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Urteilskopf

137 III 550


82. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour de droit civil dans la cause X. contre Givaudan SA et Z. SA (recours en matière civile)
4A_328/2011 du 26 septembre 2011

Regeste

Vermischung der Sphären der Mutter- und Tochtergesellschaft.
Der Anschein der Einheit kann durch äusserliche Anzeichen, wie identische oder sehr ähnliche Firmen oder identische Sitze, Räumlichkeiten, Organe, Angestellte oder Telefonnummern erweckt werden. Im vorliegenden Fall wurde eine Sphärenvermischung angenommen, welche dem Verletzten erlaubte, sowohl von der Mutter- als auch von der Tochtergesellschaft Schadenersatz zu verlangen (E. 2.4).

Sachverhalt ab Seite 550

BGE 137 III 550 S. 550

A.

A.a Le 23 juin 1994, X. a signé un contrat cadre de travail temporaire avec Z. SA. Le même jour, ces deux parties ont signé un contrat de mission de durée indéterminée prévoyant l'engagement de X. pour des travaux de manutention-nettoyage à effectuer à ... chez "Givaudan-Roure SA".
Z. SA a reçu des bulletins de commande portant le timbre de "Givaudan-Roure SA" et a établi ses factures à ce même nom.

A.b Le chemin ... à ... est le siège de deux sociétés.
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La première, intitulée initialement Givaudan-Roure Société Anonyme, a modifié sa raison sociale en Givaudan Vernier SA dès le 18 mai 2000, puis en Givaudan Suisse SA dès le 24 décembre 2002.
La seconde, dénommée tout d'abord Givaudan-Roure (International) SA, a ensuite pris la raison sociale Givaudan SA dès le 7 mai 2000.
Les deux sociétés ont un but analogue. La première est la filiale de la seconde.

A.c Dans le cadre de sa mission, X. a été victime le 19 octobre 1998 d'un grave accident. Le rapport de police, le rapport d'accident de la SUVA et la déclaration d'accident LAA indiquent que l'accident s'est produit chez "Givaudan-Roure SA". C'est également à ce nom que l'Office cantonal AI a adressé son annonce de recours contre le tiers responsable.

A.d Chaque année entre 1999 et 2007, le conseil de X. a adressé, tout d'abord à "Givaudan Roure SA", puis dès 2001 à Givaudan Vernier SA, un courrier sollicitant une renonciation à se prévaloir de la prescription jusqu'à la fin de l'année suivante.
Ces renonciations ont toutes été signées par B., titulaire d'une signature collective à deux tant pour Givaudan Suisse SA que pour Givaudan SA. A., qui a contresigné ces courriers de 2004 à 2007, dispose du même pouvoir d'engager les deux sociétés.
En 2002 et 2003, la déclaration a été signée sans que le timbre d'une société ne soit apposé, contrairement aux années précédentes. Les lettres d'accompagnement étaient rédigées sur le papier d'affaires de Givaudan SA (à en-tête Givaudan).
Le 14 octobre 2008, X. a envoyé à Z. SA et à Givaudan SA une demande d'indemnisation à hauteur de 318'245 fr. Il a reçu la réponse suivante de Givaudan Suisse SA, rédigée sur son papier d'affaires à en-tête "Givaudan":
"(...) la responsabilité de Givaudan dans cet accident n'a jamais été engagée. Par ailleurs, les indemnités demandées nous paraissent totalement infondées, sinon d'ores et déjà périmées. Nous ne pouvons dès lors que décliner votre demande. (...)."

B.

B.a Le 6 janvier 2010, X. a déposé devant le Tribunal de première instance du canton de Genève une demande contre Z. SA et Givaudan SA, dans laquelle il concluait à ce que ces deux sociétés soient
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condamnées, conjointement et solidairement, à lui verser divers montants totalisant 263'683 fr.
Givaudan SA a contesté avoir la légitimation passive et soulevé l'exception de prescription. Par jugement du 11 novembre 2010, le Tribunal de première instance a "débouté Givaudan SA de son incident de légitimation passive" et a réservé la suite de la procédure au fond.

B.b Givaudan SA a déposé un appel, dont X. a demandé le rejet. Par arrêt du 15 avril 2011, la Chambre civile de la Cour de justice a dit que Givaudan SA n'avait pas la légitimation passive et a débouté X. de ses conclusions contre cette société.

C. X. (ci-après: le recourant) a interjeté un recours en matière civile auprès du Tribunal fédéral. Il concluait principalement à ce qu'il soit dit que Givaudan SA avait la légitimation passive et à ce que cette dernière et Z. SA, solidairement entre elles, soient condamnées à lui payer divers montants totalisant 263'683 fr., intérêts en sus.
Le Tribunal fédéral a partiellement admis le recours dans la mesure où il était recevable. Il a annulé l'arrêt attaqué en tant qu'il avait trait à la légitimation passive de Givaudan SA, a constaté que Givaudan SA avait la légitimation passive et renvoyé le dossier à l'autorité précédente pour nouvelle décision sur les frais et dépens de la procédure cantonale et reprise de l'instruction de la cause.
(résumé)

Erwägungen

Extrait des considérants:

2.

2.3

2.3.1 En principe, les sociétés dominées (ou sociétés-filles) appartenant à un groupe soumis à une direction économique unique peuvent se prévaloir de leur indépendance juridique par rapport à la société dominante (ou société-mère; sur la terminologie, cf. ROLAND VON BÜREN, Der Konzern, TDPS vol. VIII/6, 2e éd. 2005, p. 5 ss, spéc. p. 15 s.). Toutefois, le voile social peut être levé et l'identité économique avec la société dominante être invoquée (Durchgriff) lorsque le fait d'opposer l'indépendance juridique des deux entités constitue un abus de droit (art. 2 CC; cf. ATF 132 III 489 consid. 3.2).
Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, il n'y a pas de "Durchgriff" proprement dit lorsque les sphères de la société dominante et de la société dominée se confondent, ou lorsque la responsabilité de
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la société dominante est déjà engagée en vertu d'un fondement propre, par exemple parce qu'elle déçoit la confiance de tiers ou doit se laisser imputer des déclarations de volonté propres à faire naître une obligation. Dans tous ces cas de figure, ce n'est pas l'indépendance de la personne morale qui est niée, mais bien sa légitimation active ou passive exclusive: la société dominante est légitimée ou obligée non pas à la place de la société dominée, mais à ses côtés (arrêt 4P.330/1994 du 29 janvier 1996 consid. 6a, in Bulletin ASA 1996 496).

2.3.2 Selon la doctrine, il existe une confusion des sphères lorsqu'extérieurement, l'identité d'une société-fille ne peut plus être distinguée de celle de la société-mère, en d'autres termes lorsqu'une apparence d'unité est créée par des signes extérieurs tels que des raisons sociales identiques ou très semblables, des sièges sociaux, des locaux, des organes, du personnel ou des coordonnées téléphoniques identiques (NINA SAUERWEIN, La responsabilité de la société mère, 2006, p. 322; KRISTINA KUZMIC, Haftung aus "Konzernvertrauen", 1998, p. 128; ALEXANDER VOGEL, Die Haftung der Muttergesellschaft als materielles, faktisches oder kundgegebenes Organ der Tochtergesellschaft, 1997, p. 228). Divers correctifs sont envisageables. D'aucuns évoquent le Durchgriff, en ce sens qu'il est abusif d'invoquer l'indépendance juridique de deux sociétés alors qu'elles-mêmes n'en tiennent pas compte (SAUERWEIN, op. cit., p. 320, 322, 330 et 333, à titre d'ultima ratio ). Des obligations contractuelles peuvent aussi être imputées à la société-mère en recourant à la figure de la procuration apparente (SAUERWEIN, op. cit., p. 332 s.) ou, plus largement, en vertu de la responsabilité fondée sur l'apparence juridique, où le partenaire contractuel, en vertu du principe de la confiance, doit être protégé dans sa croyance erronée qu'il a conclu le contrat avec la société-mère et non la fille, ou cas échéant avec les deux sociétés (BEAT BRECHBÜHL, Haftung aus erwecktem Konzernvertrauen, 1998, p. 102 s.; VOGEL, op. cit., p. 172 ss, spéc. p. 174 et 228 s.).

2.4 En l'espèce, le raisonnement tenu par la cour cantonale est en substance le suivant: la filiale de Givaudan SA était identifiable comme la locataire des services du recourant et la personne morale concernée par son accident puisque la dénomination utilisée dans les bulletins de commande et les rapports relatifs à l'accident ne contenait pas le mot "International" caractérisant la société-mère et que par ailleurs, les déclarations de renonciation à la prescription étaient
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faites soit au nom exact ou abrégé de la filiale, soit sans aucune précision. Le recourant avait lui-même identifié la personne morale impliquée, puisqu'il s'était adressé à la filiale jusqu'en 2007 et avait bien dû constater, avec la réponse donnée à sa demande d'indemnisation en 2008, que la société-mère n'était pas concernée par le litige.
Un tel raisonnement repose sur une interprétation juridique erronée des faits retenus dans l'arrêt attaqué. Le groupe Givaudan s'est présenté au bailleur de services ainsi qu'à la police et aux assureurs concernés par l'accident sous le nom de "Givaudan-Roure SA". A l'époque, la raison sociale exacte de la filiale était "Givaudan-Roure Société Anonyme", et celle de la société-mère "Givaudan-Roure (International) SA". L'abréviation "Givaudan-Roure SA" pouvait désigner aussi bien la filiale que la société-mère. A cela s'ajoute qu'extérieurement, les deux sociétés présentaient une unité apparente. Outre le caractère très semblable de leur raison sociale inscrite au registre du commerce, elles avaient un siège identique, un but social analogue et des représentants communs. Aucun élément n'indique que dans le cadre de l'exécution de son travail, le recourant ait été à même de distinguer pour quelle entité il travaillait; selon les constatations du Tribunal de première instance, la société-mère n'a du reste pas pu établir que sa filiale était seule concernée par le chantier.
Extérieurement, il existait une confusion des sphères de la société-mère et de la filiale. Cette confusion a persisté lorsque le recourant a demandé des déclarations d'interruption de la prescription et émis des prétentions en indemnisation.
La première renonciation en 1999 a été faite au nom équivoque de "Givaudan Roure SA". En 2002 et 2003, les déclarations ont été signées sans mention de la société, et accompagnées d'un courrier comportant le seul nom préimprimé de la société-mère (papier d'affaires). A tout le moins dans ces deux cas, le destinataire pouvait déduire que la renonciation émanait de la société-mère. A une exception près, les courriers accompagnant les renonciations ont été rédigés sur le papier d'affaires de la société-mère, étant entendu que dans plusieurs cas, ils étaient signés au nom de la filiale. Pris dans leur ensemble, ces éléments donnaient l'apparence d'une confusion des deux entités.
En 2008, le recourant a fait parvenir une demande d'indemnisation à la société-mère et a obtenu une réponse de la filiale. Il n'avait pas
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à déduire de ce fait que la société-mère n'était pas concernée par l'accident, d'autant moins que la filiale déclarait contester la responsabilité de "Givaudan", par quoi le recourant était en droit de comprendre "la responsabilité du groupe Givaudan".
Extérieurement, il existait bel et bien une confusion des sphères, une unité apparente dont le recourant pouvait de bonne foi inférer que la société-mère et la filiale étaient aussi concernées l'une que l'autre par l'accident, pouvaient l'une et l'autre être recherchées en responsabilité. Dans un tel contexte, le recourant, même s'il était assisté d'un conseil, était en droit de déduire qu'il pouvait adresser ses demandes de renonciation à la prescription et d'indemnisation indifféremment à la société-mère ou à la filiale.
En considérant que la société-mère Givaudan SA ne disposait pas de la légitimation passive, la cour cantonale a enfreint le droit fédéral.

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Sachverhalt

Erwägungen 2

Referenzen

BGE: 132 III 489

Artikel: art. 2 CC