BGE 119 II 271
 
54. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour civile du 15 mars 1993 dans la cause G. contre Fédération Equestre Internationale et Tribunal Arbitral du Sport (recours de droit public)
 
Regeste
Rechtliche Natur von Entscheiden des Schiedsgerichts für Sport.
2. Die Sperre für internationale Pferdesportprüfungen und der Entzug von durch einen professionellen Reiter gewonnenen Barpreisen von gewisser Bedeutung stellen eigentliche statutarische Strafen dar, die einer richterlichen Kontrolle zugänglich sind (E. 3c).
 
Sachverhalt
A.- G. est un cavalier professionnel qui fait partie de l'équipe allemande de saut d'obstacles. Il est membre du club hippique de Buchloe et titulaire d'une licence pour les concours nationaux et internationaux. Lors du renouvellement annuel de sa licence, G. s'est engagé chaque fois à se soumettre à la réglementation de la Fédération équestre allemande, laquelle renvoie aux directives édictées par la Fédération Equestre Internationale pour les concours internationaux.
La Fédération Equestre Internationale (FEI), qui a son siège à Lausanne, est une association composée uniquement de Fédérations Nationales (FN). Elle s'occupe, notamment, des concours internationaux et établit les règlements régissant le déroulement des rencontres internationales. Dans l'intérêt de la présente affaire, il sied de citer les dispositions suivantes de ses statuts (18e édition, en vigueur au 21 mars 1991):
"051 - PRÉAMBULE
1. La FEI, dont le siège est en Suisse, est une personne morale régie par le Code Civil Suisse, Livre premier, Titre 11, Chapitre III. Pour tous les litiges relevant du droit civil, la FEI relève de la Loi Suisse. Toute action civile (litige) doit être portée devant les Tribunaux Suisses de la ville où la FEI a son siège.
...
4. Toutes les Personnes Privées et Organes, Fédérations Nationales, Comités Organisateurs, Officiels, Propriétaires de Chevaux, Personnes Responsables et Concurrents impliqués dans quelque activité que ce soit sous la juridiction des Statuts et des Règlements s'engagent à reconnaître l'autorité et les responsabilités des Officiels, des Jurys de Terrain, des Commissions d'appel, de la Commission Juridique et du TAS dans l'exercice de leurs fonctions dans le cadre des Statuts et des Règlements, et s'engagent à ne recourir à aucune autre procédure légale dans des affaires appartenant au domaine de responsabilités de ces organes.
...
6. Dans le but de veiller à ce que ces responsabilités soient remplies selon les normes les plus élevées de justice et d'équité, une Commission Juridique, une Cour d'Appel et une procédure d'arbitrage sont instaurées.
6.1. Une Commission Juridique pour prendre des décisions dans tous les cas n'entrant pas dans le domaine de compétence de tout autre organe institué conformément aux Statuts et aux Règlements.
6.2. Le Tribunal Arbitral du Sport (TAS) - créé par le C.I.O. - pour trancher tout appel contre les décisions prises par un organe compétent institué conformément aux Statuts et aux Règlements.
6.3. Une Procédure d'Arbitrage (Art. 057).
Article 052 - COMMISSION JURIDIQUE
...
4. La Commission Juridique doit prendre des décisions pour tous les cas ne faisant pas partie du domaine de compétences du Jury de Terrain et de la Commission d'Appel d'un Concours Equestre International, qui lui sont soumis par l'intermédiaire du Secrétaire Général. Ces cas peuvent être les suivants:
4.1. Cas d'infraction aux Statuts et aux Règlements.
4.2. Cas de violation des principes communs de comportement et d'équité et des normes communément admises régissant la pratique de sport.
4.3. Cas de désaccord sur l'interprétation des Statuts et des Règlements.
...
Article 053 - TRIBUNAL ARBITRAL DU SPORT (TAS)
1. Le TAS doit instruire et juger tous les appels recevables qui lui sont soumis par le Secrétaire Général contre des décisions rendues par la Commission d'Appel en première instance, ainsi que par la Commission Juridique (052.4). Les parties appelantes s'engagent à se conformer aux Statuts et Règlements du TAS et à exécuter de bonne foi la sentence à intervenir.
...
6. Il ne peut être fait appel à l'encontre d'une décision de la Cour d'Appel, sauf en cas d'expulsion d'une Fédération Nationale, qui doit être confirmée par l'Assemblée Générale.
Article 057 - ARBITRAGE
1. Tout litige entre des Fédérations Nationales, ou entre des Fédérations Nationales et le Bureau ou tout autre organe de la FEI, et que la Commission Juridique considère comme sortant du cadre des Statuts, du Règlement Général, du Règlement Vétérinaire, des Règlements Spéciaux ou des Règlements Particuliers doit être réglé définitivement par une Cour d'Arbitrage instaurée conformément aux Statuts et au Règlement du "TRIBUNAL ARBITRAL DU SPORT".
2. Les parties doivent se conformer aux Statuts et Règlements susmentionnés et exécuter de bonne foi la sentence arbitrale rendue.
3. Le Tribunal Arbitral doit rendre une sentence arbitrale définitive. Les parties doivent renoncer à leur droit d'appel, conformément à l'article 192 de la Loi Fédérale Suisse sur le Droit International Privé (LDIP). Les parties doivent accepter que le Tribunal Arbitral siège à Lausanne (Suisse) et doivent se soumettre au droit suisse."
Dans un Règlement Général (RG) du 23 juillet 1990, la FEI a établi la procédure à suivre pour vider les litiges et déterminé, en particulier, la compétence de sa Commission Juridique (art. 168) et celle du TAS (art. 169), de même que les conditions et modalités de l'appel (art. 173). L'annexe F audit règlement contient le Statut et le Règlement du TAS, où il n'est pas fait de distinction entre la compétence de jugement en première instance et en appel.
B.- G. a participé avec le cheval "Life is Life" au concours international de saut d'obstacles (CSIO) d'Aix-la-Chapelle, qui s'est déroulé du 16 au 19 juin 1991. Il y a gagné des prix en espèces représentant un total de quelque 40'000 marks. A l'occasion de ce concours, le cheval en question a été désigné pour un contrôle des médications, ce qui a entraîné le prélèvement d'un double échantillon d'urine et de sang. L'analyse du premier échantillon d'urine, effectuée par le Horseracing Forensic Laboratory Ltd, à Newmarket (GB), a révélé la présence d'un produit interdit, l'isoxsuprine. A la demande de la Fédération équestre allemande, une analyse du second échantillon d'urine a été faite en présence du Professeur Donike, de Cologne; elle a conduit au même résultat que la première.
Par décision du 5 décembre 1991, la Commission Juridique de la FEI, considérant que l'isoxsuprine entrait dans la catégorie des produits interdits par le Règlement Vétérinaire de la FEI, a prononcé la disqualification du cavalier G. et de son cheval "Life is Life" pour toutes les épreuves du CSIO d'Aix-la-Chapelle et le retrait des prix en espèces gagnés à cette occasion; elle a, en outre, suspendu le cavalier de compétitions équestres internationales pour trois mois, lui a infligé une amende de 1'500 francs et a mis à sa charge les frais de la procédure.
Statuant le 10 septembre 1992, sur appel de G., le TAS a admis partiellement cet appel, en ce sens qu'il a confirmé la disqualification du cavalier et de son cheval, mais a ramené la mesure de suspension à un mois et l'amende à 1'000 francs. Quant aux frais de la cause, il les a mis pour 2/3 à la charge de l'appelant et pour 1/3 à celle de la FEI.
C.- G. forme un recours de droit public au sens des art. 191 al. 1 LDIP et 85 let. c OJ. Il conclut à l'annulation des décisions rendues le 5 décembre 1991 par la FEI et le 10 septembre 1992 par le TAS. A titre subsidiaire, il ne demande l'annulation que de ce dernier prononcé et la fixation d'un délai de 30 jours pour l'ouverture d'une action ordinaire devant le tribunal étatique compétent.
Par décision présidentielle du 23 septembre 1992, une requête du recourant tendant à l'octroi de l'effet suspensif a été rejetée.
L'échange d'écritures a été limité à la question de la recevabilité du recours. Dans leurs réponses respectives, la FEI et le TAS ont soutenu tous deux la thèse de la recevabilité du recours en tant qu'il vise le prononcé du TAS du 10 septembre 1992, à l'exclusion de la décision de la FEI du 5 décembre 1991.
 
Extrait des considérants:
a) Le TAS a son siège à Lausanne et le recourant est domicilié en Allemagne. La condition du rattachement international, posée à l'art. 176 al. 1 LDIP, est ainsi réalisée en l'espèce.
b) La sentence arbitrale, au sens de l'art. 189 LDIP, est un jugement rendu, sur la base d'une convention d'arbitrage, par un tribunal non étatique auquel les parties ont confié le soin de trancher une cause de nature patrimoniale (art. 177 al. 1 LDIP) revêtant un caractère international (art. 176 al. 1 LDIP). Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, une véritable sentence, assimilable au jugement d'un tribunal étatique, suppose que le tribunal arbitral qui la rend offre des garanties suffisantes d'impartialité et d'indépendance, telles qu'elles découlent de l'art. 58 Cst. (ATF 117 Ia 168 consid. 5a, ATF 107 Ia 158 consid. 2b). A ce défaut, elle ne saurait constituer un jugement civil exécutoire dans toute la Suisse (art. 61 Cst.; ATF 97 I 489 consid. 1). Dans ce dernier arrêt, le Tribunal fédéral, appliquant ces principes, a considéré qu'un tribunal arbitral qui était l'organe d'une association ayant qualité de partie au procès ne présentait pas des garanties suffisantes d'indépendance. Les décisions prises par de tels organes ne constituent, en effet, qu'une simple manifestation de volonté émise par l'association intéressée; il s'agit d'actes relevant de la gestion et non d'actes judiciaires. Aussi n'est-il pas possible de les considérer comme des sentences arbitrales, tant au regard du Concordat sur l'arbitrage (CIA) que du chapitre 12 de la LDIP. Pour cette raison, semblables décisions ne peuvent être attaquées ni par la voie du recours concordataire (art. 36 CIA), ni par celle du recours prévu à l'art. 190 LDIP (HEINI, Die gerichtliche Überprüfung von Vereinsstrafen, in: Freiheit und Verantwortung im Recht, FS Arthur Meier-Hayoz, p. 223 ss; JOLIDON, Commentaire du Concordat suisse sur l'arbitrage, Introduction n. 68, et n. 235 ad art. 1; LALIVE/POUDRET/REYMOND, Le droit de l'arbitrage interne et international en Suisse, n. 1.2 ad art. 1 CIA et n. 2 ad art. 176 LDIP; CORBAT, Les peines statutaires, thèse Fribourg 1974, p. 130 ss). De fait, rendre une sentence dans sa propre affaire n'est tout simplement pas compatible avec la garantie d'indépendance (ATF 52 I 75; HEINI, op.cit., p. 228; GULDENER, Schweizerisches Zivilprozessrecht, 3e éd., p. 604), de sorte qu'il importe peu, à cet égard, de savoir si l'indépendance personnelle des membres du tribunal arbitral appelé à trancher le différend pourrait être sauvegardée par le biais des règles sur la récusation (d'un autre avis: JOLIDON, Arbitrage et sport, in: Recht und Wirtschaft heute, FS Max Kummer, p. 633 ss, 643/644).
Les principes susmentionnés s'appliquent également dans l'hypothèse où celui qui est touché par le prononcé de l'organe d'une association ne fait partie qu'indirectement de celle-ci, autrement dit lorsque seules des associations ou d'autres personnes morales peuvent devenir membres, en tant que sections, de l'association faîtière. Le membre indirect peut, lui aussi, attaquer les décisions de l'association, conformément à l'art. 75 CC, ou faire examiner par le juge les sanctions (peines statutaires) qui lui ont été infligées (RIEMER, Commentaire bernois ad art. 60 ss CC, Systematischer Teil n. 511, 515 et 529, et n. 18 ad art. 75 CC). Dans le cas des sanctions, cette protection juridique doit être accordée même à la personne qui n'est pas membre de l'association, si elle s'est soumise à la réglementation établie par cette dernière, par exemple lorsque pareille démarche est une condition à remplir pour pouvoir participer à une manifestation organisée par l'association. Là encore, la décision attaquée doit être susceptible d'un contrôle juridique libre et indépendant, contrôle qui peut être confié à un tribunal arbitral pour autant que ce tribunal constitue une véritable autorité judiciaire et non pas le simple organe de l'association intéressée au sort du litige (RIEMER, n. 18 et 85 ad art. 75 CC; HEINI, op.cit., p. 229; le même, Das Schweizerische Vereinsrecht, p. 55/56 et 60 ss; KUMMER, Spielregel und Rechtsregel, p. 48 ss; SCHERRER, Rechtsfragen des organisierten Sportlebens in der Schweiz, thèse Zurich 1982, p. 150 ss; BODMER, Vereinsstrafe und Verbandsgerichtsbarkeit, thèse Saint-Gall 1988, p. 204 ss; SCHWAB/WALTER, Schiedsgerichtsbarkeit, 4e éd., p. 274 ss).
Comme on l'a indiqué plus haut, le recourant a pris l'engagement, lors du renouvellement annuel de sa licence, de respecter la réglementation établie par la Fédération équestre allemande; ce faisant, il s'est soumis indirectement aux directives édictées par la Fédération Equestre Internationale, en particulier à la procédure juridique aménagée par cette association pour contester les sanctions infligées par elle. Conformément à ces règles de procédure, après avoir interjeté appel contre la décision de la Commission Juridique, il a conclu avec la FEI une convention d'arbitrage complémentaire dans laquelle il a admis la compétence du TAS pour statuer sur son appel. Dès lors, au vu de ce qui précède, le point de savoir si la décision présentement attaquée est une sentence arbitrale pouvant être déférée au Tribunal fédéral dépend de la situation juridique du TAS par rapport à la FEI.
L'idée de la création d'un tribunal arbitral qui se saisirait d'un contentieux directement ou indirectement lié au sport a été lancée en 1983 par Juan Antonio Samaranch, Président du Comité Olympique International (CIO). Le TAS est une institution d'arbitrage autonome au plan de l'organisation, mais sans personnalité juridique, qui a son siège à Lausanne. Disposant d'un Statut, entré en vigueur le 30 juin 1984, qui lui a été donné par le CIO et qui a été complété par un Règlement adopté à la même date, il se prononce, par une sentence arbitrale, sur les cas qui lui sont soumis par les parties et portant sur des droits dont elles ont la libre disposition (art. 3). Ratione materiae, il est compétent pour connaître des litiges à caractère privé, nés à l'occasion de la pratique ou du développement du sport (art. 4). Le TAS se compose de soixante membres au plus, choisis, pour une période de quatre ans renouvelable, parmi les personnes ayant une formation juridique et une compétence reconnue en matière de sport (art. 6). Le CIO, les Fédérations Internationales (F.I.), les Comités Nationaux Olympiques (CNO) désignent chacun quinze membres en leur sein ou en dehors d'eux, tandis que les quinze derniers membres, choisis par le Président du CIO, le sont obligatoirement en dehors du CIO, des F.I. et des CNO et de l'Association qui les regroupe (art. 7). Avant d'entrer en fonction, tous les membres du TAS souscrivent une déclaration solennelle individuelle dans les termes suivants (art. 10):
"Je déclare solennellement en tout honneur et en toute conscience que je remplirai bien et fidèlement mes fonctions d'arbitre, que je garderai le secret des délibérations et des votes et que j'agirai en toute objectivité et en toute indépendance."
Pour chaque affaire, le TAS siège dans une "Formation" comprenant un ou trois arbitres choisis obligatoirement parmi ses membres (art. 11). Chacune des deux parties désigne un arbitre et les deux parties se mettent ensuite d'accord pour la désignation du troisième arbitre, qui assurera la présidence de la Formation. A défaut d'accord, le troisième arbitre est désigné par le Président du Tribunal fédéral de la Confédération suisse. Si les parties choisissent d'avoir une Formation à un arbitre, elles désignent celui-ci d'un commun accord (art. 12). Les arbitres peuvent être récusés par les parties en raison notamment des liens les unissant à l'une d'elles ou parce qu'ils se sont déjà occupés du différend à un autre titre (art. 16). Le TAS dispose d'une organisation judiciaire qui lui est propre et qui se caractérise par l'existence d'une instruction écrite ou orale, d'une procédure ordinaire ou sommaire (art. 27 ss). Les délibérations de la Formation ont lieu à huis clos (art. 58 al. 1). La sentence du TAS est motivée et notifiée aux parties (art. 61 et 63). Elle peut faire l'objet d'un recours en interprétation (art. 64) et - à condition qu'elle ait été prévue dans la convention d'arbitrage - d'une demande en révision fondée sur la survenance de faits nouveaux (art. 66 ss). Les frais de fonctionnement du TAS sont supportés par le CIO (art. 71). Dans les affaires à caractère pécuniaire, les parties contribuent aux frais nécessités par la solution du litige dans une proportion établie par un accord passé entre elles et le président de la Formation (art. 72; pour une description générale de cette institution d'arbitrage, cf. MBAYE, Une nouvelle institution d'arbitrage: Le Tribunal Arbitral du Sport, in: Annuaire Français de Droit International, 1984, p. 409 ss, publié aussi in: COLLOMB, Sport, droit et relations internationales, p. 95 ss).
Les dispositions régissant la conduite du procès devant le TAS visent clairement la procédure dite initiale ou originaire, à l'instar de ce que prévoit l'art. 057 des statuts de la FEI. Cependant, de nombreuses associations sportives internationales ont encore fait usage de la possibilité qui leur était offerte d'instituer le TAS comme instance de recours chargée d'examiner la validité des sanctions prononcées par leurs organes. Tel est le cas de la FEI qui a ouvert la voie de l'appel au TAS contre les décisions rendues par sa Commission Juridique notamment (art. 053). Ce moyen de droit est censé exclure le recours à toute autre procédure légale devant le juge étatique (art. 051 al. 4; sur cette question, cf. SCHWAAR, Nouvelles du Tribunal Arbitral du Sport, in: Bulletin ASA, 1989, p. 369 ss). De l'avis de ses fondateurs et de ses représentants, le TAS est un véritable tribunal arbitral indépendant des parties, qui exerce librement un contrôle juridique complet sur les décisions des associations qui lui sont déférées, en particulier sur les peines statutaires qui ont été infligées à l'appelant (MBAYE, op.cit., p. 424; le même, Sport et arbitrage, in: Bulletin ASA, 1990, p. 114 ss, 130; le même, in: Tribunal Arbitral du Sport, p. 33; SCHWAAR, Le tribunal arbitral du sport, in: Pratique juridique actuelle (PJA), 1992, p. 396 ss; le même, in: Bulletin ASA, 1990, p. 144; le même, Tribunal Arbitral du Sport, in: La législation sportive en Europe: évolution et harmonisation, 1er Séminaire juridique, Moscou 1991, p. 82/83; le même, in: Bulletin ASA, 1991, p. 201 ss; CARRARD, Au nom de la loi du sport, in: Revue Olympique, 1992, p. 614 ss, cet auteur préconisant toutefois une indépendance plus marquée entre le TAS et le CIO). Autant que l'on puisse en juger, cet avis fait apparemment l'unanimité dans la doctrine (SAMUEL/GEARHART, Sporting Arbitration and the International Olympic Committee's Court of Arbitration for Sport, in: Journal of International Arbitration, 1989, p. 39 ss; NAFZIGER, International sports law: a replay of characteristics and trends, in: The American Journal of International Law, 1992, p. 489 ss, 508; NETZLE, The Court of Arbitration for Sport, in: The Entertainment and Sports Lawyer, 1992, p. 1 ss; OSWALD, Le règlement des litiges et la répression des comportements illicites dans le domaine sportif, in: Mélanges en l'honneur de Jacques-Michel Grossen, p. 67 ss, 80/81).
Un tel avis peut être partagé - non sans hésitation du reste - en tant du moins qu'il a trait aux procédures conduites devant le TAS dans lesquelles le CIO n'apparaît pas comme partie. Il en va ainsi en l'espèce. Le TAS n'est pas un organe de la FEI; il ne reçoit pas d'instructions de cette association et conserve une autonomie personnelle suffisante par rapport à celle-ci dans la mesure où elle ne met à sa disposition que trois arbitres sur les soixante membres au plus dont il se compose (art. 053 ch. 3 des statuts de la FEI; sous cet angle, le TAS se distingue en tout cas du Tribunal sportif de l'Association suisse de football (ASF), que le Tribunal cantonal vaudois a refusé de considérer comme un véritable tribunal arbitral, in: JdT 1988 III 5ss). Par ailleurs, l'art. 7 du Statut du TAS impose le choix de quinze membres au moins en dehors du CIO, des F.I. et des CNO et de l'Association qui les regroupe, offrant ainsi aux parties la possibilité de désigner comme arbitre ou surarbitre l'une des quinze personnes ne dépendant ni de la FEI ni de l'une de ses sections. La garantie d'indépendance des arbitres dans un cas concret est, de surcroît, assurée par l'art. 16 du Statut du TAS relatif aux causes de récusation. Dans ces conditions, on peut admettre que le TAS présente les garanties d'indépendance auxquelles le droit suisse subordonne l'exclusion valable de la voie judiciaire ordinaire. Cette opinion est, au demeurant, corroborée par l'avis doctrinal selon lequel les sentences du TAS peuvent faire l'objet d'une exécution internationale en conformité avec la convention de New York en la matière (NAFZIGER, op.cit., p. 508). Toutefois, certaines objections quant à l'indépendance du TAS ne sauraient être écartées sans autre forme de procès, en particulier celles qui prennent appui sur les liens organiques et économiques existant entre le TAS et le CIO. De fait, ce dernier est compétent pour modifier le Statut du TAS; il supporte en outre les frais de fonctionnement de ce tribunal et joue un rôle considérable dans la désignation de ses membres. Il reste que, étant donné, d'une part, la possibilité qui subsiste d'assurer, par la voie de la récusation, l'indépendance de la Formation appelée à connaître d'une cause déterminée, et, d'autre part, la déclaration solennelle d'indépendance souscrite par chaque membre du TAS avant son entrée en fonction, de telles objections ne permettent pas à elles seules de dénier au TAS la qualité de véritable tribunal arbitral (cf. JOLIDON, in: FS Kummer, p. 643 ss), quand bien même il serait souhaitable que l'on assurât une indépendance accrue du TAS à l'égard du CIO (CARRARD, ibid.). Enfin, le fait que le TAS est un organisme institutionnalisé n'interdit nullement de le considérer comme un véritable tribunal arbitral (ATF 107 Ia 152). Ainsi, sous l'angle procédural, la décision attaquée est bien une sentence arbitrale en matière internationale et peut être l'objet d'un recours de droit public au sens de l'art. 85 let. c OJ en liaison avec les art. 176 ss LDIP.
c) La recevabilité du recours de droit public suppose, en outre, que le tribunal arbitral ait statué sur des points de droit et non pas uniquement sur l'application de règles du jeu, lesquelles ne se prêtent pas en principe à un contrôle juridique (ATF 118 II 15 ss consid. 2, ATF 108 II 19 ss consid. 3, 103 Ia 412 consid. 3b). Tel est bien le cas en l'occurrence. Le retrait de prix en espèces atteignant le total non négligeable de 40'000 marks environ, lié à la disqualification avec effet rétroactif de toutes les épreuves au cours desquelles ces prix ont été gagnés, de même que la suspension de compétitions équestres internationales - mesure qui affecte indubitablement la sphère personnelle et économique d'un cavalier professionnel - vont bien au-delà de simples sanctions destinées à assurer le déroulement correct d'un jeu et constituent de véritables peines statutaires qui portent atteinte aux intérêts juridiques de celui qu'elles touchent et qui peuvent, de ce fait, être soumises à un contrôle judiciaire (ATF 108 II 21 consid. 3; KUMMER, op.cit., p. 48 ss; JOLIDON, FS Kummer, p. 651 ss; le même, Le droit du sport en Suisse, in: RSJ 86/1990, p. 389 ss; le même, Ordre sportif et ordre juridique, in: RJB 127/1991, p. 213 ss, 231; OSWALD, op.cit., p. 71 ss).
d) Bien que la mesure de suspension qui lui a été infligée ait déjà pris fin, le recourant n'en conserve pas moins un intérêt actuel suffisant à l'annulation de la sentence attaquée. Telle est la conclusion qui s'impose en considération des effets personnels et patrimoniaux que la sanction incriminée continue de sortir. Au demeurant, la conclusion inverse impliquerait l'impossibilité de faire examiner par l'autorité de recours des suspensions de brève durée (ATF 118 Ia 53/54 consid. 3c).
e) Enfin, du moment que la FEI a son siège en Suisse, une éventuelle exclusion statutaire ou conventionnelle de tout recours des parties contre la sentence du TAS resterait sans effet dans le cadre de la présente procédure de recours (art. 192 al. 1 LDIP).
Cela étant, il y a lieu d'entrer en matière.