BGE 100 II 182
 
28. Arrêt de la IIe Cour civile du 11 juillet 1974 dans la cause Bonny contre Sadon
 
Regeste
Art. 196 Abs. 1 und 2. Art. 201 Abs. 3 ZGB; Güterverbindung, Ersatzanschaffung, Nutzung der vertretbaren Güter der Ehefrau.
2. Wenn die Ehefrau vor der Heirat ihrem Verlobten Geld gibt, um nach der Hochzeit bestimmte Güter anzuschaffen, so sind diese eingebrachtes Gut der Ehefrau. Dies entscheidet sich gemäss den allgemeinen Regeln über die Stellvertretung und nicht nach denjenigen über die Ersatzanschaffung (Erw. 4).
 
Sachverhalt
A.- Le divorce des époux Bonny-Sadon, mariés le 29 janvier 1963, a été prononcé par la Cour de justice de Genève du 20 juin 1969.
Le 19 mars 1970, dame Sadon a ouvert contre son ex-mari une action en liquidation du régime matrimonial.
Les époux étaient soumis au régime légal. La femme prétendait au remboursement d'une somme de 16567 fr. 95, reçue en cours de mariage à titre gratuit le 25 novembre 1963 ainsi qu'à sa part au bénéfice de l'union conjugale. Le mari contestait devoir rembourser l'apport, soutenant que son montant avait été affecté à l'achat d'une automobile, d'un bateau de plaisance et de divers objets mobiliers, acquis prétendait-il en remploi.
B.- Par arrêt du 8 mars 1974, la Cour de justice de Genève, confirmant pour l'essentiel le jugement de première instance, a admis l'action à concurrence de 14267 fr. 95, soit le montant de l'apport sous déduction de 2300 fr. que le mari avait placés sur un livret d'épargne au nom de sa femme. Elle a rejeté la prétention relative au bénéfice de l'union conjugale, estimant qu'il n'y avait aucun bénéfice à partager. Ce dernier point n'est plus litigieux.
C.- Bonny recourt en réforme contre cet arrêt. Il persiste à considérer que l'automobile, le bateau à voiles et la machine à coudre sont la propriété de son ex-femme.
L'intimée a conclu au rejet du recours.
 
Considérant en droit:
 
Erwägung I
2. Il est constant que cette somme a été remise au recourant. S'agissant d'argent de la femme, le mari en est devenu propriétaire et en même temps débiteur, la dette étant échue et exigible à la dissolution du mariage (art. 201 al. 3 CC).
La loi ne définit pas les conditions de la subrogation réelle, se bornant, à l'art. 196 al. 2, à instituer une présomption et à l'art. 239 al. 2 CC à réserver le remploi. Les conditions de la subrogation réelle se déterminent dès lors selon les règles dégagées par la doctrine et la jurisprudence (art. 1er al. 2 et 3 CC). La première de ces conditions est l'existence préalable de masses de biens ayant un statut juridique différent, ainsi les apports de la femme et les biens du mari dans le cadre des bien matrimoniaux, dans le régime de l'union des biens. La subrogation réelle, qu'impliquent indirectement les art. 196 al. 2 et 239 al. 2 CC, a pour fonction de conserver l'intégralité de ces patrimoines respectifs, et cela dans deux hypothèses: d'abord lorsqu'un bien est aliéné et remplacé par un autre, affecté à une destination sinon identique, tout au moins approchante, ensuite en cas de remplacement d'un bien altéré, usé ou perdu (cf. RO 75 II 275; P. SIMONIUS, Die güterrechtliche Surrogation, Bâle 1970, p. 1 à 8, 27 ss., 65 ss.; LEMP, Kommentar, n. 27 ss.; CH. KNAPP, Le régime matrimonial de l'union des biens, Neuchâtel, s.d., p. 38 n. 161 ss.).
Aucune de ces hypothèses n'est réalisée en l'espèce: en vertu de l'art. 201 al. 3 CC, la somme reçue par la femme a passé en propriété du mari. Celui-ci, en disposant de cette somme qui était sa propriété, ne peut avoir, par le jeu de la subrogation réelle, acquis un bien nouveau qui, se substituant au bien aliéné et suivant sa condition juridique, serait entré dans le patrimoine de la femme. KNAPP, no 185, p. 44, précise à juste titre: "Le remploi ne doit pas être confondu avec l'emploi. Il y a emploi lorsque des fonds de la femme sont remis au mari avant ou après l'entrée dans le régime et que le mari achète avec ces fonds les biens auxquels ils sont destinés." Dans ce sens: PLANIOL-RIPERT-BOULANGER, n. 684 p. 231.
Le recourant invoque à tort l'art. 196 al. 2 CC, car il n'y a pas eu en l'occurrence de remploi. La présomption de l'art. 196 al. 2 CC ne peut donc pas être invoquée.
Le Tribunal fédéral a adopté une solution plus nuancée, posant des exigences précises. L'arrêt Denzler (RO 52 II 5) admet ainsi que la femme qui lors de son mariage reçoit de ses parents de l'argent pour l'installation de son ménage, est propriétaire des biens acquis avec cet argent, et cela non seulement lorsqu'elle les acquiert avant le mariage, mais également lorsqu'elle confie à son fiancé l'argent nécessaire pour effectuer l'achat après le mariage. Le mari est alors réputé avoir agi comme représentant de sa femme ou tout au moins pour le compte de celle-ci. La créance de la femme en restitution des espèces, selon l'art. 201 al. 3 CC, est alors éteinte, si tant est qu'elle ait existé, par la remise des objets achetés.
Quant au fardeau de la preuve, c'est la règle générale de l'art. 196 al. 1 CC qui s'applique.
 
Erwägung II
Le seul élément que le recourant puisse invoquer est qu'il a acheté cette voiture à la demande de sa femme. Mais cela est tout à fait insuffisant. En effet, il a acquis et immatriculé cette voiture à son nom, l'a payée de ses deniers, partie par reprise de son ancienne voiture, partie au moyen d'un prêt que lui a consenti sa soeur. Le seul fait qu'il ait agi à la demande de sa femme n'implique en rien qu'il lui aurait fait don de cette voiture, qui remplaçait son ancien véhicule. Cette voiture est donc sa propriété. Les faits retenus par l'arrêt cantonal ne fournissent d'ailleurs aucun élément de preuve ni même aucun indice que le recourant ait eu la qualité de représentant de sa femme en vertu des règles sur la représentation, ni même qu'il ait acquis pour son compte à elle en vertu d'un mandat.
Rien ici encore ne permet de conclure ni à la représentation, ni au mandat donné par la femme.
Quant aux autres biens de moindre valeur, piano, machine à coudre, l'arrêt déféré ne contient aucune constatation de nature à libérer le recourant de son obligation de rendre compte. Le recours n'est d'ailleurs pas motivé sur ce point, si ce n'est par la seule affirmation que le consentement de l'intimée à ces achats, d'ailleurs non constaté par l'arrêt cantonal, serait décisif.
Par ces motifs, le Tribunal fédéral:
Rejette le recours et confirme l'arrêt attaqué.