BGE 120 Ib 70
 
12. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour de droit public du 26 janvier 1994 dans la cause Association Suisse contre les Nuisances de l'Aviation et consorts contre Grand Conseil de la République et canton de Genève (recours de droit administratif et de droit public).
 
Regeste
Art. 9 USG, Art. 5 UVPV; Umweltverträglichkeitsprüfung.
Genehmigung einer Flughafenzone und Umweltverträglichkeitsprüfung; massgebliches Verfahren für die Schaffung oder Änderung eines Flughafens (E. 2).
Akteneinsicht (E. 3).
Art. 86 Abs. 1 OG; Zulässigkeit der staatsrechtlichen Beschwerde.
Im Rahmen der Nutzungsplanung gehört die Beschwerde im Sinne von Art. 33 Abs. 2 RPG zu den Rechtsmitteln des kantonalen Rechts, die zur Erschöpfung des Instanzenzugs ergriffen werden müssen (E. 4).
 
Sachverhalt
En vertu d'un arrêté législatif pris le 4 juillet 1958 par le Grand Conseil de la République et Canton de Genève, les terrains appartenant à l'Etat de Genève et compris dans le périmètre de l'aéroport de Genève-Cointrin sont classés en zone industrielle. Le 1er août 1987 est entrée en vigueur la loi cantonale d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire (LaLAT); elle prévoit que le territoire du canton est réparti en "zones ordinaires" (art. 18 LaLAT), parmi lesquelles figurent les zones à bâtir, l'une d'elles étant la "zone aéroportuaire" (art. 19 al. 5 LaLAT). Le Conseil d'Etat de la République et canton de Genève a dès lors élaboré un projet de loi "modifiant le régime des zones de construction sur le territoire des communes de Bellevue, Grand-Saconnex, Meyrin et Vernier (création de la zone aéroportuaire)", le nouveau régime devant en particulier remplacer celui découlant de l'arrêté de 1958. Ce projet de loi, accompagné d'un plan du périmètre - qui comprend aussi des terrains dont la commune de Vernier est propriétaire -, a été mis à l'enquête publique; l'Association Suisse contre les Nuisances de l'Aviation (ASNA) et l'Association Transport et Environnement (ATE) ont formé opposition, en demandant notamment que le projet soit soumis à une étude de l'impact sur l'environnement (EIE). Par ailleurs, après l'enquête publique, le conseil municipal de Vernier a été invité à faire part de son préavis, au même titre que les autorités des trois autres communes concernées; il a donné un avis favorable, en demandant cependant qu'une étude d'impact soit réalisée. La commission d'aménagement du Grand Conseil, chargée d'étudier le projet de loi, s'est prononcée sur les critiques des deux associations précitées; elle a proposé, dans son rapport du 19 août 1992, de rejeter l'opposition. Dans sa séance du 18 septembre 1992, le Grand Conseil, suivant les conclusions de sa commission, a adopté la loi portant création de la zone aéroportuaire.
Agissant par la voie du recours de droit administratif, l'Association Suisse contre les Nuisances de l'Aviation, l'Association Transport et Environnement ainsi que la commune de Vernier ont demandé au Tribunal fédéral d'annuler la loi portant sur la création de la zone aéroportuaire. En outre, agissant seule par la voie du recours de droit public et invoquant sa qualité de propriétaire de terrains touchés par la modification du régime des zones, la commune de Vernier a également demandé l'annulation de cette loi. Le Tribunal fédéral a rejeté le recours de droit administratif, dans la mesure où il était recevable; à cet égard, il a en particulier retenu que l'Association Transport et Environnement avait qualité pour recourir, se dispensant d'examiner si tel était également le cas de l'Association Suisse contre les Nuisances de l'Aviation et de la commune de Vernier. Le Tribunal fédéral a par ailleurs déclaré irrecevable le recours de droit public.
 
Extrait des considérants:
b) aa) L'acte attaqué, adopté sous la forme d'une loi cantonale, est d'un point de vue matériel un plan d'affectation au sens des art. 14 ss LAT (RS 700); la création et la modification de "zones ordinaires" (cf. art. 18 ss LaLAT) sont en effet, en droit genevois, soumises à une procédure de type législatif (art. 15 ss LaLAT; cf. ATF 113 Ia 266). En vertu du principe énoncé à l'art. 34 al. 3 LAT, seule la voie du recours de droit public est ouverte contre les décisions sur les plans d'affectation prises par les autorités cantonales de dernière instance.
Toutefois, lorsque certaines dispositions d'un plan d'affectation - en règle générale: d'un plan d'affectation spécial - équivalent à des décisions fondées sur le droit fédéral de la protection de l'environnement - le plan contenant alors ces décisions -, la voie du recours de droit administratif est exceptionnellement ouverte à cet égard; la clause d'exclusion de l'art. 99 let. c OJ ne s'applique pas à des recours dirigés contre de telles décisions (ATF 118 Ib 11 consid. 2c, 66 consid. 1c et les arrêts cités).
bb) L'art. 9 LPE (RS 814.01) institue l'"étude de l'impact sur l'environnement", que l'autorité compétente doit effectuer avant de prendre une décision sur la planification et la construction ou la modification d'installations pouvant affecter sensiblement l'environnement; cette exigence ne concerne que les installations désignées par le Conseil fédéral dans l'annexe à l'ordonnance sur l'étude de l'impact sur l'environnement (art. 9 al. 1 LPE, art. 1er OEIE [RS 814.011]). Cette annexe à l'ordonnance fédérale désigne en outre, pour plusieurs de ces installations, la "procédure décisive", soit la procédure d'autorisation, d'approbation ou d'octroi de concession dans laquelle l'étude d'impact est effectuée (art. 5 al. 1 et 2 OEIE). Aux termes de l'art. 5 al. 3 OEIE, si la procédure décisive n'est pas déterminée dans l'annexe, elle doit être définie par le droit cantonal; dans tous les cas où les cantons prévoient l'établissement d'un plan d'affectation spécial (ou: "plan d'affectation de détail"), c'est cette procédure qui est considérée comme procédure décisive, à condition qu'elle permette de procéder à une étude d'impact exhaustive.
C'est par la voie du recours de droit administratif que le grief de violation de l'art. 9 LPE - et des dispositions fédérales d'exécution - doit être présenté, en particulier lorsqu'il est allégué que l'autorité cantonale aurait dû ordonner une étude d'impact, le cas échéant dans le cadre de l'établissement d'un plan d'affectation (cf. ATF 118 Ib 66 consid. 1d; arrêt du 25 avril 1991, consid. 1d non publié aux ATF 117 Ib 35 ss, mais reproduit in: URP/DEP 1991 p. 327).
La création et la modification, au sens de l'art. 2 OEIE, d'un aéroport - celui de Genève-Cointrin notamment - sont soumises à une étude d'impact et la procédure décisive, selon l'ordonnance du Conseil fédéral, est celle de l'octroi de la concession, au sens de l'art. 37 al. 1 LNA, par le Département fédéral des transports et communications et de l'énergie (ch. 14.1 de l'annexe à l'OEIE; cf. art. 5 al. 1 OEIE). Il n'appartient donc pas aux cantons de régler différemment cette question et l'art. 5 al. 3 OEIE, qui réserve la procédure du plan d'affectation spécial, ne s'appliquerait de toute manière pas à un aéroport. En cas de modification, au sens de l'art. 2 al. 1 OEIE, d'une telle installation, les autorités cantonales ne pourraient donc pas exiger que l'étude d'impact prévue par le droit fédéral soit effectuée dans le cadre d'une procédure cantonale d'établissement d'un plan d'affectation spécial.
Au demeurant, la création de la zone aéroportuaire n'est pas liée directement à un projet de construction, à l'instar d'un plan d'affectation de détail dont l'élaboration peut être requise préalablement à la réalisation de certaines installations, en raison de leurs incidences sur la planification locale ou sur l'environnement (cf. ATF 118 Ib 503 consid. 5b, ATF 117 Ib 270 consid. 2, 502 consid. 4d, ATF 116 Ib 50 consid. 3a). Cette zone, régie par l'art. 19 al. 5 LaLAT, est une des zones à bâtir du territoire du canton de Genève; la loi attaquée, qui est une mesure de planification, concrétise la disposition légale générale entrée en vigueur en 1987. Or, l'art. 9 LPE ne s'applique pas aux procédures d'adoption ou d'adaptation des plans généraux d'affectation, le droit fédéral n'ayant pas prévu d'étude d'impact sur l'environnement à ce stade (cf. HERIBERT RAUSCH, Kommentar zum Umweltschutzgesetz, art. 9, Zurich 1989, n. 29 et 38; YVES NICOLE, L'étude d'impact dans le système fédéraliste suisse, thèse Lausanne 1992, p. 188/189). Sur ce point, les moyens des recourantes sont donc mal fondés.
Les recourantes font en premier lieu valoir que le procès-verbal des délibérations de la commission parlementaire chargée d'examiner le projet de loi litigieux aurait dû, à la suite de leur demande, leur être communiqué par les autorités cantonales. Dans sa réponse au présent recours, l'Etat de Genève soutient que la législation cantonale s'oppose à la communication officielle de tels documents. Il ne se justifie toutefois pas d'examiner plus précisément cette question, car les recourantes admettent qu'elles ont pu se procurer le procès-verbal en temps utile, par une autre voie; elle l'ont d'ailleurs produit en annexe à leur mémoire adressé au Tribunal fédéral. Le refus opposé par les autorités cantonales, pour autant qu'il fût contraire à l'art. 4 Cst., ne les a pas entravées dans l'exercice de leurs droits, en l'occurrence dans la faculté de se pourvoir devant le Tribunal fédéral.
Les recourantes se plaignent encore de n'avoir pas eu connaissance des échanges de correspondance entre les autorités genevoises et les autorités fédérales (offices fédéraux de l'aménagement du territoire, de l'aviation civile ainsi que de l'environnement, des forêts et du paysage). Dans les cas où une étude d'impact doit être effectuée, les avis de diverses autorités ou services spécialisés figurent dans le "rapport d'impact" (cf. art. 9 OEIE) ou dans le dossier de la "décision finale" au sens de l'art. 20 OEIE et ils peuvent être consultés à certaines conditions. En l'espèce, aucune étude d'impact n'étant exigée, on ne voit pas sur quelle base les autorités cantonales auraient dû requérir un avis formel des offices fédéraux précités en vue de la création de la zone aéroportuaire; au reste, les recourantes n'expliquent pas en quoi une éventuelle correspondance avec ces offices, par exemple en relation avec l'exploitation de l'aéroport, aurait été déterminante, compte tenu de leurs griefs, pour la procédure de planification en cause. Dans ces conditions, le droit d'être entendu des recourantes n'a pas été violé (cf. ATF 117 Ia 90 consid. 5b, ATF 117 Ib 481 consid. 7b).
Selon la règle générale de l'art. 86 al. 1 OJ, le recours de droit public n'est recevable qu'à l'encontre de décisions prises en dernière instance cantonale. En ce qui concerne les procédures relatives aux plans d'affectation, le "recours" cantonal au sens de l'art. 33 al. 2 LAT - en droit genevois, il s'agit de la procédure d'opposition selon l'art. 16 al. 5 LaLAT (cf. ATF 114 Ia 233 consid. 2b, ATF 108 Ib 479 consid. 3) - fait partie des moyens de droit cantonal qui doivent avoir été épuisés (ATF 118 Ia 165 consid. 2b, ATF 116 Ia 78 consid. 1b).
La commune de Vernier n'a pas formé opposition dans les formes prescrites avant l'adoption de la loi attaquée et elle n'était pas partie à la procédure cantonale. Certes, à l'issue de l'enquête publique, elle a adressé un préavis à l'autorité cantonale; ce faisant, elle n'a toutefois pas agi en sa qualité de propriétaire foncier touché, mais comme collectivité publique, nécessairement consultée en application de l'art. 16 al. 3 LaLAT. Elle n'a donc pas épuisé les moyens de droit cantonal à sa disposition. Dans ces conditions, son recours de droit public est irrecevable.