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Informationen zum Dokument  BGer 1E.4/2004  Materielle Begründung
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BGer 1E.4/2004 vom 01.03.2004
 
Tribunale federale
 
{T 0/2}
 
1E.4/2004 /viz
 
Arrêt du 1er mars 2004
 
Ire Cour de droit public
 
Composition
 
MM. les Juges Aemisegger, Président de la Cour et Président du Tribunal fédéral, Aeschlimann et Féraud.
 
Greffier: M. Jomini.
 
Parties
 
A.________,
 
recourante, représentée par Me Tim Walker, avocat,
 
contre
 
Président de la Commission fédérale d'estimation
 
du 2e arrondissement, M. le Juge cantonal François Meylan, Palais de justice de l'Hermitage, 1014 Lausanne.
 
Objet
 
désignation d'un mandataire
 
recours de droit administratif contre la décision du Président de la Commission fédérale d'estimation
 
du 2e arrondissement du 29 janvier 2004.
 
Le Tribunal fédéral considère en fait et en droit:
 
1.
 
Une procédure d'expropriation formelle a été ouverte le 14 mai 2001 devant la Commission fédérale d'estimation du 2e arrondissement (ci-après: la Commission fédérale), à la requête de la société anonyme L'Energie de l'Ouest-Suisse (EOS); cette autorité était invitée à statuer sur les prétentions de plusieurs propriétaires fonciers se plaignant de nuisances provoquées par l'exploitation de lignes électriques de la société précitée ainsi que des Chemins de fer fédéraux (CFF) à Montreux (procédure no 91/2001). A.________ est une des propriétaires ayant annoncé des prétentions dans ce cadre.
 
Jusqu'au 29 avril 2002, A.________ était assistée de Me Jacques Philippoz, avocat à Leytron. Elle a résilié ce mandat en informant le Président de la Commission fédérale de sa volonté de "se défendre toute seule". Le 26 octobre 2002, A.________ a demandé au Président de la Commission fédérale de lui octroyer "une assistance juridique complète". Cette requête a été rejetée par une décision rendue le 31 octobre 2002.
 
2.
 
A.________ a régulièrement adressé au Président de la Commission fédérale des courriers dans lesquels, en substance, elle se plaignait des effets du rayonnement produit par les lignes électriques sur sa propriété, principalement dans sa maison, et elle formulait différentes critiques à l'encontre des autorités. En réponse à une de ces lettres, le Président de la Commission fédérale a écrit à A.________ le 21 mars 2003 pour lui exposer que, selon son appréciation, elle était manifestement hors d'état de procéder elle-même. Il lui a donc imparti un délai au 3 avril 2003 pour mandater un avocat en l'avertissant que si elle ne donnait pas suite à cette invitation, un avocat lui serait désigné conformément à l'art. 29 al. 5, 2e phrase, OJ. La lettre ajoutait que dans cette hypothèse, l'avance ou la provision à verser à l'avocat désigné serait supportée par les expropriants (EOS et CFF), la décision définitive de la Commission fédérale sur les frais et dépens de la procédure étant réservée.
 
Le 3 avril 2003, A.________ a écrit au Président de la Commission fédérale pour demander sa récusation; elle lui reprochait notamment d'avoir envisagé l'application de l'art. 29 al. 5 OJ en l'espèce.
 
La demande de récusation a été rejetée le 17 juillet 2003 par la Commission fédérale, présidée par Pierre Corboz, président suppléant. A.________ a recouru en vain contre ce prononcé auprès du Tribunal fédéral, son recours de droit administratif ayant été rejeté le 1er octobre 2003 (arrêt 1E.7/2003). A.________ a demandé la révision de cet arrêt; le Tribunal fédéral a déclaré cette demande irrecevable le 28 octobre 2003 (arrêt 1E.10/ 2003).
 
3.
 
Le 23 octobre 2003, Me Robert Liron, avocat à Yverdon-les-Bains, a écrit au Président de la Commission fédérale pour lui faire savoir qu'il était consulté par A.________ et pour lui demander de mettre à sa disposition le dossier de la procédure d'expropriation. Le 25 novembre 2003, le Président de la Commission fédérale a répondu à Me Liron en se référant à sa lettre adressée le 21 mars 2003 à A.________ et en demandant à cet avocat s'il était le mandataire de cette dernière ou s'il acceptait, le cas échéant, d'être désigné comme tel sur la base de l'art. 29 al. 5, 2e phrase, OJ. Le 15 décembre 2003, Me Liron a indiqué au Président de la Commission fédérale qu'il avait informé A.________ de sa décision d'accepter la mission d'avocat d'office aux conditions décrites dans la lettre du 21 mars 2003.
 
Par une décision du 29 janvier 2004 communiquée aux conseils des parties à la procédure d'expropriation, le Président de la Commission fédérale a désigné Me Liron en qualité de mandataire de A.________, en application de l'art. 29 al. 5 OJ. Il a dit que les provisions à verser à Me Liron seraient supportées par les expropriants EOS et CFF, solidairement entre eux, et qu'elles seraient calculées en fonction des principes applicables à la fixation des dépens dans les procédures d'expropriation. Il a encore pris acte des déclarations d'EOS et des CFF exprimant leur accord de prendre définitivement en charge les frais d'avocat de A.________, sous réserve d'un éventuel recours sur leur montant.
 
4.
 
Agissant par la voie du recours de droit administratif et représentée dans cette procédure par Me Tim Walker, avocat à Trogen, A.________ demande au Tribunal fédéral d'annuler la décision prise le 29 janvier 2004 par le Président de la Commission fédérale d'estimation. Dans un mémoire rédigé en allemand, elle se plaint de violations du droit d'être entendu et du droit de choisir librement son avocat. Elle requiert en outre l'assistance judiciaire.
 
Le Président de la Commission fédérale a été invité à produire le dossier de la procédure. Il n'a pas été demandé de réponses au recours de droit administratif.
 
5.
 
Conformément à la règle générale de l'art. 37 al. 3 OJ, le présent arrêt doit être rédigé en français, langue de la décision attaquée.
 
6.
 
La recourante soutient que la désignation d'un mandataire sur la base de l'art. 29 al. 5 OJ ne serait pas possible dans une procédure d'expropriation.
 
L'art. 29 al. 5 OJ a la teneur suivante:
 
"Lorsqu'une partie est manifestement hors d'état de procéder elle-même, le tribunal peut l'inviter à commettre un mandataire. Si elle ne donne pas suite à cette invitation dans le délai qui lui est imparti, il lui en désigne un et met les frais à sa charge".
 
Cette règle fait partie des dispositions communes de procédure applicables dans les différentes voies ouvertes devant le Tribunal fédéral (art. 29 à 40 OJ). Elle est également applicable, selon la doctrine, dans les procédures que régit la loi fédérale sur la procédure administrative (cf. André Grisel, Traité de droit administratif, vol. II, Neuchâtel 1984, p. 844; Jean-François Poudret/Suzette Sandoz-Monod, Commentaire de la loi fédérale d'organisation judiciaire, vol. I, Berne 1990, n. 7.1 ad art. 29, p. 172). Il s'agit alors d'une application par analogie, en raison d'une lacune proprement dite de la loi.
 
En vertu de l'art. 3 de l'ordonnance concernant les commissions fédérales d'estimation (RS 711.1), les dispositions du deuxième chapitre de la loi fédérale sur la procédure administrative - à savoir les règles générales de procédure des art. 7 à 43 PA - sont applicables à la procédure devant le président ou la commission fédérale d'estimation. Si, conformément aux avis précités de la doctrine, on considère que l'art. 29 al. 5 OJ exprime une règle générale de procédure administrative, cette règle est visée par le renvoi de l'art. 3 de ladite ordonnance (dans la loi fédérale sur la procédure administrative, les prescriptions concernant la représentation et l'assistance des parties sont incluses dans le deuxième chapitre - cf. art. 11 et 11a PA). Le régime spécial de la loi fédérale sur l'expropriation en matière de frais et dépens (art. 114 et 115 LEx) implique qu'en principe, la partie expropriée n'a pas à supporter les honoraires du mandataire désigné, pour les opérations indispensables à la procédure. La décision attaquée fait du reste référence à cette réglementation et mentionne les engagements pris à ce sujet, dans la présente cause, par les parties expropriantes. Dans ces conditions, on ne voit pas de motifs d'exclure en l'espèce une application par analogie de l'art. 29 al. 5 OJ.
 
7.
 
Se plaignant d'une violation du droit d'être entendu (art. 29 al. 2 Cst.), la recourante reproche au Président de la Commission fédérale de ne lui avoir pas donné la possibilité de s'exprimer avant la désignation du mandataire. Ce grief est manifestement mal fondé. En effet, le 21 mars 2003, la recourante avait été formellement invitée à présenter ses déterminations. Elle était au courant des démarches préalables effectuées par Me Liron - qu'elle avait directement contacté - auprès du Président de la Commission fédérale (cf. lettre du 10 décembre 2003 de la recourante à Me Liron, envoyée en copie au Président de la Commission fédérale) et elle n'a pas présenté d'objections à ce sujet avant la communication de la décision attaquée. Elle a donc à l'évidence eu la possibilité de s'exprimer.
 
Invoquant toujours le droit d'être entendu, la recourante se plaint d'une motivation insuffisante de la décision attaquée. Ce grief est également mal fondé. En effet, cette décision fait suite à la lettre du Président de la Commission fédérale du 21 mars 2003. Sur la base de ces deux actes, la recourante pouvait se rendre compte de la portée de la mesure prise à son égard et recourir contre elle en connaissance de cause (cf. ATF 129 I 232 consid. 3.2 p. 236; 126 I 15 consid. 2a/aa p. 17, 97 consid. 2b p. 102 et les arrêts cités).
 
8.
 
La recourante conteste être hors d'état de procéder elle-même au sens de l'art. 29 al. 5 OJ. L'autorité compétente dispose à ce propos d'un large pouvoir d'appréciation. Elle peut tenir compte de la manière dont la partie se comporte, notamment lorsqu'elle trouble la marche normale du procès (cf. Poudret/Sandoz-Monod, op. cit., n. 7.2 p. 172). En l'espèce, si l'on prend en considération la complexité de l'affaire, à cause des aspects techniques ou scientifiques, et l'attitude de la recourante, qui depuis le mois d'avril 2002 agit de manière procédurière, il apparaît clairement que le Président de la Commission fédérale n'a pas fait un mauvais usage de son pouvoir d'appréciation en l'invitant à se constituer un avocat puis, comme elle ne l'avait pas fait, en lui en désignant un d'office.
 
9.
 
La recourante affirme qu'elle n'a pas pu créer un rapport de confiance avec Me Liron. Elle n'allègue en revanche aucun motif objectif propre à empêcher la désignation de cet avocat en tant que mandataire au sens de l'art. 29 al. 5 OJ (cf. par analogie la jurisprudence relative à la désignation d'un nouvel avocat d'office en cas de défense obligatoire ou nécessaire: ATF 126 I 26 consid. 4b/aa p. 31; 116 Ia 102 consid. 4b p. 105). Le droit fédéral de procédure n'a donc, de ce point de vue également, pas été violé.
 
10.
 
Il s'ensuit que le recours de droit administratif, manifestement mal fondé, doit être rejeté. Comme les conclusions de la recourante paraissaient d'emblée vouées à l'échec, la demande d'assistance judiciaire doit être rejetée conformément à l'art. 152 al. 1 OJ.
 
Le présent arrêt doit être rendu sans frais ni dépens (art. 116 al. 1, 3e phrase, LEx).
 
Par ces motifs, vu l'art. 36a OJ, le Tribunal fédéral prononce:
 
1.
 
Le recours de droit administratif est rejeté.
 
2.
 
La demande d'assistance judiciaire est rejetée.
 
3.
 
Il n'est pas perçu d'émolument judiciaire.
 
4.
 
Il n'est pas alloué de dépens.
 
5.
 
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire de la recourante, au Président de la Commission fédérale d'estimation du 2e arrondissement et, pour information, à Me Robert Liron, avocat à Yverdon-les-Bains.
 
Lausanne, le 1er mars 2004
 
Au nom de la Ire Cour de droit public
 
du Tribunal fédéral suisse
 
Le président: Le greffier:
 
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