BGer 6B_740/2008
 
BGer 6B_740/2008 vom 09.12.2008
Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
{T 0/2}
6B_740/2008 /rod
Arrêt du 9 décembre 2008
Cour de droit pénal
Composition
MM. les Juges Schneider, Président,
Ferrari et Favre.
Greffier: M. Vallat.
Parties
Ministère public de l'Etat de Fribourg, 1700 Fribourg,
recourant,
contre
X.________,
intimé, représenté par Me Nicolas Riedo, avocat,
Objet
Meurtre; assassinat; fixation de la peine,
recours contre l'arrêt de la Cour d'appel du Tribunal cantonal de l'Etat de Fribourg du 25 juin 2008.
Faits:
A.
Le 17 juillet 2003, entre 7h51 et 8h20, X.________ a frappé A.________ à la gorge à l'aide d'un couteau. La victime est décédée.
Par jugement du 23 mai 2006, le Tribunal pénal de la Sarine a reconnu X.________ coupable d'assassinat à raison de ces événements. Le tribunal l'a, par ailleurs, reconnu coupable, en relation avec d'autres faits, de tentative de lésions corporelles simples (avec un objet dangereux), de lésions corporelles simples (avec un objet dangereux), de vol, de tentative de vol, de dommages à la propriété, de menaces, de violation de domicile, d'incendie intentionnel (de peu d'importance), de délit contre la loi fédérale sur les armes, de conduite en étant pris de boisson, de circulation sans permis de conduire et de délit contre la loi sur la protection des animaux. Le tribunal a condamné X.________, avec suite de frais, à la peine de 13 ans de réclusion, sous déduction de 251 jours de détention préventive. Un traitement ambulatoire a été ordonné. Ce jugement statue en outre sur les prétentions des parties civiles. Il repose, pour l'essentiel, sur l'état de fait suivant, en ce qui concerne le crime d'assassinat.
A.a X.________ est né au Brésil le 24 août 1984. Son père est décédé avant sa naissance. Son demi-frère, B.________, est né en 1982. Leur mère, C.________, est venue en Suisse en 1992, après avoir épousé D.________. X.________ a alors vécu avec sa grand-mère et des tantes. Il a rejoint sa mère en Suisse en 1996. Son frère B.________ les a rejoints à son tour en 1998. X.________ a appris le français dans une classe d'accueil puis a poursuivi sa scolarité en classe de développement jusqu'à l'âge de 16 ans. Il est ensuite retourné au Brésil, dans la maison de sa mère à la campagne. Il est revenu en Suisse à la fin de l'année 2002 et a commencé un apprentissage de cuisinier, qu'il a interrompu après deux mois.
A.b En janvier 2000, A.________ et B.________ ont commencé la vie commune. De leur relation est né E.________, le 4 octobre 2001. En juillet 2002, le couple s'est séparé. Depuis le 1er mars 2003, A.________ et B.________ ont repris la vie commune. Vers la mi-avril 2003, X.________ s'est installé au domicile de son frère, que ce dernier partageait avec A.________, leur fils E.________, ainsi que les deux filles de A.________. Cette dernière avait voulu accueillir X.________ lorsque la mère de ce dernier avait refusé de continuer à lui payer son loyer. Elle avait eu pitié de lui et a été d'accord qu'il vienne emménager chez eux.
A.c Le 16 juillet 2003 à midi, A.________ a appelé son frère F.________ et lui a dit qu'elle avait mis X.________ à la porte. Vers 17h00-17h30, X.________ a déclaré à son ami G.________, à la terrasse d'un café, qu'il en avait marre de A.________, qu'elle le faisait « chier », qu'elle lui reprochait de rentrer trop tard, de faire trop de bruit ou encore d'amener des filles et qu'il voulait quitter l'appartement de son frère et repartir au Brésil. Vers 21h00-21h30, X.________, après avoir rejoint sa mère dans un café et contacté G.________, a remis à ce dernier un dossier contenant une lettre dans laquelle il déclarait laisser tous ses biens à ces deux personnes et qu'il partait pour une nouvelle vie. Vers 22h30-23h00, X.________ s'est rendu sur son lieu de travail, le bar du Stalden.
Après avoir bu de l'alcool sur son lieu de travail, X.________ est parti vers 4h30, le 17 juillet 2003, avec son scooter en direction de la pizzeria l'Escale où il a rencontré une dénommée H.________ et un certain I.________, avec lesquels il a mangé et bu. Il a déclaré qu'il en avait marre de tout, que si A.________ le faisait encore « chier », il allait la tuer. Il a ensuite quitté cet établissement avec son scooter, en continuant à penser, sur le trajet, qu'il allait tuer A.________ si elle le faisait « chier ». Arrivé vers 5h00-6h00 du matin à la maison, il s'est rendu au salon où il a regardé la télévision et bu une bière. Son frère - de même que A.________ - l'a insulté en lui disant qu'il était saoul. X.________ n'a pas réagi et est resté devant la télévision. Vers 7h00, B.________ est parti travailler et la discussion avec A.________ s'est également arrêtée. A 7h51, cette dernière a téléphoné au patron de son compagnon et demandé à parler à celui-ci. Elle lui a dit que X.________ mettait la musique fort et qu'elle voulait qu'il le mette à la porte le soir-même. B.________ a précisé que A.________ était énervée mais sans plus, sinon il serait rentré tout de suite à la maison.
A.d A.________ s'est énervée après que X.________ eut renversé une bière au salon. Elle lui a dit « Arrête de boire, soûlon, tu vas te tuer ». X.________ a été énervé par ces paroles. Il s'est rendu à la cuisine pour y prendre de quoi nettoyer ou une autre bière. A.________ et lui se sont bousculés et cette dernière s'est mise à crier ou a continué à l' « engueuler ». A ce moment-là, X.________ a pris un couteau dans la cuisine et a dit à A.________: « Tu continues pas ces conneries sinon il va se passer des conneries ». A.________ a continué à l'« engueuler » et lui a dit qu'il ressemblait à sa mère, ce qui a blessé et énervé X.________. C'est alors qu'il a coupé A.________ au niveau de la gorge. A 8h15-8h20, une voisine, L.________, a entendu un genre de cri, une sorte de fort gémissement, qui provenait de l'appartement de A.________. Au moins quatre coups ont été donnés, dans le sens de quatre mouvements (le couteau a pu ne pas se soulever complètement, mais a passé quatre fois). Il n'a, en revanche, pas été possible d'établir si les coups avaient été donnés de face, par derrière ou de côté. Le couteau n'avait pas de dents et était tranchant, pas piquant. La durée de survie à ces blessures était de quelques minutes. Le tribunal a retenu que l'agression avait eu lieu dans le couloir, la victime était restée un moment au sol dans la penderie, car il y avait un épanchement de sang important à cet endroit précis. Elle a été déplacée à l'endroit où elle a été découverte et l'auteur a nettoyé le couloir et l'entrée de la chambre où la victime gisait.
A.e Ensuite, X.________ a pris le natel de son frère au salon. Il a cherché les clés de l'appartement, fouillé partout, même dans le sac à main de la victime. Finalement, il a trouvé les clés à la serrure de la porte d'entrée. Il a pris le couteau et fermé la porte de l'appartement à clé. Il a également pris le natel de A.________. Avant de partir, il a mis un haut de training vert. Il a également fermé la porte de la chambre où se trouvait le corps.
Après être sorti de chez lui, il a jeté le couteau dans une poubelle ou un buisson. Il s'est rendu à la gare où il avait rendez-vous, depuis la veille, avec G.________, à 9h00. Ils devaient se rendre en France. Le voyage était prévu depuis deux à trois semaines mais deux jours avant, X.________ avait demandé à son copain de pouvoir l'accompagner. X.________ a changé 170 fr. en euros. G.________ lui a trouvé l'air nerveux et trop excité. Depuis la gare, X.________ a appelé sa mère et lui a déclaré avoir tué A.________. C.________ ne l'a pas cru et lui a donné rendez-vous au Café de l'Espérance. X.________ s'y est rendu avec G.________ et deux inconnues. Arrivé au café, il a répété à sa mère, qui ne le croyait toujours pas, qu'il avait tué A.________. X.________ était à deux doigts de pleurer. Il a jeté une clé à sa mère en lui disant « va regarder toi-même si tu ne me crois pas ». Après quoi, il a quitté les lieux en précisant qu'il allait « foutre le camp ». G.________ l'a attendu dehors. X.________ est ensuite parti en France avec lui et les deux inconnues. Dans la voiture, X.________ a paru changé; il souriait et plaisantait avec les filles. Durant le trajet, il a appelé sa mère en lui demandant de ne rien dire à la police. Il lui a également fait part de sa volonté d'acheter un billet d'avion en France et de se rendre au Brésil. Après avoir raccroché, il a dit à G.________ qu'il avait fait une « connerie », soit qu'il avait tué A.________. A Annecy, X.________ s'est rendu dans une agence de voyage où il s'est renseigné sur le prix des billets pour le Brésil. G.________ avait essayé de le faire changer d'avis pour qu'il rentre en Suisse avec lui, mais il ne voulait rien savoir. A l'agence, ils ont appris que le billet coûtait 800 euros. G.________ a dit à X.________: « Tu n'a pas les moyens pour aller au Brésil, t'as déjà fait la merde, tu dois assumer et rentrer en Suisse ». X.________ lui a répondu qu'il devait réfléchir. Le soir, ils ont pris une chambre d'hôtel. Après avoir reçu un deuxième téléphone d'un certain J.________ et un téléphone de la police, G.________ a dit à X.________ qu'il rentrait à Fribourg. Ce dernier l'a accompagné à la gare, où G.________ a acheté deux billets de train Annecy-Genève. Ensuite, G.________ lui a dit qu'il devait rentrer avec lui faute de quoi il ne lui parlerait plus jamais. X.________ a accepté de le suivre. Il a été arrêté par la police à son arrivée à Genève.
A.f Examinant la qualification de l'homicide, le tribunal a jugé, en résumé, que les mobiles et la manière de procéder étaient particulièrement odieux. Le tribunal a également jugé que l'auteur avait agi avec une grande détermination, en soulignant tant son comportement durant les faits eux-mêmes que ceux survenus dans les heures et le jour suivants.
B.
Saisie de recours en appel de l'accusé et du Ministère public, la Cour d'appel pénal du Tribunal cantonal du canton de Fribourg les a admis tous deux partiellement, par arrêt du 25 juin 2008. Elle a réformé le jugement du 23 mai 2006 en ce sens que X.________ a été reconnu coupable de meurtre, de délit manqué de lésions corporelles graves, de lésions corporelles simples (avec un objet dangereux), de vol, de tentative de vol, de dommages à la propriété, de menaces, de violation de domicile, d'incendie intentionnel (de peu d'importance), de délit contre la loi fédérale sur les armes, d'avoir conduit en étant pris de boisson, d'avoir circulé sans permis de conduire, et de délit contre la loi sur la protection des animaux. Elle a, en revanche, acquitté l'intéressé des chefs d'accusation de lésions corporelles simples, voies de fait, injure, escroquerie, faux dans les titres, vol d'usage, contravention à la loi fédérale sur les stupéfiants et contravention à la loi d'application du Code pénal. X.________ a été condamné à une peine de 14 ans de réclusion, sous déduction de la détention avant jugement subie du 23 au 24 avril 2003 et du 17 juillet 2003 au 24 mars 2004 (date à laquelle il a été mis en exécution anticipée de peine), ainsi qu'au paiement des frais pénaux de première instance comprenant un émolument de 1800 francs et les débours à déterminer. Un traitement ambulatoire a été ordonné en application de l'ancien art. 43 ch. 1 CP. Cet arrêt statue en outre sur les prétentions civiles et les frais de la procédure d'appel.
En bref, s'agissant de la qualification de l'homicide, la cour cantonale a estimé qu'il convenait de nuancer l'appréciation du tribunal de première instance sur les différents éléments constitutifs retenus à l'appui de la qualification d'assassinat. Dans l'appréciation globale, plusieurs éléments rapprochaient de l'assassinat l'acte commis par X.________, en particulier l'horreur de tuer en coupant la gorge, qui plus est d'une frêle jeune femme qui l'avait hébergé et lui avait prodigué son aide peu de temps auparavant, l'invocation des raisons inconsistantes et le peu d'état d'âme. Il n'y avait cependant sur aucun des éléments topiques (mobiles, manière d'agir, sang froid), une distinction nette avec le meurtre. L'acte avait été accompli sans que ce soit pour en retirer un avantage, au sortir d'une nuit blanche, par un auteur de moins de dix-neuf ans, qui en raison de son parcours de vie supportait très mal d'être abandonné et qui précisément se trouvait écarté une nouvelle fois, qui avait beaucoup bu comme il le faisait depuis plusieurs mois, qui s'était retrouvé confronté à des reproches qu'il acceptait mal même s'ils étaient justifiés et dont le geste criminel, selon les faits constatés, avait été bref et sans acharnement particulier. L'assassinat ne pouvait être retenu faute de pouvoir être nettement distingué, en l'espèce, d'un meurtre.
C.
Le Ministère public de l'Etat de Fribourg forme un recours en matière pénale contre cet arrêt. Il conclut, avec suite de frais, à l'annulation de l'arrêt entrepris en tant qu'il reconnaît X.________ coupable de meurtre et non d'assassinat et au renvoi de la cause à l'autorité cantonale pour nouvelle décision au sens des considérants.
Il n'a pas été ordonné d'échange d'écritures.
Considérant en droit:
1.
L'arrêt attaqué peut faire l'objet d'un recours en matière pénale (art. 78 al. 1 et 80 al. 1 LTF), que le recourant qui conteste la qualification de l'une des infractions retenues est habilité à former (art. 81 al. 1 let. a et let. b ch. 3 LTF).
2.
Le recours en matière pénale peut être interjeté pour violation du droit, tel qu'il est circonscrit par les art. 95 et 96 LTF. Le Tribunal fédéral l'applique d'office (art. 106 al. 1 LTF). Il n'est donc limité ni par les arguments soulevés dans le recours ni par la motivation retenue par l'autorité précédente. Il peut admettre un recours pour un autre motif que ceux qui ont été invoqués et il peut rejeter un recours en adoptant une argumentation différente de celle de l'autorité précédente (cf. ATF 130 III 136 consid. 1.4 p. 140). Compte tenu de l'exigence de motivation contenue à l'art. 42 al. 1 LTF, sous peine d'irrecevabilité (art. 108 al. 1 let. b LTF), le Tribunal fédéral n'examine en principe que les griefs invoqués; il n'est pas tenu de traiter, comme le ferait une autorité de première instance, toutes les questions juridiques qui se posent, lorsque celles-ci ne sont plus discutées devant lui. Il ne peut pas entrer en matière sur la violation d'un droit constitutionnel ou sur une question relevant du droit cantonal ou intercantonal si le grief n'a pas été invoqué et motivé de manière précise par la partie recourante (art. 106 al. 2 LTF). Le Tribunal fédéral n'entre pas non plus en matière sur les critiques de nature appellatoire (ATF 133 III 393 consid. 6 p. 397).
Le Tribunal fédéral, saisi d'un recours en matière pénale ne réexamine l'établissement des faits - sous réserve de la violation du droit au sens de l'art. 95 LTF - que lorsqu'il est entaché d'inexactitude manifeste (art. 97 al. 1 LTF), soit d'arbitraire (ATF 134 IV 36 consid. 1.4.1, p. 39). Une décision est arbitraire lorsqu'elle est manifestement insoutenable, méconnaît gravement une norme ou un principe juridique clair et indiscuté, ou encore heurte de manière choquante le sentiment de la justice et de l'équité. Il ne suffit pas que sa motivation soit insoutenable; encore faut-il que la décision apparaisse arbitraire dans son résultat. A cet égard, le Tribunal fédéral ne s'écarte de la solution retenue que si celle-ci apparaît insoutenable, en contradiction manifeste avec la situation effective, adoptée sans motif objectif ou en violation d'un droit certain. Il n'y a pas arbitraire du seul fait qu'une autre solution paraît également concevable voire même préférable (ATF 134 I 140 consid. 5.4 et les arrêts cités, p. 148, 129 I 8 consid. 2.1 p. 9). En matière d'appréciation des preuves et d'établissement des faits, il y a arbitraire lorsque l'autorité ne prend pas en compte, sans aucune raison sérieuse, un élément de preuve propre à modifier la décision, lorsqu'elle se trompe manifestement sur son sens et sa portée, ou encore lorsque, en se fondant sur les éléments recueillis, elle en tire des constatations insoutenables (ATF 129 I 8 consid. 2.1 p. 9).
3.
L'assassinat (art. 112 CP) est une forme qualifiée d'homicide intentionnel, qui se distingue du meurtre ordinaire (art. 111 CP) par le fait que l'auteur a tué avec une absence particulière de scrupules. Cette dernière suppose une faute spécialement lourde et déduite exclusivement de la commission de l'acte; pour la caractériser, l'art. 112 CP évoque le cas où les mobiles, le but ou la façon d'agir de l'auteur sont particulièrement odieux, mais cet énoncé n'est pas exhaustif. Pour déterminer si l'on se trouve en présence d'un assassinat, il faut procéder à une appréciation d'ensemble des circonstances externes et internes de l'acte (mode d'exécution, mobile, but, etc.). Les antécédents et le comportement de l'auteur après l'acte sont également à prendre en considération, s'ils ont une relation directe avec cet acte et sont révélateurs de la personnalité de l'auteur. Il y a assassinat lorsqu'il résulte de l'ensemble de ces circonstances que l'auteur a fait preuve du mépris le plus complet pour la vie d'autrui. Alors que le meurtrier agit pour des motifs plus ou moins compréhensibles, généralement dans une grave situation conflictuelle, l'assassin est une personne qui agit de sang froid, sans scrupules, qui démontre un égoïsme primaire et odieux et qui, dans le but de poursuivre ses propres intérêts, ne tient aucun compte de la vie d'autrui. Chez l'assassin, l'égoïsme l'emporte en général sur toute autre considération; il est souvent prêt, pour satisfaire des besoins égoïstes, à sacrifier un être humain dont il n'a pas eu à souffrir. La destruction de la vie d'autrui est toujours d'une gravité extrême; pour retenir la qualification d'assassinat, il faut cependant que la faute de l'auteur, son caractère odieux, se distingue nettement de celle d'un meurtrier au sens de l'art. 111 CP (ATF 127 IV 10 consid. 1a p. 13 s.). Cette définition jurisprudentielle rejoint la description de l'assassin donnée par le psychiatre Hans Binder, que l'art. 112 CP s'efforce de cerner, à savoir une personne qui agit de sang froid, sans scrupules, démontre un égoïsme primaire et odieux avec une absence quasi totale de tendances sociales et qui, dans le but de poursuivre ses propres intérêts, ne tient absolument pas compte de la vie d'autrui (ATF 120 IV 265 consid. 3a p. 274; 118 IV 122 consid. 2b p. 126; FF 1985 II 1034; cf. HANS BINDER, Der juristische und der psychiatrische Massstab bei der Beurteilung der Tötungsdelikte, RPS 1952 p. 313 ss et 324 ss).
ll n'y a pas d'absence particulière de scrupules, sous réserve de la façon d'agir, lorsque le motif de l'acte est compréhensible et n'est pas d'un égoïsme absolu, notamment lorsqu'il résulte d'une grave situation conflictuelle (ATF 120 IV 265 consid. 3a p. 274; 118 IV 122 consid. 3d p. 129). Une réaction de souffrance fondée sérieusement sur des motifs objectifs imputables à la victime exclut en général la qualification d'assassinat (ATF 118 IV 122 consid. 3d p. 129). Il faut en revanche retenir l'assassinat lorsqu'il ressort des circonstances de l'acte que son auteur fait preuve du mépris le plus complet pour la vie d'autrui (ATF 120 IV 265 consid. 3a p. 274; 118 IV 122 consid. 2b p. 126; cf. également ATF 117 IV 369 consid. 19b p. 394).
3.1 Comme l'a souligné à juste titre la cour cantonale (arrêt entrepris, consid. 3d/aa, p. 8), les explications fournies par l'intimé à son geste sont inconsistantes et ne permettent donc pas de rendre plus ou moins compréhensible son geste d'un point de vue moral objectif. De tels mobiles, ne peuvent guère être qualifiés que de futiles - ce qui constitue un indice en faveur de l'assassinat (v. BERNARD CORBOZ, Les infractions en droit suisse, vol. I, 2002, art. 112 n. 7 et 8; STEFAN DISCH, l'Homicide intentionnel, 1999, p. 317 et les références citées en note 1170) - ou tout au plus révéler une certaine volonté de se venger ou de se débarrasser de la victime qui pouvait apparaître gênante à l'intimé dans sa représentation de sa situation. Ces éléments ne sont pas dénués d'un certain égoïsme ou tout au moins de l'intention de s'éviter les désagréments causés par les critiques de la victime. De telles circonstances ne constituent pas moins des indices en faveur de l'assassinat (cf. ATF 101 IV 279 consid. 4, p. 283). Il est par ailleurs constant qu'aucun reproche ne peut être élevé à l'égard de la victime qui avait non seulement accueilli l'intimé dans son foyer, mais n'a formulé que des reproches justifiés sur sa conduite.
3.2 On ne saurait suivre la cour cantonale lorsqu'elle tente, en se référant aux indications de l'expert psychiatre, de relativiser le caractère odieux du comportement de l'intimé. L'autorité précédente a souligné sur ce point qu'il avait souffert de réactions dépressives avec sentiment d'abandon. Il était affecté de troubles relationnels incontestables. Il semblait en être venu à « l'idée que mieux vaut recevoir des coups que d'être ignoré, laissé pour compte ». La réaction violente aux abandons ou autres mises à l'écart était ainsi enracinée dans son parcours, comme le démontraient d'ailleurs les autres actes de violence gratuite dont il s'était rendu coupable et qu'il ne contestait pas. Il fallait enfin retenir l'existence d'un syndrome de dépendance constaté chez l'accusé (arrêt entrepris, eodem loco).
Cette argumentation peut certes, d'un point de vue médical, apporter un début d'explication sur les mécanismes psychiques qui ont conduit l'intimé à agir. Elle ne constitue cependant qu'une justification essentiellement subjective qui est sans pertinence au stade de la qualification, qui suppose au contraire un jugement moral objectif sur les circonstances de l'acte (cf. CORBOZ, Les infractions en droit suisse, vol. I, art. 112, n. 4; arrêts non publiés du Tribunal fédéral, du 22 décembre 1997, consid. 1a, 6S.780/1997 et du 20 octobre 2004, consid. 2.2, 6S.357/2004; sur les limites de la distinction, v. : CHRISTIAN SCHWARZENEGGER, Basler Kommentar, Strafrecht II, 2008, art. 112 n. 4). Pour les mêmes raisons, on ne saurait non plus, comme le voudrait le recourant, soutenir que les épisodes de violence gratuite dont l'intimé s'est fait l'auteur, « combinés au diagnostic de personnalité asociale (CIM10 F60.2) mis en évidence par l'expert » permettraient de retenir chez l'accusé une absence de scrupules à exercer des violences gratuites contre autrui, le tableau de la personnalité asociale coïncidant avec la définition de l'assassin donnée par Binder. Cette démarche, qui part de la personnalité de l'accusé pour qualifier son acte, est, elle aussi, étrangère à l'art. 112 CP (cf. DISCH, op. cit., p. 362). Il s'agit au contraire, de qualifier l'acte lui-même en partant d'abord des seules circonstances intrinsèques à sa commission.
3.3 En ce qui concerne la manière d'agir, la cour cantonale a jugé que couper la victime à la gorge était à l'évidence un acte odieux et lâche de la part d'un agresseur d'environ 1.80 m qui s'en était pris à une jeune femme sans défense et de frêle constitution (1.55 m pour 39 kg). Elle a cependant retenu que le déroulement des faits n'avait pu être établi dans tous ses détails. Elle a jugé que l'on ne pouvait retenir que l'accusé avait « bien insisté dans ses coups », ce qui ne ressortait pas du dossier de la cause. La façon d'accomplir les gestes mortels n'avait pu être établie. On ignorait en particulier si l'auteur avait agi par derrière ou de face. En tous les cas, le drame avait dû se dérouler rapidement. Il était incontestable qu'un tel comportement manifestait une cruauté évidente. Il ne montrait en revanche pas que l'accusé aurait pris plaisir à faire souffrir ou à tuer sa victime ou qu'il se serait acharné ou aurait fait preuve d'une autre forme de cruauté (arrêt entrepris consid. 3d/bb in fine, p. 9).
3.3.1 Selon la jurisprudence, l'auteur agit de façon particulièrement odieuse lorsqu'il exploite avec perfidie la confiance de la victime ou lorsque son mode d'exécution est atroce ou barbare. Il en va notamment ainsi lorsque la victime doit endurer des souffrances morales ou physiques particulières (de par leur intensité ou leur durée) et que l'auteur du crime a voulu ou tout au moins accepté d'infliger ces souffrances (ATF 118 IV 122 consid. 2b p. 126; DISCH, op. cit., p. 319; v. également les exemples tirés de la jurisprudence cités par SCHWARZENEGGER, op. cit. art. 112, n. 18).
3.3.2 Le recourant reproche tout d'abord à la cour cantonale de ne pas avoir retenu, contrairement au tribunal de première instance, que l'intimé avait « bien insisté dans ses coups ». Il soutient que la cour cantonale aurait sur ce point établi les faits de manière arbitraire.
Il ressort cependant de l'état de fait de la décision entreprise, qui reproduit sur ce point le jugement de première instance (arrêt entrepris, consid. 3d/bb, p. 8 s.), que selon la doctoresse K.________, au moins quatre coups avaient été donnés, dans le sens de quatre mouvements car le couteau pouvait ne pas se soulever complètement mais avait passé quatre fois. Ce point de fait n'a pas été remis en cause par la cour cantonale. Dans cette mesure savoir si, en passant quatre fois la lame, le recourant avait « bien insisté dans ses coups » constitue une simple appréciation des faits qui n'a pas de portée propre, la constatation selon laquelle la lame a passé quatre fois étant suffisante. Cette constatation ne permet pas nécessairement de conclure, comme le soutient le recourant, à l'existence d'un acharnement particulier de l'intimé sur sa victime. A tout le moins, cette appréciation n'apparaît-elle pas totalement insoutenable, soit arbitraire.
Cela étant, la cour cantonale a retenu de manière à lier la cour de céans (art. 105 al. 1 LTF) qu'il n'était pas établi que l'accusé aurait pris plaisir à faire souffrir ou à tuer sa victime ou qu'il se serait acharné ou aurait fait preuve d'une autre forme de cruauté (arrêt entrepris, consid. 3d/bb in fine, p. 9). On peut également relever dans ce contexte que, selon les constatations de fait de la décision entreprise (arrêt cantonal, consid. 3d/bb, p. 9), la durée de survie aux blessures infligées était de quelques minutes. Cela ne permet pas non plus de conclure à une intention particulière de faire et voir souffrir la victime. Dans ces conditions, on ne saurait reprocher à la cour cantonale d'avoir estimé, dans une appréciation très nuancée, que la manière d'agir de l'intimé, qu'elle qualifie à juste titre, d'un point de vue objectif, d'odieuse en relevant notamment qu'elle n'était pas dénuée de cruauté, ne permettait pourtant pas encore, d'un point de vue subjectif, de conclure à l'absence particulière de scrupules, soit au caractère particulièrement odieux exigé pour l'application de l'art. 112 CP, faute de toute intention établie de l'intimé d'infliger à sa victime des souffrances particulières.
3.3.3 Le recourant reproche ensuite à la cour cantonale d'avoir tu certains éléments de fait retenus par les premiers juges. Il relève en particulier le passage suivant du jugement de première instance:
« [...] A.________ se trouvait chez elle, dans son propre appartement où elle avait accueilli X.________ quelques mois plus tôt. A.________ était seule et sans défense face à un homme beaucoup plus grand et beaucoup plus fort qu'elle (A.________ mesurait 1m55 pour 39kg et X.________ 1m80), de surcroît avec un couteau tranchant. A.________ n'avait absolument aucune chance de survivre à ces quatre coups de couteau donnés en pleine gorge. X.________ a agi avec une grande lâcheté. Il s'en est pris à une personne bien plus faible que lui et dans un endroit où celle-ci ne pouvait ni s'échapper ni obtenir du secours; et il ne lui a pas laissé la moindre chance de survivre. A.________ n'a pu faire qu'un petit geste de défense. X.________ avait décidé qu'elle devait mourir. »
Le recourant soutient que la cour cantonale aurait ignoré dans son raisonnement le lieu où l'acte a été commis, la différence de stature entre l'intimé et sa victime ainsi que le fait que l'un était armé et l'autre sans défense.
On doit cependant constater que la cour cantonale n'a pas méconnu que l'intimé avait coupé la victime à la gorge (ce qui suppose qu'il disposait d'un instrument tranchant). L'arrêt entrepris se réfère par ailleurs expressément au jugement de première instance en mentionnant les conclusions de la doctoresse K.________ relatives à l'arme (un couteau). La cour cantonale a également mentionné la différence de stature, la constitution frêle de la victime et le fait qu'elle était sans défense et a expressément conclu de ces divers éléments que l'acte était odieux (arrêt entrepris, consid. 3d/bb, p. 8 s.). Il est par ailleurs constant que les faits se sont déroulés dans l'appartement de la victime, ce que constate dûment l'arrêt entrepris. Le grief est infondé en tant qu'il a trait à la constatation des faits.
3.4 La cour cantonale a, ensuite, jugé que l'on ne pouvait déduire des faits de l'espèce que l'accusé avait agi avec une grande détermination et une grande froideur. Elle a relevé que cette appréciation des premiers juges tenait insuffisamment compte du rôle de l'alcool dans le comportement de l'intimé. L'ivresse de ce dernier ne devait pas être considérée comme un facteur déterminant de l'acte homicide mais une analyse correcte du degré de détermination et de froideur de l'auteur lorsqu'il avait agi ne pouvait occulter cet élément d'appréciation. La grande froideur de l'assassin était difficilement compatible avec l'importance de l'alcoolisation de l'accusé. L'acte s'était par ailleurs produit après une nuit blanche et donc dans un état de fatigue qui expliquerait difficilement que l'auteur ait agi de sang froid (arrêt entrepris, consid. 3d/cc, p. 9 ss).
3.4.1 Comme la jurisprudence a déjà eu l'occasion de le préciser, le fait d'exécuter froidement un plan constitue un indice en faveur de l'assassinat. Le sang-froid ne suffit cependant pas à lui seul pour conclure à l'assassinat. Il s'agit plutôt de déterminer, sur la base de l'ensemble des circonstances, si l'on peut tirer la conclusion que l'auteur fait particulièrement peu de cas de la vie d'autrui (ATF 118 IV 122 consid. 3a, p. 127).
En l'espèce, la cour cantonale a retenu de manière à lier la cour de céans l'existence d'une situation de tension bien réelle, même si elle avait été provoquée par l'intimé, rentré tard et ivre. La cour cantonale a souligné dans ce contexte que la victime avait été énervée après que l'intimé eut renversé une bière au salon. Elle l'avait invectivé (« arrête de boire, soûlon, tu vas te tuer »). L'intimé avait été énervé par ces paroles. Ils s'étaient bousculés, après quoi l'intimé avait menacé la victime, laquelle l'avait blessé par ses paroles et énervé (arrêt entrepris consid. 3d/cc, p. 10 s.). Une telle implication émotionnelle de l'auteur ne parle pas en faveur de l'assassinat (DISCH, op. cit., p. 322).
3.4.2 La cour cantonale a, par ailleurs, souligné dans ce contexte l'influence de l'alcool et du syndrome de dépendance à l'alcool de l'intimé en relevant que l'état de l'intimé n'était pas compatible avec la « grande froideur de l'assassin ». De tels facteurs, qui conditionnent en principe essentiellement la responsabilité pénale de l'auteur, ne sont, en règle générale, pas pertinents au stade de la qualification de l'homicide comme meurtre ou comme assassinat (v. supra consid. 3.2). En l'espèce toutefois, l'existence d'une imprégnation alcoolique importante a constitué l'une des causes de la dispute et le syndrome de dépendance à l'alcool peut, jusqu'à un certain point, expliquer la tension née des reproches de la victime sur la conduite de l'intimé. On ne saurait, dans ces conditions, reprocher à la cour cantonale d'avoir tenu compte de ces facteurs - qui, contrairement à ce que soutient le recourant, n'ont, en revanche, pas fondé la légère diminution de responsabilité retenue (arrêt entrepris, consid. 9d/dd, p. 17) - en ce sens que ces éléments, qui participaient de la situation conflictuelle, ne dépeignaient pas l'intimé comme l'auteur d'un homicide agissant de sang-froid, soit avec une absence particulière de scrupules.
Enfin, comme l'a jugé de manière convaincante la cour cantonale, l'appréciation du comportement de l'intimé après l'acte (recherche des clés, nettoyage de l'appartement, port des habits encore maculés de sang) peut être apprécié de diverses manières et trouver diverses explications (arrêt entrepris, consid. 3d/cc in fine, p. 11). Ce comportement ne conduit donc pas nécessairement à la conclusion que l'intimé, qui était en outre au bord des larmes lorsqu'il a confirmé son geste à sa mère, a fait preuve de sang-froid ou du mépris le plus total pour la vie d'autrui.
3.5 Dans une appréciation globale de l'ensemble de ces éléments, la futilité des mobiles avancés par l'intimé pour expliquer son geste doit être mise en relation avec la situation conflictuelle brossée par la cour cantonale en ce sens que si les motifs avancés par l'intimé ne rendent pas son acte moralement compréhensible, l'acte s'inscrit néanmoins dans une situation conflictuelle marquée par d'importantes tensions liées notamment au syndrome de dépendance à l'alcool ainsi qu'à l'alcoolisation de l'auteur. Dans ce contexte, ces deux éléments ne peuvent, comme l'a retenu à juste titre la cour cantonale, être purement et simplement relégués à la seule question de l'appréciation de la faute dans la perspective de la fixation de la peine. Ils démontrent moins une grande détermination et une grande froideur de l'intimé que son incapacité à faire face à une situation de conflit aiguë, dans le cadre de laquelle son acte peut encore ne pas apparaître comme exclusivement motivé par un égoïsme absolu. Cela étant, il n'est pas nécessaire d'examiner si, comme le soutient le recourant, la cour cantonale a, à tort ou à raison, tiré au surplus argument de la fatigue de l'intimé pour nier l'absence particulière de scrupules. Enfin, la manière d'agir de l'intimé, certes odieuse et non dénuée de cruauté, ne permet pas non plus à elle seule de conclure à l'assassinat, la cour cantonale n'ayant pas constaté d'intention de l'intimé d'infliger des souffrances particulières à sa victime (v. supra consid. 3.3.2) et la portée du comportement de l'intimé après l'acte étant équivoque.
On ne saurait ainsi faire grief à la cour cantonale d'avoir considéré que l'acte reproché à l'intimé se situait encore à la limite supérieure de la qualification de meurtre (art. 111 CP) dont elle ne se distinguait pas de manière suffisamment nette pour que l'on doive nécessairement conclure à un assassinat. Cette appréciation ne viole pas le droit fédéral. Le grief est rejeté.
3.6 Le recourant succombe. Il n'y a pas lieu de prélever des frais (art. 66 al. 4 LTF). Il n'y a pas lieu non plus d'allouer des dépens à l'intimé qui n'a pas été invité à procéder (art. 68 al. 1 et 2 LTF).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
1.
Le recours est rejeté.
2.
Il n'est pas prélevé de frais ni alloué de dépens.
3.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour d'appel du Tribunal cantonal de l'Etat de Fribourg.
Lausanne, le 9 décembre 2008
Au nom de la Cour de droit pénal
du Tribunal fédéral suisse
Le Président: Le Greffier:
Schneider Vallat