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Original
 
Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
{T 0/2}
6B_627/2008 /rod
Arrêt du 9 décembre 2008
Cour de droit pénal
Composition
M. et Mme les Juges Schneider, Président,
Wiprächtiger et Brahier Franchetti, Juge suppléante.
Greffière: Mme Paquier-Boinay.
Parties
A.________,
recourante, représentée par Me Philippe Leuba, avocat,
contre
X.________,
intimé, représenté par Me David Ecoffey, avocat,
Ministère public de l'Etat de Fribourg, Rue de Zaehringen 1, 1700 Fribourg,
intimé.
Objet
Ordonnance de non-lieu (viol),
recours contre l'arrêt de la Chambre pénale du Tribunal cantonal fribourgeois, du 12 juin 2008.
Faits:
A.
Le 24 février 2005, A.________, qui séjournait alors à l'Hôpital psychiatrique de Marsens, a informé la police que dans le courant de l'année 2004 (recte: 2003), elle avait été victime d'un viol.
Une instruction a dès lors été ouverte à l'encontre de X.________, auteur présumé. Cette procédure a été close le 23 juin 2006 par une ordonnance de non-lieu.
B.
Par arrêt du 7 août 2006, la Chambre pénale du Tribunal cantonal fribourgeois a admis le recours formé par A.________ contre cette décision et a renvoyé la cause à l'instruction pour compléter celle-ci.
C.
Après complément d'enquête, la juge d'instruction a rendu une nouvelle ordonnance de non-lieu le 7 septembre 2007.
D.
Le 12 juin 2008, la Chambre pénale du Tribunal cantonal fribourgeois a rejeté le recours de A.________ et confirmé l'ordonnance de non-lieu, au motif que les imprécisions et contradictions de la recourante, notamment sur les éléments déterminants du prétendu viol, mettaient sérieusement en doute sa crédibilité et que le renvoi de X.________ devant le juge de répression aboutirait en tout état de cause à un acquittement.
E.
A.________ forme un recours en matière pénale contre cette dernière décision, concluant, avec suite de frais et dépens, à son annulation et à l'annulation de l'ordonnance de non-lieu du 7 septembre 2007, ainsi qu'au renvoi de X.________ devant le Tribunal de répression. En substance, la recourante invoque une violation du principe in dubio pro duriore, dans la mesure où une condamnation n'apparaît ni impossible ni même hautement invraisemblable, ce qui justifie selon elle le renvoi en jugement.
Elle sollicite également l'octroi de l'assistance judiciaire.
Considérant en droit:
1.
Le recours en matière pénale peut notamment être formé pour violation du droit fédéral (art. 95 let. a LTF), y compris les droits constitutionnels. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF), à moins que la recourante ne démontre que ces faits ont été établis de façon manifestement inexacte, à savoir arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. (FF 2001 p. 4135), ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 97 al. 1 LTF). Le Tribunal fédéral ne sanctionne une violation des droits fondamentaux que si ce moyen est invoqué et motivé par la recourante (art. 106 al. 2 LTF). Les exigences de motivation de l'acte de recours correspondent à celles de l'art. 90 al. 1 let. b OJ (FF 2001 p. 4142).
2.
La recourante invoque une violation du principe « in dubio pro duriore » et prétend qu'au vu des faits établis, le prévenu aurait dû être renvoyé devant l'autorité répressive, une condamnation demeurant possible et un doute suffisant subsistant.
La tâche de l'autorité de renvoi est d'éviter la saisine du juge du fond lorsqu'il apparaît d'emblée qu'une condamnation est exclue en raison du doute qui doit profiter à l'accusé. Toutefois, selon l'adage « in dubio pro duriore », si en revanche la culpabilité du prévenu apparaît vraisemblable, ou simplement possible, un renvoi en jugement s'impose (cf. arrêts du Tribunal fédéral 6B_588/2007 du 11 avril 2008, consid. 3.2.3; 6B_615/2007 du 8 janvier 2008 et les références citées).
Il ressort clairement de la motivation de son recours qu'en invoquant ce principe la recourante cherche à démontrer que le dossier ne permet pas de considérer comme impossible ni hautement invraisemblable la condamnation de l'intimé. Elle s'en prend ainsi en réalité à l'appréciation des preuves opérée par l'instance cantonale, que le Tribunal fédéral ne revoit que sous l'angle de l'arbitraire.
3.
La recourante expose longuement les motifs qui auraient dû amener l'autorité cantonale à renvoyer l'intimé devant le juge de fond. Elle invoque ainsi le fait que son état psychique lors de la première audition justifierait les contradictions avec ses déclarations ultérieures, son parcours familial et personnel qui expliquerait l'écoulement du temps entre la survenance des faits et leur signalement aux autorités, la tentative de suicide qu'elle a faite un mois après l'événement, la symptomatologie qu'elle présentait telle qu'elle ressort d'un rapport de 2006, toutes deux typiques d'un traumatisme tel qu'un viol, les témoignages de sa mère, d'un témoin présent sur les lieux et celui indirect d'une connaissance à laquelle elle s'est confiée, ainsi que le mensonge de l'intimé qui a déclaré ne pas la connaître, éléments qui parlent clairement selon elle en faveur de la véracité de sa version des faits.
3.1 S'agissant de l'appréciation des incertitudes de son discours relatives à l'endroit où le viol a été commis et à son déroulement, qu'elle n'a pas remis en cause devant la cour cantonale, la recourante n'y revient pas, si ce n'est en précisant, comme pour l'erreur commise sur la date du viol, que ses premières déclarations le 25 février 2005 contiennent des incertitudes ou des contradictions du fait qu'elle était à ce moment-là hospitalisée à l'hôpital psychiatrique de Marsens, sous l'effet de médicaments, qu'elle était gravement perturbée parce qu'elle avait dû placer à nouveau ses enfants, qu'à l'époque des faits comme à celle de leur dénonciation, elle était une consommatrice de drogues, de médicaments et d'alcool et que le viol s'inscrivait dans le chaos dans lequel elle vivait.
La cour cantonale a précisé que l'état psychique de la recourante s'était sans doute amélioré et que l'effet des tranquillisants qu'elle avait pris était dissipé lors de sa seconde audition du 17 mars 2005. Pourtant, ce jour-là, la recourante s'est à nouveau trompée sur la date du prétendu viol qu'elle a situé le 29 avril 2004 au lieu du 29 avril 2003, tout en prétendant être formelle quant à la date en raison de sa bonne mémoire. Ce n'est qu'après avoir pris connaissance des investigations de la police que la recourante a situé le viol en 2003. En vertu de la maxime d'office, la cour cantonale a de plus relevé et apprécié certaines imprécisions de la victime quant au déroulement du viol et en a conclu que ces incertitudes fragilisaient la crédibilité de celle-ci.
La recourante se borne à opposer sa thèse à l'appréciation de l'autorité cantonale et se limite pour l'essentiel à expliquer le contexte de sa première audition. S'agissant de la seconde, celle du 17 mars 2005, elle n'y fait pas clairement allusion et se contente de prétendre qu'elle était une "paumée" et qu'on ne pouvait pas attendre d'elle qu'elle fasse preuve d'exactitude. Ce faisant, elle n'expose pas en quoi l'appréciation de sa seconde audition et de ses déclarations relatives au déroulement du viol par la cour cantonale serait insoutenable et son grief, qui ne répond pas aux exigences de motivation rappelées ci-dessus, n'a pas à être examiné. Au demeurant, la simple allégation qu'elle aurait été paumée à l'époque ne suffit pas pour qualifier cette appréciation et l'analyse de l'autorité cantonale d'insoutenables.
3.2 S'agissant du temps pris pour dénoncer l'infraction, d'une part la recourante n'a pas discuté devant la cour cantonale les raisons qui l'ont incitée à ne dénoncer les faits qu'en février 2005, de telle sorte qu'il n'y a pas sur ce point de décision de dernière instance, en principe seule attaquable devant le TF. D'autre part, devant la cour de céans la recourante se contente de répéter les raisons pour lesquelles elle a tardivement porté plainte, sans chercher à démontrer en quoi l'appréciation qui en a été faite serait arbitraire. Son grief ne peut donc être examiné.
3.3 La recourante n'a pas non plus remis en question devant la cour cantonale l'appréciation des révélations faites à sa mère. Devant la cour de céans, elle revient sur ce point et mentionne comme un élément en faveur de la véracité de ses déclarations le fait qu'elle a confié le viol à sa mère le lendemain des faits en lui interdisant d'en parler. La motivation de son grief est une nouvelle fois insuffisante pour permettre son examen. Au demeurant, il ne paraît pas arbitraire de relativiser la portée d'un tel témoignage et la recourante ne démontre pas le contraire.
3.4 Pour renforcer sa thèse, la recourante argue encore d'une tentative de suicide commise le 1er juin 2003, soit un peu plus d'un mois après le viol. Si ce fait dénote une grande fragilité, comme cela a été retenu en première instance, il est établi que la recourante connaissait à l'époque d'importantes difficultés liées à la séparation d'avec ses enfants et aux rapports conflictuels avec son ex-mari, qui l'ont amenée à commencer un traitement psychothérapeutique et médicamenteux, de telle sorte qu'il n'est pas insoutenable d'admettre qu'il peut trouver d'autres explications que la réalité du viol.
Il en est de même de la symptomatologie typique que la recourante présentait selon le rapport médical du 19 août 2006, comme l'admet l'arrêt attaqué, dont le caractère arbitraire n'est d'ailleurs pas motivé suffisamment par la recourante.
3.5 La recourante invoque le témoignage de Y.________ en tant qu'élément parlant en faveur du viol. Elle reproche à la cour cantonale de ne pas avoir accordé de crédit aux ultimes déclarations de ce témoin lors de son audition du 30 mars 2007, qui aurait dit « ça peut être que A.________ est descendue pisser et que X.________ l'a suivie », allant à l'encontre de sa première version qui était de dire que les protagonistes étaient allés ensemble sur les lieux du viol.
Le fait qu'en fin d'audition, après que la recourante ait dit qu'elle était partie "pisser" et que l'intimé l'avait suivi, le témoin soit revenu sur ses déclarations précédentes, pourtant très précises et ait dit que cette thèse était possible, ne permet encore pas de qualifier d'insoutenable l'appréciation et le poids donné à ce témoignage par les juges cantonaux, eu égard à l'ensemble des déclarations de ce témoin. En effet, jusqu'à la fin de l'audition, le témoin a toujours dit clairement que les protagonistes étaient partis ensemble en direction du talus, a parlé d'une relation ambiguë entre l'intimé et la recourante, du fait qu'ils avaient déjà eu des rapports sexuels, d'une attirance entre les protagonistes, de l'ambiance le soir en question, du fait qu'il aurait pu entendre crier, du fait que par la suite les protagonistes avaient de nouveau sympathisé et que la recourante était une femme facile lorsqu'elle avait bu. Au vu de l'ensemble de ces déclarations, il n'était pas insoutenable d'admettre que ce témoignage ne confortait pas la thèse de la recourante.
3.6 La recourante invoque encore le témoignage indirect de Z.________ qui a déclaré que la victime lui avait paru sincère lorsqu'elle lui avait parlé du viol. Sur ce point également, la victime ne cherche pas à démontrer en quoi l'appréciation de ce témoignage par les juges cantonaux serait insoutenable. Une telle motivation ne permet ni d'examiner ce grief, ni a fortiori de conclure à l'arbitraire de l'arrêt attaqué.
3.7 Enfin, au vu de ce qui précède, admettre que le mensonge de l'intimé qui a nié connaître la victime, ce qui peut constituer un élément à sa charge, ne permet pas de retenir la culpabilité de l'intimé ni même d'installer un doute suffisant à justifier un renvoi, n'est en rien insoutenable et la recourante ne démontre une nouvelle fois pas le contraire. Au demeurant, la crédibilité de la recourante est largement remise en cause par les nombreuses incohérences dans ses propos. Ainsi, le déroulement des faits tel qu'il a été décrit par la recourante, outre qu'il a varié au cours de l'instruction, n'est pas compatible avec la configuration des lieux. La crédibilité des dires de la recourante ne se trouve pas renforcée par les déclarations des deux principaux témoins à charge. Les certificats médicaux produits par la victime n'apportent aucun élément déterminant. En outre, l'hypothèse selon laquelle la recourante aurait pu invoquer un prétendu viol pour expliquer ses difficultés à s'occuper de ses enfants ne peut être écartée. Par ailleurs, seul le refus de l'intimé d'admettre qu'il connaissait la recourante, respectivement son déni face à l'évidence, prêche en sa défaveur et il est clair qu'un tel élément ne suffirait pas pour établir la culpabilité de l'intimé. Dans ces circonstances, une condamnation de l'intimé pouvait sans arbitraire être tenue pour hautement invraisemblable au vu de l'important doute qui subsistait et, par conséquent, la décision attaquée ne viole pas le principe in dubio pro duriore.
4.
Le recours ne peut qu'être rejeté dans la mesure où il est recevable. Comme il apparaissait d'emblée dénué de chance de succès, la requête d'assistance judiciaire doit être rejetée et les frais judiciaires mis à la charge de la recourante, en tenant compte de sa situation financière. Il n'est pas alloué d'indemnité à l'intimé qui n'est pas intervenu dans la procédure devant le Tribunal fédéral.
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.
2.
La requête d'assistance judiciaire est rejetée.
3.
Les frais judiciaires, arrêtés à 800 fr., sont mis à la charge de la recourante.
4.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Chambre pénale du Tribunal cantonal fribourgeois.
Lausanne, le 9 décembre 2008
Au nom de la Cour de droit pénal
du Tribunal fédéral suisse
Le Président: La Greffière:
Schneider Paquier-Boinay