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Original
 
Tribunale federale
Tribunal federal
{T 0/2}
4A_106/2007 /ech
Arrêt du 31 juillet 2007
Ire Cour de droit civil
Composition
MM. et Mme les juges Corboz, président, Kolly et Kiss.
Greffier: M. Thélin.
Parties
Y.________,
A.X.________ et
B.X.________,
demandeurs et recourants, représentés par Me Jacques Borowsky,
contre
Z.________ SA,
défenderesse et intimée, représentée par Me Philippe Zoelly.
Objet
responsabilité civile
recours en matière civile contre l'arrêt rendu le 16 mars 2007 par la Chambre civile de la Cour
de justice du canton de Genève.
Faits :
A.
En 1999, depuis plus de dix ans, H.X.________ travaillait au service de la société Z.________ SA et se consacrait à la révision et à l'entretien des ascenseurs. Il vivait en ménage commun avec sa compagne Y.________ et leurs deux enfants A.X.________ et B.X.________.
Le 14 juin 1999, il était chargé de procéder à la révision de deux ascenseurs installés dans un bâtiment du chemin de Grange-Canal à Genève. Il a entrepris cette mission à dix heures. Il travaillait seul, conformément à la pratique habituelle dans l'entreprise. Ayant immobilisé la cabine de l'un des appareils à l'étage supérieur, il s'est placé dans la fosse que constitue le bas de la cage d'ascenseur. Pour l'exécution de travaux de graissage, il a utilisé un dissolvant fourni par l'employeuse. En fin de matinée, il fut trouvé mort sur le sol de la fosse, intoxiqué par les émanations de ce produit.
Précédemment, deux collègues du défunt s'étaient plaints d'étourdissements consécutifs à l'emploi du dissolvant et il était prévu, dans l'entreprise, d'étudier l'utilisation des produits dangereux.
B.
Le 1er juillet 2002, Y.________ et les enfants A.X.________ et B.X.________ ont ouvert action contre Z.________ SA devant le Tribunal de première instance du canton de Genève. Ils tenaient la défenderesse pour responsable de la perte de leur compagnon et père. Y.________ réclamait 708'500 fr. pour réparation d'une perte de soutien et chacun des trois demandeurs réclamait 20'000 fr. à titre de réparation morale. Les deux enfants avaient reçu d'autres prestations de l'assurance-accidents.
La défenderesse a conclu au rejet de l'action.
Le tribunal s'est prononcé le 28 septembre 2006. Il a condamné la défenderesse à payer 436'540 fr. à Y.________, à titre de dommages-intérêts pour perte de soutien, et 20'000 fr. à chacun des trois demandeurs à titre de réparations morales; tous ces montants étaient dus avec intérêts au taux de 5% par an dès le 15 juin 1999.
La défenderesse ayant appelé à la Cour de justice, celle-ci a statué le 16 mars 2007. Elle a annulé le jugement et débouté les demandeurs de toutes leurs conclusions. La Cour a renoncé à élucider si la prescription était acquise à la défenderesse après que les demandeurs avaient laissé écouler plus d'une année sans agir. Elle a constaté qu'un acte illicite était imputable à la défenderesse car celle-ci n'avait pas fait appliquer, dans l'accomplissement de ses activités de révision et d'entretien des ascenseurs, une directive de l'assurance-accidents concernant les travaux à effectuer avec des produits nocifs dans des réservoirs, fosses ou locaux exigus. Cependant, compte tenu que l'emploi du dissolvant n'avait auparavant entraîné aucun incident dans la pratique habituelle de l'entreprise, l'intoxication mortelle subie par H.X.________ était un événement difficilement prévisible; la défenderesse n'était donc coupable que d'une négligence légère. Au regard de la législation spéciale applicable, cette circonstance excluait, contre cette partie, toute prétention civile consécutive à cet événement.
C.
Agissant par la voie du recours en matière civile et du recours constitutionnel subsidiaire, les demandeurs saisissent le Tribunal fédéral de conclusions correspondant à ce qu'ils ont obtenu devant le Tribunal de première instance.
La défenderesse conclut au rejet du recours.
Le Tribunal fédéral considère en droit:
1.
Le recours est formé par une partie qui a pris part à l'instance précédente et succombé dans ses conclusions (art. 76 al. 1 LTF). Il est dirigé contre un jugement final (art. 90 LTF), rendu en matière civile (art. 72 al. 1 LTF) et en dernière instance cantonale (art. 75 al. 1 LTF). La valeur litigieuse excède le minimum légal de 30'000 fr. (art. 51 al. 1 let. a et 74 al. 1 let. b LTF). Déposé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) et dans les formes requises (art. 42 al. 1 à 3 LTF), le recours en matière civile est recevable, de sorte que le recours constitutionnel subsidiaire (art. 113 LTF) est exclu.
Le recours peut être exercé pour violation du droit fédéral (art. 95 let. a LTF). Le Tribunal fédéral applique ce droit d'office (art. 106 al. 1 LTF); il n'est pas lié par l'argumentation des parties et il apprécie librement la portée juridique des faits; il s'en tient cependant, d'ordinaire, aux questions juridiques que la partie recourante soulève conformément aux exigences légales relatives à la motivation du recours (art. 42 al. 2 LTF) et il conduit son raisonnement juridique sur la base des faits constatés dans la décision attaquée (art. 105 al. 1 LTF).
2.
Aux termes des art. 41 al. 1, 45 al. 3 et 47 CO, celui qui, d'une manière illicite, cause à autrui un dommage, soit intentionnellement, soit par négligence ou imprudence, est tenu de le réparer (art. 41 al. 1). En cas de mort d'homme, la réparation est due aux personnes désormais privées de leur soutien (art. 45 al. 3); le juge peut en outre allouer, à titre de réparation morale, une indemnité équitable aux membres de la famille (art. 47).
3.
Il est d'abord nécessaire d'examiner si le décès de H.X.________ est la conséquence d'un acte ou d'une omission illicite et imputable à la défenderesse.
L'art. 82 al. 1 de la loi fédérale sur l'assurance-accidents (LAA; RS 832.20) prévoit que l'employeur est tenu de prendre, pour prévenir les accidents et les maladies professionnels, toutes les mesures dont l'expérience a démontré la nécessité, que l'état de la technique permet d'appliquer et qui sont adaptées aux conditions données. Dans des termes semblables, la même obligation est prévue à l'art. 6 al. 1 de la loi fédérale sur le travail dans l'industrie, l'artisanat et le commerce (LTr; RS 822.11).
La Cour de justice fait grief à la défenderesse d'avoir méconnu les « règles relatives aux travaux exécutés à l'intérieur de réservoirs et dans des locaux exigus », édictées par la Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents et destinées à protéger les travailleurs contre les risques inhérents aux produits nocifs ou inflammables. Elles prévoient qu'une ventilation mécanique doit être poursuivie aussi longtemps qu'une personne se trouve dans un réservoir ou endroit analogue et que des gaz ou vapeurs y règnent ou peuvent s'y former. Elles prévoient aussi que deux personnes au moins doivent être désignées pour les travaux à effectuer dans les réservoirs ou endroits analogues, l'une d'elles étant chargée de la surveillance.
Dans sa réponse au recours, la défenderesse conteste que le travail confié à H.X.________ fût visé par ces prescriptions. Interprétant leur texte, elle soutient que dans des fosses ou autres locaux situés au-dessous du sol, seul l'emploi de produits nocifs ou inflammables en grande quantité, pour l'application de peinture ou de revêtements de protection, est visé, tandis que l'emploi d'un dissolvant en petite quantité, pour le dégraissage de certaines pièces mécaniques, n'y est pas assujetti. Elle fait valoir que cette activité n'avait jamais provoqué aucun incident dans ses travaux d'entretien et de révision des ascenseurs et que les services de surveillance compétents n'ont jamais exigé l'application des mesures de sécurité précitées.
Cette argumentation revient à contester que lesdites mesures fissent partie de celles dont l'expérience avait démontré la nécessité, aux termes des art. 82 al. 1 LAA ou 6 al. 1 LTr. Or, il n'est pas nécessaire de statuer sur ce point car de toute manière, on verra que l'omission éventuellement advenue ne constitue pas une faute suffisamment grave pour engager la responsabilité de la défenderesse.
4.
En juin 1999, l'art. 44 al. 2 aLAA, abrogé depuis le 11 janvier 2003, prévoyait que des prétentions civiles ne pouvaient être élevées contre l'employeur, par suite d'un accident professionnel subi par un travailleur, que si ledit employeur avait provoqué l'accident intentionnellement ou par une négligence grave (RO 1982 p. 1689). Hors ces hypothèses, l'employeur n'assumait aucune obligation de réparer le dommage non couvert par l'assurance-accidents (ATF 125 IV 153 consid. 2b/bb p. 158; voir aussi ATF 127 III 580 consid. 1; 123 III 280 consid. 2). Conformément à l'art. 1er al. 1 tit. fin. CC, cette disposition s'applique aux conséquences de l'accident subi par H.X.________. Celui qui viole un devoir de prudence élémentaire, dont le respect s'impose à toute personne raisonnable placée dans la même situation, commet une négligence grave (ATF 128 III 76 consid. 1b p. 81; 119 II 443 consid. 2a p. 448).
La Cour de justice n'a pas constaté qu'il fût habituel, dans d'autres entreprises pratiquant l'entretien et la révision des ascenseurs, de mettre en place une ventilation mécanique et d'organiser la surveillance d'une deuxième personne pendant les travaux nécessitant l'emploi d'un dissolvant. Il apparaît plutôt que d'ordinaire, ces travaux s'accomplissaient sans ces précautions et sans dommage - nonobstant les indispositions rapportées par deux collègues du défunt - pour la personne qui en était chargée. L'intoxication mortelle de H.X.________ n'a pu survenir que par suite d'un événement extraordinaire ou de circonstances exceptionnelles qui n'ont pas été élucidés. Cet accident était donc, effectivement, peu prévisible, et la nécessité des précautions qui l'eussent évité n'était pas apparente. Dans ces conditions, la Cour de justice retient à bon droit que l'omission reprochée à la défenderesse, supposée illicite, ne constituait pas une négligence grave. Cette partie échappe donc, en vertu de l'art. 44 al. 2 aLAA, à toute responsabilité. Il n'est pas nécessaire d'examiner si, de plus, l'action est atteinte par la prescription.
5.
Le recours en matière civile se révèle privé de fondement, ce qui conduit à son rejet. A titre de parties qui succombent, les demandeurs doivent acquitter l'émolument à percevoir par le Tribunal fédéral et les dépens auxquels l'autre partie peut prétendre.
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
1.
Le recours en matière civile est rejeté.
2.
Le recours constitutionnel est irrecevable.
3.
Les demandeurs acquitteront un émolument judiciaire de 7'000 fr.
4.
Les demandeurs acquitteront, solidairement entre eux, une indemnité de 8'000 fr. due à la défenderesse à titre de dépens.
5.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties et à la Cour de justice du canton de Genève.
Lausanne, le 31 juillet 2007
Au nom de la Ire Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse
Le président: Le greffier: