BGE 89 II 284
 
39. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour civile du 26 septembre 1963 dans la cause dames Beckmann et Volk contre Gotschaux.
 
Regeste
Das gemeinschaftliche (korrespektive) Testament ist im schweizerischen Recht nicht anerkannt (Hinweis auf die Rechtsprechung).
 
Sachverhalt


BGE 89 II 284 (284):

Max Fischer et Lucie-Pauline Gotschaux se sont mariés à Paris le 28 juillet 1909. Ils ont conclu dans cette ville, le 27 juillet 1909, un contrat de mariage par lequel ils ont adopté le régime de la communauté de biens réduite aux acquêts selon les art. 1498 et 1499 du Code civil français. Les deux époux sont décédés successivement à Genève:
dame Fischer-Gotschaux, le 10 mars 1955; Max Fischer,

BGE 89 II 284 (285):

le 17 octobre 1959. Ils ont laissé un testament écrit à la main par l'épouse, sur une feuille de papier à l'en-tête "Max Fischer", ainsi libellé:
"En pleine possession de nos facultés mentales d'un commun accord nous avons décidé aujourd'hui le 2 juillet 1950 qu'au cas où un de nous deux viendrait à mourir avant l'autre toute notre fortune, mobilier, objets, argent, valeurs, etc., deviendra la propriété exclusive du conjoint survivant qui aura le droit illimité d'en disposer librement.
Il est notre intention de faire partager après notre mort tout ce qui restera à parts égales entre les familles. Mais le survivant éventuel pourra modifier ces dispositions à son gré."
Daté de Genève, le 2 juillet 1950, le testament est signé par "Lucie Pauline Fischer née Gotschaux" et par "Max Fischer". Celui-ci a fait précéder sa signature de la mention "lu et approuvé".
Les héritiers légaux de dame Fischer étaient son mari et son neveu Jean Gotschaux. Décédé à son tour, Max Fischer a laissé comme héritiers légaux ses deux nièces Elisabeth Beckmann et Ida Volk.
Jean Gotschaux a introduit contre les héritiers de Max Fischer une action tendant à l'annulation du testament conjonctif du 2 juillet 1950. Statuant en seconde instance le 7 mai 1963, la Cour de justice de Genève lui a donné gain de cause.
Les défendeurs ont formé un recours en réforme que le Tribunal fédéral a rejeté.
 
Considérant en droit:
4. Sans contester que le testament conjonctif soit inadmissible en droit suisse (RO 46 II 18; 47 II 50; 70 II 259; 76 II 278/9, consid. 3 a), les recourants prétendent que l'acte du 2 juillet 1950 ne présente pas ce caractère. A leur avis, il s'agirait du testament olographe de dame Fischer-Gotschaux, que son mari se serait contenté d'approuver, sans disposer lui-même de sa propre succession. Assurément, la doctrine admet que le testament conjonctif, invalide comme tel, demeure valable en tant que disposition pour cause de mort de l'un des testateurs, si la forme

BGE 89 II 284 (286):

requise par l'art. 505 CC est observée; encore faut-il que le testament ainsi maintenu ne soit pas lié à l'autre, qui deviendrait caduc, par une dépendance étroite (TUOR, rem. prél. 17 c) sur le pacte successoral; ESCHER, no 9 de l'introduction au titre XIV CC). Il n'est pas nécessaire de dire aujourd'hui si une conversion semblable est admissible en principe. Supposé que la question soit tranchée par l'affirmative, la conversion serait exclue en l'espèce par l'interdépendance des dispositions. En effet, si l'acte est bien écrit, daté et signé de la main de dame Fischer-Gotschaux, il porte aussi la signature de Max Fischer, précédée des mots "lu et approuvé". En outre, il est rédigé à la première personne du pluriel. La simple lecture du texte montre qu'il ne s'agit pas d'un pluriel de majesté. Les termes employés expriment sans équivoque la décision prise d'un commun accord par les deux époux de s'instituer mutuellement comme héritiers universels de toute leur fortune et de partager celle-ci, après le décès du second d'entre eux, par parts égales entre les deux familles. Chacun des époux a disposé ainsi de tous les biens compris dans la communauté d'acquêts instituée par le contrat de mariage. Rien ne permet de dire que dame Fischer-Gotschaux aurait testé de la même manière, sans la participation de son mari. Au contraire, les institutions réciproques apparaissent intimement liées. Dès lors, l'acte ne peut être considéré comme le testament valable de l'épouse.
Quant à la conversion du testament conjonctif en un pacte successoral, elle est exclue d'emblée, du fait que la forme prévue par l'art. 512 CC n'a pas été respectée.