BGE 113 Ib 299
 
47. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour de droit public du 21 août 1987 dans la cause X. et Y. contre commune de Puidoux et Conseil d'Etat du canton de Vaud (recours de droit public)
 
Regeste
Art. 8 und 33 RPG; Schutzplan für das Gebiet von Lavaux und Rechtsschutz.
 
Sachverhalt


BGE 113 Ib 299 (300):

La loi vaudoise sur le plan de protection de Lavaux (LPPL), adoptée le 12 février 1979 par le Grand Conseil vaudois et entrée en vigueur le 9 mai de la même année, a réparti les biens-fonds compris dans le périmètre de protection en divers territoires (viticoles, agricoles, d'intérêt public, de villages et hameaux, etc.) et a fixé aux communes concernées un délai d'une année pour établir et adopter des plans d'extension dans lesquels les territoires protégés, avec les principes qui leur étaient applicables, seraient transposés, sous réserve de légères adaptations nécessitées par les conditions topographiques locales (art. 6 al. 1 et 7 al. 1 LPPL).
X. et Y. sont propriétaires, sur le territoire de la commune de Puidoux, non loin du Signal de Chexbres, de deux parcelles ayant resp. 7'815 m2 et 2'533 m2 et vouées jusqu'à ce jour à la culture céréalière. Classées dans l'ancien plan de zones communal de 1969/70 en zone sans affectation spéciale, puis incluses dans une zone protégée en vertu de l'arrêté fédéral du 17 mars 1972 instituant des mesures urgentes en matière d'aménagement du territoire, ces parcelles sont comprises, depuis l'entrée en vigueur de la LPPL, le 9 mai 1979, dans le périmètre du plan de protection de Lavaux.


BGE 113 Ib 299 (301):

Le 2 mars 1982, la Municipalité de Puidoux a approuvé, pour l'ensemble du territoire communal, un plan d'extension destiné à remplacer celui de 1969/70 et classant les deux parcelles en question en zone agricole, mesure à laquelle X. et Y. se sont opposés. Leur opposition ayant été levée par le Conseil communal, les deux propriétaires ont saisi le Conseil d'Etat d'une requête au sens de l'art. 2 de l'arrêté cantonal du 19 octobre 1983 concernant la protection juridique en matière d'opposition au plan d'extension. Ils demandaient la modification de l'affectation donnée à leurs parcelles dans le nouveau plan et le transfert de celles-ci dans le territoire à bâtir. Le Conseil d'Etat a rejeté la requête. Contre cette décision, X. et Y. ont formé un recours de droit administratif et un recours de droit public, pour violation des art. 8 et 33 LAT et - implicitement - du principe de la force dérogatoire du droit fédéral, pour classement arbitraire de leurs terrains en zone agricole et violation de l'égalité de traitement.
Le Tribunal fédéral a déclaré le recours de droit administratif irrecevable et a rejeté le recours de droit public dans la mesure où il était recevable.
 
Extrait des considérants:
Ce plan de protection a été institué par une loi du 12 février 1979 entrée en vigueur le 9 mai 1979, c'est-à-dire avant l'adoption de la nouvelle loi fédérale sur l'aménagement du territoire qui définit, à son art. 8, le contenu minimum des plans directeurs des cantons. Cela n'empêche nullement le Tribunal fédéral d'examiner la nature juridique de ce plan au regard du nouveau droit. Si, par sa portée, il s'apparente à une zone réservée, il s'en distingue par la durée indéterminée de sa validité, les zones réservées ne pouvant en principe être prévues que pour cinq ans au plus en vertu de l'art. 27 al. 2 LAT. Le plan de protection de Lavaux détermine globalement l'affectation des divers secteurs territoriaux de la région. S'il lie les autorités de planification comme cela ressort des art. 6 et 7 LPPL, il ne fixe pas en revanche définitivement le sort des parcelles, dont le mode d'utilisation doit être précisé dans les plans d'affectation. Il en résulte que le plan

BGE 113 Ib 299 (302):

de protection de Lavaux équivaut, matériellement, à un plan directeur cantonal au sens des art. 6 ss LAT et 3 ss de l'ordonnance d'exécution du 26 mars 1986 (cf. ATF 107 Ia 82, ATF 105 Ia 235 consid. cc).
Compte tenu du rapport existant entre les plans directeurs et les plans d'affectation, et de leur portée respective, la protection juridique des propriétaires intéressés doit être assurée lors de l'adoption des plans d'affectation. L'art. 33 LAT dit que ceux-ci sont mis à l'enquête publique (al. 1) et fait obligation au législateur cantonal de prévoir à leur encontre une voie de recours au moins (al. 2), ouverte auprès d'une autorité ayant un libre pouvoir d'examen, qui soit accessible aux intéressés au moins dans les mêmes limites que le recours de droit administratif au Tribunal fédéral (al. 3). Cette protection juridique ne saurait naturellement être restreinte lorsqu'un plan d'affectation est adopté en exécution d'un plan directeur. Il est par conséquent loisible au propriétaire qui s'oppose à une mesure d'aménagement ou qui recourt contre elle, de mettre en discussion la constitutionnalité d'un plan directeur dans la mesure où l'autorité de planification devait se borner à en transposer le contenu dans son plan d'affectation; celui-ci actualise en effet simplement alors une lésion virtuelle des intérêts du propriétaire touché par une mesure d'aménagement dictée par le plan directeur que le lésé n'a pas eu la possibilité d'attaquer au moment de son adoption.
Contrairement à l'opinion des recourants, le Conseil d'Etat n'a pas méconnu en l'espèce ces exigences. Il a certes constaté qu'il n'avait pas la compétence de modifier lui-même le plan de protection de Lavaux, ce qui est évident puisque celui-ci a été adopté par le législateur cantonal. Il n'en a pas moins examiné librement le bien-fondé des mesures d'aménagement litigieuses et procédé à une pesée complète des intérêts en présence. Il n'a donc pas limité son pouvoir d'appréciation à la seule question de la conformité de ces mesures au plan de protection de Lavaux. Au regard de l'art. 33 LAT, il est sans importance qu'il se soit livré à cet examen en lieu et place de l'autorité communale qui, dans son avis motivé, s'était bornée à invoquer le plan de protection de Lavaux, pour rejeter les oppositions des recourants. Jouissant d'une pleine cognition, l'autorité intimée pouvait en effet apprécier librement s'il était plus opportun de renvoyer l'affaire à la commune ou de statuer elle-même sur le fond, réparant ainsi l'irrégularité formelle dont l'avis motivé était entaché.


BGE 113 Ib 299 (303):

Le grief de violation de l'art. 2 Disp. trans. Cst., voire du droit d'être entendu garanti par l'art. 4 Cst., est donc manifestement mal fondé.