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Original
 
Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
{T 0/2}
4A_485/2012
Arrêt du 8 janvier 2013
Ire Cour de droit civil
Composition
Mmes les juges Klett, présidente, Kiss et Niquille.
Greffier: M. Thélin.
Participants à la procédure
H.X.________ et
F.X.________,
représentés par Me Nils de Dardel,
défendeurs et recourants,
contre
Z.________,
représentée par Me Raija Lahlou,
demanderesse et intimée.
Objet
procédure civile; abus de droit
recours contre l'arrêt rendu le 29 juin 2012 par la Chambre des baux et loyers de la Cour de justice du canton de Genève.
Faits:
A.
Dès 1999, F.X.________ a pris à bail un appartement de quatre pièces au sixième étage d'un bâtiment locatif de Chêne-Bougeries; elle y habite actuellement avec son époux, devenu lui aussi locataire, et leurs quatre enfants. Le loyer mensuel s'élève à 1'521 fr.50, frais accessoires en sus.
Au début de janvier 2010, divers voisins se sont adressés à la bailleresse Z.________ pour se plaindre d'odeurs et de bruits incommodants qu'ils imputaient à la famille X.________. Le 22 janvier et le 16 février 2010, la bailleresse a averti les locataires de ces plaintes et elle les a menacés de résilier le bail.
Le 19 mars 2010, usant de formules officielles adressées à chacun des deux locataires, la bailleresse a résilié le bail avec effet au 30 avril 2010 en raison de leur manque d'égards envers les voisins.
B.
Le 11 mai 2010, les locataires ont saisi la Commission de conciliation compétente d'une requête tendant à faire constater l'invalidité du congé. La Commission a tenu audience le 16 juillet 2010 et elle a déclaré l'affaire non conciliée. Les locataires n'ont pas saisi le Tribunal des baux et loyers.
C.
Le 18 octobre 2010, devant la Commission de conciliation puis devant le Tribunal des baux et loyers, la bailleresse a ouvert action contre les locataires. Ceux-ci devaient être condamnés à évacuer l'appartement de leurs personnes, de leurs biens et de tous tiers, ainsi que de tous détritus.
Les locataires ont contesté les reproches élevés par leurs voisins et rapportés par la bailleresse, et ils ont conclu au rejet de l'action.
Le Tribunal des baux et loyers s'est prononcé le 20 juin 2011; accueillant l'action, il a condamné les locataires à évacuer l'appartement de leurs personnes, de leurs biens et de tous tiers dont ils sont éventuellement responsables. Le tribunal a admis la validité du congé, cependant sans constater les manques d'égards envers les voisins qui étaient allégués par la bailleresse et contestés par les locataires. Il a jugé que ceux-ci contestaient abusivement le motif du congé après qu'ils avaient, par un comportement dilatoire devant la Commission de conciliation, longuement retardé l'action en évacuation que l'adverse partie allait leur intenter. Le tribunal tenait pour dilatoire et abusif d'avoir saisi tardivement la Commission, le 11 mai 2010, puis d'avoir, au lieu de retirer la requête introductive, laissé cette autorité appointer l'audience.
La Chambre des baux et loyers de la Cour de justice a statué le 29 juin 2012 sur l'appel des locataires. Elle a confirmé le jugement; en substance, elle a aussi confirmé le raisonnement et l'appréciation des premiers juges.
D.
Agissant principalement par la voie du recours en matière civile et subsidiairement par celle du recours constitutionnel, les locataires requièrent le Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt de la Cour de justice. Ils se plaignent d'une violation prétendument manifeste de l'art. 257f CO et d'une violation de leur droit d'être entendu garanti par l'art. 29 al. 2 Cst.
La bailleresse et intimée conclut principalement à l'irrecevabilité des recours et subsidiairement à leur rejet.
Par ordonnance du 17 octobre 2012, le Tribunal fédéral a accordé l'assistance judiciaire aux recourants et il a désigné Me Nils de Dardel en qualité d'avocat d'office de ces plaideurs.
Considérant en droit:
1.
Selon la jurisprudence relative à l'art. 42 al. 1 LTF, le mémoire introductif du recours au Tribunal fédéral doit comporter des conclusions portant sur le sort de la cause, et la partie recourante n'est en principe pas recevable à réclamer seulement l'annulation de la décision attaquée. Ce dernier procédé n'est admis que dans l'hypothèse où le Tribunal fédéral, en cas de succès du recours, ne pourrait de toute manière pas rendre un jugement final, et devrait au contraire renvoyer la cause à la juridiction cantonale pour complètement de l'état de fait et nouvelle décision selon l'art. 107 al. 2 LTF (ATF 134 III 379 consid. 1.3 p. 383; 133 III 489 consid. 3).
Cette hypothèse particulière est réalisée dans la présente affaire car la validité du congé signifié aux recourants est contestée et les faits déterminants pour l'appréciation de cette question juridique n'ont pas été établis. Nonobstant l'opinion contraire de l'intimée, les conclusions présentées sont donc recevables.
2.
Dans une contestation portant sur la validité d'une résiliation de bail, la valeur litigieuse est égale au loyer de la période minimum pendant laquelle le contrat subsiste si la résiliation n'est pas valable, période qui s'étend jusqu'à la date pour laquelle un nouveau congé peut être donné; il faut prendre ici en considération, s'il y a lieu, la période de protection de trois ans dès la fin de la procédure judiciaire qui est prévue par l'art. 271a al. 1 let. e CO (ATF 137 III 389 consid. 1.1 p. 390; 111 II 384 consid. 1 p. 386). En l'espèce, compte tenu d'un loyer mensuel supérieur à 1'500 fr., la valeur litigieuse minimum de 15'000 fr. (art. 74 al. 1 let. a LTF) est atteinte.
Pour le surplus, le recours est dirigé contre une décision finale (art. 90 LTF), rendue en dernière instance cantonale (art. 75 al. 1 LTF) et susceptible du recours en matière civile (art. 72 al. 1 LTF). Ses auteurs ont pris part à l'instance précédente et succombé dans leurs conclusions (art. 76 al. 1 LTF). Le recours en matière civile est en principe recevable, de sorte que le recours constitutionnel, subsidiaire (art. 113 LTF), est exclu.
3.
Le recours est ouvert pour violation du droit fédéral (art. 95 let. a LTF). Le Tribunal fédéral applique ce droit d'office, hormis les droits fondamentaux (art. 106 LTF). Il n'est pas lié par l'argumentation des parties et il apprécie librement la portée juridique des faits; il s'en tient cependant, d'ordinaire, aux questions juridiques que la partie recourante soulève dans la motivation du recours (art. 42 al. 2 LTF; ATF 135 III 397 consid. 1.4 p. 400; 133 II 249 consid. 1.4.1 p. 254), et il ne se prononce sur la violation de droits fondamentaux que s'il se trouve saisi d'un grief invoqué et motivé de façon détaillée (art. 106 al. 2 LTF; ATF 134 I 83 consid. 3.2 p. 88; 134 II 244 consid. 2.2 p. 246; 133 II 249 consid. 1.4.2). Il conduit son raisonnement juridique sur la base des faits constatés dans la décision attaquée (art. 105 al. 1 LTF).
4.
Il est constant que les parties se sont liées par un contrat de bail à loyer, éventuellement résiliable aux conditions de l'art. 257f CO.
Aux termes de l'art. 257f al. 1 et 2 CO, le locataire est tenu d'user de la chose louée avec le soin nécessaire et, s'il s'agit d'un bien immobilier, d'avoir pour les personnes habitant la maison et pour les voisins les égards qui leur sont dus. L'art. 257f al. 3 CO prévoit que si le maintien du bail est devenu insupportable pour le bailleur ou le voisinage, et que le locataire persiste à enfreindre ses devoirs en dépit d'une protestation écrite, le bailleur peut, s'il s'agit d'un bail d'habitation ou de locaux commerciaux, résilier ce contrat en observant un délai de congé de trente jours pour la fin d'un mois.
Le congé que l'intimée a en l'espèce signifié aux recourants, le 19 mars 2010, est fondé sur ces dispositions.
5.
Si le locataire entend contester un congé fondé sur l'art. 257f CO au motif qu'il n'a, à son avis, pas enfreint ses devoirs envers le bailleur ou les voisins, il peut le faire en saisissant l'autorité de conciliation dans le délai de trente jours dès la réception du congé, en application de l'art. 273 al. 1 CO, puis en agissant en justice si la conciliation n'a pas abouti. Il est aussi loisible au locataire de soulever ce moyen plus tard, au stade de sa défense dans l'action en évacuation des locaux que le bailleur lui intentera après l'expiration du délai de congé (ATF 121 III 156 consid. 1c/aa p. 161; 122 III 92 consid. 2d p. 95). Le locataire est toutefois déchu de cette voie d'exception s'il a expressément ou tacitement, notamment en s'abstenant de protester contre le congé tenu pour injustifié, reconnu la validité de ce congé (ATF 121 III 156 consid. 1c/bb in fine p. 162; 138 III 123 consid. 2.4.2 p. 128).
Jusqu'à la fin de 2010, soit jusqu'à l'entrée en vigueur du code de procédure civile unifié, la loi a spécialement réglé l'hypothèse où le bailleur entreprenait une procédure d'évacuation alors que le locataire avait lui-même saisi l'autorité de conciliation: selon l'art. 274g al. 1 let. b et 274g al. 3 aCO, l'autorité d'expulsion était seule compétente et l'autorité de conciliation devait lui transmettre la requête. Cette règle concernait surtout les cantons dont la législation instituait une procédure et une autorité spécifiques pour l'action en évacuation; une pareille procédure n'existait pas dans le canton de Genève.
Dans la présente affaire, les recourants ont saisi l'autorité de conciliation mais ils n'ont pas observé le délai de trente jours à compter de la réception du congé que fixe l'art. 273 al. 1 CO; ce retard est incontesté. Comme la Cour de justice le relève, les recourants ont ensuite laissé l'autorité convoquer les parties et tenir audience le 16 juillet 2010. Quoique le bail fût censément arrivé à expiration le 30 avril 2010 par l'effet du congé, l'intimée n'a entrepris l'action en évacuation que le 18 octobre 2010.
6.
Aux termes de l'art. 2 CC, chacun est tenu d'exercer ses droits selon les règles de la bonne foi (al. 1) et l'abus manifeste d'un droit n'est pas protégé par la loi (al. 2). Ces principes ont régi non seulement le droit civil fédéral mais aussi le droit de procédure civile; cependant, en tant que celui-ci était édicté par les législateurs des cantons, l'interdiction de l'abus de droit appartenait aux règles du droit cantonal (ATF 83 II 345 consid. 2 p. 348; voir aussi ATF 132 I 249 consid. 5 p. 252). Depuis le 1er janvier 2011, l'art. 52 CPC impose aux plaideurs de se conformer aux règles de la bonne foi; dans le domaine de la procédure civile, la portée de cette nouvelle règle est identique à celle qu'avait auparavant l'art. 2 al. 1 et 2 CC (Thomas Sutter-Somm et Marco Chevalier, in Kommentar zur schweizerischen Zivilprozessordnung, Sutter-Somm et al., éd., 2010, n° 10 ad art. 52 CPC).
7.
Les recourants contestent qu'un comportement abusif leur soit imputable.
7.1 Un abus de droit peut être réalisé lorsqu'une institution juridique est utilisée dans un but étranger à celui qui est le sien (ATF 138 III 401 consid. 2.4.1 p. 405; 135 III 162 consid. 3.3.1 p. 169; 132 I 249 ibidem). Il y a lieu d'examiner si, de ce point de vue, les recourants se sont comportés abusivement en saisissant l'autorité de conciliation puis en la laissant convoquer les parties et tenir audience alors que leur requête était tardive au regard de l'art. 273 al. 1 CO.
En raison de cette dernière circonstance, il était d'emblée exclu que la procédure de conciliation pût être suivie d'une procédure judiciaire susceptible d'aboutir à l'annulation du congé. Néanmoins, conformément à la mission qui lui était assignée par l'art. 274a al. 1 let. a et b aCO, la Commission de conciliation pouvait conseiller les parties (let. a) et tenter de les amener à un accord (let. b) dans le différend qui perdurait au sujet du congé. A cette fin, la Commission a d'ailleurs convoqué les parties et tenu audience. Il n'apparaît donc pas de manière indiscutable que cette procédure de conciliation, bien qu'entreprise tardivement, fût détournée de son but et que les recourants n'eussent aucun intérêt légitime à en faire usage. Cet aspect n'est pas discuté dans la décision attaquée.
7.2 Les procédés purement dilatoires sont aussi contraires à l'art. 2 al. 2 CC (ATF 132 I 249 ibidem). Comme on vient de le voir, il est douteux que la procédure de conciliation entreprise le 11 mai 2010 eût pour seul but de retarder la restitution des locaux loués. Au surplus, cette procédure ne pourrait être jugée dilatoire, et donc abusive, que si elle avait été effectivement propre à empêcher l'intimée d'entreprendre une action en évacuation. Or, au regard de l'art. 274g al. 1 let. b et 274g al. 3 aCO, ladite procédure ne pouvait de toute évidence pas exercer un pareil effet. Il était au contraire loisible à l'intimée de saisir elle-même la Commission de conciliation, indépendamment de toute démarche de ses adverses parties. Cela n'a d'ailleurs pas échappé à la Cour de justice. Celle-ci mentionne, dans sa décision, l'art. 274g aCO; elle considère toutefois que « la requête des appelants [...] était de nature à conduire l'intimée à penser que la validité de la résiliation serait tranchée dans le cadre de cette procédure, après quoi, [...] elle pourrait introduire une requête en évacuation ». La Cour se livre ici à une conjecture sur la stratégie adoptée par l'intimée; elle ne constate pas un réel empêchement à agir, de fait ou de droit, qui soit imputable aux recourants. Sans désigner aucun élément de preuve topique, la Cour suppose que ces derniers aient voulu et soient parvenus à influencer malicieusement la stratégie de leur adverse partie.
Le reproche d'abus de droit retenu à l'encontre des recourants se révèle inconsistant. Il n'est pas nécessaire d'examiner si la sanction que les autorités précédentes ont attachée à ce prétendu abus, consistant dans le refus de constater les faits déterminants et de les apprécier au regard de l'art. 257f CO, était conforme au droit. Cette sanction était de toute manière dépourvue de justification. En accueillant l'action en évacuation sans avoir vérifié si l'intimée avait résilié le contrat conformément à cette dernière disposition, ces autorités ont elles-mêmes violé une règle déterminante pour l'issue de la cause. En refusant en termes exprès et sans justification pertinente l'examen d'une objection soulevée dans le procès, elles ont commis un déni de justice formel et, par là, violé l'art. 29 al. 1 Cst. (cf. ATF 135 I 6 consid. 2.1 p. 9; 134 I 229 consid. 2.3 p. 232). Cela conduit à l'admission du recours en matière civile et à l'annulation de la décision attaquée.
8.
A titre de partie qui succombe, l'intimée doit acquitter l'émolument à percevoir par le Tribunal fédéral et les dépens auxquels ses adverses parties peuvent prétendre.
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
1.
Le recours constitutionnel est irrecevable.
2.
Le recours en matière civile est admis, la décision attaquée est annulée et la cause est renvoyée à la Cour de justice pour nouvelle décision.
3.
L'intimée acquittera un émolument judiciaire de 3'000 francs.
4.
L'intimée versera une indemnité de 3'500 fr. aux recourants, créanciers solidaires, à titre de dépens.
5.
La caisse du Tribunal fédéral versera une indemnité de 3'500 fr. à Me de Dardel, à titre d'honoraires, dans l'éventualité où les dépens se révéleraient irrécouvrables.
6.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour de justice du canton de Genève.
Lausanne, le 8 janvier 2013
Au nom de la Ire Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse
La présidente: Klett
Le greffier: Thélin