BGE 134 III 67
 
11. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour de droit civil dans la cause A. et consorts contre X. SA en liquidation concordataire et Y. SA (recours en matière civile)
 
4A_346/2007 du 16 novembre 2007
 
Regeste
Art. 336 Abs. 2 lit. c, Art. 336a und 336b OR; Massenentlassung ohne vorhergehende Konsultation der Arbeitnehmervertretung; von den Arbeitnehmern geforderte Entschädigung, obwohl die Arbeitgeberin die Kündigungen zurückgezogen hat und die Arbeitsverhältnisse fortgesetzt werden.
 
Sachverhalt


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X. SA, actuellement en liquidation concordataire, a notifié leur licenciement à cent vingt-quatre travailleurs qu'elle employait dans le canton de Vaud. Les contrats ainsi résiliés devaient expirer à la fin des mois d'octobre, novembre ou décembre 2002, ou janvier 2003. Les travailleurs ont tous fait opposition à leur congé.
L'employeuse a par la suite conclu un contrat avec Y. SA selon lequel cette dernière reprendrait certains de ses sites de production. X. SA a informé les travailleurs concernés de leur prochain transfert à Y. SA et elle a déclaré retirer le congé qu'elle leur avait notifié. Tous ont poursuivi leur activité salariée au delà du 31 janvier 2003, désormais au service de Y. SA; aucun ne s'est opposé à la poursuite des rapports de travail ni au transfert desdits rapports à cette employeuse-ci.
Par jugement du 20 février 2003, le Tribunal de prud'hommes de l'arrondissement de Lausanne a constaté que X. SA n'avait pas respecté la procédure de consultation de la représentation des travailleurs qui doit être observée préalablement à un licenciement collectif. Ce jugement fut confirmé par le Tribunal cantonal puis, le 16 décembre 2003, par le Tribunal fédéral (arrêt 4C.263/2003; ATF 130 III 102).
Dès le 10 mars 2003, soixante-trois des travailleurs transférés à Y. SA ont ouvert action contre X. SA devant le Tribunal de prud'hommes. Leurs causes furent jointes et reportées devant la Cour civile

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du Tribunal cantonal, désormais compétente à raison de la valeur litigieuse; de plus, les actions furent intentées également à Y. SA, les deux défenderesses devant être condamnées solidairement. Chaque demandeur réclamait une indemnité pour licenciement abusif correspondant à deux mois de salaire, avec intérêts au taux de 5 % par an dès le 1er octobre 2002. En capital, leurs prétentions variaient de 3'754 fr. 85 à 15'166 fr. 65, de la plus modeste à la plus élevée; le total s'élevait à plus de 600'000 francs.
La Cour civile a donné gain de cause aux défenderesses. Elle a retenu que les congés étaient certes abusifs, que les demandeurs avaient toutefois, de manière tacite, accepté leur retrait, et que la continuation des rapports de travail éteignait l'obligation de leur verser des indemnités par suite de ces congés.
Le Tribunal fédéral a rejeté le recours des demandeurs.
 
Extrait des considérants:
Un contrat de travail de durée indéterminée peut être résilié conformément à l'art. 335 al. 1 CO. La résiliation est cependant abusive lorsqu'elle intervient dans l'une des situations énumérées à l'art. 336 al. 1 ou 2 CO, soit notamment, selon l'art. 336 al. 2 let. c CO, lorsque l'employeur procède à un licenciement collectif sans avoir consulté la représentation des travailleurs.
Selon l'art. 336a al. 1 et 2 CO, la partie qui a résilié abusivement doit à l'autre une indemnité à fixer par le juge et correspondant, en règle générale, à six mois de salaire au plus. L'art. 336a al. 3 CO limite à deux mois de salaire, au plus, l'indemnité due en cas de licenciement collectif sans consultation préalable de la représentation des travailleurs. C'est cette indemnité qui est présentement revendiquée par les demandeurs.
5. D'après l'art. 336b al. 1 et 2 CO, la partie qui envisage de réclamer une indemnité par suite d'un licenciement abusif doit faire opposition au congé auprès de l'autre partie, par écrit et au plus tard à la fin du délai de congé (al. 1). Si l'opposition est valable et que les parties ne

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s'entendent pas pour maintenir le rapport de travail, celle qui a reçu le congé peut faire valoir sa prétention; au besoin, et sous peine de péremption, elle doit agir en justice dans un délai de cent huitante jours (al. 2). Si, au contraire, les parties s'accordent et conviennent de maintenir le rapport de travail, la créance d'indemnité s'éteint. Dans les éventuelles négociations qui suivent l'opposition au congé, le travailleur n'a aucun devoir d'accepter une modification du contrat de travail; en revanche, le travailleur doit accepter un retrait du congé, en ce sens que même s'il refuse le retrait, celui-ci éteint la créance d'indemnité (ATF 123 III 246 consid. 4c p. 252).
La Cour civile retient que les demandeurs ont fait opposition aux congés, que X. SA leur a déclaré retirer ces mêmes congés et que les demandeurs ont tacitement accepté ce retrait en poursuivant les rapports de travail comme si l'employeuse ne les avait pas licenciés. D'après la Cour, les parties ont ainsi conclu des contrats ayant pour objet de tenir les congés pour non avenus, et il résulte de cette situation que les indemnités réclamées ne sont pas dues.
Ce jugement est exactement conforme à l'art. 336b al. 2 CO. Pour le contester, les demandeurs soutiennent que dans le cas particulier du licenciement abusif visé par les art. 336 al. 2 let. c CO et 336a al. 3 CO, l'indemnité est due même si les congés ne prennent pas effet et que les rapports de travail sont finalement poursuivis. Ils consacrent de longs développements à la nature et au but des indemnités prévues par l'art. 336a CO mais ces généralités n'apportent rien à l'appui de leur thèse. Celle-ci méconnaît que d'après son texte et sa place dans le système de la loi, l'art. 336b CO régit en principe tous les cas de licenciement abusif. Le Tribunal fédéral a d'ailleurs déjà admis, sans que cela ne prêtât à discussion, que le délai de péremption de l'art. 336b al. 2 CO doit être respecté aussi après un licenciement collectif sans consultation de la représentation des travailleurs (ATF 132 III 406 consid. 2 p. 408).
La règle prévoyant l'opposition au congé a pour but de favoriser la négociation entre les parties et, au delà, la continuation du rapport de travail plutôt que le paiement d'une indemnité (ULLIN STREIFF et ADRIAN VON KAENEL, Arbeitsvertrag, Praxiskommentar zu Art. 319-362 OR, 6e éd. 2006, p. 713 ch. 4). Cela coïncide avec l'objectif des art. 335f et 335g CO concernant la procédure préalable aux licenciements collectifs, en tant que celle-ci est destinée à favoriser la sauvegarde des emplois compromis (STREIFF/VON KAENEL, op. cit.,

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p. 629 ch. 2). Dans ces conditions, on ne voit guère ce qui pourrait justifier l'opinion ici défendue par les demandeurs. Ceux-ci soulignent vainement qu'en l'espèce, le retrait des congés n'est pas le fruit de négociations avec eux mais une échappatoire consécutive au contrat que l'employeuse a pu conclure avec Y. SA alors qu'elle bénéficiait d'un sursis concordataire. En effet, il est classique que des emplois menacés par les difficultés financières de l'employeur soient sauvegardés, si possible, au moyen d'un transfert de l'entreprise, ou d'une partie de l'entreprise, à un autre employeur.