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Original
 
Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
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1B_509/2018
Arrêt du 6 mars 2019
Ire Cour de droit public
Composition
MM. les Juges fédéraux Chaix, Président,
Fonjallaz et Kneubühler.
Greffière : Mme Kropf.
Participants à la procédure
A.________,
représenté par Me Guerric Canonica, avocat, Etude Canonica Valticos de Preux & Ass.,
recourant,
contre
B.________,
représentée par Me Romain Jordan, avocat,
Etude Merkt & Associés,
intimée,
Ministère public de la République et canton de Genève.
Objet
Ordonnance de refus d'obligation de garder le secret,
recours contre l'arrêt de la Chambre pénale de recours de la Cour de justice de la République et canton de Genève du 5 octobre 2018 (ACPR/574/2018 P/6899/2018).
Faits :
A.
Le 13 avril 2018, B.________ a déposé plainte pénale contre A.________ pour contrainte, séquestration, contrainte sexuelle aggravée, viol aggravé et toute autre infraction.
Par courrier du 29 juin 2018, A.________ s'est plaint des interventions dans la presse du conseil de B.________, requérant du Ministère public de la République et canton de Genève qu'il enjoigne cet avocat à garder immédiatement le silence. A.________ a réitéré sa requête le 12 juillet 2018. Interpellée par le Procureur, B.________ s'est déterminée le 20 août 2018, s'opposant à cette démarche.
Par ordonnance du 11 septembre 2018, le Ministère public a refusé d'ordonner à la partie plaignante et à ses conseils de garder le silence sur la procédure pénale - ouverte ce même jour par ordonnance séparée - dirigée contre A.________ pour viol et contrainte sexuelle.
B.
Le 5 octobre 2018, la Chambre pénale de recours de la Cour de justice de la République et canton de Genève a rejeté le recours formé par A.________ contre cette ordonnance. Cette autorité a considéré que le droit d'être entendu de ce dernier n'avait pas été violé par le Ministère public (cf. consid. 3) et que les conditions permettant, le cas échéant, de prononcer une obligation de garder le secret à la charge de la partie plaignante et de ses mandataires n'étaient pas remplies (cf. consid. 4.2).
C.
Par acte du 5 novembre 2018, A.________ forme un recours en matière pénale contre cet arrêt, concluant à son annulation. Il demande qu'ordre soit donné à B.________ et à ses conseils de garder le silence sur la procédure et les personnes impliquées dès ce jour et jusqu'à nouvel avis de la direction de la procédure, ou pour une période définie dont le Tribunal fédéral fixera la durée.
La cour cantonale s'est déterminée le 16 novembre 2018. B.________ (ci-après : l'intimée) a conclu à l'irrecevabilité du recours, subsidiairement à son rejet. Le 21 décembre 2018, le recourant a persisté dans ses conclusions et, le 7 janvier 2019, le Ministère public a renoncé à déposer des observations. Le 24 suivant, ce magistrat a toutefois précisé avoir rendu une ordonnance, le 25 octobre 2018, rejetant une demande d'accès au dossier déposée par le recourant, décision qui n'avait pas été contestée. Ce dernier s'est déterminé notamment à cet égard le 6 février 2019, observations adressées à l'intimée le 15 suivant.
Considérant en droit :
1.
Le Tribunal fédéral examine d'office sa compétence (art. 29 al. 1 LTF) et contrôle librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 144 II 184 consid. 1 p. 186).
1.1. L'arrêt attaqué a été rendu par une autorité cantonale statuant en tant que dernière instance cantonale (art. 80 LTF) dans le cadre d'une procédure pénale. Le recours a été déposé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) et, par conséquent, la voie du recours en matière pénale est en principe ouverte (art. 78 ss LTF).
1.2. S'agissant d'une décision ne mettant pas un terme à la procédure pénale, elle revêt un caractère incident et le recours n'est recevable qu'aux conditions de l'art. 93 al. 1 let. a LTF, l'hypothèse prévue à l'art. 93 al. 1 let. b LTF n'entrant pas en considération dans le cas d'espèce. En matière pénale, le préjudice irréparable au sens de la disposition susmentionnée se rapporte à un dommage de nature juridique qui ne puisse pas être réparé ultérieurement par un jugement final ou une autre décision favorable au recourant (ATF 144 IV 127 consid. 1.3.1 p. 130).
A cet égard, le recourant soutient en substance que la publicité et le battage médiatique entourant l'instruction de la plainte pénale déposée par l'intimée à son encontre seraient susceptibles d'influencer négativement le procès à venir, cela en violation du principe de présomption d'innocence dont il devrait pouvoir bénéficier; cette "campagne médiatique, tendancieuse, systématique et d'une virulence exceptionnelle" porterait également une atteinte irrémédiable à ses intérêts privés, à son honneur, ainsi qu'à sa réputation et mettrait en péril sa crédibilité et le but de la procédure. La question de savoir si ces éléments, au stade de la recevabilité, sont suffisants pour considérer que le recourant subirait un préjudice irréparable qui ne pourrait être réparé par une décision ultérieure peut rester indécise. En effet, vu la violation du droit d'être entendu alléguée, l'entrée en matière se justifie dans le cas d'espèce s'agissant d'un droit de partie invoqué par le recourant (ATF 141 IV 1 consid. 1.1 p. 5).
2.
Le recourant reproche à l'autorité précédente d'avoir considéré que la violation du droit d'être entendu soulevée à l'encontre du Ministère public aurait été guérie au cours de la procédure de recours.
2.1. La cour cantonale a retenu que, lorsqu'une requête d'une partie concernait une autre partie, la direction de la procédure se devait de consulter la seconde (cf. art. 109 al. 2 CPP). L'autorité précédente a en revanche estimé que, dans le cas d'espèce, le Ministère public n'avait pas à adresser ensuite les déterminations de l'intimée à la partie requérante, faute pour cette dernière de voir sa situation juridique affectée négativement par la décision à rendre; ce prononcé tendait en effet uniquement à limiter les droits de l'intimée et pas ceux du requérant. Vu les arguments invoqués (violation de la présomption d'innocence et atteintes à sa personnalité), on peut douter que le recourant ne soit pas personnellement et directement touché par un rejet de sa demande. Cela étant, cette question peut rester indécise.
En effet, l'autorité précédente a également considéré en substance que le vice en lien avec un éventuel droit de réplique (sur le droit de réplique, notamment pour des procédures devant les tribunaux, voir ATF 142 III 48 consid. 4.1.1 p. 53 s.; 139 I 189 consid. 3.2 p. 191 s.; 138 I 154 consid. 2.5 p. 157 s.) avait été réparé dès lors que "la partie qui se prétend lésée par une décision du ministère public peut exercer son droit d'être entendu et répliquer, si elle le souhaite, aux déterminations des autres parties, lorsqu'elles ont été recueillies" au cours de la procédure de recours; la partie doit ainsi "faire pièces aux arguments du ministère public dans la décision attaquée (art. 385 al. 1 CPP) et à ceux des autres parties qui se sont exprimées". La cour cantonale a ainsi retenu qu'au cours de la procédure de recours, le recourant avait pu "contester la motivation du Ministère public sans aucune limitation de [sa] part" (cf. consid. 3 p. 4 de l'arrêt attaqué).
Une telle appréciation par rapport à la correction d'un vice formel au cours de la procédure de recours n'est pas en soi critiquable puisque l'autorité cantonale dispose d'une pleine cognition en fait et en droit (cf. art. 393 al. 2 CPP; ATF 141 IV 396 consid. 4.4 p. 405; arrêt 1B_556/2017 du 5 juin 2018 consid. 2.1). Une guérison présuppose cependant que le recourant ait reçu - non pas un accès intégral au dossier - mais une copie des déterminations litigieuses préalablement au dépôt de son mémoire de recours. Or, aucun élément au dossier ne permet de considérer que le recourant aurait obtenu la transmission des observations de l'intimée, notamment en temps utile. Il a pourtant formé une requête formelle dans ce sens le 17 septembre 2018 où il a expressément expliqué que sa demande intervenait dans l'optique d'un recours contre l'ordonnance du Ministère public (art. 105 al. 2 LTF); ce faisant, le recourant ne semble, au demeurant et à juste titre, pas contester que, le cas échéant, le droit de réplique dont il se prévaut puisse être mis en oeuvre au cours de la procédure de recours. En tout état de cause, aucune des deux autorités concernées - la Chambre pénale de recours et le Ministère public - ne soutient avoir formellement transmis ces écritures au recourant. En particulier, le second ne saurait se prévaloir de l'ordonnance du 25 octobre 2018 - ultérieure au demeurant à l'arrêt attaqué (art. 99 al. 1 LTF) - pour pallier le défaut de motivation de celle à l'origine de la présente cause s'agissant d'une éventuelle restriction du droit d'accès au dossier. C'est le lieu également de préciser que le recourant ne peut pas, par le biais de la présente procédure, obtenir un accès à des pièces du dossier d'instruction autres que celles concernant sa requête du 29 juin 2018, soit celles déposées le 20 août 2018 par l'intimée.
Au regard de ces considérations, la cour cantonale ne pouvait donc pas considérer que le recourant avait pu valablement répliquer sur les arguments développés par l'intimée devant le Ministère public. Ce faisant, l'autorité précédente viole le droit d'être entendu du recourant.
2.2. Le Tribunal fédéral ne disposant pas d'une pleine cognition en fait et en droit, le vice constaté ne peut pas être réparé au cours de la procédure fédérale. La violation du droit d'être entendu entraîne donc l'annulation de la décision entreprise, indépendamment des chances de succès du recours sur le fond (ATF 142 II 218 consid. 2.8.1 p. 226 s.).
3.
Il s'ensuit que le recours formé contre l'arrêt du 5 octobre 2018 est admis, ce prononcé est annulé et la cause est renvoyée à l'autorité précédente pour qu'elle reprenne l'instruction. Dans ce cadre, elle transmettra au recourant une copie des déterminations du 20 août 2018 déposées par l'intimée devant le Ministère public, lui impartira un délai pour se déterminer, procédera, le cas échéant, à d'autres échanges d'écritures et/ou mesures d'instruction, puis rendra une nouvelle décision.
Le recourant, qui obtient gain de cause avec l'assistance d'un avocat, a droit à des dépens (art. 68 al. 1 LTF), indemnité qui, eu égard au motif retenu, sera mise à la charge de la République et canton de Genève. L'intimée ayant conclu au rejet du recours, elle ne saurait prétendre à l'obtention d'une indemnité de dépens. En raison également de la motivation retenue, il n'y a pas lieu de percevoir de frais judiciaires (art. 66 al. 1 et 4 LTF).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Le recours est admis. L'arrêt du 5 octobre 2018 de la Chambre pénale de recours de la Cour de justice de la République et canton de Genève est annulé. La cause est renvoyée à cette autorité pour qu'elle procède au sens des considérants.
2.
Il n'est pas perçu de frais judiciaires.
3.
Une indemnité de dépens, fixée à 2'000 fr., est allouée au recourant à la charge de la République et canton de Genève.
4.
Le présent arrêt est communiqué aux parties, au Ministère public de la République et canton de Genève et à la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre pénale de recours.
Lausanne, le 6 mars 2019
Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
Le Président : Chaix
La Greffière : Kropf