BGer 1B_63/2016
 
BGer 1B_63/2016 vom 08.06.2016
{T 0/2}
1B_63/2016
 
Arrêt du 8 juin 2016
 
Ire Cour de droit public
Composition
MM. les Juges fédéraux Fonjallaz, Président,
Merkli, Karlen, Chaix et Kneubühler.
Greffière : Mme Kropf.
Participants à la procédure
recourant,
contre
Ministère public de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy.
Objet
Procédure pénale, surveillance téléphonique,
recours contre l'arrêt de la Chambre pénale de recours de la Cour de justice de la République et canton de Genève du 19 janvier 2016.
 
Faits :
 
A.
A.a. Le 24 juin 2015, la police genevoise a adressé au Ministère public de la République et canton de Genève un rapport l'informant qu'un Ghanéen inconnu se livrait à un important trafic de cocaïne à Genève et recevait régulièrement des livraisons d'Espagne, la dernière étant intervenue les 20 et 21 juin 2015; ces renseignements avaient été obtenus par des "sources confidentielles et sûres". Dans un second rapport daté du même jour, la police suggérait la surveillance - active et rétroactive - du raccordement utilisé par le Ghanéen ("07***9"). Ces mesures ont été immédiatement ordonnées par le Procureur, puis autorisées le lendemain par le Tribunal des mesures de contrainte (Tmc).
La mesure de surveillance a mis en évidence qu'entre le 19 et le 21 juin 2015, il y avait eu 28 échanges entre le raccordement susmentionné et le numéro "07***6", ce dernier étant probablement détenu par une "mule" (cf. le rapport de police du 12 juillet 2015); la police a requis une surveillance rétroactive de ce second numéro, mesure ordonnée par le Ministère public et approuvée par le Tmc le 13 juillet 2015. La police a encore indiqué que la première connexion n'avait plus été utilisée, son détenteur ayant quitté la Suisse.
Le 16 juillet 2015, la police a avisé le Procureur qu'elle suspectait l'utilisateur du numéro "07***9" d'être revenu en Suisse le jour précédent et qu'une livraison de cocaïne était imminente; le contrôle technique d'un troisième numéro semblant lié à ces événements ("0034***6") a été suggéré. Le Ministère public l'a ordonné immédiatement et le Tmc l'a approuvé ce même jour.
Le Procureur a été informé le 18 juillet 2015 que le détenteur du numéro "07***9" utilisait un même boîtier avec plusieurs cartes SIM, afin de séparer ses appels courants de ceux liés au trafic présumé de stupéfiants. Une surveillance de l'appareil (IMEI) a été alors ordonnée par le magistrat, respectivement approuvée par le Tmc.
A.b. Le 19 juillet 2015, A.________, ressortissant ghanéen, a été appréhendé en compagnie d'une tierce personne. Cette dernière arrivait de Barcelone et transportait 1.3 kg de cocaïne; l'étiquette de son bagage portait en outre une étiquette aéroportuaire relative à un voyage entre Genève et Barcelone le 20 juin 2015. Quant à A.________, il était en possession d'un appareil téléphonique raccordé au numéro "07***9"; il a admis avoir organisé l'acquisition de la drogue en Espagne et son transfert en Suisse, contestant en revanche toute autre importation. Il a été mis en prévention de trafic aggravé de stupéfiants et placé en détention.
Lors de l'audience du 29 octobre 2015, A.________ a été informé des mesures de surveillance secrète portant sur son raccordement téléphonique et sur son appareil entre le 24 juin et le 23 juillet 2015, respectivement entre le 18 et le 23 juillet 2015.
B. Le 19 janvier 2016, la Chambre pénale de recours de la Cour de justice de la République et canton de Genève a rejeté le recours déposé par A.________ contre les ordonnances rendues les 25 juin, 13 et 16 juillet 2015 par le Tmc, ainsi que contre celles du Ministère public des 24 juin, 13 et 16 juillet 2015.
C. Par acte du 19 février 2016, A.________ forme un recours en matière pénale contre cet arrêt, concluant à son annulation, ainsi qu'à celles des décisions relatives à la surveillance secrète - rétroactive et active - du Tmc, respectivement du Ministère public, mise en oeuvre à son encontre. Il demande en substance le constat de l'illicéité de ces mesures et le retrait de la procédure de tous les éléments, documents et supports d'information établis grâce à ces moyens. A titre subsidiaire, il requiert le renvoi de la cause à l'autorité précédente pour nouvelle décision. Le recourant sollicite également l'octroi de l'assistance judiciaire.
L'autorité précédente a renoncé à déposer des déterminations. Quant au Ministère public, il a conclu au rejet du recours. Le 21 avril 2016, le recourant a persisté dans ses conclusions, relevant notamment l'avis de prochaine clôture rendu par le Procureur.
 
Considérant en droit :
1. Le Tribunal fédéral examine d'office sa compétence (art. 29 al. 1 LTF) et contrôle librement les conditions de recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 140 IV 57 consid. 2 p. 59).
1.1. L'arrêt attaqué relatif à des mesures de surveillance téléphonique a été rendu au cours d'une procédure pénale par une autorité statuant en dernière instance cantonale (art. 80 LTF); il est donc susceptible d'un recours en matière pénale au sens des art. 78 ss LTF.
1.2. Ce prononcé - qui ne met pas un terme à la procédure pénale - est une décision incidente et le recours n'est recevable qu'aux conditions de l'art. 93 LTF.
1.2.1. En matière pénale, le préjudice irréparable au sens de l'art. 93 al. 1 let. a LTF se rapporte à un dommage de nature juridique qui ne puisse pas être réparé ultérieurement par un jugement final ou une autre décision favorable au recourant. Le seul fait qu'un moyen de preuve dont la validité est contestée demeure au dossier ne constitue en principe pas un tel préjudice, dès lors qu'il est possible de renouveler ce grief jusqu'à la clôture définitive de la procédure. En particulier, la question de la légalité des moyens de preuve peut être soumise au juge du fond (art. 339 al. 2 let. d CPP), autorité dont il peut être attendu qu'elle soit en mesure de faire la distinction entre les moyens de preuve licites et ceux qui ne le seraient pas, puis de fonder son appréciation en conséquence. Les motifs retenus par le juge de première instance peuvent ensuite être contestés dans le cadre d'un appel (art. 398 CPP) et, en dernier ressort, le prévenu peut remettre en cause ce jugement devant le Tribunal fédéral (ATF 141 IV 284 consid. 2.2 p. 287 et les arrêts cités).
Cette règle comporte toutefois des exceptions. Tel est notamment le cas lorsque la loi prévoit expressément la restitution, respectivement la destruction immédiate des preuves illicites (cf. par exemple les art. 248, 271 al. 3, 277 et 289 al. 6 CPP). Il en va de même quand, en vertu de la loi ou de circonstances spécifiques liées au cas d'espèce, le caractère illicite des moyens de preuve s'impose d'emblée (ATF 141 IV 284 consid. 2.3 p. 287).
1.2.2. Le recours institué à l'art. 279 al. 3 CPP contre une mesure de surveillance secrète permet de contester la légalité de la mesure, et non sa valeur probante, cette dernière question appartenant au juge du fond. Lorsque la communication des mesures de surveillance a été valablement notifiée par le ministère public (art. 279 al. 1 CPP; arrêt 6B_795/2014 du 6 janvier 2015 consid. 2.3.4 et les arrêts cités), la question de la licéité de cette surveillance ne peut toutefois plus être examinée par le juge du fond (ATF 140 IV 40 consid. 1.1 p. 42). Le recourant peut donc se prévaloir d'un préjudice irréparable au sens de l'art. 93 al. 1 let. a LTF.
1.3. Le recourant, prévenu mis en cause par lesdites mesures, entend faire constater l'illicéité de celles-ci et ensuite obtenir la destruction des moyens de preuve en résultant. Il dispose ainsi d'un intérêt juridique à l'annulation ou à la modification de la décision entreprise et la qualité pour recourir doit lui être reconnue (art. 81 al. 1 let. a et b ch. 1 LTF; arrêt 1B_271/2015 du 10 novembre 2015 consid. 1.2).
Vu la communication effectuée par le Ministère public au recourant des décisions relatives à la surveillance secrète (cf. art. 279 al. 1 CPP), peu importe que ce dernier puisse avoir peut-être obtenu et utilisé le raccordement téléphonique et/ou l'appareil surveillés de manière non conforme aux art. 14 de la loi fédérale du 6 octobre 2000 sur la surveillance de la correspondance par poste et télécommunication (LSCPT; RS 780.1) et 19a de son ordonnance (OSCPT; RS 780.11; cf. a contrario l'arrêt 1C_626/2015 du 8 décembre 2015 consid. 1.4 et 1.5); ces faits n'ont au demeurant pas été établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF).
1.4. Pour le surplus, les conditions de recevabilité sont réunies et il y a donc lieu d'entrer en matière.
2. Invoquant les art. 269 et 197 CPP, le recourant reproche à l'autorité précédente d'avoir retenu que les conditions permettant la mise en oeuvre de mesures de surveillance secrète étaient réunies.
2.1. Selon l'art. 269 al. 1 CPP, le ministère public peut ordonner la surveillance de la correspondance par poste et télécommunication aux conditions suivantes : de graves soupçons laissent présumer que l'une des infractions visées à l'alinéa 2 a été commise (let. a; ci-après consid. 2.2); cette mesure se justifie au regard de la gravité de l'infraction (let. b); les mesures prises jusqu'alors dans le cadre de l'instruction sont restées sans succès ou les recherches n'auraient aucune chance d'aboutir ou seraient excessivement difficiles en l'absence de surveillance (let. c; ci-après consid. 2.3). Seules les infractions visées par le catalogue exhaustif de l'art. 269 al. 2 CPP peuvent justifier une surveillance; parmi celles-ci figurent les infractions réprimées à l'art. 19 al. 2 de la loi fédérale du 3 octobre 1951 sur les stupéfiants et les substances psychotropes (LStup; RS 812.121; art. 269 al. 2 let. f CPP).
De manière générale, le Tribunal fédéral a rappelé que des abus n'étaient pas exclus dans les cas d'application des normes permettant des mesures de surveillance secrète, notamment téléphonique. Seul un contrôle par une autorité judiciaire, par le biais tout d'abord d'une procédure d'autorisation, puis la possibilité d'un recours ultérieur par la personne concernée (ATF 140 I 381 consid. 4.5.1 p. 390 s.) assurent les garanties nécessaires et adéquates à cet égard (ATF 140 I 353 consid. 8.7.2.3 p. 376 et les arrêts cités). Cette procédure (autorisation judiciaire, puis éventuel recours) se justifie en raison de la grave atteinte à la sphère privée que constitue ce type de mesure (art. 13 al. 1 Cst.; sur cette disposition, ATF 140 I 381 consid. 4.1 p. 383 s., 353 consid. 8.3 p. 369 s.).
2.2. Le CPP s'inscrit parfaitement dans ce souci d'éviter des abus. Ainsi, ce type de surveillance est soumis à l'autorisation du Tmc (art. 272 al. 1 CPP). Puis, au plus tard lors de la clôture de la procédure préliminaire, le ministère public communique au prévenu ainsi qu'au tiers qui ont fait l'objet d'une surveillance au sens de l'art. 270 let. b CPP, les motifs, le mode et la durée de la surveillance (art. 279 al. 1 CPP). Selon l'alinéa 3 de cette même disposition, les personnes dont le raccordement de télécommunication ou l'adresse postale ont été surveillés ou celles qui ont utilisé le même raccordement ou la même adresse postale peuvent interjeter recours conformément aux art. 393 à 397 CPP; le délai de recours commence à courir dès la réception de la communication.
En tant qu'autorité d'autorisation (art. 272 al. 2, 273 al. 2 et 274 CPP), le Tmc est ainsi appelé à vérifier l'existence de graves soupçons au sens de l'art. 269 al. 1 let. a CPP. Lors de cet examen, il n'a cependant pas à procéder à une pesée complète des éléments à charge et à décharge. Il doit uniquement examiner, si, au vu des éléments ressortant alors de la procédure, il existe des indices sérieux de culpabilité justifiant la mesure requise et procède donc à un examen de la qualification juridique des faits sous l'angle de la vraisemblance (ATF 141 IV 459 consid. 4.1 p. 461).
2.2.1. Selon la doctrine, la gravité des soupçons au sens de l'art. 269 al. 1 let. a CPP doit atteindre celle requise pour la mise en détention provisoire (cf. art. 221 al. 1 CPP ["fortement soupçonné", "dringend verdächtig", "gravemente indiziato"]; MARC JEAN-RICHARD-DIT-BRESSEL, in Basler Kommentar, Schweizerische Strafprozessordnung, Art. 196-457 StPO, 2e éd. 2014, n° 34 ad art. 269 CPP; FRANZ RIKLIN, StPO Kommentar, Schweizerische Strafprozessordnung, 2e éd. 2014, n° 4 ad remarques préliminaires ad art. 269-298d CPP et n° 1 ad art. 269 CPP; NIKLAUS SCHMID, Praxiskommentar, Schweizerische Strafprozessordnung, 2e éd. 2013, n° 6 ad art. 269 CPP; JEANNERET/KUHN, Précis de procédure pénale, 2013, n. 14094; MOREILLON/PAREIN-REYMOND, Petit commentaire, Code de procédure pénale, 2013, n° 6 ad art. 269 CPP; ZUFFEREY/BACHER, in Commentaire romand, Code de procédure pénale suisse, 2011, n° 8 ad art. 269 CPP). Selon HANSJAKOB, le degré de gravité devrait cependant être moins élevé s'agissant d'une mesure de surveillance que celui exigé pour une détention, dès lors que les éléments obtenus lors de la première mesure peuvent permettre le prononcé de la seconde (THOMAS HANSJAKOB, in DONATSCH/HANSJAKOB/ LIEBER, Kommentar zur Schweizerischen Strafprozessordnung (StPO), 2e éd. 2014, n° 19 ad art. 269 CPP).
L'intensité des charges propres à motiver notamment un maintien en détention n'est pas la même aux divers stades de l'instruction pénale; ainsi, dans les premiers temps de l'enquête, des soupçons encore peu précis peuvent être suffisants (ATF 137 IV 122 consid. 3.2 p. 126 s.; arrêts 1B_56/2016 du 7 mars 2016 consid. 2.1; 1B_352/2015 du 27 octobre 2015 consid. 2.2 et les arrêts cités). Tel n'est cependant pas le cas de vagues suspicions ne se fondant sur aucun motif objectif; en outre, les charges doivent être objectivement fondées et vérifiables (ZUFFEREY/BACHER, op. cit., n° 8 ad art. 269 CPP). Il n'est en revanche pas nécessaire de prouver les éléments de la qualification déjà au moment de statuer sur l'admissibilité de la mesure (ATF 129 IV 188 consid. 3.2.3 p. 194 s.; arrêt 1B_425/2010 du 22 juin 2011 consid. 3.1). Il faut aussi tenir compte de la gravité de l'infraction examinée, de l'existence, le cas échéant, d'une décision judiciaire préalable relative à de tels soupçons, ainsi que de l'avancée depuis lors de l'instruction (arrêt 1B_230/2013 du 26 juillet 2013 consid. 5.1.2).
2.2.2. Pour effectuer ce contrôle, le Tmc se fondera en particulier sur la demande du ministère public, l'ordre de surveillance de ce dernier, un exposé des motifs et les actes déterminants du dossier (cf. art. 274 al. 1 let. a et b CPP). La requête contiendra notamment une - courte - description de l'état de fait, l'indication de l'infraction poursuivie et des circonstances fondant les graves soupçons (JEAN-RICHARD-DIT-BRESSEL, op. cit., n° 5 ad art. 274 CPP; HANSJAKOB, op. cit., n° 4 ad art. 274 CPP; RIKLIN, op. cit., n° 2 ad art. 274 CPP; MOREILLON/PAREIN-REYMOND, op. cit., n° 4 ad art. 274 CPP; NIKLAUS OBERHOLZER, Grundzüge des Strafprozessrechts, 3e éd. 2012, n° 1199 p. 424; ZUFFEREY/BACHER, op. cit., n° 5 ad art. 274 CPP). Elle exposera de plus les démarches entreprises au cours de l'enquête, en particulier celles restées sans succès (cf. art. 269 al. 1 let. c CPP; OBERHOLZER, op. cit., n° 1199 p. 424; ZUFFEREY/BACHER, op. cit., n° 5 ad art. 274 CPP).
Quant aux actes déterminants que doit fournir le ministère public au Tmc, il peut s'agir de pièces à conviction au sens de l'art. 192 CPP (JEAN-RICHARD-DIT-BRESSEL, op. cit., n° 35 ad art. 269 CPP; ZUFFEREY/ BACHER, op. cit., n° 6 ad art. 274 CPP; ALEXIS SCHMOCKER, in Commentaire romand, Code procédure pénale, 2011, n° 9 ad art. 221 CPP, auteur citant en matière de détention provisoire une arrestation en flagrant délit, des aveux a priori crédibles, des empreintes digitales et/ou ADN). La doctrine mentionne aussi des rapports de police et/ou des notes du ministère public (JEAN-RICHARD-DIT-BRESSEL, op. cit., n° 5 ad art. 274 CPP), voire même des éléments recueillis au cours des premières 24 heures de surveillance (ZUFFEREY/BACHER, op. cit., n° 6 ad art. 274 CPP). L'établissement des graves soupçons peut aussi se fonder sur les déclarations de témoins, de parties (art. 104 CPP), d'autres participants (art. 105 CPP), ainsi que de collaborateurs des autorités pénales (JEAN-RICHARD-DIT-BRESSEL, op. cit., n° 35 ad art. 269 CPP; ZUFFEREY/BACHER, op. cit., n° 8 ad art. 269 CPP et n° 6 ad art. 274 CPP).
2.2.3. Il ne faut cependant pas perdre de vue que les déclarations de parties ou de témoins peuvent manquer d'objectivité (ZUFFEREY/ BACHER, op. cit., n° 8 ad art. 269 CPP). Dès lors, la seule affirmation - notamment d'une partie - sans indication de source ou sans avoir le caractère spécifique de témoignage n'est en principe pas suffisante (JEAN-RICHARD-DIT-BRESSEL, op. cit., n° 35 ad art. 269 CPP). Il en va de même de simples spéculations, de rumeurs ou de suppositions générales (arrêt 1B_516/2011 du 17 novembre 2011 consid. 2.1; JONAS WEBER, in Basler Kommentar, Schweizerische Strafprozessordnung, Art. 196-457 StPO, 2e éd. 2014, n° 7 ad art. 197 CPP).
Une appréciation plus nuancée est envisageable s'agissant des éléments relevés par la police dans ses rapports. En effet, il arrive que ceux-ci ne puissent pas être davantage étayés, notamment afin de protéger, provisoirement ou durablement, l'identité de certains informateurs; l'utilisation de telles informations n'en est pas pour autant exclue si celles-ci semblent objectivement plausibles au vu des circonstances entourant l'enquête (HANSJAKOB, op. cit., n° 3 ad art. 274 CPP).
2.3. En vertu du principe de proportionnalité (art. 197 al. 1 let. c et d et 269 al. 1 let. b CPP), la mesure de surveillance doit encore être adéquate et poursuivre un intérêt public; elle doit ainsi être susceptible d'obtenir des résultats concrets. Les circonstances d'espèce sont dès lors déterminantes pour examiner la gravité de l'infraction; à cet égard, il n'est pas en soi suffisant que celle-ci figure dans le catalogue de l'art. 269 al. 2 CPP. La surveillance est ainsi admissible si, objectivement et subjectivement, elle se justifie au regard de la nature du bien juridiquement protégé atteint par l'acte punissable, la mise en danger de ce dernier, la gravité de la lésion, le mode opératoire utilisé, l'énergie criminelle déployée et/ou les mobiles de l'auteur (ATF 141 IV 459 consid. 4.1 p. 461 s.).
Enfin, une surveillance ne peut être autorisée que si elle respecte le principe de subsidiarité (art. 269 al. 1 let. c CPP). Celui-ci présuppose notamment que l'autorité examine d'abord si une autre mesure moins incisive peut atteindre le résultat recherché (ultima ratio; ATF 141 IV 459 consid. 4.1 p. 462).
3. En l'espèce, le recourant ne conteste pas que le contenu des informations données par la police (nationalité du trafiquant présumé, genre de stupéfiant et nature, voire ampleur, de l'infraction en cause) puisse, le cas échéant, constituer de graves soupçons justifiant la mise en oeuvre de la surveillance de son numéro de téléphone, respectivement de son appareil téléphonique. En revanche, il soutient en substance que, vu l'absence d'information sur les sources de ces renseignements dans les rapports de police ("sources sûres et confidentielles"), il ne pourrait être procédé à aucun contrôle de la réalité de ces indices; cette manière de procéder tendrait à donner un blanc-seing à la police et ne permettrait pas non plus de contrôler la légalité des activités déployées par celle-ci, notamment pour récolter lesdites informations.
On ne saurait remettre en cause le fait que les deux rapports de police du 24 juin 2015 demandant au Ministère public l'ouverture d'une instruction en lien avec des infractions à la LStup et la mise en oeuvre d'une surveillance secrète ne contiennent aucune information sur l'origine des éléments mentionnés par la police pour obtenir la mesure de surveillance litigieuse. Il n'est en particulier pas possible d'examiner si les constatations retenues par les policiers (suspicion d'un important trafic de cocaïne mené par un ressortissant ghanéen entre la Suisse et l'Espagne) coïncident avec les mesures d'investigation entreprises et/ou si celles-ci ont été opérées de manière conforme à la loi. Il faut donc maintenant examiner si, au regard des circonstances d'espèce, cette manière de procéder est admissible.
3.1. Tout d'abord, les présents soupçons se fondent, non pas sur des affirmations de parties au sens notamment de l'art. 104 CPP ou de témoin, mais sur les constatations émises dans des rapports écrits par la police, autorité de poursuite pénale au sens de l'art. 12 let. a CPP.
Le Code de procédure pénale régit les activités de la police (art. 15 al. 1 CPP). Celle-ci doit notamment respecter le principe de la bonne foi, l'interdiction de l'abus de droit (art. 3 al. 2 let. a et b CPP, 5 al. 3 Cst.; ATF 138 I 49 consid. 8.3.1 p. 53 et les références; MARC THOMMEN, in Basler Kommentar, Schweizerische Strafprozessordnung, Art. 1-195 StPO, 2e éd. 2014, nos 43 ss ad art. 3 CPP; MOREILLON/PAREIN-REYMOND, op. cit., nos 9 ss ad art. 3 CPP), ainsi que le caractère impératif de la poursuite lorsqu'elle a connaissance d'infractions ou d'indices permettant de présumer l'existence d'infractions (art. 7 al. 1 CPP; RIEDO/FIOLKA, in Basler Kommentar, Schweizerische Strafprozessordnung, Art. 1-195 StPO, 2e éd. 2014, n° 14 ad art. 7 CPP; MOREILLON/PAREIN-REYMOND, op. cit., n° 3 et 14 ad art. 15 CPP). Il lui incombe d'enquêter sur des infractions que ce soit de sa propre initiative, sur dénonciation de particuliers ou d'autorités, ainsi que sur mandat du ministère public (art. 15 al. 2 1ère phrase CPP). Lors de ses investigations, la police établit les faits constitutifs de l'infraction; ce faisant, elle se fonde sur les dénonciations, les directives du ministère public ou ses propres constatations (art. 306 al. 1 CPP). La police informe sans retard le ministère public sur les infractions graves et tout autre événement sérieux (art. 307 al. 1 1ère phrase CPP). Le ministère public ouvre une instruction formelle lorsqu'il ressort notamment du rapport de police des soupçons suffisants laissant présumer qu'une infraction a été commise (art. 309 al. 1 let. a CPP), lorsqu'il ordonne des mesures de contrainte (art. 309 al. 1 let. b CPP) ou lorsqu'il est informé par la police conformément à l'art. 307 al. 1 CPP (art. 309 al. 1 let. c CPP).
Certes, le statut particulier de la police ne la dispense pas de manière générale d'expliquer, même brièvement, l'origine de ses soupçons (indicateur, pièce et/ou propres observations effectuées). Toutefois, au regard du stade précoce de l'enquête et sans autre indication permettant en l'état d'étayer la thèse d'une violation des art. 140 al. 1 CPP ou 282 al. 2 CPP, le Ministère public doit pouvoir partir du principe que les éléments figurant dans les rapports de la police dénonçant une infraction ont été récoltés de manière conforme aux obligations incombant aux services de police. Ces rapports - qui résument généralement les investigations menées - ne sont ainsi prima facie pas dénués de toute valeur probante (cf. notamment arrêts 6B_1140/2014 du 3 mars 2016 consid. 1.3; 6B_685/2010 du 4 avril 2011 consid. 3.1). Cela vaut d'autant plus ici que, si les quatre agents qui y sont mentionnés devaient être entendus au cours de la procédure, ils comparaîtraient en tant que témoins, soumis alors aux droits et obligations liés à cette qualité (cf. notamment l'art. 307 CP; arrêts 1B_296/2015 du 14 octobre 2015 consid. 2 et 6B_1088/2013 du 12 mai 2014 consid. 1.4). Il en découle que les constatations émises par la police dans ses rapports sont en principe suffisantes, même en l'absence d'autres pièces, pour justifier l'ouverture d'une instruction formelle (cf. art. 309 al. 1 let. a CPP); c'est en effet dans ce cadre que ceux-ci pourront être confirmés ou infirmés (HANSJAKOB, op. cit., n° 19 ad art. 269 CPP).
Pour déterminer ensuite si ces mêmes indices permettent une surveillance secrète ou s'ils devraient être étayés préalablement, le stade de la procédure au moment où une telle mesure est sollicitée ne peut être ignoré. En l'espèce, la demande d'ouverture d'une instruction formelle, ainsi que celle requérant une surveillance téléphonique sont déposées le même jour par la police. La première relève le défaut de résultat des démarches entreprises - notamment de nombreux contrôles - pour identifier l'utilisateur du raccordement mis en évidence par l'enquête policière; ce motif permet d'ailleurs de rejeter tout grief en lien avec une éventuelle violation du principe de subsidiarité (cf. art. 269 al. 1 let. c CPP). Vu ces constatations, les graves soupçons d'infraction relevés dans les rapports de police du 24 juin 2015 doivent permettre la mise en oeuvre d'une surveillance téléphonique. Soutenir le contraire à ce stade très précoce de l'enquête équivaudrait à ouvrir une procédure pénale sans possibilité ensuite de la faire progresser, notamment par l'utilisation des moyens d'instruction supplémentaires que cette étape permet (cf. art. 309 al. 1 let. b CPP).
3.2. Il convient aussi de prendre en compte la nature de l'infraction dénoncée, soit un important trafic de stupéfiants entre la Suisse et l'Espagne. Il est notoire que les enquêtes relatives à de telles infractions touchent un grand nombre de personnes (acheteurs, vendeurs, "mules", etc.) et que celles-ci communiquent principalement par le biais de téléphones portables (arrêt 1B_425/2010 du 22 juin 2011 consid. 3.2). L'interpellation de ces personnes - respectivement leur maintien, peut-être temporaire, en liberté - peut permettre d'identifier d'autres membres du réseau, voire de le démanteler. Ce genre d'enquêtes peut aussi impliquer l'ouverture de différentes procédures pénales et l'avancée de celles-ci a lieu souvent par le biais de recoupement d'informations. Afin de réduire le risque de collusion pouvant en découler, il se justifie, le cas échéant, de ne pas divulguer immédiatement les origines de certaines informations, notamment au début d'une instruction.
La mesure de surveillance demandée est en outre propre à faire progresser l'enquête (cf. art. 269 al. 1 let. c CPP), en particulier afin de tenter de confondre l'utilisateur du numéro surveillé, de déterminer l'étendue du trafic déployé et/ou d'identifier d'autres participants; la confirmation des informations policières est d'ailleurs intervenue rapidement en l'espèce, puisque la police a rendu un premier rapport le 12 juillet 2015 - soit moins d'un mois après la mise en oeuvre de la surveillance - sur les résultats obtenus. Il n'est en outre pas exclu que ce type de mesure puisse être ordonné parallèlement à d'autres actes d'investigation, par exemple une filature des principaux suspects; tel est notamment le cas lorsque ces autres moyens d'investigation ne suffisent pas à eux seuls pour cerner l'ampleur du trafic mis en place (cf. art. 269 al. 1 let. c CPP). Enfin, une surveillance téléphonique peut aussi se justifier s'agissant d'actes à venir, soit par exemple en matière de stupéfiants afin de déterminer quand et où pourrait avoir lieu une future livraison (arrêt 1B_425/2010 du 22 juin 2011 consid. 3.3).
3.3. Au regard de ces circonstances particulières, le Tmc pouvait donc retenir l'existence de graves soupçons de la commission d'une infraction au sens de l'art. 269 al. 1 let. a CPP sur la seule base des rapports de police. Vu le stade de la procédure, un risque d'abus semble également pouvoir être exclu. La situation devrait être envisagée différemment en cas de prolongation de la mesure ou de recours systématique à la terminologie "sources confidentielles et sûres"; une telle explication n'est en effet pas suffisante, en particulier sur la durée, pour justifier la mise en oeuvre d'une mesure de surveillance secrète.
Partant, c'est à juste titre et sans violer le droit fédéral que la Chambre pénale de recours a rejeté les recours intentés par A.________ contre les décisions du Tmc autorisant la surveillance active et rétroactive de son numéro de téléphone.
4. Les considérations précédentes permettent également de rejeter tout grief en lien avec les surveillances secrètes ordonnées ultérieurement, dont celle de l'appareil (IMEI) utilisé par le recourant. Celles-ci ont en effet été ordonnées en raison des résultats obtenus - rapidement - lors de la première mesure. La licéité de cette dernière ayant été confirmée, les art. 277 et/ou 141 al. 4 CPP - qui prévoient l'inexploitabilité des informations obtenues à la suite d'une surveillance non autorisée ou d'une administration illicite d'une preuve - ne sont pas applicables.
5. Il s'ensuit que le recours est rejeté.
Le recourant a demandé l'assistance judiciaire et les conditions en paraissent réunies (art. 64 al. 1 LTF). Il y a lieu de désigner Me Gaétan Droz en qualité d'avocat d'office et de fixer ses honoraires, qui seront supportés par la caisse du Tribunal fédéral (art. 64 al. 2 LTF). Le recourant est en outre dispensé des frais judiciaires (art. 64 al. 1 LTF). Il n'est pas alloué de dépens (art. 68 al. 3 LTF).
 
 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1. Le recours est rejeté.
2. La demande d'assistance judiciaire est admise; Me Gaétan Droz est désigné comme avocat d'office du recourant et une indemnité de 1'500 fr. lui est allouée à titre d'honoraires, à payer par la caisse du Tribunal fédéral. Il n'est pas perçu de frais judiciaires.
3. Le présent arrêt est communiqué au mandataire du recourant, au Ministère public de la République et canton de Genève et à la Chambre pénale de recours de la Cour de justice de la République et canton de Genève.
Lausanne, le 8 juin 2016
Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
Le Président : Fonjallaz
La Greffière : Kropf