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Original
 
Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
1B_45/2020
Arrêt du 20 février 2020
Ire Cour de droit public
Composition
MM. et Mme les Juges fédéraux Fonjallaz,
Juge présidant, Kneubühler et Jametti.
Greffier : M. Kurz.
Participants à la procédure
A.________, représenté par Me Claude-Alain Boillat, avocat,
recourant,
contre
Ministère public de l'arrondissement du Nord vaudois.
Objet
Procédure pénale, refus de dessaisissement,
recours contre l'ordonnance du Ministère public
du canton de Vaud, Procureur général,
du 23 décembre 2019 (PE19.012360).
Considérant en fait et en droit :
1.
Dans le cadre d'une instruction contre A.________ pour vol et tentative de brigandage, le prévenu a demandé au Ministère public de l'arrondissement du Nord vaudois (ci-après: le Ministère public), le 22 novembre 2019, de se dessaisir en faveur de la juridiction des mineurs. Il alléguait être né en 2003. Le 27 novembre 2019, le Ministère public a refusé de se dessaisir. Par ordonnance du 23 décembre 2019, le Procureur général du canton de Vaud (ci-après: le Procureur général) a rejeté le recours formé par le prévenu et a confirmé la décision du Ministère public. Le prévenu avait déjà fait l'objet en 2019 de cinq ordonnances pénales dans lesquelles la date de naissance retenue était le 27 octobre 2000; lors de ses premières auditions devant la police puis le Ministère public, il avait confirmé cette date. Le rapport d'expertise du 13 août 2019 estimait l'âge probable entre 18 et 20 ans (âge minimum 15,4 ans).
Par acte d'accusation du 14 décembre 2019, le Ministère public a renvoyé le prévenu devant le Tribunal correctionnel de La Côte pour y répondre de vol par métier, tentative de brigandage, dommages à la propriété, violation de domicile, infractions à la LEI et à la LStup.
Agissant par la voie du recours en matière pénale, A.________ demande au Tribunal fédéral de réformer l'ordonnance du Procureur général en ce sens que le Tribunal correctionnel doit se dessaisir au profit de la juridiction des mineurs, le recourant étant transféré dans un établissement de détention permettant la prise en charge de mineurs. Il demande l'assistance judiciaire ainsi que l'effet suspensif, en relevant que les débats ont été fixés au 10 mars 2020.
Le Ministère public se réfère à la décision attaquée et conclut au rejet du recours.
2.
Le recours porte sur une question de compétence (entre la juridiction pénale ordinaire et la juridiction pour mineurs) et le recours en matière pénale est en principe immédiatement ouvert au Tribunal fédéral en application des art. 78 et 92 al. 1 LTF (ATF 145 IV 228 consid. 1 p. 230).
Le recourant, prévenu, a un intérêt juridique à l'annulation ou à la modification de la décision entreprise, dès lors que celle-ci l'empêche en substance de pouvoir bénéficier des aménagements prévus par le droit pénal des mineurs (art. 81 al. 1 let. a et b ch. 1 LTF). Pour le surplus, le recours a été déposé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) contre une décision d'une autorité statuant en tant que dernière instance cantonale (art. 80 LTF) et les conclusions qui y sont prises sont recevables (art. 107 al. 1 LTF).
2.1. Le recourant se plaint d'arbitraire. Il relève que les autorités italiennes auraient indiqué une date de naissance en 2003, contrairement à la date mentionnée par le recourant dans la première phase de l'instruction. II avait par la suite indiqué avoir menti sur son âge, en en expliquant les raisons. L'expertise médico-légale mentionne un âge minimum de 15,4 ans; l'âge minimum serait de 16,4 ans selon les méthodes d'estimation d'âge osseux et l'examen dentaire révélerait un âge situé entre 14,4 et 22,1 ans. Il s'agirait dès lors d'un cas limite dans lequel il serait hautement probable que le recourant soit malgré tout mineur.
2.2. La détermination de l'âge réel du prévenu est une question qui relève de l'établissement des faits. Dans ce domaine, le Tribunal fédéral est lié par les constatations de la décision entreprise (art. 105 al. 1 LTF), à moins que celles-ci n'aient été établies en violation du droit ou de manière manifestement inexacte au sens des art. 97 al. 1 et 105 al. 2 LTF, soit pour l'essentiel de façon arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. Une décision n'est pas arbitraire du seul fait qu'elle apparaît discutable ou même critiquable; il faut qu'elle soit manifestement insoutenable, et cela non seulement dans sa motivation mais aussi dans son résultat. En matière d'appréciation des preuves et d'établissement des faits, il n'y a arbitraire que lorsque l'autorité ne prend pas en compte, sans aucune raison sérieuse, un élément de preuve propre à modifier la décision, lorsqu'elle se trompe manifestement sur son sens et sa portée, ou encore lorsque, en se fondant sur les éléments recueillis, elle en tire des constatations insoutenables. Le Tribunal fédéral n'entre en matière sur les moyens fondés sur la violation de droits fondamentaux, dont l'interdiction de l'arbitraire, que s'ils ont été invoqués et motivés de manière précise (art. 106 al. 2 LTF; ATF 143 IV 500 consid. 1.1 p. 503).
2.3. La décision attaquée se fonde sur les déclarations du recourant lui-même lors de ses premières auditions (et alors même que son attention avait été attirée sur le fait que des documents italiens indiquaient une date de naissance en 2003), ainsi que sur cinq ordonnances pénales rendues à Genève et Saint-Gall en 2019, dans lesquelles la date de naissance retenue - et non contestée - est celle du 27 octobre 2000. L'expertise réalisée au mois d'août 2019 par le Centre Universitaire Romand de Médecine Légale conclut, sur la base des deux méthodes d'estimation d'âge osseux, que l'âge minimum du recourant est de 16,4 ans; l'estimation sur la base de l'examen dentaire est de 18,26 ans avec un écart type de 3,84 ans, les experts estimant ainsi qu'il est probable que l'expertisé ait atteint sa 18ème année avec un âge probable entre 18 et 20 ans et un âge minimum de 15,4 ans. Le Procureur général relève que l'on ne voit pas pourquoi le recourant se serait faussement vieilli durant ses premières auditions. Le recourant prétend avoir indiqué les motifs d'un tel mensonge, en se référant à deux lettres adressées au procureur; dans la première, il affirme avoir menti sur son âge car il avait peur, et avoir déclaré précédemment être majeur pour ne pas rester en garde à vue, explications qui n'apparaissent guère compréhensibles et encore moins convainquantes; dans la seconde, le recourant se contente de déclarer qu'il préférerait être soumis au juge des mineurs. Force est dès lors de constater que le recourant ne donne aucune explication crédible sur les raisons pour lesquelles il se serait spontanément vieilli de trois ans lors de ses premières auditions, comme lors des précédentes procédures ayant abouti au prononcé d'ordonnances pénales.
Sur le vu de ce qui précède, la décision attaquée, objectivement motivée, ne se trouve contredite par aucun élément du dossier. Elle ne saurait être qualifiée d'arbitraire.
3.
Le recours doit par conséquent être rejeté. Le recourant a demandé l'assistance judiciaire. En dépit du caractère largement appellatoire du recours, l'assistance judiciaire peut être accordée au recourant. Me Claude-Alain Boillat est désigné comme avocat d'office, rétribué par la caisse du Tribunal fédéral. Le présent arrêt, rendu selon la procédure simplifiée prévue à l'art. 109 al. 2 let. a LTF, rend sans objet la demande d'effet suspensif.
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Le recours est rejeté.
2.
La demande d'assistance judiciaire est admise; Me Claude-Alain Boillat est désigné comme avocat d'office du recourant et une indemnité de 1500 fr. lui est allouée à titre d'honoraires, à payer par la caisse du Tribunal fédéral. Il n'est pas perçu de frais judiciaires.
3.
Le présent arrêt est communiqué au mandataire du recourant, au Ministère public de l'arrondissement du Nord vaudois et au Ministère public du canton de Vaud, Procureur général.
Lausanne, le 20 février 2020
Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
Le Juge présidant : Fonjallaz
Le Greffier : Kurz