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Informationen zum Dokument  BGer 5C.170/2003  Materielle Begründung
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BGer 5C.170/2003 vom 13.01.2004
 
Tribunale federale
 
{T 0/2}
 
5C.170/2003 /frs
 
Arrêt du 13 janvier 2004
 
IIe Cour civile
 
Composition
 
M. et Mmes les Juges Raselli, Président,
 
Nordmann et Hohl.
 
Greffière: Mme Krauskopf
 
Parties
 
A.________,
 
recourant, représenté par Maîtres Pierre Boivin et Claude-Emmanuel Dubey, avocats,
 
contre
 
dame A.________,
 
intimée, représentée par Me Richard Calame, avocat,
 
Objet
 
art. 68 OJ (mesures provisionnelles),
 
recours en nullité contre l'ordonnance de la Présidente du Tribunal civil de l'arrondissement de la Sarine
 
du 4 août 2003.
 
Faits:
 
A.
 
Dame A.________ et A.________, tous deux de nationalité française et domiciliés en France, se sont mariés le 23 décembre 1966. Ils ont deux enfants, aujourd'hui majeurs. Les époux sont séparés de fait depuis octobre 1999.
 
Par demande déposée devant le juge aux affaires familiales du Tribunal de Grande Instance de Quimper le 11 février 2003, dame A.________ a ouvert action en séparation de corps. Dans le cadre de cette procédure, elle demande notamment l'octroi d'une pension, la jouissance exclusive et gratuite du domicile conjugal sis à Nevez ainsi que la désignation d'un expert aux fins d'établir la consistance du patrimoine de son époux et la mise sous séquestre du domicile conjugal et des biens appartenant directement ou indirectement à son époux.
 
B.
 
Le 6 février 2003, l'épouse a déposé contre son mari par devant la présidente du tribunal civil de l'arrondissement de la Sarine une "requête de mesures préprovisionnelles d'extrême urgence". Elle exposait que le domicile conjugal est propriété de la SI française X.________ dont son mari est le Président directeur général; cette société appartiendrait en grande partie à la SI Y.________ SA à Fribourg dont son mari serait, directement ou indirectement, actionnaire, les actions étant détenues par B.________ et C.________, associé, respectivement directeur auprès de B.________ et Cie à Fribourg, siège de la SI Y.________ SA. Faisant valoir que son mari cherche à diminuer son patrimoine pour faire baisser le montant de la contribution d'entretien qui lui est due et à soustraire des biens afin qu'ils n'apparaissent pas dans le cadre de la liquidation du régime matrimonial, l'épouse demandait à ce qu'il soit ordonné à B.________, à C.________ et à la société B.________ et Cie de bloquer les actions de la SI Y.________ SA ou le capital des sociétés qui en sont les apparents propriétaires ainsi que tous avoirs dont A.________ est titulaire ou détenteur économique. Elle demandait également qu'il soit fait interdiction à son mari, sous la menace des peines prévues à l'art. 292 CP, de disposer sans autorisation judiciaire des avoirs bloqués. Elle sollicitait en outre que B.________ et C.________ soient astreints, sous la menace des peines prévues à l'art. 292 CP, de fournir des renseignements complets et de produire des pièces au sujet de la fortune de A.________ et en particulier sur la propriété des actions de la SI Y.________ SA.
 
Statuant par ordonnance d'urgence du 7 février 2003, la présidente du tribunal d'arrondissement a fait droit aux conclusions de l'épouse, à l'exception du chef de conclusions tendant à astreindre B.________ et C.________ à fournir les renseignements et pièces sollicités.
 
Après audition des parties, elle a confirmé le 4 août 2003 les mesures prononcées (chiffre I) et également fait droit au chef de conclusions astreignant B.________ et C.________, sous la menace des peines prévues à l'art. 292 CP, à fournir au greffe du Tribunal de la Sarine des renseignements complets et à produire toutes pièces justificatives utiles sur l'état de la fortune du mari (chiffre II), qu'elle a condamné aux dépens (chiffre IV).
 
C.
 
A.________ exerce un recours en nullité au Tribunal fédéral, concluant à l'annulation des chiffres II et IV de l'ordonnance du 4 août 2003. Il soutient que la présidente du tribunal de l'arrondissement de la Sarine n'était, sauf à violer l'art. 10 LDIP, territorialement pas compétente pour astreindre des tiers à fournir des renseignements et des pièces au sujet de son patrimoine.
 
Invitée à se déterminer, l'intimée conclut à l'irrecevabilité du recours, subsidiairement à son rejet.
 
Par ordonnance du 25 septembre 2003, le Président de la IIe Cour civile du Tribunal fédéral a attribué l'effet suspensif au recours en tant qu'il concerne le chiffre II du dispositif de l'ordonnance du 4 août 2003.
 
Le Tribunal fédéral considère en droit:
 
1.
 
Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 129 II 225 consid. 1 p. 227; 128 II 56 consid. 1 p. 58).
 
1.1 Que l'on considère la décision ordonnant la communication de renseignements en application des art. 10 LDIP et 170 CC comme une décision finale au sens de l'art. 48 OJ et donc susceptible d'un recours en réforme (art. 43 ss OJ; ATF 127 III 474 consid. 2 p. 476; 126 III 445 consid. 3b p. 446; arrêt 5P.39/2002 du 5 avril 2002, consid.1; arrêt 5C.169/2000 du 4 décembre 2000, consid. 1a) ou comme une décision de mesures provisionnelles, non finale, ne pouvant faire l'objet que d'un recours en nullité (art. 68 ss OJ; arrêt 5C.138/1997 du 28 août 1997, consid. 1; arrêt 5C. 243/1990 du 5 mars 1991, consid. 1, publié in SJ 1991 p. 461; arrêt 5P.487/1994 du 11 juillet 1995, consid. 1a), le recours interjeté pour violation des prescriptions de droit fédéral relatives à la compétence territoriale n'est recevable qu'à l'encontre de la décision rendue par la dernière instance cantonale. Le législateur a en effet subordonné le recours en réforme comme celui en nullité à l'épuisement des recours ordinaires cantonaux.
 
La notion de recours ordinaire de droit cantonal se détermine selon le droit fédéral. D'après la jurisprudence, il s'agit d'un recours qui permet un libre examen du droit fédéral (effet dévolutif) et qui empêche la décision de passer en force de chose jugée (effet suspensif) (ATF 120 II 93 consid. 1c p. 96; Poudret, Commentaire de la loi fédérale d'organisation judiciaire, volume II, n. 1.3.2 ad art. 48, p. 305).
 
1.2 L'ordonnance querellée est une décision de mesures provisoires au sens de l'art. 10 LDIP. La présidente du tribunal de l'arrondissement de la Sarine a admis sa compétence en vertu de la jurisprudence relative à cette disposition, jurisprudence qui, dans certains cas, autorise le juge suisse à ordonner des mesures de l'art. 137 al. 2 CC (art. 145 aCC) (arrêt 5C.243/1990 du 5 mars 1991, consid. 5, publié in SJ 1991 p. 464). Appliquant la lex fori et en particulier l'art. 170 al. 2 CC, elle a astreint des tiers à fournir des renseignements et pièces.
 
1.2.1 Les mesures provisoires de l'art. 137 al. 2 CC sont ordonnées conformément aux dispositions du code de procédure civile, c'est-à-dire aux art. 367 ss CPC/FR (art. 48 LACC/FR; RSF 210.1). Le juge entend les parties présentes à son audience (art. 373 al. 1 CPC/FR; RSF 270.1). Si le déclinatoire est opposé, il prononce séance tenante; s'il admet sa compétence, il procède nonobstant recours (art. 373 al. 2 CPC/FR). Dans les causes qui sont de la compétence d'un tribunal, l'ordonnance rendue par son président est susceptible de recours à ce tribunal (art. 376 al. 1 CPC/FR). Toutefois, en vertu de l'art. 377 al. 2 CPC/FR, lorsque l'ordonnance du président du tribunal d'arrondissement est attaquée pour déclinatoire, c'est la voie du recours en appel qui doit être choisie.
 
Le recours en appel pour déclinatoire en matière de mesures provisionnelles est un recours ordinaire de droit cantonal au sens des art. 48 et 68 OJ. Il a un effet dévolutif (art. 299a CPC/FR) et, comme tout recours en appel, empêche l'entrée en force de chose jugée de la décision (art. 274 CPC/FR, par renvoi des art. 370 et 361 CPC). L'ordonnance a toutefois force exécutoire immédiate, à moins que le président de l'autorité de recours ne la lui retire (art. 378 CPC/FR), alors qu'en règle générale, le recours en appel suspend l'exécution du jugement (art. 299 al. 1 CPC/FR).
 
1.2.2 Dans la mesure où le recourant conteste la compétence de la présidente du tribunal d'arrondissement, estimant que les conditions de l'art. 10 LDIP telles qu'explicitées par la jurisprudence ne sont pas réalisées, il devait adresser un recours en appel pour déclinatoire au Tribunal cantonal fribourgeois conformément à l'art. 377 CPC/FR avant de saisir le Tribunal fédéral d'un quelconque recours. Lorsqu'il soutient que l'ordonnance attaquée a été rendue en dernière instance cantonale parce que le recours prévu par l'art. 376 CPC/FR n'est pas ouvert "à défaut de compétence pour statuer sur le fond de la présente cause", le recourant ne tient pas compte de l'art. 377 CPC/FR, qui institue pourtant une voie de recours spécifique pour les questions de compétence - le recours en appel au Tribunal cantonal -, et ce même lorsque le tribunal d'arrondissement peut être saisi d'un recours sur les autres questions en vertu de l'art. 376 al. 1 CPC/FR (art. 377 al. 2 CPC/FR, "même susceptible de recours au tribunal"). La question de savoir si un recours à ce tribunal sur les questions autres que le déclinatoire est ouvert en l'espèce n'a pas à être résolue.
 
1.3 Par ailleurs, même si l'on considérait que la requête du 6 février 2003 a ouvert une procédure de mesures provisionnelles indépendante, voire qu'elle a introduit une procédure de mesures protectrices de l'union conjugale puisqu'elle a été déposée avant la litispendance de l'action en séparation de corps devant les tribunaux français (voir toutefois l'ATF 129 III 60 consid. 3 p. 62), le résultat serait identique. Contre une ordonnance rendue en procédure de mesures provisionnelles indépendante (art. 369 al. 2 CPC/FR), le recours en appel pour déclinatoire serait également ouvert en vertu de l'art. 377 CPC/FR. Contre une décision de mesures protectrices de l'union conjugale selon l'art. 54 let. c et d LACC/FR, un recours en appel au Tribunal cantonal pourrait et devrait également être interjeté (art. 54 in initio LACC/FR).
 
1.4 Au vu de ce qui précède, le présent recours est irrecevable, faute d'épuisement des voies de recours.
 
2.
 
Le recourant, qui succombe, supporte les frais (art. 156 al. 1 OJ). Il versera une indemnité de partie à l'intimée dans la mesure où celle-ci s'est déterminée sur le recours (art. 159 al. 1 OJ).
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
 
1.
 
Le recours est irrecevable.
 
2.
 
Un émolument judiciaire de 3'000 fr. est mis à la charge du recourant.
 
3.
 
Le recourant versera une indemnité de 3'000 fr. à l'intimée au titre de dépens.
 
4.
 
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties et à la Présidente du Tribunal civil de l'arrondissement de la Sarine.
 
Lausanne, le 13 janvier 2004
 
Au nom de la IIe Cour civile
 
du Tribunal fédéral suisse
 
Le président: La greffière:
 
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