BGE 137 II 222
 
17. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour de droit public dans la cause Commission fédérale des maisons de jeu et Fédération suisse des casinos contre Société de la Loterie de la Suisse Romande (Loterie Romande), Swisslos, Interkantonale Landeslotterie et l'ensemble des Cantons (recours en matière de droit public)
 
2C_186/2010 / 2C_187/2010 du 18 janvier 2011
 
Regeste
Art. 106 BV; Art. 1 Abs. 2 LG; Art. 1 Abs. 2 SBG; Begriff der Lotterie; Spiel "Tactilo".
Begriff der Lotterie im Sinne von Art. 1 Abs. 2 LG; Erfordernis der "Planmässigkeit" (Bestätigung der Rechtsprechung, E. 7.1 und 7.2); aufgrund der festgestellten konkreten Umstände erfüllt das Gerät "Tactilo" die Voraussetzungen einer Lotterie (E. 7.3 und 7.4); die Frage, ob eine vergleichbare Gefahr der Abhängigkeit wie bei einem klassischen Geldspielautomaten besteht, ist nicht geeignet, seine juristische Qualifikation in Frage zu stellen, sondern bildet Gegenstand von vorzusehenden Sicherheits- und Überwachungsmassnahmen (E. 7.5).
 
Sachverhalt
Le 5 mars 1998, la Conférence Romande de la Loterie et des jeux a autorisé la Société de la Loterie de la Suisse Romande (ci-après: la Loterie Romande) à exploiter des distributeurs du jeu "Tactilo". Cette société a mis en service environ 400 appareils dans les différents cantons de la Suisse romande, qui donnent accès, au moyen d'un écran tactile, à des versions électroniques de billets à gratter, vendus également en version papier.
Depuis mai 2004, Swisslos Interkantonale Landeslotterie (ci-après: Swisslos) a exprimé l'intention d'exploiter des appareils du même type, désignés sous le terme de "Touchlot" en Suisse alémanique.
Le 10 juin 2004, la Commission fédérale des maisons de jeu (ci-après: la Commission fédérale) a ouvert une procédure, afin de déterminer si les distributeurs de jeux "Tactilo" et "Touchlot" étaient assujettis à la législation sur les loteries et les paris professionnels ou tombaient sous le coup des dispositions légales régissant les jeux de hasard et les maisons de jeu. La Fédération Suisse des Casinos (ci- après: la FSC) a été admise à participer à la procédure en qualité de partie.
Par décision du 21 décembre 2006, la Commission fédérale, qualifiant les distributeurs "Tactilo" de jeux de hasard au sens de la législation sur les maisons de jeu, a interdit leur exploitation - ainsi que celle des appareils présentant les mêmes caractéristiques techniques - à l'extérieur des maisons de jeu au bénéfice d'une concession.
La Loterie Romande, l'ensemble des cantons et Swisslos ont recouru auprès du Tribunal administratif fédéral contre la décision précitée.
Par arrêt du 18 janvier 2010, le Tribunal administratif fédéral a admis les recours, annulé la décision attaquée et constaté que les distributeurs "Tactilo" sont soumis à la législation fédérale sur les loteries et les paris professionnels.
La Commission fédérale des maisons de jeu et la FSC ont, chacun de leur côté, interjeté un recours en matière de droit public au Tribunal fédéral contre l'arrêt précité, en concluant à son annulation.
Par arrêt du 18 janvier 2011, le Tribunal fédéral, après avoir joint les causes, a pour l'essentiel rejeté les recours dans la mesure où ils étaient recevables.
(résumé)
 
Extrait des considérants:
 
Erwägung 6
6.1 Selon l'art. 106 Cst. (art. 35 de l'ancienne Constitution), la législation sur les jeux de hasard et les loteries relève de la compétence de la Confédération. Contrairement à ce que pourrait laisser croire le texte de cette disposition, les loteries sont des jeux de hasard (JEAN-FRANÇOIS AUBERT, Petit commentaire de la Constitution fédérale, Aubert/Mahon [éd.], 2003, n° 3 ad art. 106 Cst.), mais elles sont soumises à une réglementation particulière. Du reste, dès que la Confédération s'est mise à légiférer à ce sujet, soit au cours des années 1920, deux lois ont été élaborées, l'une sur les maisons de jeu et l'autre sur les loteries et les paris (AUBERT, op. cit., n° 5 ad art. 106 Cst.). Cette répartition de la matière a été maintenue jusqu'à présent (ATF 133 II 68 consid. 3.2 p. 71).
La première loi fédérale sur les maisons de jeu adoptée en 1929 a été révisée, le texte actuel, qui date de 1998 étant entré en vigueur le 1er avril 2000 (loi sur les maisons de jeu, LMJ; RS 935.52). Pour sa part, la loi originaire sur les loteries du 8 juin 1923 est toujours d'actualité (LLP; RS 935.51). Une révision a été projetée, mais elle a été suspendue provisoirement le 18 mai 2004. En contrepartie, les cantons, qui s'étaient engagés à remédier eux-mêmes aux carences constatées par la commission d'experts dans le domaine des loteries et des paris, ont adopté une convention intercantonale sur la surveillance, l'autorisation et la répartition du bénéfice de loteries et paris exploités sur le plan intercantonal ou sur l'ensemble de la Suisse (ci- après: CILP), entrée en vigueur le 1er juillet 2006 (cf. Message du 20 octobre 2010 concernant l'initiative populaire "Pour des jeux d'argent au service du bien commun", FF 2010 7266 ch. 2.1.3.2).
Il convient encore de relever qu'une initiative populaire "Pour des jeux d'argent au service du bien commun" visant à modifier et à compléter l'art. 106 Cst. a été valablement déposée le 10 septembre 2009. Le Conseil fédéral a élaboré un contre-projet direct à cette initiative qui pourrait déboucher sur une révision de la LLP et de la LMJ. Il y est en effet proposé de conférer à la Confédération une compétence législative étendue à tout le domaine des jeux d'argent - dans le respect des intérêts des cantons - et de créer un organe de coordination pour éviter les conflits de compétence entre la Confédération et les cantons. A cette fin, la délimitation des compétences serait facilitée par la suppression de la notion de "loteries" et du critère du plan qui caractérisent ces dernières (cf. Message précité du 20 octobre 2010, FF 2010 7290 ch. 4.2 et passim; voir aussi ATF 137 II 164 consid. 3.3 p. 170). Il en découle que, pour l'instant, la répartition de la matière repose encore sur la distinction initiale faite dans les années 1920 entre loteries et jeux de hasard (ATF 137 II 164 consid. 4.1 p. 170).
6.2 L'art. 1 al. 2 LMJ prévoit que la loi sur les maisons de jeu "ne s'applique pas aux loteries et aux paris professionnels, ceux-ci étant régis par la loi fédérale du 8 juin 1923 les concernant." Les versions allemande et italienne de cette disposition sont rédigées quelque peu différemment, dans la mesure où elles ne font que réserver l'application de la LLP en ces termes: "Vorbehalten bleiben die Vorschriften des Bundesgesetzes vom 8. Juni 1923 betreffend die Lotterien und die gewerbsmässigen Wetten." - "Sono fatte salve le disposizioni della legge federale dell'8 giugno 1923 concernente le lotterie e le scommesse professionalmente organizzate." Cette réserve ne saurait, à elle seule, avoir pour effet de restreindre la portée de la législation sur les loteries, pour autant évidemment qu'un jeu tombe dans son champ d'application. L'art. 1 al. 2 LMJ indique seulement, comme l'a rappelé récemment la jurisprudence, que la LLP est une lex specialis par rapport à la LMJ, qui fait figure de lex generalis (cf. ATF 136 II 291 consid. 3.1 p. 293; ATF 133 II 68 consid. 3.2 p. 71).
6.3 Encore faut-il se demander si, comme l'affirment les recourantes, les loteries exploitées sur la base d'un support électronique, par le biais d'un réseau de télécommunication, ne sont pas, en raison du support utilisé, d'emblée exclues du champ d'application de la LLP. A cet égard, celles-ci perdent de vue que la volonté exprimée par le Conseil fédéral d'inclure, lors de la révision de la législation sur les maisons de jeu de 1998, dans le champ d'application de la nouvelle loi tous les appareils à sous, y compris les appareils servant aux jeux de loteries qui présentent une surface électronique sur laquelle le joueur peut se livrer à un jeu de loterie (cf. Message du 26 février 1997 relatif à la loi fédérale sur les jeux de hasard et les maisons de jeu, FF 1997 III 137, 163 ch. 22), n'a pas été confirmée par le législateur. Les parlementaires ont estimé qu'une telle modification devait être envisagée dans le cadre de la révision de la LLP (BO 1998 CN 1943 ss), car elle constituait une entorse à l'art. 1 al. 2 LMJ et n'avait pas sa place dans la législation sur les maisons de jeu (BO 1998 CE 1173). Tant que cette loi n'a pas été révisée et que la question des jeux de hasard sur support électronique n'a pas été expressément réglée et ce de manière unifiée (cf. supra consid. 6.1 in fine), il appartient certes aux tribunaux fédéraux de se prononcer sur la soumission de tels jeux à la LMJ ou à la LLP, comme l'a encore rappelé récemment le Conseil fédéral (Message précité du 20 octobre 2010, FF 2010, 7271 ch. 2.1.7), mais en fonction du droit actuel. Lors de cette analyse, il ne revient en effet pas au Tribunal fédéral de tenir compte des modifications non retenues par les Chambres lors de la révision de la LMJ ni d'anticiper une éventuelle nouvelle répartition de la matière entre la LLP et la LMJ, qui découlerait soit de l'adoption de l'initiative populaire précitée, soit du contre-projet direct du Conseil fédéral (cf. supra consid. 6.1 et la référence à l' ATF 137 II 164 consid. 4.1 p. 170).
Il se trouve que, dans le droit positif, ni la LMJ ni la LLP ne définissent leur champ d'application respectif en fonction du support technique utilisé pour transposer le jeu de hasard. Le critère essentiel réside dans l'existence d'une loterie, dont la définition légale laisse place à une interprétation dynamique. C'est du reste grâce à ce critère évolutif que la LLP, qui date de 1923, régit aujourd'hui encore les jeux de loteries dont la plupart se présentent dans des formes qui, sur le plan technique, étaient inexistantes au moment de son élaboration (cf. CLAUDE ROUILLER, Jeux de loteries et paris professionnels, RDAF 2004 I p. 429 ss, 438). Par conséquent, dans leurs versions actuelles, on ne peut déduire ni de la LMJ ni de la LLP l'existence, à propos de la qualification juridique des jeux de hasard sur support électronique, d'une véritable lacune qu'il faudrait combler en appliquant à ce type de jeux la législation générale, soit la loi sur les maisons de jeu. L'interprétation préconisée par les recourantes ne peut donc être suivie.
7.1 Selon l'art. 1 al. 2 LLP, est réputée loterie toute opération qui offre, en échange d'un versement ou lors de la conclusion d'un contrat, la chance de réaliser un avantage matériel consistant en un lot, l'acquisition, l'importance ou la nature de ce lot étant subordonnées, d'après un plan, au hasard d'un tirage de titres ou de numéros ou de quelque procédé analogue. La jurisprudence constante, rendue tant en matière de droit pénal que de droit administratif, considère que, pour qu'il y ait loterie au sens de l'art. 1 al. 2 LLP, il faut que les quatre éléments constitutifs suivants soient réunis: 1° le versement d'une mise ou la conclusion d'un contrat; 2° la chance de réaliser un avantage matériel, c'est-à-dire un gain; 3° l'intervention du hasard, qui détermine, d'une part, si un gain est acquis et qui en fixe, d'autre part, l'importance ou la nature; enfin, 4° la planification (ATF 133 II 68 consid. 7.2 p. 75; ATF 132 IV 76 consid. 3.2 et 4.2.1 p. 80 s.; ATF 125 IV 213 consid. 1a p. 215; ATF 85 I 168 consid. 5 p. 176).
La condition la plus délicate à apprécier est celle de la planification. C'est aussi la plus importante, car c'est avant tout cet élément qui permet de distinguer un jeu de hasard d'une loterie (cf. ATF 137 II 164 consid. 3.1 p. 168 et la référence à l'arrêt 6S.50/2005 du 26 octobre 2005 consid. 3; LEONOR PERRÉARD, Monopole des loteries et paris en Suisse, Cahier de l'IDHEAP n° 238, 2008, p. 16; ROUILLER, op. cit., p. 434; MARKUS SCHOTT, Les jeux sont-ils faits-, auf dem Weg zu einer kohärenten Regulierung des Glücksspiels in der Schweiz, in Risiko und Recht, Festgabe zum Schweizerischen Juristentag, 2004, p. 495 ss, 502). Selon une pratique établie, la planification suppose l'existence d'un plan qui, d'avance, mesure exactement les gains en jeu attribués par l'organisateur, de sorte que ce dernier exclut son propre risque. Tel est le cas lorsque l'organisateur pose une limite au montant des sommes d'argent ou des marchandises offertes (lots clairement définis). En revanche, si l'organisateur promet un prix à tout participant sans pouvoir déterminer à l'avance leur nombre, il prend le risque d'avoir à verser des sommes importantes sans pouvoir les prévoir. Dans ce cas, la planification fait défaut. En principe, la détermination du risque sur la base d'un calcul de probabilités n'est pas suffisante pour admettre l'existence d'une planification (ATF 137 II 164 consid. 4.2.1 et 4.2.2 p. 171 s.; ATF 133 II 68 consid. 7.2 p. 75 et les références). Le plan de loterie joue un rôle protecteur. Pour l'organisateur tout d'abord, dans la mesure où il supprime pratiquement tout risque de jeu; celui-ci n'assume qu'un risque commercial s'il ne place pas tous ses billets, surtout si seuls les billets gagnants sont vendus. Toutefois, le chiffre d'affaires et la perte éventuelle sont circonscrits par le plan (PERRÉARD, op. cit., p. 16 s.; ROUILLER, op. cit., p. 434). Ce dernier protège aussi les joueurs, qui ne jouent pas individuellement contre l'organisateur, mais les uns contre les autres; chaque joueur est en outre conscient à l'avance que le montant total des gains est inférieur au montant total des mises; enfin, le plan permet de garantir la sincérité et la loyauté du jeu (ATF 137 II 164 consid. 4.3 p. 172; PERRÉARD, op. cit., p. 17; ROUILLER, op. cit., p. 434).
Une telle modification ne paraît pas opportune. D'une part, elle reviendrait à changer sans véritable motif, des critères de distinction certes imparfaits, mais qui ont néanmoins permis de délimiter la matière tant sur le plan pénal qu'administratif durant des années. D'autre part et surtout, comme déjà indiqué en relation avec la distinction reposant sur le support utilisé (cf. supra consid. 6.3), des travaux législatifs sont en cours tendant à répartir différemment les matières entre la LMJ et la LLP. Dans ce contexte, on voit mal que le Tribunal fédéral, au travers d'une modification des critères de distinction de la législation actuelle, anticipe une révision qui devrait intervenir dans un proche avenir en changeant la répartition des compétences entre les cantons et la Confédération (cf. ATF 137 II 164 consid. 4.4 p. 173). C'est donc sur la base des conditions et de la notion de planification telles qu'elles ressortent de la jurisprudence établie (cf. supra consid. 7.1) que la qualification du jeu "Tactilo" doit être examinée.
7.3 En l'espèce, il n'est pas contesté que le jeu "Tactilo" réunit les trois première conditions pour être qualifié de jeu de hasard. Pour y jouer, il faut acheter un billet; le joueur obtient ainsi une chance de réaliser un gain patrimonial, qui dépend d'un tirage au sort. Quant à la planification, il ressort des faits constatés par le Tribunal administratif fédéral, d'une manière qui lie la Cour de céans (art. 105 al. 2 LTF) que les jeux sont organisés sur la base de plans qui se révèlent identiques à ceux des loteries à prétirage sur papier. Ainsi, tous les billets émis lors d'un jeu sont prédéfinis, de même que tous ceux permettant la réalisation d'un gain. Une fois acheté, un billet est retiré du système et ne peut plus être acquis par un autre joueur. Le jeu se termine nécessairement avec la vente de tous les billets ou par son interruption par l'organisateur, faute d'un nombre suffisant de billets restants. Si une nouvelle émission est mise en place, celle-ci se conforme à un nouveau plan. Le plan des jeux indique en outre le prix de chacun des billets mis en vente, leur nombre et la liste complète des billets gagnants avec les gains correspondants. Le tirage a lieu avant la distribution du jeu. Le risque que court l'organisateur est donc limité par le plan et, du point de vue des joueurs, le montant des gains étant défini à l'avance et inférieur à la somme des mises attendues, ceux-ci sont conscients que, même en achetant tous les billets disponibles, leur gain resterait inférieur à la mise totale qu'ils auront déboursée. Les joueurs jouent les uns contre les autres et non contre l'organisateur, dans la mesure où ils savent que chaque lot gagné par l'un ne pourra pas l'être par un autre. La détermination du risque diffère des règles de probabilité des pures machines à sous, dès lors que celles-ci ne visent qu'à réduire le risque des exploitants et que les chances de chaque joueur sont les mêmes pour chaque mise, ce qui n'est pas le cas du jeu "Tactilo". Il est vrai que la machine offre au joueur la possibilité de choisir un billet et de le jouer plusieurs fois (au maximum 5), ce qui permet d'accroître son gain si le billet est gagnant (fonction "BET"). Selon les constatations de l'arrêt attaqué, cette fonction n'influe toutefois ni sur la masse totale des gains, ni sur le nombre total des billets reçus, de sorte qu'elle ne remet pas en cause le plan. En outre, des modérateurs sont mis en place. Ainsi, les billets de banque ne peuvent être utilisés; la mise maximale est de 5 fr.; lorsqu'un joueur dépasse un crédit de plus de 50 fr., le jeu s'interrompt; la machine imprime des tickets de paiement à encaisser et les gains de plus de 50 fr. ne peuvent être recouvrés qu'après l'écoulement de 48 heures.
Compte tenu de ces éléments, on ne peut faire grief au Tribunal administratif fédéral d'avoir admis que les jeux "Tactilo" répondaient à l'exigence de la planification et que, partant, ils entraient dans la définition d'une loterie au sens de l'art. 1 al. 2 LPP, même s'il est indéniable que le support électronique utilisé rend la distinction avec les machines à sous que l'on trouve dans les casinos moins évidente qu'en présence d'une loterie sur tirage papier (cf. ATF 137 II 164 consid. 3.2.1 p. 168; PERRÉARD, op. cit., p. 22 s.).
7.4 Lorsque les recourantes reprochent au Tribunal administratif d'avoir retenu que, pour les joueurs, les appareils "Tactilo" sont reconnaissables comme jeux de loterie, elles perdent de vue que savoir ce qu'une personne sait ou comprend relève des constatations de fait (ATF 132 III 122 consid. 4.5.3 p. 136; ATF 124 III 182 consid. 3 p. 183 s.), qui lient le Tribunal fédéral (art. 105 al. 1 LTF), à moins que les faits aient été établis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit (cf. art. 105 al. 2 LTF), soit arbitrairement (arrêt 2C_239/2010 du 30 juin 2010 consid. 2.1). Or, sur ce point, les recourantes ne font qu'opposer leur propre appréciation à celle de l'autorité inférieure, ce qui n'est pas suffisant. Il ne sera donc pas entré plus avant sur ces critiques appellatoires.
7.5 Il n'est pas contesté que le jeu "Tactilo", dès lors qu'il a pour support une machine électronique, présente des différences par rapport à une loterie dont les billets sont émis sur papier. Ces différences, tels la vitesse de jeu, le potentiel de pertes ou le taux de redistribution, sont inhérentes au support utilisé, tout en étant tempérées par les modérateurs mis en place. Comme l'a du reste relevé pertinemment le Tribunal administratif fédéral, le point de savoir si ces caractéristiques représentent, pour le joueur, un risque d'addiction comparable à celui d'une machine à sous traditionnelle, n'est pas propre à remettre en cause la qualification juridique du jeu "Tactilo", mais relève des mesures de sécurité et de surveillance propres à de tels jeux. De telles mesures sont non seulement prévues partiellement dans la LLP (cf. art. 7 ss LLP), mais les cantons peuvent aussi adopter des législations complémentaires à cet égard (cf. ATF 135 II 338 consid. 3.2.1 p. 346 s.), ce qu'ils ont fait au travers de la Convention intercantonale entrée en vigueur en 2006 (CILP; cf. supra consid. 6.1). Les mesures prises par les cantons ont du reste fait l'objet d'une évaluation par la Confédération, qui a retenu que ceux-ci avaient remédié à un grand nombre des carences constatées dans le domaine des loteries et paris (Message précité du 20 octobre 2010, FF 2010 7270 ch. 2.1.6). Le fait que les machines "Tactilo" puissent comporter un risque supérieur, pour les joueurs, à une loterie sur tirage papier n'est donc, en vertu des critères figurant dans le droit en vigueur, pas déterminant pour les qualifier de jeux de hasard et prohiber leur installation et leur exploitation en dehors des maisons de jeu titulaires d'une concession. On ne voit pas qu'en adoptant ce raisonnement le Tribunal administratif fédéral aurait violé l'art. 106 al. 2 Cst. ou l'art. 2 LMJ, contrairement à ce qu'affirment les recourantes.
Les critiques des recourantes concernant le refus du Tribunal administratif fédéral de soumettre les distributeurs "Tactilo" à la LMJ sont donc infondées.