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Original
 
Tribunale federale
Tribunal federal
{T 0/2}
5A_398/2007
Arrêt du 28 avril 2008
IIe Cour de droit civil
Composition
MM. et Mme les Juges Raselli, Président,
Marazzi et Jacquemoud-Rossari.
Greffière: Mme Jordan.
Parties
dame X.________,
recourante,
contre
X.________,
intimé, représenté par Me Pascal Métral, avocat,
Objet
divorce (compétence),
recours contre l'arrêt de la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève du 8 juin 2007.
Faits:
A.
X.________, né en 1961, ressortissant des Etats-Unis d'Amérique, et dame X.________, née en 1970, de nationalité française, se sont mariés le 6 août 1993 en France. Deux enfants sont issus de cette union: A.________, née le 27 mai 1990, et B.________, né le 28 octobre 2001.
Les époux se sont séparés le 3 octobre 2002. Dame X.________ a quitté la maison individuelle acquise par le couple le 3 mai 2001 à C.________ (France) pour être accueillie, ainsi que les enfants, durant deux semaines, dans un foyer mis à disposition par le centre de consultation pour victimes d'infractions (LAVI).
B.
Le 10 octobre 2002, dame X.________ a saisi le Tribunal de première instance du canton de Genève d'une demande unilatérale en divorce.
Statuant sur mesures préprovisoires le 13 novembre 2002, la Présidente de ce tribunal, considérant que son incompétence - contrairement à ce que prétendait le mari - n'était pas manifeste, a attribué la garde des enfants à la mère, sous réserve d'un droit de visite d'un après-midi par semaine au foyer de Gilly en faveur du père; elle a par ailleurs donné acte à l'époux de son engagement de contribuer à l'entretien de sa famille par le versement de 2'100 fr., par mois et d'avance.
En séance de comparution personnelle du 27 janvier 2003, X.________ s'est opposé aux conclusions de sa femme et a soulevé une exception d'incompétence du tribunal à raison du lieu, arguant que les conjoints vivaient en France.
Dans la période du 28 avril 2003 au 29 septembre 2005, l'instance a été suspendue à trois reprises à la requête des parties. Elle l'a été derechef du 29 novembre 2005 au 9 novembre 2006.
Le 7 décembre 2006, le Tribunal de première instance, constatant son incompétence à raison du lieu, a déclaré irrecevable la demande.
Sur appel de dame X.________, la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève a, le 8 juin 2007, confirmé ce jugement, compensé les dépens et débouté les parties de toutes autres conclusions.
C.
Dame X.________, qui n'est pas représentée par un mandataire professionnel, forme un recours en matière civile au Tribunal fédéral. Elle conclut, principalement, à l'admission de son recours et à une décision sur le fond et, subsidiairement, au renvoi de la cause à l'autorité cantonale pour nouvelle décision.
Des observations n'ont pas été requises.
Considérant en droit:
1.
La décision attaquée ayant été rendue après l'entrée en vigueur, le 1er janvier 2007 (RO 2006 1242), de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le recours est régi par le nouveau droit (art. 132 al. 1 LTF).
2.
Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 133 I 206 consid. 2 p. 210; 133 II 249 consid. 1.1 p. 251).
2.1 Formé par la partie qui a succombé dans ses conclusions condamnatoires (art. 76 al. 1 LTF) et dirigé contre un arrêt rendu en matière civile (art. 72 al. 1 LTF) par une autorité cantonale de dernière instance (art. 75 LTF) dans une affaire non pécuniaire (arrêt 5A_108/2007 du 11 mai 2007 consid. 1.2), le recours en matière civile, déposé par ailleurs en temps utile (art. 100 al. 1 LTF), est en principe recevable.
2.2 L'arrêt de la Cour de justice confirme, sur recours, le jugement du Tribunal de première instance qui nie, sur la base de l'art 59 al. 1 de la loi fédérale du 18 décembre 1987 sur le droit international privé (LDIP; RS 291), la compétence des autorités genevoises pour connaître de l'action en divorce introduite par l'épouse. Dès lors qu'il met fin à la procédure, il doit être qualifié de décision finale au sens de l'art. 90 LTF (ATF 133 V 477 consid. 4.1.1 p. 480; cf. ATF 130 III 136 consid. 1.1 p. 139).
2.3 Le mémoire de recours doit contenir les conclusions et les motifs à l'appui de celles-ci (art. 42 al. 1 LTF). Les motifs doivent exposer succinctement en quoi l'acte attaqué viole le droit (art. 42 al. 2 LTF). Le recourant ne peut ainsi se borner à conclure à l'annulation de l'arrêt attaqué et au renvoi devant l'autorité précédente, mais doit prendre des conclusions au fond (ATF 133 III 489 consid. 3.1 p. 489/490).
En l'espèce, la recourante conclut d'une façon toute générale à l'admission de son recours et à une décision sur le fond et, subsidiairement, au renvoi de la cause à l'autorité cantonale pour nouvelle décision. Interprétées au regard de la motivation du recours et de la décision attaquée (cf. ATF 125 III 412 consid. 1b p. 414/415; 106 II 175/176; 101 II 372/373; 99 II 176 consid. 2 p. 181), de telles conclusions doivent être comprises en ce sens que la recourante demande que l'exception d'incompétence soulevée par son mari soit rejetée et que les autorités genevoises soient déclarées compétentes pour connaître de l'action en divorce. Elles sont ainsi recevables selon l'art. 42 al. 1 LTF.
3.
Selon la recourante, la Chambre civile aurait admis à tort l'exception d'incompétence à raison du lieu soulevée par son époux. Elle soutient en bref qu'elle est, et a toujours été, domiciliée à Genève, qu'elle remplit ainsi les conditions de domicile en Suisse de l'art. 59 LDIP et que, partant, les tribunaux genevois sont compétents pour connaître de sa demande en divorce.
3.1 Les parties étant de nationalités étrangères, la loi fédérale du 18 décembre 1987 sur le droit international privé (LDIP; RS 291) régit la compétence des autorités judiciaires (art. 1er al. 1 let. a LDIP), à défaut de traité international (art. 1er al. 2 LDIP).
3.2 D'après l'art. 59 LDIP, sont compétents pour connaître d'une action en divorce ou en séparation de corps les tribunaux suisses du domicile de l'époux défendeur (let. a), ou les tribunaux suisses du domicile de l'époux demandeur, si celui-ci réside en Suisse depuis une année ou est suisse (let. b). En l'espèce, il n'est pas contesté que l'intimé est domicilié en France. La recourante est de son côté de nationalité française. La compétence territoriale du juge qu'elle a saisi dépend ainsi exclusivement du point de savoir si elle résidait à Genève au moment où elle a introduit son action, soit le 10 octobre 2002 (cf. ATF 116 II 9 consid. 5 p. 13 s., 209 consid. 2b/bb p. 212).
Le domicile est déterminé selon les critères de l'art. 20 al. 1 let. a LDIP, dont la teneur correspond à celle de l'art. 23 al. 1 CC: une personne physique a son domicile au lieu ou dans l'Etat dans lequel elle réside avec l'intention de s'y établir, ce qui suppose qu'elle fasse du lieu en question le centre de ses intérêts personnels et professionnels (ATF 127 V 237 consid. 1 p. 238 ; 120 III 7 consid. 2a p. 8; 119 II 167 consid. 2b p. 169). Cette définition du domicile comporte deux éléments: l'un objectif, la présence physique en un lieu donné; l'autre subjectif, l'intention d'y demeurer durablement (ATF 127 V 237 consid. 1 p. 238; 119 II 167 consid. 2b p. 169; cf. également 5C.56/2002 consid. 4.2.1 non publié aux ATF 129 III 404). L'élément objectif n'implique pas nécessairement que le séjour ait déjà duré un certain temps; si la condition subjective est remplie par ailleurs, la constitution d'un domicile peut se produire dès l'arrivée dans un nouveau pays de séjour. Aussi, pour déterminer si une personne réside en un lieu donné avec l'intention de s'y établir - en d'autres termes, pour déterminer si elle s'y est créé un domicile - ce n'est pas la durée de son séjour à cet endroit qui est décisive, mais bien la perspective d'une telle durée (arrêt 5A.34/2004 du 22 avril 2005, consid. 3.2; Andreas Bucher, Droit international privé suisse, t. II: Personnes, famille, successions, Bâle 1992, n. 123 p. 62 s.). Cependant, l'intention d'une personne de s'établir durablement en un lieu déterminé ne doit pas être examinée de façon subjective, au regard de sa volonté interne, mais à la lumière des circonstances objectives, reconnaissables pour les tiers, permettant de conclure à l'existence d'une telle intention (ATF 127 V 237 consid. 1 p. 238; 120 III 7 consid. 2b p. 8; 119 II 64 consid. 2b/bb p. 65 et les références). Ce n'est pas la volonté interne de l'intéressé qui importe, mais exclusivement la manifestation extérieure de cette volonté; les circonstances de fait objectives qui la manifestent de manière reconnaissable pour les tiers ont une portée juridique autonome (ATF 97 II 1 consid. 3 p. 4; en matière internationale: Andreas Bucher, Droit international privé, op. cit., t. II, n. 118 p. 61). Pour qu'une personne soit domiciliée à un endroit donné, il faut donc que des circonstances de fait objectives manifestent de manière reconnaissable pour les tiers que cette personne a fait de cet endroit, ou qu'elle a l'intention d'en faire, le centre de ses intérêts personnels, sociaux et professionnels (ATF 119 II 64 précité et arrêt 5C.56/2002 du 18 février 2003, consid. 4.2.1 non publié aux ATF 129 III 404, mais paru à la RSDIE 2003 p. 394 ss, spéc. p. 395). Si les circonstances objectives concrètes susceptibles de manifester cette intention relèvent du fait, les conclusions qui peuvent en être tirées relèvent en revanche du droit (ATF 120 III 7 consid. 2a p. 8 et les références).
3.3 En l'espèce, la Cour de justice a considéré que les attaches de la recourante étaient en France par sa famille. Par ailleurs, d'un point de vue objectif, aucun élément de fait ne permettait de conclure à l'existence d'une volonté interne de s'établir durablement à Genève. En effet, les époux disposaient depuis le 31 août 2001, en qualité de propriétaires, d'une maison individuelle à C.________ (France) dans laquelle la recourante vivait lorsqu'elle s'était séparée de son époux pour être accueillie dans un foyer à Genève, l'appartement de deux pièces loué par les conjoints dans cette ville étant alors occupé par une amie. La demanderesse était en outre enregistrée à la Mission suisse auprès des Organisations internationales comme étant domiciliée en France, les parties ayant vécu dans ce pays depuis leur retour des Etats-Unis, successivement à D.________, à E.________ et à F.________. Les allocations familiales françaises avaient ainsi versé des prestations sociales en faveur des enfants aux mois de septembre et octobre 2002. Dans l'année qui avait précédé le dépôt de l'action, la demanderesse avait, selon ses propres indications, vécu dans le centre de la France durant les mois de juin à septembre 2001. Après la naissance du second enfant, le 28 octobre 2001, elle était restée deux mois au domicile français de son époux, six semaines chez ses parents en France, deux semaines chez sa soeur qui habitait non loin, puis à nouveau une semaine avec son mari et enfin, durant une certaine période non précisée, à Genève, chez une amie. Elle n'avait pas prétendu avoir regagné par la suite - après la séparation et le séjour de deux semaines dans le foyer d'accueil de Genève - l'appartement de la rue G.________; elle avait au contraire précisé elle-même que ce logement alors occupé par une amie, avait été sous-loué au cousin de son conjoint dès le mois de novembre 2002. Elle n'avait pas allégué davantage s'être installée dans un autre lieu à Genève.
De plus, quand bien même l'appartement de la rue G.________ aurait constitué un domicile, rien n'indiquait que la demanderesse y aurait résidé durant une année. Depuis le retour des Etats-Unis en 1995, elle avait en effet vécu principalement, voire exclusivement, en France, successivement à D.________, à E.________, puis à F.________. Après l'acquisition de la maison de C.________ en mai 2001, elle avait séjourné, du mois de juin au mois de septembre 2001 au centre de la France, puis, après la naissance du second enfant, en octobre 2001, durant deux mois chez son époux, six semaines chez ses parents, deux semaines chez sa soeur, une semaine à nouveau chez son époux, puis chez une amie à Genève. A la date de la séparation le 3 octobre 2002, qui avait précédé d'une semaine le dépôt de la demande, elle vivait par ailleurs à C.________.
3.4 La recourante ne conteste pas avoir séjourné à divers endroits autres que Genève dans l'année qui a précédé l'introduction de l'action en divorce. Elle prétend toutefois y avoir été contrainte pour échapper à son mari. Elle affirme par ailleurs que le dernier domicile du couple était sis à Genève, qu'elle y a gardé son propre domicile et y a séjourné lorsque les « choses se sont mal passées » avec son époux, mais qu'elle n'a pu y rester ayant dû fuir ce dernier. En définitive, elle soutient avoir voulu, depuis le début, vivre à Genève, mais y avoir été empêchée à certains moments du fait des menaces de son mari.
3.5 S'il appert que l'action en divorce a été introduite dans un climat conflictuel, il ne résulte pas de la décision attaquée que ce serait pour échapper à la violence de son époux que la recourante a changé à moults reprises de résidences. Il s'agit là d'un fait qui ne ressort pas de l'arrêt entrepris. Or, le Tribunal fédéral doit conduire son raisonnement juridique sur la base des faits constatés dans la décision attaquée (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut s'en écarter que si ceux-là ont été établis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF). Le recourant qui entend s'écarter des constatations de l'autorité précédente doit expliquer de manière circonstanciée en quoi les conditions d'une exception prévue par l'art. 105 al. 2 LTF seraient réalisées, ce que ne fait pas la recourante en l'espèce (ATF 133 III 462 consid. 2.4 p. 466/467; 133 II 249 consid. 1.4.3 p. 254/255; 133 IV 150 consid. 1.3 p. 152).
Pour le surplus, la recourante se contente de prétendre qu'elle a toujours voulu résider à Genève, méconnaissant que la volonté de la personne n'est pas décisive en soi et ne produit d'effet sur le domicile que si elle est confirmée par des faits extérieurs à l'homme et reconnaissables par des tiers (ATF 127 V 237 consid. 1 p. 238; 120 III 7 consid. 2b p. 8; 119 II 64 consid. 2b/bb p. 65 et les références). Or, il résulte des constatations de l'arrêt entrepris - non remises en cause par la recourante - qu'au moment de la séparation, cette dernière vivait avec son mari à C.________ (France) dans la maison acquise ensemble. Il n'est par ailleurs pas établi qu'elle ait regagné, après la rupture et le séjour de deux semaines dans le foyer d'accueil de Genève, l'appartement de la rue G.________ où elle prétend être domiciliée. Du propre aveu de l'intéressée, celui-là était du reste, lors de la séparation en octobre 2002, occupé par une amie, puis avait été sous-loué au cousin de son époux dès le mois de novembre suivant. Il n'apparaît en outre pas que la recourante se soit installée dans un autre lieu à Genève. Quant à l'année qui a précédé l'introduction de l'action, l'intéressée a résidé la pluspart du temps en France, pays dans lequel habitent ses parents et sa soeur et où se trouve la maison acquise avec l'intimé. Elle a en effet séjourné au centre de la France de juin à septembre 2001, puis, après la naissance du second enfant, en octobre 2001, dans la maison de C.________ avec son mari durant deux mois, à nouveau au centre de la France chez ses parents et sa soeur, respectivement durant six et deux semaines, et, enfin, une nouvelle fois à C.________ avec son époux pendant une semaine. Elle n'a en définitive vécu à Genève que pendant les deux semaines passées dans le foyer d'accueil après son départ de la maison de C.________ et, auparavant, durant une certaine période - non précisée - chez une amie. Il apert en outre qu'elle a perçu des prestations des allocations familiales françaises en septembre et octobre 2002. Dans de telles circonstances, la Chambre civile pouvait sans nullement violer le droit fédéral, conclure qu'au moment de l'introduction de l'action en divorce, Genève ne constituait pas le centre de l'existence de la recourante ainsi que de sa vie domestique et familiale au point d'y retenir un domicile et, partant, confirmer le jugement de première instance admettant l'exception d'incompétence ratione loci soulevée par le mari et déclarant la demande de la femme irrecevable.
4.
Vu ce qui précède, le recours doit être rejeté dans la mesure de sa recevabilité. La recourante, qui succombe, supportera les frais de la procédure (art. 66 al. 1 LTF). Il n'y a pas lieu d'allouer de dépens à l'intimé qui n'a pas été invité à se déterminer.
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.
2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 1'500 fr., sont mis à la charge de la recourante.
3.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève.
Lausanne, le 28 avril 2008
Au nom de la IIe Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse
Le Président: La Greffière:
Raselli Jordan