BGE 120 V 489
 
68. Arrêt du 12 septembre 1994 dans la cause Vaudoise Générale, Compagnie d'Assurances contre Caisse supplétive LAA et Office fédéral des assurances sociales, Berne (Concernant M.)
 
Regeste
Art. 3 Abs. 2 und 5, Art. 77 Abs. 2 UVG, Art. 7 Abs. 1 lit. b UVV. Bei der Verlängerung einer Versicherung hat der Unfallversicherer des alten Arbeitgebers und nicht die Ersatzkasse ihre Leistungen einem arbeitslosen Versicherten zu erbringen, der einige Monate nach Ende des Arbeitsverhältnisses Opfer eines Unfalls geworden ist, und dies obwohl kein Versicherungsverhältnis mit dem ehemaligen Arbeitgeber mehr besteht. Keine Gesetzeslücke (Erw. 2).
Art. 134 OG: Verfahrenskosten. Rechtsstreit zwischen einem Unfallversicherer und der Ersatzkasse um Übernahme der Unfallfolgekosten eines Versicherten: Verfahrenskosten zulasten der unterliegenden Partei (Erw. 3).
 
Sachverhalt


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A.- a) M. était employé par X S.A. en qualité de directeur administratif. Il a perdu toutefois son travail à dater du 29 février 1992, à la suite de la faillite de son employeur, et a perçu des indemnités de chômage à partir du 1er mars suivant.
Durant son emploi, le prénommé était assuré contre les accidents, conformément à la LAA, auprès de la Vaudoise Générale, Compagnie d'Assurances (ci-après: la Vaudoise), à Lausanne. En raison de la faillite de X S.A., la police d'assurance LAA conclue pour le personnel de cette entreprise a été annulée avec effet au 5 mars 1992.
b) Le 16 août 1992, M. a été victime d'un accident (fracture du talon gauche). Le cas a été annoncé le 25 août suivant à la Vaudoise, laquelle a alloué ses prestations, en l'occurrence la prise en charge de frais médicaux et d'indemnités journalières s'élevant à 32'646 fr. 80.
Par décision du 1er octobre 1992, la Vaudoise a signifié à la Caisse supplétive LAA (ci-après: la caisse supplétive) qu'elle lui demandait le remboursement des prestations versées à M., au motif qu'à la date à laquelle s'était produit l'accident, il n'existait plus aucun contrat d'assurance entre la Vaudoise et l'ancien employeur de l'intéressé. Or, s'il était incontestable que M. bénéficiait d'une couverture d'assurance prolongée pendant la durée de son chômage, c'était à la caisse supplétive et non pas à l'ancien assureur-accidents qu'il incombait d'en supporter les conséquences en cas de sinistre.
La caisse supplétive a fait opposition à cette décision, contestant toute obligation d'allouer ses prestations dans un cas de ce genre. Dans sa décision sur opposition du 14 avril 1993, la Vaudoise a réfuté de manière circonstanciée l'argumentation de la caisse supplétive et a rejeté l'opposition formée par cette dernière.


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B.- Saisi d'un recours de la caisse supplétive, l'Office fédéral des assurances sociales (OFAS), par décision du 17 décembre 1993, a annulé la décision sur opposition du 14 avril 1993.
L'office fédéral a considéré, en substance, qu'au moment de l'accident M. était toujours assuré auprès de la Vaudoise, en vertu de la loi, et qu'il incombait donc à cette compagnie d'assurances d'allouer les prestations dues en cas d'accident non professionnel, ceci indépendamment de l'existence ou de l'inexistence d'un contrat d'assurance avec l'ex-employeur de l'assuré. Contrairement à l'opinion de la Vaudoise, l'OFAS a estimé que la loi ne souffre d'aucune lacune en ce domaine et que l'on ne saurait par voie d'interprétation étendre, comme cette compagnie le voudrait, la compétence de la caisse supplétive, ce qui serait contraire à l'intention du législateur.
C.- La Vaudoise interjette recours de droit administratif contre cette décision qu'elle demande au Tribunal fédéral des assurances d'annuler. Ses moyens seront exposés ci-après, pour autant que de besoin.
La caisse supplétive renvoie aux arguments développés en instance précédente et conclut implicitement au rejet du recours.
M. n'a pas fait usage de la faculté de se déterminer qui lui a été offerte.
 
Considérant en droit:
L'OFAS a implicitement considéré que tel était le cas, dans la mesure où, d'après lui, la décision litigieuse a pour objet de régler un conflit de compétence négatif entre la Vaudoise et la caisse supplétive. Il s'est référé pour cela aux arrêts ATF 114 V 51 et RAMA 1989 no U 68 p. 171, ainsi qu'à MAURER, Schweizerisches Unfallversicherungsrecht, Ergänzungsband, p. 8.
Ce n'est pourtant pas la solution à laquelle conduisent cette jurisprudence et cet avis de doctrine. En réalité, un assureur social n'a pas qualité

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d'autorité revêtue du pouvoir de décision à l'égard d'un autre assureur de même rang, comme l'a déjà jugé le Tribunal fédéral des assurances dans un cas analogue (RAMA 1991 no U 134 p. 316 consid. 3b). La Vaudoise ne pouvait, par conséquent, rendre une décision afin de contraindre la caisse supplétive à lui rembourser les prestations qu'elle a versées à M. C'est pourquoi, tant sa décision du 25 septembre 1992 que la décision sur opposition du 14 mars 1993 sont nulles (ATF 114 V 327 consid. 4b; SJ 1992 p. 143), ce que l'OFAS aurait dû constater d'office (ATF 116 Ia 217 consid. 2a et les renvois).
b) Quelle voie devait alors suivre la Vaudoise pour obtenir satisfaction? Elle aurait pu se borner à contester sa compétence et à transmettre l'affaire à l'assureur qu'elle tenait pour compétent, en l'occurrence la caisse supplétive, comme le prévoit l'art. 78 LAA. Dans ce cas, si la caisse supplétive s'estimait à son tour incompétente, il lui eût appartenu de rendre une décision - puis, s'il y avait lieu, une décision sur opposition - dans ce sens, à l'intention de l'assuré, contre laquelle non seulement ce dernier mais également la Vaudoise aurait pu recourir (devant l'OFAS: art. 105 al. 2 LAA dans la version en vigueur jusqu'au 31 décembre 1993), en qualité d'intéressée à la solution du litige (cf. sur ce point RAMA 1994 no U 188 p. 101 consid. 5b in fine et, par analogie, ATF 119 V 220). Ce mode de faire est cependant de nature à retarder la solution du litige et peut contraindre l'assuré à procéder successivement contre deux assureurs qui contestent chacun leur compétence, à moins que l'un d'entre eux n'accepte de fournir ses prestations à l'assuré, à titre d'avance remboursable et sans reconnaissance de responsabilité, jusqu'à droit connu sur la question de la compétence (MAURER, Bundessozialversicherungsrecht, pp. 333-334; Schweizerisches Unfallversicherungsrecht, pp. 74-75, et Ergänzungsband, pp. 9-10; BÖNI-CLERC, Aus der Praxis des Eidgenössischen Versicherungsgerichts 1988, SZS 1990 p. 149, ch. 5.5.1).
C'est sans doute pourquoi MAURER préconise une solution qui s'inspire apparemment de l'art. 127 RAVS, à savoir qu'une décision soit prise par l'autorité de surveillance, en l'occurrence l'OFAS, à la demande de tout intéressé - ce qui peut désigner aussi bien l'assuré que son employeur ou un assureur - sur la question de la compétence, cette décision pouvant elle-même être déférée au Tribunal fédéral des assurances (Ergänzungsband, p. 10 en haut). GHÉLEW/RAMELET/RITTER, quant à eux, sont d'avis qu'en l'absence de disposition analogue à l'art. 127 RAVS, l'intéressé doit

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demander à l'assureur qu'il tient pour compétent de statuer sur sa compétence par voie de décision selon l'art. 99 LAA, comme le prescrit la procédure administrative fédérale (art. 9 al. 1 et 2 PA; ATF 108 Ib 540), c'est-à-dire par une décision de constatation au sens de l'art. 25 PA (Commentaire de la loi sur l'assurance-accidents [LAA], p. 228; cf. également la p. 223 en ce qui concerne la question voisine des rapports entre la caisse supplétive et la CNA.
c) Quoi qu'il en soit, la Cour de céans ne peut, en l'espèce, que constater d'office la nullité de la décision sur opposition du 14 mars 1993 qui est l'objet de la contestation dans le présent procès.
Cela étant, ce serait faire preuve de formalisme excessif que de renvoyer la cause à la Vaudoise pour qu'elle procède comme il est dit ci-dessus. En effet, ainsi qu'on l'a vu, l'autre assureur intéressé aurait de toute manière qualité pour recourir contre la décision d'incompétence notifiée à l'assuré, de sorte qu'une procédure analogue s'engagerait devant l'OFAS et finirait de manière semblable devant le Tribunal fédéral des assurances. Il convient dès lors, par économie de procédure, d'entrer en matière sur le fond et de statuer sur les conclusions de la recourante malgré le vice dont souffre la procédure administrative de premier échelon (même solution: ATF 116 V 261 consid. 4 in initio).
d) Par ailleurs, il sied de réserver la solution résultant des modifications de la LAA qui ont accompagné la révision de l'OJ du 4 octobre 1991 (RO 1992 p. 288) et qui sont entrées en vigueur le 1er janvier 1994 (RO 1993 p. 909), soit postérieurement à la décision litigieuse.
b) Dans un tel cas, c'est l'assureur-accidents de l'ancien employeur qui répond des conséquences de l'accident, même si celui-ci s'est produit longtemps après la fin des rapports de travail. Comme le fait observer avec

BGE 120 V 489 (494):

raison l'OFAS dans la décision attaquée, cette solution résulte implicitement de l'art. 77 al. 2 LAA (et aussi de l'arrêt ATF 113 V 127; dans le même sens: KOCHER, Zum Wesen der Koordination in der schweizerischen Sozialversicherung, recht 1994, p. 69, cas no 3). Elle n'est en tout cas pas contraire à la jurisprudence faisant application de cette disposition légale (ATF 116 V 51; RAMA 1994 no U 188 p. 94).
On ne saurait en revanche suivre la recourante lorsqu'elle soutient que, faute de rapport d'assurance avec l'ancien employeur de l'assuré à la date de l'accident, ce serait à la caisse supplétive d'allouer ses prestations à ce dernier, en vertu de l'art. 59 al. 3 LAA. En effet, le texte de cette disposition légale vise expressément et uniquement le cas spécifique du "travailleur soumis à l'assurance obligatoire (qui) n'est pas assuré au moment où survient un accident", hypothèse manifestement non réalisée en l'espèce puisque M. était bel et bien assuré au moment déterminant, conformément à l'art. 3 al. 2 LAA combiné avec l'art. 7 al. 1 let. b OLAA.
c) En outre, et contrairement à ce que soutient la recourante dans une argumentation peu convaincante, il n'existe aucune lacune de la loi, même impropre, dans ce domaine. Car ce que voudrait la Vaudoise, en réalité, c'est faire supporter à la caisse supplétive la charge - qui peut effectivement se révéler très importante, en particulier en période de chômage élevé - des conséquences financières d'un accident dont est victime un assuré au chômage qui bénéficie de cette protection d'assurance prolongée.
Cependant, comme l'ont démontré de façon pertinente tant l'intimée que l'OFAS, pareille opinion ne trouve aucun fondement en droit positif, pas plus que dans les travaux préparatoires de la loi et de ses ordonnances d'application. Dès lors, si la Vaudoise entend obtenir satisfaction sur cette question de principe, c'est au législateur qu'elle doit s'adresser et non au juge. Aussi bien le recours ne peut-il qu'être rejeté.


BGE 120 V 489 (495):

La Vaudoise supportera donc les frais de justice (art. 156 al. 1 OJ). Ceux-ci sont fixés en fonction de la valeur litigieuse qui est celle des prestations dont la recourante entendait obtenir le remboursement.