BGE 121 II 39
 
7. Extrait de l'arrêt de la Ière Cour de droit public du 20 février 1995 dans la cause Association pour la sauvegarde de Corsier et environs et consorts contre Service des eaux de Vevey-Montreux, Département des travaux publics, de l'aménagement et des transports et Conseil d'Etat du canton de Vaud (recours de droit administratif)
 
Regeste
Plan betreffend Grundwasserschutzzonen, Verwaltungsgerichtsbeschwerde, Beschwerdelegitimation; Art. 99 lit. c, Art. 103 lit. a OG; Art. 20 GSchG, Art. 13 ff. VWF.
Der Eigentümer eines an das öffentliche Trinkwasserversorgungsnetz angeschlossenen Grundstückes oder ein einfacher Wasserbezüger ist grundsätzlich nicht legitimiert, die Festlegung von Grundwasserschutzzonen mittels Verwaltungsgerichtsbeschwerde anzufechten (E. 2c).
Verbandsbeschwerderecht (E. 2d).
 
Sachverhalt


BGE 121 II 39 (40):

Le Service des eaux de Vevey-Montreux (ci-après: le Service des eaux) est une association intercommunale regroupant huit communes du district de Vevey, parmi lesquelles la commune de Corsier-sur-Vevey. Cet organisme assure la fourniture et la distribution de l'eau potable dans ces communes; il exploite de nombreuses sources et il dispose de stations de pompage dans le lac Léman. Le Service des eaux est en particulier propriétaire de cinq sources au lieu-dit "Les Monts-de-Corsier", à Corsier-sur-Vevey; il a mandaté des spécialistes pour qu'ils effectuent une étude hydrogéologique de ces captages, en vue de la délimitation de zones de protection des sources. Sur la base des propositions de ces spécialistes, le Département cantonal des travaux publics, de l'aménagement et des transports (ci-après: le département) a établi un plan de délimitation des zones de protection SI, SII et SIII pour les cinq sources précitées, conformément aux exigences de l'art. 63 de la loi cantonale sur la protection des eaux contre la pollution (LVPEP). Ce plan, accompagné d'un règlement, a été mis à l'enquête publique du 22 novembre au 21 décembre 1991.
L'Association pour la sauvegarde de Corsier et environs (ci-après: l'Association), ainsi que certains de ses membres agissant à titre personnel - soit M., R. et quatre autres particuliers (ci-après: M. et consorts) -, ont formé opposition, en faisant valoir en substance que pour certains captages, les zones de protection seraient inadaptées ou insuffisantes pour prévenir efficacement les pollutions. L'Association, régie par les art. 60 ss CC, a pour but statutaire "de sauvegarder le

BGE 121 II 39 (41):

patrimoine de la région corsiérane tel qu'il est constitué par ses monuments et immeubles historiques, classés ou non, ses sites, ses zones de verdure, ses biotopes, ses parcs et certains arbres, notamment". Quant aux opposants M. et consorts, ils habitent le village de Corsier-sur-Vevey, qui se trouve à plus de deux kilomètres des captages litigieux; M. et R. sont par ailleurs propriétaires de bâtiments d'habitation dans cette localité.
Par avis motivé du 19 mai 1992, le département a proposé au Conseil d'Etat du canton de Vaud d'écarter cette opposition. Agissant conjointement, l'Association ainsi que M. et consorts ont adressé au Conseil d'Etat une requête en réexamen de leur opposition; cette autorité est en effet compétente pour adopter le plan des zones de protection (cf. art. 63 al. 6 LVPEP, qui renvoie aux dispositions de la loi cantonale sur l'aménagement du territoire et les constructions [LATC] concernant les plans d'affectation cantonaux). Le Conseil d'Etat a déclaré la requête irrecevable par décision rendue le 3 décembre 1993. Il a considéré que les particuliers, même propriétaires d'immeubles, ne pouvaient pas, en tant que consommateurs d'eau potable, se prévaloir d'un intérêt digne de protection à ce propos, car ils n'étaient pas touchés plus que la généralité des administrés; le Conseil d'Etat n'est pas non plus entré en matière sur les conclusions de l'Association.
Agissant par la voie du recours de droit administratif, l'Association ainsi que M. et consorts ont demandé au Tribunal fédéral d'annuler la décision prise par le Conseil d'Etat. Le recours a été rejeté, dans la mesure où il était recevable.
 
Extrait des considérants:
a) Selon l'art. 97 OJ en relation avec l'art. 5 PA, la voie du recours de droit administratif est ouverte contre les décisions fondées sur le droit public fédéral - ou qui auraient dû l'être -, à condition qu'elles émanent des autorités énumérées à l'art. 98 OJ et pour autant qu'aucune des exceptions prévues aux art. 99 à 102 OJ ou dans la législation spéciale ne soit réalisée. Le recours de droit administratif est également recevable contre des décisions fondées sur le droit cantonal et sur le droit fédéral, dans la mesure où la violation de dispositions de droit fédéral directement applicables est en jeu (cf. art. 104 let. a OJ; ATF 120 Ib 27 consid. 2a,

BGE 121 II 39 (42):

224 consid. 2a, 287 consid. 3a et les arrêts cités). Une décision de refus d'entrer en matière prise, comme en l'espèce, par une autorité cantonale statuant en dernière instance (cf. art. 98 let. g OJ; en droit vaudois, il n'y a pas de recours au Tribunal administratif cantonal contre les décisions du Conseil d'Etat - cf. art. 4 al. 2 de la loi cantonale sur la juridiction et la procédure administratives [LJPA]), et fondée sur le droit cantonal de procédure - notamment sur les règles définissant la qualité pour recourir -, peut faire l'objet d'un recours de droit administratif au Tribunal fédéral (pour autant que cette voie de recours soit ouverte) dans les cas où l'autorité, si elle avait statué sur le fond, aurait dû appliquer le droit administratif fédéral (ATF 118 Ia 8 consid. 1a, ATF 118 Ib 326 consid. 1b, ATF 116 Ib 8 et les arrêts cités).
b) aa) Les mesures "d'organisation du territoire" nécessaires à la protection des eaux souterraines ou à la sauvegarde de la qualité des eaux ont été placées par le législateur fédéral dans la compétence des cantons; ces mesures sont régies par les art. 19 ss de la loi fédérale du 24 janvier 1991 sur la protection des eaux, entrée en vigueur le 1er novembre 1992 (LEaux; RS 814.20). Auparavant, des dispositions analogues figuraient aux art. 29 ss de la loi fédérale du 8 octobre 1971 sur la protection des eaux contre la pollution (LPEP); la révision de la législation fédérale n'a entraîné, à ce propos, aucune modification de la réglementation sur le fond (cf. Message du Conseil fédéral concernant l'initiative populaire "pour la sauvegarde de nos eaux" et la révision de la loi fédérale sur la protection des eaux, FF 1987 II p. 1143). Le droit fédéral prévoit en particulier la création de zones de protection des eaux souterraines autour des captages; les cantons doivent délimiter ces zones et fixer les restrictions nécessaires du droit de propriété (art. 20 al. 1 LEaux). Les zones de protection sont définies plus précisément aux art. 13 ss de l'ordonnance du 28 septembre 1981 sur la protection des eaux contre les liquides pouvant les altérer (OPEL; RS 814.226.21). La zone S est définie à l'art. 14 OPEL, qui a la teneur suivante:
"La zone S comprend:
a. Les zones de protection établies autour de captages d'eaux souterraines et de captages de sources (art. 30 de la loi [actuellement: art. 20 LEaux]), soit la zone de captage (zone S 1), la zone de protection rapprochée (zone S 2) et la zone de protection éloignée (zone S 3);
b. Les périmètres de protection des eaux souterraines (art. 31 de la loi [actuellement: art. 21 LEaux])."
Le plan de délimitation des zones de protection SI, SII et SIII pour les sources des Monts-de-Corsier a été établi en application des art. 20 LEaux

BGE 121 II 39 (43):

(ou 30 LPEP) et 14 let. a OPEL (les zones SI, SII et SIII de l'art. 63 LVPEP correspondent manifestement aux zones S 1, S 2 et S 3 du droit fédéral; cf. ATF ATF 120 Ib 224 consid. 3). Le droit cantonal vaudois prévoit que ces zones, qui entraînent des restrictions pour les propriétaires des biens-fonds inclus dans leurs périmètres (interdictions de construire, prescriptions relatives aux cultures, etc.; cf. ATF 120 Ib 224 consid. 4), sont adoptées sous la forme de plans d'affectation - en l'occurrence de plans d'affectation cantonaux, selon les art. 73 ss LATC (cf. aussi art. 47 let. n LATC). Ces zones de protection ne sont toutefois pas, en soi ou matériellement, des mesures de planification au sens de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire; elles sont fondées directement sur la législation fédérale de la protection des eaux ainsi que sur les dispositions cantonales d'exécution (cf. JAAC 49 n. 34 consid. 1). Il s'agit néanmoins, du point de vue formel, d'éléments particuliers du plan d'affectation réglant de façon générale, pour le territoire concerné, le mode d'utilisation du sol (cf. ATF 120 Ib 287 consid. 3c/cc).
bb) L'art. 99 let. c OJ dispose que le recours de droit administratif au Tribunal fédéral n'est pas recevable contre "des décisions relatives à des plans, en tant qu'il ne s'agit pas de décisions sur opposition contre des expropriations ou des remembrements". Cette clause d'exclusion du recours de droit administratif a été appliquée, ces dernières années, aux décisions cantonales relatives aux plans des zones de protection des eaux souterraines et le Conseil fédéral était l'autorité fédérale de recours en cette matière (cf. art. 73 al. 1 let. c PA; cf. prononcés du Conseil fédéral publiés in JAAC 38 n. 104, 38 n. 105, 44 n. 66, 45 n. 44, 47 n. 36, 49 n. 34); la réglementation spéciale de l'art. 34 al. 3 LAT ne s'applique pas dans ce domaine (cf. art. 67 LEaux). Le Tribunal fédéral considère désormais - en accord avec le Conseil fédéral, avec qui il a procédé à un échange de vues - que la voie du recours de droit administratif est ouverte lorsqu'un tel plan est contesté (ATF 120 Ib 225 consid. 1; cf. aussi ATF 120 Ib 136 consid. 1). La décision attaquée peut donc faire l'objet d'un recours de droit administratif (cf. supra, consid. 2a in fine).
c) aa) Aux termes de l'art. 103 let. a OJ, a qualité pour recourir quiconque est atteint par la décision attaquée et a un intérêt digne de protection à ce qu'elle soit annulée ou modifiée. Selon la jurisprudence, le recourant doit être touché dans une mesure et avec une intensité plus grandes que la généralité des administrés, et l'intérêt invoqué - qui n'est pas nécessairement un intérêt juridiquement protégé, mais qui peut être un intérêt de fait - doit se trouver, avec l'objet de la contestation, dans un

BGE 121 II 39 (44):

rapport étroit, spécial et digne d'être pris en considération; il faut donc que l'admission du recours procure au recourant un avantage, de nature économique, matérielle ou idéale. Le recours d'un particulier formé dans l'intérêt de la loi ou d'un tiers est en revanche irrecevable (cf. ATF 120 Ib 48 consid. 2a, 59 consid. 1c, ATF 120 V 39 consid. 2b, ATF 119 Ib 179 consid. 1c, ATF 118 Ib 614 consid. 1b et les arrêts cités).
bb) Le Tribunal fédéral a déjà admis la qualité pour recourir du propriétaire foncier qui conteste un plan incluant son terrain dans le périmètre d'une zone de protection S 1, S 2 ou S 3; cet administré est en effet soumis à de nouvelles restrictions dans l'exercice de son droit de propriété et l'annulation de la mesure contestée lui permettrait d'utiliser son bien-fonds de manière différente (cf. ATF 120 Ib 224; arrêt non publié du 28 octobre 1994 en la cause I c. commune de W.).
Le particulier ou la collectivité qui est propriétaire de la source ou qui exploite le captage a aussi en principe qualité pour recourir, au sens de l'art. 103 let. a OJ, contre une décision de l'autorité cantonale relative à la délimitation des zones de protection des eaux souterraines. Dans le canton de Vaud, ce sont les communes qui sont tenues de fournir l'eau potable sur leur territoire (art. 1er de la loi cantonale sur la distribution de l'eau); elles peuvent constituer à cet effet une organisation intercommunale (art. 4 de la loi). Les communes doivent veiller à la bonne qualité de l'eau potable fournie sur leur territoire (art. 2 de la loi); elles utilisent l'eau de leurs propres sources, des eaux publiques dont l'utilisation leur a été concédée, ou des eaux dont elles ont acquis le droit d'utilisation par la voie de l'expropriation ou selon une convention (art. 3 de la loi). L'eau est fournie au propriétaire de l'immeuble raccordé au réseau (lié au fournisseur par un "abonnement"; cf. art. 16 de la loi), et non pas directement au consommateur. La décision de l'autorité cantonale délimitant les zones de protection atteint la commune - ou l'association intercommunale - qui utilise la source, et cette collectivité, chargée de distribuer de l'eau potable de bonne qualité à ses abonnés, peut invoquer à ce propos un intérêt digne de protection (cf. ATF 118 Ib 614 consid. 1b, ATF 117 Ib 406 consid. 1a). En effet, dans le cas où ces zones ne seraient pas suffisamment étendues et négligeraient de prendre en compte toutes les caractéristiques hydrogéologiques du terrain, les risques de pollution de la source seraient plus difficiles à prévenir et l'exploitation du captage serait mise en cause; dans l'autre hypothèse, à savoir lorsque l'autorité cantonale délimite trop largement les zones de

BGE 121 II 39 (45):

protection, le détenteur du captage pourrait être amené à indemniser des propriétaires pour des restrictions en définitive non justifiées (cf. art. 20 al. 2 let. c LEaux) et il aurait également un intérêt digne de protection à contester le plan.
cc) La situation du propriétaire abonné - ou raccordé - au réseau de distribution d'eau potable est manifestement différente de celle du propriétaire dont le fonds est inclus dans une zone de protection, ainsi que de celle de l'organe chargé de fournir l'eau. Dans un arrêt récent, le Tribunal fédéral a considéré que le particulier raccordé aux conduites d'eau n'avait pas un intérêt digne de protection à obtenir l'annulation d'une décision relative à la construction d'une voie de chemin de fer lorsqu'il invoquait simplement, à l'encontre de cette nouvelle installation, les risques qu'elle présenterait pour l'alimentation en eau dans la région; ce particulier, qui ne se trouve pas dans une relation suffisamment étroite avec l'objet de la contestation, n'a donc pas qualité pour recourir (consid. 1 non publié de l' ATF 120 Ia 270). Il en va de même, en principe, lorsque ce particulier conteste le périmètre des zones de protection autour d'un captage.
Les recourants propriétaires de bâtiments raccordés au réseau du Service des eaux font néanmoins valoir qu'ils pourraient être intoxiqués s'il leur était fourni de l'eau non potable, et qu'un risque d'intoxication des habitants diminue la valeur de leurs immeubles. En vertu de la législation vaudoise, comme cela a été exposé (supra, consid. 2c/bb), la collectivité est tenue de fournir aux abonnés de l'eau de bonne qualité (cf. art. 2 de la loi cantonale sur la distribution de l'eau); il est notoire que tant les moyens de traitement - chloration, etc. - que l'organisation des réseaux de distribution - en l'espèce, l'eau fournie par le Service des eaux provient de nombreux captages ou stations de pompage, répartis sur un vaste périmètre (en 1992, cet organisme a vendu plus de 8 millions de m3 d'eau, dont une faible proportion, soit environ 100'000 m3, était captée aux Monts-de-Corsier) - permettent en règle générale aux communes de satisfaire à cette obligation légale. L'hypothèse d'une pollution accidentelle d'une source du réseau ne saurait être exclue, notamment si les mesures de protection se révélaient inadéquates; dans une telle éventualité toutefois, la collectivité responsable devrait renoncer à l'exploitation du captage en cause, pour autant que la qualité de l'eau distribuée soit affectée par cette pollution, et il est peu probable que l'abonné subisse effectivement un préjudice. En outre, même une délimitation très large des zones de

BGE 121 II 39 (46):

protection ne supprimerait pas de façon absolue les risques de pollution des sources. Dans le cas particulier, cependant, la contestation ne porte pas sur les obligations de la collectivité chargée de fournir l'eau aux abonnés, mais uniquement sur les mesures de planification prises par le canton en vue de la protection de certaines sources; or les intérêts invoqués par les recourants propriétaires d'immeubles ne sont pas liés de façon spéciale et suffisamment étroite à cet objet. Ces recourants n'ont donc pas, à défaut d'intérêt digne de protection, qualité pour former un recours de droit administratif contre une décision cantonale relative à l'adoption d'un plan établi conformément à l'art. 20 LEaux.
A fortiori, les simples consommateurs d'eau potable - locataires d'appartements domiciliés sur le territoire de la commune ou consommateurs occasionnels -, qui sont approvisionnés par l'intermédiaire de propriétaires abonnés, n'ont pas non plus qualité pour recourir au sens de l'art. 103 let. a OJ. Le recours de M. et consorts est donc irrecevable de ce point de vue. Cela étant, ces recourants ne font pas valoir que les règles cantonales définissant la qualité pour former une requête en réexamen d'une opposition par le Conseil d'Etat - règles sur lesquelles la décision cantonale d'irrecevabilité est fondée (cf. art. 60 al. 2 LATC, dans sa teneur à la date du prononcé attaqué, par renvoi des art. 63 al. 6 LVPEP et 73 LATC) -, poseraient des exigences plus strictes ou différentes de celles qui découlent de l'art. 103 let. a OJ et qui doivent de toute manière être appliquées par l'autorité cantonale lorsque la voie du recours de droit administratif est ouverte (cf. ATF 118 Ib 442 consid. 2b).
d) aa) En application de l'art. 103 let. a OJ, une association peut être admise à agir par la voie du recours de droit administratif, sans être elle-même touchée par la décision entreprise, pour autant qu'elle ait pour but statutaire la défense des intérêts dignes de protection de ses membres, que ces intérêts soient communs à la majorité ou au moins à un grand nombre d'entre eux et, enfin, que chacun de ceux-ci ait qualité pour s'en prévaloir à titre individuel (ATF 120 Ib 59 consid. 1a et les arrêts cités). Ces conditions ne sont manifestement pas remplies en l'espèce: l'Association recourante n'a pas pour but la défense des intérêts de ses membres; de toute manière, ceux-ci n'ont pas, à titre individuel, la qualité pour recourir dans ce domaine (cf. supra, consid. 2c). En outre, la recourante a d'emblée admis qu'elle ne pouvait se prévaloir des règles spéciales des art. 12 LPN (RS 451) ou 55 LPE (RS 814.01), en relation avec l'art. 103 let. c OJ, applicables aux seules organisations d'importance nationale.


BGE 121 II 39 (47):

bb) L'Association recourante soutient néanmoins que le Conseil d'Etat aurait dû entrer en matière sur sa requête car, selon elle, la qualité pour recourir serait généralement reconnue, en droit cantonal vaudois, aux associations de protection de la nature. Elle fait valoir qu'un plan de délimitation des zones de protection des eaux souterraines tend non seulement à assurer l'approvisionnement en eau potable des habitants, mais aussi à garantir l'alimentation en eau des biotopes humides; elle relève à cet égard que ses statuts la chargent précisément d'intervenir pour la sauvegarde des biotopes de la région corsiérane. L'Association recourante se plaint d'un déni de justice formel et d'une application arbitraire du droit cantonal.
Il ne se justifie pas d'examiner plus précisément si la voie du recours de droit administratif est ouverte à cet égard ou si, au contraire, seule la voie, subsidiaire (art. 84 al. 2 OJ), du recours de droit public entre en considération. De toute manière, l'Association a demandé que son recours soit, le cas échéant, traité comme un recours de droit public; ce recours est recevable en tant que l'on se plaint d'une application arbitraire du droit cantonal autonome et son auteur doit avoir, pour ce seul grief, la qualité requise au sens de l'art. 88 OJ. Il n'y a pas non plus lieu de vérifier si l'Association recourante, partie à la procédure cantonale, a qualité pour se plaindre d'une violation des garanties formelles dont elle se prévaut (cf. ATF ATF 119 Ia 4 consid. 1, ATF 119 Ib 305 consid. 3 et les arrêts cités); d'ailleurs, le recours de droit administratif, lorsqu'il est recevable, peut être formé pour violation du droit public fédéral (art. 104 let. a OJ) et cette notion inclut, dans les domaines relevant de la juridiction administrative fédérale, les droits constitutionnels des citoyens (ATF 120 Ib 287 consid. 3d, ATF 118 Ib 13 consid. 1a, 51 consid. 1b, 417 consid. 2a et les arrêts cités). Quoi qu'il en soit, les griefs de la recourante sont manifestement mal fondés.
cc) L'Association recourante soutient qu'il serait loisible aux autorités cantonales de conférer aux associations se vouant à la protection de la nature un droit de recours en matière de sauvegarde des ressources en eau, mais elle n'indique pas précisément par quelle norme le législateur cantonal aurait conféré ce droit aux associations, dans la mesure qu'elle décrit, ni sur quelle base sa requête aurait dû être déclarée recevable. Elle se réfère à l'art. 71 LVPEP, qui, selon elle, définirait la qualité pour recourir dans ce domaine selon des critères différents de ceux du droit fédéral. Or cette disposition a été abrogée par la loi cantonale du 18 décembre 1989 modifiant la loi sur la protection des eaux contre la pollution (en relation avec l'adoption de la loi cantonale sur la

BGE 121 II 39 (48):

juridiction et la procédure administratives); ni l'art. 37 LJPA, qui définit de façon générale la qualité pour recourir en procédure administrative vaudoise, ni l'art. 60 al. 2 LATC (dans sa teneur à la date de la décision attaquée) ne prévoient un régime spécial pour le recours des associations. L'Association recourante mentionne encore l'art. 90 de la loi cantonale sur la protection de la nature, des monuments et des sites (LPNMS); selon cette disposition, "les associations d'importance cantonale qui, aux termes de leurs statuts, se vouent à la protection de la nature, des monuments et des sites, ont qualité pour recourir contre les décisions prises en application de la présente loi et susceptibles de recours". Or la décision attaquée n'a manifestement pas été prise en application de la législation cantonale sur la protection de la nature et l'Association recourante ne saurait se prévaloir de cette règle spéciale; au surplus, il ne serait pas arbitraire de retenir que cette organisation n'a, en vertu de ses statuts, qu'une importance régionale ou locale, et non pas cantonale. Le Conseil d'Etat était donc fondé à déclarer la requête irrecevable au motif que l'Association n'avait pas d'intérêt digne de protection à la modification du plan des zones de protection des sources des Monts-de-Corsier.