BGer 5A_411/2013
 
BGer 5A_411/2013 vom 25.09.2014
{T 0/2}
5A_411/2013
 
Arrêt du 25 septembre 2014
 
IIe Cour de droit civil
Composition
MM. les Juges fédéraux von Werdt, Président,
Herrmann et Schöbi.
Greffière: Mme de Poret Bortolaso.
Participants à la procédure
A.________,
représentée par Me Philippe Eigenheer, avocat,
recourante,
contre
B.________,
représenté par Me François Micheli, avocat,
intimé.
Objet
partage de copropriété,
recours contre l'arrêt de la Chambre civile de la Cour
de justice du canton de Genève du 26 avril 2013.
 
Faits:
 
A.
A.a. A.________ et B.________ ont entretenu une relation intime dès le mois de février 2007, interrompue en mai 2008 et reprise au mois de juillet de la même année. Ils se sont définitivement séparés au mois d'octobre 2008.
A.b. En février 2008, A.________ et B.________ ont acquis les parcelles nos 1058 et 1059, sises à X.________ (quartier Z.________). Une villa y est érigée. Copropriétaires à raison de la moitié chacun, ils ont acquis les biens-fonds pour un montant de 5'500'000 fr., auquel s'ajoutaient des taxes et frais divers s'élevant à 257'000 fr.
A.c. Les parties ont emménagé dans leur villa en juillet 2008 et y ont vécu ensemble jusqu'à fin octobre ou courant novembre 2008.
A.d. Dès la séparation définitive des parties, A.________ a vécu seule dans la copropriété.
A.e. En mai 2011, A.________ a unilatéralement grevé sa part de copropriété sur la villa d'une hypothèque supplémentaire de 500'000 fr.
 
B.
B.a. Le 13 février 2009, B.________ a saisi le Tribunal de première instance du canton de Genève d'une demande en partage des parcelles détenues en copropriété, en réclamant la vente aux enchères publiques.
B.b. Statuant le 26 avril 2013 sur appel de A.________, la Cour de justice a condamné B.________ à verser à l'appelante un montant de 177'528 fr. 50 avec intérêt à 5% l'an dès le 1er juillet 2010, confirmé pour le surplus le jugement rendu par le Tribunal de première instance et débouté les parties de toutes autres conclusions.
C. Le 31 mai 2013, A.________ (ci-après la recourante) forme un recours en matière civile au Tribunal fédéral contre la décision cantonale, dont elle réclame l'annulation.
D. La requête d'effet suspensif présentée par la recourante a été déclarée sans objet par ordonnance présidentielle du 26 juin 2013, le recours disposant de l'effet suspensif de par la loi dès lors que dirigé contre un arrêt constitutif (art. 103 al. 2 let. a LTF).
E. Sur requête de la recourante, l'instruction du recours a été suspendue jusqu'au 20 mars 2014, suspension prolongée au 30 avril 2014.
 
Considérant en droit:
1. Le recours est dirigé contre une décision finale (art. 90 LTF), prise par une autorité cantonale supérieure statuant sur recours (art. 75 LTF), dans une contestation civile de nature pécuniaire, dont la valeur litigieuse est supérieure à 30'000 fr. (art. 72 al. 1 et 74 al. 1 let. b LTF); il a par ailleurs été déposé à temps (art. 100 al. 1 LTF), par la partie qui a succombé dans ses conclusions devant l'instance précédente (art. 76 LTF), de sorte qu'il est recevable au regard de ces dispositions.
 
2.
2.1. Saisi d'un recours en matière civile, le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Il n'est donc limité ni par les arguments soulevés dans le recours, ni par la motivation retenue par l'autorité précédente; il peut admettre un recours pour d'autres motifs que ceux qui ont été invoqués et le rejeter en adoptant une argumentation différente de celle de l'autorité précédente (cf. ATF 134 III 102 consid. 1.1 et la référence).
2.2. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut s'en écarter que si ces faits ont été établis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF), et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF). Le recourant qui entend invoquer que les faits ont été établis de manière manifestement inexacte (art. 97 al. 1 LTF), c'est-à-dire que les constatations de fait sont arbitraires au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 133 II 249 consid. 1.2.2), doit démontrer, par une argumentation précise, en quoi consiste la violation. Le Tribunal fédéral n'examine en effet la violation de l'interdiction de l'arbitraire que si ce grief a été invoqué et motivé par le recourant (art. 106 al. 2 LTF), c'est-à-dire s'il a été expressément soulevé et exposé de façon claire et détaillée (principe d'allégation; ATF 133 IV 286 consid. 1.4).
3. L'application du droit suisse n'est à juste titre pas remise en cause, malgré le domicile israélien de l'intimé (art. 6 et 97 LDIP).
4. La recourante soutient que les parties étaient parvenues à un accord quant au mode de partage de la copropriété, ce que la cour n'avait pourtant pas retenu, procédant à une appréciation arbitraire des faits la conduisant à violer l'art. 651 al. 2 CC.
4.1. La Cour de justice a privilégié la vente aux enchères publiques, considérant que les parties n'avaient pas convenu de mode de partage. Lors d'une audience tenue le 29 septembre 2009, l'intimé avait certes indiqué accepter la vente de sa part à la recourante, pour autant toutefois qu'il récupère l'investissement fait. Les parties ne s'étaient toutefois pas entendues quant au montant de ce rachat, ni ne s'étaient ensuite mises d'accord sur le bien-fondé de leurs autres prétentions pécuniaires (travaux d'aménagement, intérêts hypothécaires, primes des assurances-vie). La juridiction a également noté que, durant la suite de la procédure, aucune volonté ni conclusions concordantes n'avaient été formulées quant au mode de partage de la copropriété, les parties affichant même un profond antagonisme à cet égard.
4.2. La recourante oppose à la cour cantonale une appréciation arbitraire des faits, affirmant que, contrairement à ce que retenait la juridiction, les parties s'étaient entendues quant au mode de partage de leur copropriété; dit accord ressortait au demeurant d'une ordonnance préparatoire rendue par le juge de première instance le 20 décembre 2010. Les divergences soulignées par la Cour de justice pour appuyer sa conclusion concernaient en réalité les modalités du partage, certes litigieuses entre les parties, mais qui n'empêchaient toutefois nullement l'existence d'une entente entre celles-ci quant au mode de partage lui-même. En ordonnant la vente aux enchères publiques des biens-fonds et en refusant ainsi que la recourante reprenne la part de l'intimée, malgré la volonté convergente des parties à ce dernier égard, les magistrats cantonaux auraient en conséquence violé l'art. 651 al. 2 CC.
 
4.3.
4.3.1. Aux termes de l'art. 650 al. 1 CC, chacun des copropriétaires a le droit d'exiger le partage, s'il n'est tenu de demeurer dans l'indivision en vertu d'un acte juridique, par suite de la constitution d'une propriété par étages ou en raison de l'affectation de la chose à un but durable. Cette disposition régit le droit au partage, alors que l'art. 651 CC règle le mode de partage, sur lequel le juge se prononcera une fois le principe du partage préalablement admis (ATF 119 II 197 consid. 2).
4.3.2. L'action en partage a été introduite en 2009 par l'intimé, de sorte qu'en première instance, la cause était régie par l'ancienne loi de procédure civile genevoise (LPC/GE). Conformément à l'art. 197 al. 3 LPC/GE, le juge n'est pas lié par les ordonnances préparatoires, ni par leurs suites. Le juge peut ainsi parfaitement révoquer une ordonnance déjà prise ( BERTOSSA ET AL., Commentaire de la loi de procédure civile genevoise, n. 8 ad art. 197 LPC).
 
4.4.
4.4.1. Pour l'essentiel, l'argumentation de la recourante se réfère à l'ordonnance préparatoire du 20 décembre 2010, par laquelle le magistrat de première instance constatait l'existence d'un accord entre les parties quant au mode de partage. Comme il l'a été indiqué, l'ordonnance préparatoire ne lie cependant pas le juge (consid. 4.3.2). Le premier magistrat s'en est d'ailleurs implicitement écarté en relevant d'une part que, si les parties avaient certes initialement trouvé un accord, elles étaient toutes deux revenues sur celui-ci en cours de procédure, et en remarquant d'autre part les lacunes de l'expertise judiciaire ainsi que le manque de liquidités de la recourante, circonstances empêchant la réalisation du mode de partage initialement évoqué par les intéressés.
4.4.2. Il ressort du procès-verbal de comparution personnelle des parties du 29 septembre 2009 que l'intimé avait certes initialement accepté que la recourante rachète sa part, tout en faisant pourtant des modalités de rachat souhaitées une condition de son accord au mode de partage privilégié par la recourante: " 
5. La recourante reproche ensuite à la cour cantonale d'avoir arbitrairement apprécié les faits en refusant de prendre en considération, pour fixer sa créance en remboursement à l'encontre de l'intimé, les intérêts hypothécaires dont elle se serait pourtant acquitté entre les mois d'octobre 2010 et d'octobre 2011.
5.1. La juridiction cantonale a jugé à cet égard que la prétention de l'intéressée n'était plus recevable au stade de l'appel. La recourante ne pouvait en effet produire pour la première fois devant elle des documents relatifs à des éléments de faits survenus antérieurement au 10 novembre 2011, date à laquelle le premier juge avait gardé la cause à juger. A cela s'ajoutait que le paiement des montants réclamés sur la période concernée n'était pas démontré par pièces.
5.2. La recourante indique avoir expressément conclu, dans ses écritures du 20 septembre 2010 (mémoire de réponse et amplification de la demande), à ce que l'intimé lui verse la moitié des intérêts à compter du mois de septembre 2010 jusqu'au prononcé du jugement de première instance. La preuve du paiement des intérêts résultait de surcroît du décompte de la banque daté du 14 septembre 2012, décompte faisant uniquement apparaître des arriérés à compter du mois de juin 2012. En tant que l'intimé n'avait jamais allégué s'être acquitté des intérêts depuis la séparation des parties, il fallait en conséquence admettre que la recourante s'en était nécessairement acquitté. C'est d'ailleurs en raisonnant ainsi que la cour cantonale avait retenu que la recourante avait pris en charge les intérêts liés à la période du mois de novembre 2011 au mois de mai 2012.
5.3. La recourante a certes conclu dans son mémoire du 20 septembre 2010 à ce que l'intimé lui verse la moitié des intérêts hypothécaires liés à la période comprise entre le mois de septembre 2010 et le prononcé du jugement de première instance. En date du 8 novembre 2011, soit un peu moins d'un an plus tard, la recourante a néanmoins été amenée à déposer des conclusions motivées devant le Tribunal de première instance, sans pourtant détailler ses conclusions en paiement ni produire les pièces afférentes aux versements réclamés. Dits éléments n'ont été apportés qu'au cours de la procédure d'appel alors que, comme le souligne sans arbitraire la cour cantonale, ils pouvaient parfaitement l'être devant l'autorité de première instance. Quant au raisonnement entrepris par la cour cantonale pour la période du mois de novembre 2011 au mois de mai 2012, sur lequel la recourante fonde ses prétentions, il se justifie du fait que les moyens de preuves y afférents ne pouvaient plus être apportés par l'intéressée devant le Tribunal de première instance, les débats étant clos depuis le 10 novembre 2011. L'argumentation de celle-ci tombe en conséquence à faux.
6. En définitive, le recours est rejeté aux frais de son auteur (art. 66 al. 1 LTF). Aucune indemnité de dépens n'est octroyée à l'intimé, étant précisé qu'il a conclu au rejet de la requête d'effet suspensif présentée par la recourante, requête déclarée sans objet par le Président de la Cour de céans.
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
1. Le recours est rejeté.
2. Les frais judiciaires, arrêtés à 10'000 fr., sont mis à la charge de la recourante.
3. Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève.
Lausanne, le 25 septembre 2014
Au nom de la IIe Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse
Le Président: von Werdt
La Greffière: de Poret Bortolaso