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Original
 
Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
{T 0/2}
6B_514/2011
Arrêt du 26 octobre 2011
Cour de droit pénal
Composition
MM. et Mme les Juges Mathys, Président,
Jacquemoud-Rossari et Denys.
Greffier: M. Rieben.
Participants à la procédure
X.________, représenté par Me Giuseppe Donatiello, avocat,
recourant,
contre
1. Ministère public du canton de Genève, case postale 3565, 1211 Genève 3,
2. Service cantonal d'avance et de recouvrement des pensions alimentaires (SCARPA), case postale 3429, 1211 Genève 3,
intimés.
Objet
Violation d'une obligation d'entretien (art. 217 CP),
recours contre l'arrêt de la Cour de justice du canton de Genève, Chambre pénale d'appel et de révision, du 24 juin 2011.
Faits:
A.
A la suite de son divorce, prononcé le 18 mars 2004 par le Tribunal de première instance de la République et canton de Genève, X.________ a été condamné à verser une contribution mensuelle de 1'000 francs à l'entretien de sa fille A.________, née le 23 mars 1995, jusqu'à l'âge de seize ans.
Né en 1963, il est titulaire d'un CFC d'employé de commerce, d'un diplôme de cadre et d'une licence en sciences économiques. Il a exercé diverses fonctions dans son domaine de compétence, notamment dans l'immobilier, et il dispose de bonnes connaissances linguistiques. Employé depuis le 1er mai 1991 par l'agence immobilière B.________ et Cie à Genève en qualité "d'assistant de M. B.________", son dernier salaire s'élevait à 10'100 francs, payé treize fois l'an. Son contrat de travail a été résilié le 30 août 2004 pour le 30 novembre suivant. Il s'est trouvé en incapacité de travail pour cause de maladie dès le 1er septembre 2004 et son salaire lui a été versé jusqu'au 31 mai 2005. Le 15 juin 2005, il a rempli et signé une demande d'indemnités de chômage.
Par jugement du 14 février 2011, le Tribunal de police de la République et canton de Genève a reconnu X.________ coupable d'escroquerie - pour ne pas avoir déclaré certains revenus, ce qui lui avait permis de toucher des prestations sociales - et de violation d'une obligation d'entretien pour ne pas avoir versé la contribution d'entretien mensuelle de 1'000 francs due pour sa fille durant la période du 1er janvier 2007 au 31 août 2008.
B.
Statuant le 24 juin 2011 sur l'appel dont X.________ l'avait saisie, la Chambre pénale d'appel et de révision l'a acquitté de l'infraction d'escroquerie et l'a reconnu coupable de violation d'une obligation d'entretien. Elle l'a condamné à une peine pécuniaire de 30 jours-amende, à 30 francs le jour, avec sursis durant trois ans, cette peine étant complémentaire à la peine de 10 jours-amende infligée le 25 mai 2009.
C.
X.________ interjette un recours en matière pénale contre cet arrêt. Il conclut à ce qu'il soit acquitté du chef de violation d'une obligation d'entretien. Il sollicite par ailleurs le bénéfice de l'assistance judiciaire.
Il n'a pas été ordonné d'échange d'écritures.
Considérant en droit:
1.
Le recourant invoque une violation de l'art. 217 CP. Il conteste la réalisation des conditions tant objective que subjective de l'infraction.
1.1 L'art. 217 al. 1 CP punit, sur plainte, celui qui n'aura pas fourni les aliments ou les subsides qu'il doit en vertu du droit de la famille, quoi qu'il en eût les moyens ou pût les avoir.
1.2
1.2.1 D'un point de vue objectif, l'obligation d'entretien est violée lorsque le débiteur ne fournit pas intégralement, à temps et à disposition de la personne habilitée à la recevoir, la prestation d'entretien qu'il doit en vertu du droit de la famille (Bernard Corboz, Les infractions en droit suisse, 3ème éd., 2010, n. 14 ad art. 217 CP). En revanche, on ne peut reprocher à l'auteur d'avoir violé son obligation d'entretien que s'il avait les moyens de la remplir ou aurait pu les avoir (Corboz, op. cit., n. 20 ad art. 217 CP). Par là, on entend celui qui, d'une part, ne dispose certes pas de moyens suffisants pour s'acquitter de son obligation, mais qui, d'autre part, ne saisit pas les occasions de gain qui lui sont offertes et qu'il pourrait accepter (ATF 126 IV 131 consid. 3a; Message concernant la modification du code pénal et du code pénal militaire, du 26 juin 1985, FF 1985 II 1070). La capacité économique du débiteur de verser la contribution d'entretien se détermine par analogie avec le droit des poursuites relatif au minimum vital (art. 93 LP; ATF 121 IV 272 consid. 3c p. 277).
Le juge pénal est lié par la contribution d'entretien fixée par le juge civil (ATF 106 IV 36; arrêt 6B_264/2011 du 19 juillet 2011 consid. 2.1.3; 6B_1057/2009 du 17 juin 2010 consid. 1.2). En revanche, la question de savoir quelles sont les ressources qu'aurait pu avoir le débiteur d'entretien doit être tranchée par le juge pénal s'agissant d'une condition objective de punissabilité au regard de l'art. 217 CP. Il peut certes se référer à des éléments pris en compte par le juge civil. Il doit cependant concrètement établir la situation financière du débiteur, respectivement celle qui aurait pu être la sienne en faisant les efforts pouvant raisonnablement être exigés de lui.
Déterminer quelles sont les ressources qu'aurait pu avoir le débiteur d'entretien relève de l'appréciation des preuves et de l'établissement des faits (arrêt 6B_264/2011 du 19 juillet 2011 consid. 2.1.3; Corboz, op. cit., n. 28 ad art. 217 CP). Dans le recours en matière pénale, les faits constatés par l'autorité précédente lient le Tribunal fédéral (art. 105 al. 1 LTF), à moins qu'ils n'aient été établis en violation du droit ou de manière manifestement inexacte au sens des art. 97 al. 1 et 105 al. 2 LTF, soit essentiellement de façon arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. (cf. ATF 137 I 58 consid. 4.1.2 p. 62; sur la notion d'arbitraire, v. ATF 137 I 1 consid. 2.4 p. 5). Le Tribunal fédéral ne connaît de la violation des droits fondamentaux que si un tel moyen est invoqué et motivé par le recourant (art. 106 al. 2 LTF), c'est-à-dire s'il a été expressément soulevé et exposé de manière claire et détaillée (ATF 134 I 83 consid. 3.2 p. 88). Le recourant qui se plaint d'arbitraire doit démontrer, par une argumentation claire et détaillée, que cette décision se fonde sur une constatation des faits ou une appréciation des preuves insoutenables (ATF 133 II 396 consid. 3.2 p. 400).
1.2.2 Selon l'autorité cantonale, le recourant n'avait disposé d'aucun revenu durant la période pénale, soit du 1er janvier 2007 au 31 août 2008. Il était toutefois incompréhensible et invraisemblable, eu égard à sa formation, à son parcours professionnel et à ses connaissances linguistiques, en l'absence de maladie ou d'accident, qu'il n'avait pas trouvé d'emploi depuis 2007. Il aurait pu reprendre une activité professionnelle, fût-ce en occupant un poste moins prestigieux et moins rémunéré que le précédent, comme il en avait l'obligation en sa qualité de débiteur d'aliments. Il avait certes produit des pièces faisant état de recherches en 2007 et 2008. Il avait toutefois lui-même rédigé et signé ces documents auxquels les courriers adressés à des employeurs potentiels n'étaient pas joints, pas plus que les réponses de ces derniers. Force était dès lors de constater que le recourant n'avait pas consenti les efforts qu'on pouvait attendre de lui pour remplir, à tout le moins partiellement, son obligation d'entretien. Il s'était donc rendu coupable de violation d'une obligation d'entretien.
Le recourant soutient toutefois qu'il était inscrit au chômage pendant la période pénale, ce qui constituait un moyen approprié pour lui permettre de remplir ses obligations alimentaires, et l'assurance-chômage ne l'avait jamais sanctionné pour ne pas avoir effectué des recherches de travail suffisantes. Il n'avait cependant pas perçu d'indemnités journalières en raison de l'analyse juridique erronée de l'assurance précitée, qui n'avait pas su faire la distinction entre gain accessoire et gain intermédiaire et reconnaître que son éventuel domicile à l'étranger était sans portée juridique. Les prestations qui lui étaient dues ne lui avaient été versées qu'en 2009, à titre rétroactif, à la suite d'un arrêt du Tribunal cantonal des assurances du 8 septembre 2008. Il soutient également qu'il appartient à l'accusation de démontrer sa culpabilité et qu'en l'absence de toute décision de l'assurance chômage le sanctionnant pour ne pas s'être conformé à ses obligations en matière de recherches de travail, l'autorité précédente a violé la présomption d'innocence (art. 32 al. 1 Cst., art. 6 § 2 CEDH et art. 14 al. 2 Pacte ONU) en retenant qu'il n'avait pas fourni les efforts nécessaires en la matière.
1.2.3 Par son argumentation, le recourant oppose l'appréciation de la caisse de chômage selon laquelle il aurait fourni les efforts nécessaires pour trouver un emploi, qu'il déduit implicitement du fait qu'elle lui a versé des prestations, à celle de la cour cantonale. Or, de même que le juge pénal n'est pas lié par une décision civile, il ne saurait non plus être lié par la décision d'une autorité administrative. Il est rappelé qu'il lui appartient de trancher quelles sont les ressources qu'aurait pu avoir le débiteur d'entretien afin de se conformer à ses obligations alimentaires s'agissant d'une condition objective de punissabilité au regard de l'art. 217 CP (cf. supra consid. 1.2.1). Cela implique qu'il se fonde, le cas échéant, sur des critères plus sévères que ceux qui prévalent en matière d'assurance sociale, ou à tout le moins différents. En effet, le créancier d'aliments, surtout lorsqu'il s'agit, comme en l'espèce, d'un enfant, doit pouvoir compter sur les contributions qui lui sont dues pour couvrir ses besoins essentiels et le débiteur doit dès lors fournir des efforts particuliers pour en assurer le paiement. De telles considérations ne sont en revanche pas déterminantes dans le cadre de l'assurance-chômage, laquelle pose des exigences en matière de recherche d'emploi afin que la personne réintègre le marché du travail, indépendamment du fait qu'elle ait, ou pas, des obligations alimentaires.
Pour le surplus, le recourant ne critique pas la décision cantonale et il ne démontre ainsi pas qu'il était inadmissible de considérer, sur la base des éléments invoqués par l'autorité précédente - qu'il ne conteste pas (cf. art. 97 LTF) - qu'il aurait pu trouver un emploi durant la période pénale et que les pièces qu'il a produites n'étaient pas suffisantes pour démontrer qu'il avait fourni les efforts qui pouvaient être attendus de lui. Le recourant a été licencié au motif qu'il privilégiait ses propres activités, au détriment de son employeur, il a donné des cours de finance et marketing pour le compte de la société C.________ jusqu'en juillet 2005, puis a suivi deux étudiants préparant un MBA jusqu'en juin 2006. Il a en outre été inscrit au registre du commerce en tant qu'associé gérant de la société D.________ Sàrl, détenue par sa compagne, dont il affirme toutefois n'avoir perçu aucun revenu. Ces éléments démontrent qu'il dispose de qualités et ressources personnelles qui auraient dû l'amener à trouver un emploi avant le début de la période pénale puisque cela faisait alors déjà plusieurs mois qu'il était au chômage. Le domaine de l'immobilier dans lequel il était actif avant d'être licencié ne subissait en outre pas une crise particulière. Ces considérations s'appliquent à l'entier de la période pénale et il est sans conséquence que la cour cantonale ait indiqué qu'il était inexplicable que le recourant soit resté dans la même situation "de 2007 à 2011", dans la mesure où elle n'a, par ailleurs, pas ignoré que les faits reprochés au recourant s'étendaient uniquement du 1er janvier 2007 au 31 août 2008 (cf. arrêt attaqué p. 7).
Ainsi, compte tenu des compétences du recourant, du dernier salaire mensuel qu'il a réalisé, soit plus de dix mille francs, et de la contribution due de mille francs, c'est sans violer le droit fédéral que l'autorité cantonale a considéré, en l'absence de charge particulière invoquée, qu'il aurait pu disposer des moyens de fournir, à tout le moins partiellement, les aliments qu'il devait en vertu du droit de la famille sans entamer son minimum vital, fût-ce en acceptant un emploi qui, dans son domaine d'activité, ne correspondait pas exactement à ses qualifications et était moins bien rémunéré. Les conditions objectives de l'infraction sont ainsi réunies.
1.3 Le recourant conteste également la réalisation de l'élément subjectif de l'infraction. Il soutient qu'il avait pensé de bonne foi que son comportement était adéquat puisqu'il avait tout mis en ?uvre pour obtenir le versement d'indemnités journalières de l'assurance-chômage.
1.3.1 Du point de vue subjectif, l'infraction est intentionnelle; le dol éventuel suffit (ATF 76 IV 109 consid. 5 p. 118; Thomas Bosshard, Basler Kommentar, Strafrecht II, 2ème éd., 2007, n. 21 ad art. 217 CP; Andreas Donatsch/Wolfgang Wohlers, Delikte gegen die Allgemeinheit, 4ème éd., 2011, § 3, p. 16).
1.3.2 Le recourant ne conteste pas avoir connu les obligations qui lui étaient imposées par le jugement de divorce du 18 mars 2004. En outre, il savait que le versement de ses indemnités de chômage était suspendu et il ne pouvait dès lors imaginer qu'elles constituaient un moyen approprié pour lui permettre de se conformer à temps à son obligation d'entretien. Il ne pouvait par ailleurs pas ignorer, ou à tout le moins devait-il envisager, eu égard à ses compétences et au dernier salaire qu'il percevait, qu'en fournissant les efforts nécessaires, il pourrait être en mesure de s'acquitter de ses obligations. Enfin, il indique qu'en juin 2006, il avait soldé un arriéré de contribution d'entretien lorsque son dossier d'assurance-chômage s'était temporairement débloqué. Un tel élément ne permet toutefois pas encore de démontrer sa volonté de se conformer à ses obligations durant la période pénale. La condition subjective de l'infraction est remplie.
1.4 Le recourant ne conteste pas, pour la surplus, la peine prononcée à son encontre. Le recours est rejeté.
2.
Comme ses conclusions étaient manifestement dénuées de chance de succès, le recourant doit être débouté de sa demande d'assistance judiciaire (art. 64 al. 1 LTF a contrario) et supporter les frais de justice, qui seront fixés en tenant compte de sa situation financière (art. 65 al. 2 et art. 66 al. 1 LTF).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
1.
Le recours est rejeté.
2.
La demande d'assistance judiciaire est rejetée.
3.
Les frais judiciaires, arrêtés à 800 francs, sont mis à la charge du recourant.
4.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour de justice du canton de Genève, Chambre pénale d'appel et de révision.
Lausanne, le 26 octobre 2011
Au nom de la Cour de droit pénal
du Tribunal fédéral suisse
Le Président: Mathys
Le Greffier: Rieben