence de motifs fondés de prolonger la détention préventive ne peut pas d'emblée être exclue. La conclusion prise en ce sens par la recourante doit être rejetée. Pour rétablir une situation conforme au droit, il appartiendra à la Chambre d'accusation de statuer à nouveau sur la demande de prolongation de la détention, à bref délai et dans le respect des garanties découlant des art. 29 al. 2 Cst. et 112 al. 1 LTF.
 
5.
 
Le recours doit par conséquent être partiellement admis. Il n'y a pas lieu de percevoir de frais judiciaires (art. 66 al. 4 LTF). L'Etat de Genève versera en revanche une indemnité de dépens à la recourante, qui obtient gain de cause avec l'assistance d'un avocat (art. 68 al. 1 LTF). Vu l'issue du recours, la demande d'assistance judiciaire est sans objet.
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
 
1.
 
Le recours est partiellement admis. L'ordonnance attaquée est annulée et la cause renvoyée à la Chambre d'accusation de la République et canton de Genève pour nouvelle décision dans le sens des considérants.
 
2.
 
La demande de mise en liberté est rejetée.
 
3.
 
Il n'est pas perçu de frais judiciaires.
 
4.
 
Une indemnité de 1'500 fr. à payer à la recourante à titre de dépens est mise à la charge de la République et canton de Genève.
 
5.
 
Le présent arrêt est communiqué au mandataire de la recourante, ainsi qu'au Procureur général et à la Chambre d'accusation de la République et canton de Genève.
 
Lausanne, le 15 juillet 2009
 
Au nom de la Ire Cour de droit public
 
du Tribunal fédéral suisse
 
Le Président: Le Greffier:
 
Féraud Parmelin
 
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