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Informationen zum Dokument  BGer 5P.145/2002  Materielle Begründung
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BGer 5P.145/2002 vom 18.09.2002
 
Tribunale federale
 
{T 0/2}
 
5P.145/2002 /frs
 
Arrêt du 18 septembre 2002
 
IIe Cour civile
 
Les juges fédéraux Bianchi, président,
 
Nordmann, Hohl,
 
greffière Heegaard-Schroeter.
 
G.________ (époux),
 
recourant, représenté par Me Charles Guerry, avocat, rue du Progrès 1, case postale, 1701 Fribourg,
 
contre
 
Dame G.________ (épouse),
 
intimée, représentée par Me Anne Giovannini, avocate, bd de Pérolles 8, case postale 399, 1701 Fribourg,
 
Tribunal civil de l'arrondissement de la Gruyère, Le Château, case postale 364, 1630 Bulle.
 
Art. 9 Cst.; mesures provisionnelles
 
Recours de droit public contre la décision du Tribunal civil de l'arrondissement de la Gruyère du 8 mars 2002.
 
Faits:
 
A.
 
G.________, né le 10 juillet 1963, et dame G.________, née le 24 avril 1960, ont contracté mariage le 2 septembre 1994 à Morat. Une fille est issue de leur union, J.________, née le 24 octobre 1996.
 
Après avoir travaillé comme économiste pour la Confédération, G.________ est, depuis le 1er mai 2001, salarié de la société de conseil qu'il a créée.
 
B.
 
Statuant le 23 mai 2001 sur la requête de mesures provisoires déposée par G.________ dans le cadre de l'action matrimoniale introduite à l'encontre de dame G.________, le Président du Tribunal civil de la Gruyère a notamment pris acte de ce que les époux vivaient séparés, confié à la mère la garde de l'enfant, réservé au père un droit de visite et condamné le mari à verser des contributions d'entretien mensuelles de 1'280 fr. pour sa femme (chiffre 4 du dispositif) et 1'200 fr. pour leur fille, allocations familiales en sus (chiffre 3 du dispositif).
 
G.________ a appelé de cette ordonnance, afin que son droit de visite soit élargi, la pension de sa femme supprimée et celle de sa fille réduite à 965 fr. Son recours a été rejeté le 8 mars 2002 par le Tribunal civil de la Gruyère, tant en ce qu'il concernait les modalités du droit de visite que les contributions d'entretien en faveur de l'épouse et de l'enfant.
 
C.
 
Agissant par la voie du recours de droit public, G.________ ne remet en cause que la fixation des pensions, concluant à l'annulation de la décision du 8 mars 2002, avec suite de frais et dépens.
 
L'intimée conclut, avec suite de frais et dépens, au rejet du recours et à la confirmation de la décision attaquée.
 
Le Tribunal fédéral considère en droit:
 
1.
 
1.1 Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 128 II 13 consid. 1a p. 16, 46 consid. 2a p. 47 et les arrêts cités).
 
1.2 Contre la décision attaquée, en tant que décision sur mesures provisoires dans une action matrimoniale, est ouverte la voie du recours de droit public (ATF 126 III 261 consid. 1 p. 263; 100 Ia 12 consid. 1b p. 14). Formé en temps utile, compte tenu de la suspension des délais prévue par l'art. 34 al. 1 let. a OJ, contre une décision rendue en dernière instance cantonale (art. 376 al. 1 CPC/FR; RFJ 2000 p. 284 (287); Extraits 1983 p. 43), le recours est également recevable sous l'angle des art. 86 al. 1 et 89 al. 1 OJ.
 
1.3 Bien que le recourant conclue simplement à l'annulation du jugement attaqué, sans donner de précisions, il ressort de sa motivation qu'il en demande en réalité la cassation uniquement dans la mesure où les points de l'ordonnance de mesures provisionnelles du 23 mai 2001 relatifs aux pensions ont été confirmés. C'est donc dans cette perspective qu'il faut considérer ce chef de conclusions.
 
1.4 Dans la procédure de recours de droit public, la partie adverse n'a aucun droit de disposition sur l'objet du litige; elle ne peut que conclure à l'irrecevabilité ou au rejet du recours, et critiquer les points de l'acte attaqué qui lui sont défavorables ou qui sont à ses yeux inexacts (ATF 123 I 56 consid. 2a; 115 Ia 27 consid. 4a p. 30; 101 Ia 521 consid. 3 p. 525), sans pouvoir prendre de conclusions propres sur le fond. Est donc irrecevable le chef de conclusions de l'intimée tendant à la confirmation de la décision déférée (cf. K. Spühler, Die Praxis der staatsrechtlichen Beschwerde, Berne 1994, n. 74, p. 44).
 
2.
 
Le recourant se plaint d'une appréciation arbitraire des preuves (art. 9 Cst.). Il critique la façon dont l'autorité cantonale a calculé ses revenus durant la période prise en compte pour la fixation des pensions, à savoir du 1er mai au 31 octobre 2001.
 
2.1 De jurisprudence constante, le Tribunal fédéral se montre réservé en matière d'appréciation des preuves, vu le large pouvoir qu'il reconnaît dans ce domaine aux autorités cantonales; aussi, la décision attaquée ne doit-elle être annulée que lorsque cette appréciation se révèle arbitraire, c'est-à-dire si elle est manifestement insoutenable ou en contradiction flagrante avec la situation de fait, repose sur une inadvertance manifeste ou heurte de façon choquante le sentiment de la justice. Il ne suffit pas que la motivation de l'arrêt déféré soit insoutenable; encore faut-il que celui-ci apparaisse arbitraire dans son résultat (ATF 127 I 38 consid. 2a p. 41; 124 I 208 consid. 4a et les références citées).
 
2.2 Pour déterminer le montant des pensions en faveur de l'épouse et de l'enfant, l'autorité cantonale a retenu que, pour les six mois concernés, les revenus du recourant s'étaient élevés à 58'400 fr. Elle a pris en compte, d'une part, le salaire de 20'900 fr. perçu par le recourant pour son activité au sein de sa société et, d'autre part, des honoraires de 37'500 fr. (6x 6'250 fr.) versés par la Promotion économique du canton de Fribourg (ci-après: la Promotion économique) à cette société. Considérant que l'affirmation du recourant, selon laquelle les prestations de la Promotion économique étaient inclues dans les comptes d'exploitation de la société, n'était pas vraisemblable, au vu de ses autres déclarations, les juges cantonaux ont ajouté lesdits honoraires à ses revenus.
 
2.3 Le recourant prétend que c'est arbitrairement que l'autorité cantonale a ajouté au salaire que lui a versé sa société entre mai et octobre 2001 les honoraires mensuels payés durant cette période par la Promotion économique. Les éléments du dossier ne permettaient pas aux juges cantonaux de considérer ces prestations comme ses revenus personnels. Il ressortait au contraire des preuves apportées qu'il s'agissait de produits réalisés par sa société; cela était en particulier clairement établi par le contrat de services conclu avec la Promotion économique, qui désigne la société elle-même comme mandataire.
 
2.4 Le grief présenté par le recourant est fondé. En effet, en réponse à la lettre du Président du Tribunal civil de la Gruyère du 21 novembre 2001 lui demandant de préciser si les prestations versées par la Promotion économique (6'250 fr. par mois) devaient être ajoutées à ses revenus, le recourant a affirmé, le 23 novembre 2001, que ces montants étaient inclus dans les produits de sa société et n'étaient donc pas perçus comme un salaire personnel. Il a en outre produit le contrat passé entre sa société et la Promotion économique, ainsi que les bilan et comptes d'exploitation intermédiaires de la société pour la période du 1er mai au 31 octobre 2001. Le montant des produits de la société tel qu'il a été mentionné dans la lettre explicative du 23 novembre 2001 - à savoir 23'480 fr. 40 - ne correspond certes pas à celui figurant dans les comptes d'exploitation - à savoir 46'878 fr. 50 -; l'autorité cantonale a toutefois elle-même corrigé cette inadvertance manifeste. Quant au contrat conclu avec la Promotion économique, il indique explicitement que la personne à qui le mandat est confié, et à qui les honoraires mensuels de 6'250 fr. sont payés, est la société. Au vu de ces explications, les juges cantonaux ne pouvaient pas, sans arbitraire, considérer que l'affirmation du recourant n'était pas vraisemblable eu égard à ses dires, sans même indiquer une quelconque référence à ceux-ci. S'agirait-il des déclarations faites lors de la séance tenue le 16 novembre 2001, lorsque le recourant affirmait "[...] j'ai reçu une proposition de l'Office de la promotion économique du canton de Fribourg pour une activité à 50 %. Je reçois une avance forfaitaire de Fr. 6'250.- par mois. J'aurai peut-être une prime à la fin de l'année en fonction du résultat de mon travail [...]", qu'elles n'autoriseraient pas une telle conclusion. Il est en effet courant, pour l'associé gérant d'une société à responsabilité limitée, de parler de celle-ci à la première personne du singulier.
 
2.5 Enfin, il ne peut être entré en matière sur l'argumentation de l'intimée tendant à démontrer que la décision déférée est juste dans son résultat si l'on prend en compte, pour le calcul des pensions, un revenu hypothétique du recourant plus élevé que son revenu effectif. Outre le fait que la motivation de l'intimée n'est pas conforme aux exigences posées par l'art. 90 let. b OJ, disposition applicable par analogie au mémoire de réponse à un recours de droit public (ATF 115 Ia 27 consid. 4a p. 30; 101 Ia 521 consid. 3 p. 525; Messmer/Imboden, Die eidgenössischen Rechtsmittel in Zivilsachen, Zurich 1992, p. 229, n. 25), le jugement attaqué n'a pas du tout discuté cet aspect de la question, de sorte que les éléments qui permettraient d'examiner les mérites de ce moyen font défaut.
 
3.
 
En conclusion, le recours doit être admis et la décision attaquée annulée en tant qu'elle confirme les chiffres 3 et 4 du dispositif de l'ordonnance rendue le 23 mai 2001 par le Président du Tribunal civil de la Gruyère. L'intimée, qui succombe, supportera les frais judiciaires (art. 156 al. 1 OJ) et versera des dépens au recourant (art. 159 al. 1 OJ).
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
 
1.
 
Le recours est admis et la décision attaquée annulée en tant qu'elle concerne les contributions d'entretien en faveur de l'épouse et de l'enfant.
 
2.
 
Un émolument judiciaire de 1'500 fr. est mis à la charge de l'intimée.
 
3.
 
L'intimée versera au recourant une indemnité de 1'500 fr. à titre de dépens.
 
4.
 
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties et au Tribunal civil de l'arrondissement de la Gruyère.
 
Lausanne, le 18 septembre 2002
 
Au nom de la IIe Cour civile
 
du Tribunal fédéral suisse
 
Le président: Le greffier:
 
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