BGE 132 IV 1
 
1. Extrait de l'arrêt de la Cour de cassation pénale dans la cause A.X contre Procureur général du canton du Valais, B.X et C.X (pourvoi en nullité)
 
6S.239/2005 du 9 novembre 2005
 
Regeste
Art. 64 zweitletzter Absatz StGB; Strafmilderung, wenn seit der Tat verhältnismässig lange Zeit verstrichen ist; Verhältnis zum neuen Recht der Verfolgungsverjährung.
 


BGE 132 IV 1 (1):

Extrait des considérants:
 


BGE 132 IV 1 (2):

Erwägung 6.1
6.1.1 Selon la jurisprudence, l'atténuation de la peine en raison d'un temps relativement long procède de la même idée que la prescription. L'effet guérisseur du temps écoulé, qui rend moindre la nécessité de punir, doit aussi pouvoir être pris en considération lorsque la prescription n'est pas encore acquise, si l'infraction est ancienne et si le délinquant s'est bien comporté dans l'intervalle (ATF 92 IV 201 consid. a p. 202 s.). La jurisprudence admet donc qu'il s'est écoulé un temps relativement long au sens de l'art. 64 avant-dernier alinéa CP lorsque la poursuite pénale est près d'être acquise (ATF 102 IV 198 consid. 5 p. 209; ATF 92 IV 201 consid. b p. 202 s.), étant précisé que les délais spéciaux, plus courts, ne s'appliquent pas (cf. art. 109, 118 al. 4 et 178 al. 1 CP; ATF 89 IV 3 consid. 1 p. 5).
La jurisprudence se réfère au délai de la prescription ordinaire, et non à celui de la prescription absolue (ATF 92 IV 201 consid. c p. 203). Cela s'explique en raison de la ratio legis de l'art. 64 avant-dernier alinéa CP, qui doit permettre d'échelonner le passage entre l'atténuation de la peine selon l'art. 63 CP et l'acquittement en raison de la prescription, en introduisant une étape intermédiaire où la peine peut être atténuée en application des art. 64 et 65 CP.
6.1.2 La doctrine relève que la jurisprudence privilégie par trop l'effet guérisseur du temps écoulé par rapport à l'idée de la prévention spéciale, aussi à la base de l'art. 64 avant-dernier alinéa CP. Selon elle, il faut aussi tenir compte du fait qu'en se comportant bien pendant un temps relativement long, l'auteur reconnaît, de même que par le repentir sincère, à nouveau l'ordre juridique, de sorte que la nécessité de punir diminue (STRATENWERTH, Schweizerisches Strafrecht, Allgemeiner Teil II: Strafen und Massnahmen, Berne 1989, § 7, n. 96, p. 262; WIPRÄCHTIGER, Basler Kommentar, Strafgesetzbuch I, 2003, art. 64 CP, n. 29; KILLIAS, Précis de droit pénal général, Berne 2001, n. 1021, p. 163). Certains auteurs considèrent que le temps écoulé ne devrait pas être mis seulement en relation avec la prescription, mais aussi tenir compte de la nature et de la gravité de l'infraction commise dans le cas concret (ALEX BRINER, Die ordentliche Strafmilderung nach dem Schweizerischen Strafgesetzbuch, unter besonderer Berücksichtigung der Strafmilderungsgründe des Art. 64, thèse Zurich 1977, p. 141; STRATENWERTH, op. cit.; cf. aussi BJM 1962 p. 232).
6.2 L'autorité cantonale a appliqué sans autre les nouvelles règles sur la prescription, entrées en vigueur le 1er octobre 2002,

BGE 132 IV 1 (3):

considérant que le temps écoulé depuis la commission de l'infraction, en 1993 et 1994, n'était pas proche de la prescription, puisque le nouveau délai de prescription était de quinze ans. Le recourant conteste cette manière de voir. Il préconise d'adapter la jurisprudence au nouveau système de la prescription et de retenir la circonstance atténuante du délai relativement long depuis l'infraction lorsque les deux tiers du délai de prescription sont dépassés.
6.2.1 Par la loi du 5 octobre 2001, entrée en vigueur le 1er octobre 2002, le législateur a supprimé les règles sur la suspension et l'interruption de la prescription et a fixé, en contrepartie, des délais plus longs, qui correspondent aux anciens délais de la prescription absolue (sauf dans le cas de l'art. 70 al. 1 let. c CP). Si le législateur a introduit ces nouvelles règles sur la prescription, ce n'est pas qu'il désirait prolonger le délai de prescription, mais c'est pour simplifier et clarifier la réglementation antérieure, qui était fort complexe, notamment en raison du mécanisme de l'interruption et de la suspension (message du Conseil fédéral du 23 mars 1999, FF 1999 p. 1939). La prolongation des délais de prescription n'est donc que la conséquence de la suppression des règles sur l'interruption et la suspension. Dans ces circonstances, il ne paraît guère compréhensible que les nouveaux délais de l'art. 70 CP impliquent, par leur durée supérieure aux délais ordinaires de l'ancien droit, une application restrictive de l'art. 64 avant-dernier alinéa CP.
En outre, l'application du nouveau système de la prescription liée à l'exigence de l'imminence de l'arrivée de la prescription posée par la jurisprudence rendrait illusoire l'idée à la base de l'art. 64 avant-dernier alinéa CP, qui est de faciliter le passage de l'atténuation ordinaire de la peine (art. 63 CP) à l'acquittement pour cause de prescription, en introduisant une étape intermédiaire où la peine peut être atténuée en application de l'art. 65 CP. En effet, selon la jurisprudence, le délai de référence était le délai de la prescription ordinaire, mais l'infraction n'était prescrite, selon l'ancien droit, qu'avec l'arrivée de la prescription absolue. Avec les nouvelles règles sur la prescription, qui suppriment la prescription absolue, la circonstance atténuante du temps relativement long ne s'appliquerait que lorsque le nouveau délai de prescription (correspondant à celui de la prescription absolue) serait sur le point d'arriver à son terme, réduisant ainsi quasi à néant l'étape intermédiaire où la peine pourrait être atténuée en application des art. 64 et 65 CP.


BGE 132 IV 1 (4):

Pour compenser l'allongement du délai de prescription et la suppression des règles sur l'interruption, le juge doit donc se montrer moins sévère dans l'appréciation de la notion de "date proche de la prescription". Cette condition doit être donnée, notamment lorsque le délai de prescription est de quinze ans, en tout cas lorsque les deux tiers du délai sont écoulés. Le délai écoulé peut cependant aussi être plus court pour tenir compte de la nature et de la gravité de l'infraction. Pour déterminer si l'action pénale est proche de la prescription, le juge doit se référer, comme à l'heure actuelle, à la date à laquelle les faits ont été souverainement établis, et non au jugement de première instance (moment où cesse de courir la prescription selon l'art. 70 al. 3 CP). Ainsi, lorsque le condamné a fait appel et qu'en vertu de la procédure cantonale, ce recours a un effet dévolutif et suspensif, il faut prendre en considération le moment où le jugement de seconde instance a été rendu (ATF 115 IV 95 consid. 3).