BGE 106 V 177
 
40. Extrait de l'arrêt du 17 septembre 1980 dans la cause T. contre Société vaudoise et romande de secours mutuels et Tribunal des assurances du canton de Vaud
 
Regeste
Art. 12 KUVG und 23 Abs. 2 Vo III.
 
Extrait des considérants:
L'art. 20 des statuts de la Société vaudoise et romande de secours mutuels renvoie, s'agissant du droit aux prestations, de leur étendue, de leur versement et de la perte de ce droit, aux conditions d'assurance. L'art. 6 lit. d CGA dispose ainsi ce qui suit:
"Les prestations ne sont pas accordées ... pendant la durée d'une détention, d'un internement à caractère pénal ou de toute autre mesure similaire ordonnée par une autorité judiciaire ou administrative."
L'art. 1er al. 2 LAMA prévoit notamment que les caisses s'organisent à leur gré, en tant que la loi ne contient pas de disposition contraire. La liberté ainsi laissée aux caisses n'équivaut toutefois pas à un blanc-seing: elles doivent pratiquer l'assurance d'après le principe de la mutualité (art. 3 al. 3 LAMA, ATF 105 V 281), c'est-à-dire garantir aux membres les mêmes avantages sans autre distinction que celle qui résulte des cotisations fournies et en excluant toute idée de bénéfice, ou encore percevoir des cotisations équilibrées et, à situations identiques, égales (ATFA 1967 p. 11). Les caisses doivent aussi respecter le principe de la proportionnalité, notamment dans les sanctions qu'elles prennent (ATF 104 V 10, ATF 102 V 197, ATF 99 V 129, ATF 98 V 147; RJAM 1980 p. 20).
La pratique administrative a admis la possibilité pour les caisses d'introduire dans leurs statuts des clauses excluant l'octroi des prestations d'assurance pendant la détention d'un assuré. Dans un arrêt non publié Akyildiz du 16 mai 1974, le Tribunal fédéral des assurances, tout en relevant que cette exception au principe de l'obligation de verser les prestations n'était pas conforme à la conception actuelle de l'assurance sociale, a déclaré que de telles clauses n'étaient pas contraires au droit fédéral.
Appelée à nouveau à se prononcer sur ce point, la Cour de céans est aujourd'hui de l'avis que cette jurisprudence ne saurait être maintenue s'agissant de la détention préventive en tout cas. Appliquée dans toute sa rigueur, elle n'est en réalité pas compatible avec les principes jurisprudentiels relatifs à l'art. 1er al. 2 LAMA précités. Une dérogation à l'obligation de verser des prestations consacrée à l'art. 12 LAMA doit, au sens de ces principes, être objectivement justifiée. Or, dans la mesure où elle n'est pas réservée aux seuls cas où l'intéressé est médicalement pris en charge par l'Etat et soigné aux frais de ce dernier - ce qui est en général loin d'être la règle lors de la détention préventive - une telle exclusion n'est pas fondée. Serait-elle licite au regard de ce qui précède, qu'elle pourrait faire double emploi avec les dispositions relatives à la surindemnisation (art. 26 LAMA). Pareille restriction ne constitue qu'une sanction, qu'il n'incombe pas à une caisse-maladie de prendre, du moins à ce stade de la procédure pénale.
La présente modification de la jurisprudence est toutefois limitée au seul cas ici litigieux, savoir celui de la détention préventive. Il n'appartient pas à la Cour de céans de se prononcer dans la présente procédure sur la question de l'assurance-maladie en cas de détention punitive.