BGer 1C_518/2015
 
BGer 1C_518/2015 vom 14.10.2015
{T 0/2}
1C_518/2015
 
Arrêt du 14 octobre 2015
 
Ire Cour de droit public
Composition
MM. les Juges fédéraux Fonjallaz, Président,
Merkli et Eusebio.
Greffière : Mme Arn.
Participants à la procédure
A.________,
contre
Conseil d'Etat de la République
et canton de Genève,
Cour de justice de la République et
canton de Genève, Chambre constitutionnelle.
Objet
NR/CN 2015 - élection du Conseil national et du
Conseil des Etats 2015; refus du service des votations
et élections d'accepter un dossier de candidature,
recours contre l'arrêté du 23 septembre 2015
du Conseil d'Etat de la République et canton de Genève et contre l'arrêt du 8 septembre 2015 de la Chambre constitutionnelle de la Cour de Justice de la République et canton de Genève.
 
Faits :
A. Par arrêtés du 25 février 2015, le Conseil d'Etat genevois a fixé au 3 août 2015 à 12h l'échéance pour le dépôt des listes de candidats pour l'élection au Conseil national et au Conseil des Etats du 18 octobre 2015. Le 3 août 2015, A.________ a remis au Service des votations et élection du canton de Genève (SVE) deux dossiers de candidature, l'un pour le Conseil national et l'autre pour le Conseil des Etats. Le nom de la liste était " xxx ". Les deux dossiers ne contenaient aucune signature de soutien de liste. A.________ était dans les deux cas seul candidat. Les deux dossiers ont fait l'objet d'une mention manuscrite " liste refusée " accompagnée du timbre humide et de la signature du chef de service du SVE; il a été mentionné que le nombre de signatures déposées était de 0.
B. Le 8 octobre 2015, A.________ a recouru auprès du Tribunal fédéral, dans un seul et même acte, contre l'arrêt du 8 septembre 2015 et contre l'arrêté du 23 septembre 2015. Il a complété son recours par acte du 9 octobre 2015.
 
Considérant en droit :
1. Aux termes de l'art. 82 let. c LTF, le Tribunal fédéral connaît des recours qui concernent le droit de vote des citoyens ainsi que les élections et votations populaires (recours en matière de droit public, art. 82 ss LTF).
1.1. Cette voie de recours est notamment ouverte contre les décisions des gouvernements cantonaux qui statuent sur des recours contre des irrégularités affectant la préparation et l'exécution des élections au Conseil national (art. 88 al. 1 let. b LTF, en relation avec les art. 77 al. 1 let. c et 80 de la loi fédérale sur les droits politiques [LDP; RS 161.1]). Selon l'art. 100 al. 4 LTF, le délai de recours est de trois jours contre les décisions des gouvernements cantonaux touchant aux élections au Conseil national. Ce délai est rappelé par le Conseil d'Etat dans l'indication des voies de droit de l'arrêté entrepris. Ce dernier a été notifié le jeudi 24 septembre 2015, de sorte que le délai de recours expirait le lundi 28 septembre 2015 (cf. art. 45 al. 1 LTF). Or le recourant n'a déposé son mémoire de recours à la poste que le 8 octobre 2015, soit tardivement. Il résulte de ce qui précède que le recours, en tant qu'il concerne l'arrêté du Conseil d'Etat relatif à l'élection du Conseil national, est manifestement irrecevable.
1.2. La voie du recours en matière de droit public est également ouverte contre les actes d'autorités cantonales de dernière instance qui statuent sur des recours contre des irrégularités affectant les élections au Conseil des Etats (art. 88 al. 1 let. a LTF). Le délai de recours est alors de trente jours (art. 100 al. 1 LTF).
1.3. Conformément à l'art. 99 al. 1 LTF, aucun fait nouveau ni preuve nouvelle ne peut être présenté à moins de résulter de la décision attaquée. Les diverses pièces produites comme preuves par le recourant et qui ne figuraient pas au dossier de la Chambre constitutionnelle doivent, à ce titre, être écartées. Tel est notamment le cas des feuilles qu'il a produites comportant une septantaine de signatures de soutien à sa liste.
2. En vertu de l'art. 42 al. 1 LTF, les mémoires de recours doivent être motivés. Selon l'art. 42 al. 2 LTF, les motifs doivent exposer succinctement en quoi l'acte attaqué viole le droit. Pour satisfaire à cette exigence, il appartient au recourant de discuter au moins brièvement les considérants de la décision litigieuse (ATF 134 II 244 consid. 2.1 p. 245). Les griefs de violation des droits fondamentaux et des dispositions de droit cantonal sont en outre soumis à des exigences de motivation accrues (art. 106 al. 2 LTF). Le recourant doit alors mentionner les principes constitutionnels qui n'auraient pas été respectés et expliquer de manière claire et précise en quoi ces principes auraient été violés; de même, il doit citer les dispositions du droit cantonal dont il se prévaut et démontrer en quoi ces dispositions auraient été appliquées arbitrairement ou d'une autre manière contraire au droit (ATF 136 II 489 consid. 2.8 p. 494).
3. Sur le fond, le recourant soutient que l'exigence des 200 signatures de parrainage prescrite par l'art. 24 al. 1 LDP serait contraire à la Constitution fédérale, soit à l'art. 143 Cst. qui dispose que " tout citoyen ou citoyenne ayant le droit de vote est éligible au Conseil national, au Conseil fédéral et au Tribunal fédéral ".
3.1. L'art. 25 al. 2 de la loi cantonale sur l'exercice des droits politiques (LEDP; RS/GE A 5 05) prescrit que les conditions pour le dépôt des listes au Conseil national s'appliquent par analogie au dépôt des listes pour le Conseil des Etats. Le droit cantonal renvoie donc sur ce point à la LDP. Selon l'art. 24 de cette loi fédérale, toute liste de candidats doit porter la signature manuscrite d'un nombre minimum d'électeurs dont le domicile politique se trouve dans l'arrondissement; ce nombre est de 100 dans les cantons qui disposent de 2 à 10 sièges (let. a), 200 dans les cantons qui disposent de 11 à 20 sièges (let. b) et 400 dans les cantons qui disposent de plus de 20 sièges (let. c).
3.2. Tel qu'il est formulé, le grief d'inconstitutionnalité soulevé par le recourant ne satisfait manifestement pas aux exigences accrues de motivation précitées. L'intéressé se contente en effet de se plaindre de l'inéquité consistant à exiger le même nombre de signatures pour des candidatures individuelles et des formations de groupe. Il ne démontre en particulier pas en quoi le fait d'exiger un nombre minimal de signatures pour une candidature individuelle serait contraire à la disposition constitutionnelle fédérale qu'il invoque. Sa critique est dès lors irrecevable. Au demeurant, à supposer recevable, elle aurait dû être écartée. L'art. 143 Cst. invoqué par le recourant vise en effet l'élection au Conseil national et non celle au Conseil des Etats, qui fait l'objet du présent examen. Pour le surplus, le recourant n'a invoqué aucune disposition constitutionnelle cantonale à l'appui de son grief.
3.3. Dans l'arrêt entrepris, le Chambre constitutionnelle a notamment considéré que l'obligation de réunir un nombre minimal de signatures à l'appui d'une liste - posée par les art. 25 al. 2 LEDP en relation avec l'art. 24 al. 1 LDP - était proportionnée au but visé, qui consistait à éviter que des listes de candidats ne soient déposées à la légère ou par plaisanterie et ainsi à prévenir les abus et les excès découlant des facilités de participation aux élections; l'instance précédente se référait en particulier aux messages du Conseil fédéral concernant la LDP (FF 1975 I 1357 et FF 1993 III 447).
4. Le recourant se plaint ensuite de ne pas avoir eu une réponse juridique sérieuse à sa critique, formulée dans son recours cantonal, concernant la " légalité du manque de formulaires à disposition pour récolter les signatures ". Dans la mesure où le recourant n'a invoqué aucune violation de son droit d'être entendu, plus particulièrement de son droit à une décision motivée (art. 29 al. 2 Cst.), son grief ne satisfait pas aux exigences de motivation accrue découlant de l'art. 106 al. 2 LTF et doit partant être déclaré irrecevable.
5. Sur le vu de ce qui précède, le recours doit être rejeté dans la très faible mesure de sa recevabilité. En vertu de l'art. 66 LTF, les frais judiciaires sont mis à la charge du recourant qui succombe. Il n'est pas alloué de dépens.
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1. Le recours en tant qu'il est dirigé contre l'arrêté du Conseil d'Etat genevois du 23 septembre 2015 est irrecevable.
2. Le recours en tant qu'il est dirigé contre l'arrêt de la Chambre constitutionnelle de la Cour de justice du 8 septembre 2015 est rejeté, dans la mesure de sa recevabilité.
3. Les frais judiciaires, arrêtés à 500 fr., sont mis à la charge du recourant.
4. Le présent arrêt est communiqué au recourant, au Service des votations et élections, au Conseil d'Etat de la République et canton de Genève, à la Chambre constitutionnelle de la Cour de justice de la République et canton de Genève, à la Chancellerie fédérale, au Secrétariat général de l'Assemblée fédérale, aux Services du Parlement, Secrétariat général et Service juridique, Berne.
Lausanne, le 14 octobre 2015
Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
Le Président : Fonjallaz
La Greffière : Arn