BGE 87 III 100
 
18. Arrêt du 19 décembre 1961 dans la cause Henry.
 
Regeste
Lohnpfändung, Berechnung des Notbedarfs.
2. Muss der Schuldner seine Wohnung wechseln, so ist ihm ein Betrag zu belassen, der zur Deckung der damit verbundenen Auslagen (namentlich der Umzugskosten) genugt (Erw. 2).
 
Sachverhalt


BGE 87 III 100 (100):

A.- Claude Butty poursuit son ex-épouse, dame Eliane Henry, en paiement de 800 fr. en capital.


BGE 87 III 100 (101):

La débitrice a un salaire net de 527 fr. par mois. Elle vit seule et occupe un appartement de deux pièces, pour lequel elle paie un loyer mensuel de 188 fr., y compris les frais de chauffage et d'eau chaude.
L'Office des poursuites de Lausanne-Est a considéré que le gain mensuel de la débitrice était inférieur de 26 fr. à son minimum vital et il n'a dès lors ordonné aucune saisie de salaire.
B.- Butty a porté plainte contre cette décision. Il alléguait notamment que la débitrice devait se loger à meilleur compte et qu'on ne pouvait donc prendre en considération, dans le minimum vital, 188 fr. pour les frais de logement.
L'Autorité inférieure de surveillance a admis cette thèse. Elle a considéré que la débitrice devait soit sous-louer une chambre, soit choisir un autre appartement ou une chambre dont le loyer serait moins élevé que celui de son logement actuel. En conséquence, elle a invité l'Office des poursuites à impartir à la débitrice un délai convenable pour qu'elle choisisse l'une ou l'autre de ces solutions.
Sur recours de dame Henry, la Cour des poursuites et faillites du Tribunal cantonal vaudois a réformé cette décision et ordonné une saisie de salaire de 12 fr. par mois. Elle s'est fondée, en bref, sur les motifs suivants:
La recourante est tenue de réduire ses frais de logement. Mais les autorités de poursuite ne sauraient lui dicter des règles de vie, en l'invitant, par exemple, à sous-louer une chambre ou à choisir un autre appartement. Elles peuvent simplement, en fixant le minimum vital, compter non pas le loyer dû par la recourante, mais le montant qu'elle devrait supporter si elle occupait un logis plus simple ou tirait un meilleur parti de son appartement actuel. En revanche, elle reste libre de disposer comme elle l'entend de la quotité insaisissable. Dame Henry n'a pas le droit de sous-louer son appartement. Mais elle peut certainement trouver un logement de 150 fr. par mois. Si, dans le calcul du minimum vital, on substitue cette somme

BGE 87 III 100 (102):

à 188 fr., on obtient un montant saisissable de 12 fr. par mois.
C.- Dame Henry défère la cause au Tribunal fédéral, en concluant à l'annulation de la saisie ordonnée.
 
Considérant en droit:
De même, un débiteur dont les créanciers sont obligés de saisir le salaire faute d'autres biens doit réduire ses frais de logement dans la mesure du possible (RO 57 III 207). Cependant, il est notoire que, surtout dans les grandes villes, les appartements à loyer modeste sont rarement libres et sont difficiles à obtenir. Pour ne pas léser le débiteur, on doit donc en principe exiger du créancier, comme pour la saisie d'un objet de valeur visé par l'art. 92 LP, qu'il mette lui-même à la disposition du débiteur un logis de remplacement suffisant et sensiblement moins coûteux. C'est seulement si le débiteur a sans aucun doute la possibilité de se loger à meilleur compte (par exemple en sous-louant une partie de son appartement) qu'on peut faire abstraction de cette condition.
Lorsque, en vertu de ces règles, le débiteur est tenu de réduire ses frais de logement, on ne saurait lui ordonner, comme l'a fait l'autorité de première instance, de déménager ou de sous-louer une ou plusieurs pièces de son appartement. Les critiques que la Cour cantonale adresse à la décision de l'autorité inférieure sont fondées à cet égard. Les autorités de poursuite doivent simplement, dans le calcul du minimum vital, compter non les frais de logement effectifs du débiteur, mais le montant auquel

BGE 87 III 100 (103):

il pourrait les réduire. Il est libre, en revanche, de disposer comme il l'entend de la quotité insaisissable ainsi déterminée.
b) En l'espèce, le créancier ne propose pas d'autre logement à la recourante. Les juges cantonaux déclarent, il est vrai, qu'elle peut "certainement" trouver un appartement de 150 fr. par mois. Mais il s'agit là d'une supposition plutôt que d'une constatation. Aussi bien le nombre des appartements vides est-il très réduit à Lausanne. D'après l'Annuaire statistique de la Suisse (éd. 1959/1960, p. 189), ils ont passé de 266 en 1955 à 33 en 1959 (et ce chiffre comprend les appartements qui, le jour déterminant, étaient vides mais déjà loués). En outre, il est notoire qu'on ne peut généralement trouver un appartement à loyer peu élevé qu'après des recherches longues et persévérantes. On ne saurait donc admettre que la recourante aurait sans aucun doute la possibilité de trouver un appartement pour 150 fr. par mois (y compris le chauffage et l'eau chaude). En revanche, elle pourrait certainement louer une chambre non meublée qui lui coûterait sensiblement moins que son logis actuel. Mais l'économie qu'elle réaliserait ainsi serait compensée, en tout cas dans une large mesure, par le fait qu'il lui serait plus difficile de préparer ses repas elle-même, de faire ses lessives, etc. Ainsi, on ne saurait tenir pour certain que la recourante puisse se loger à des conditions sensiblement plus favorables. Il faut donc compter 188 fr. pour le loyer, ce qui empêche toute saisie de salaire.
Par ces motifs, la Chambre des poursuites et des faillites
admet le recours et annule la décision attaquée.