BGer 4C.169/2006
 
BGer 4C.169/2006 vom 16.05.2007
Tribunale federale
{T 1/2}
4C.169/2006 /ech
Arrêt du 16 mai 2007
Ire Cour de droit civil
Composition
Mmes et MM. les Juges Klett, Juge présidant, Wurzburger, Rottenberg Liatowitsch, Kolly et Kiss
Greffière: Mme Godat Zimmermann.
Parties
Bernard Favre,
défendeur et recourant, représenté par Me Pierre Martin-Achard,
contre
BNP Paribas (Suisse) SA,
demanderesse et intimée, représentée par Me Charles Poncet.
Objet
concurrence déloyale; dénigrement par voie de presse,
recours en réforme contre l'arrêt de la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève du 17 mars 2006.
Faits :
G47282003
C/4r28/2003
A.
UEB (Switzerland) (United European Bank, ci-après: UEB; anciennement United Overseas Bank, ci-après: UOB) exploitait une banque à Genève. Eric Stauffer est un homme d'affaires domicilié dans le canton de Genève. En septembre 1996, il avait conclu, en qualité d'«apporteur d'affaires», une convention de rétrocession avec UOB, par laquelle celle-ci lui accordait un droit à des commissions dépendant de la valeur des comptes ouverts par son intermédiaire.
En juin 2002, la Tribune de Genève a publié un premier article intitulé «Eric Stauffer attaque l'UEB pour tentative d'escroquerie» et accompagné du sous-titre «Le Genevois parle de corruption impliquant l'ex-Gouvernement mauricien». Puis, dans son édition du week-end des 25/26 janvier 2003, elle a publié un article libellé ainsi:
«Un document secret pourrait relancer l'affaire Stauffer
Un responsable d'une banque genevoise envisageait des opérations douteuses en 1997
La Tribune de Genève a pu se procurer un document interne de la succursale genevoise de l'UEB (United European Bank) qui pourrait relancer ce que l'on appelle désormais "l'affaire Stauffer". Une sombre affaire mêlant la diffamation, la corruption et le financement occulte d'un parti politique en île Maurice. L'UEB ne conteste pas l'authenticité de ce document, qui démontre qu'elle a envisagé, en 1997, une participation à un tel montage financier. Elle assure toutefois y avoir immédiatement renoncé en raison du caractère illicite de cette affaire. Elle note qu'elle applique "des critères stricts en matière de lutte contre le blanchiment d'argent et la corruption". Résumé de l'affaire.
Accusations fantaisistes
Homme d'affaires genevois, au bénéfice d'un contrat d'apporteur de clients avec l'UEB, Eric Stauffer est un personnage très en vue en île Maurice dans les années 1990. Jusqu'à devenir, en septembre 1999, le conseiller personnel de Xavier-Luc Duval, numéro trois du Gouvernement mauricien. Mais de manière surprenante, ses affaires commencent à péricliter à partir de décembre de la même année. Sans explication apparente.
Le climat se dégrade à tel point que, le 6 avril 2000, il s'enfuit de l'île, échappant de justesse à une arrestation sommaire. Le premier ministre de l'époque, M. Rangoolam, lance une campagne de presse contre lui, qui s'achève le 1err mai 2000 par de graves accusations publiques étayées par un prétendu rapport Interpol.
Eric Stauffer parviendra aisément à démontrer que ces accusations sont infondées. Il dépose plainte contre M. Rangoolam pour diffamation. En septembre 2000, M. Rangoolam perd les élections et Eric Stauffer est réhabilité en île Maurice.
Aujourd'hui Eric Stauffer pense savoir ce qui a motivé son soudain retour de fortune. "On a voulu m'abattre parce que je suis le seul à savoir comment le parti de M. Rangoolam a financé sa campagne électorale", pense-t-il. L'ambassadrice de l'île Maurice à Paris, Son Excellence Roussety, était à l'origine de ce projet de financement occulte et elle en aurait tiré des pots-de-vin. Quand elle revoit Eric Stauffer en décembre 1999, elle prend peur. "C'est elle qui a monté le ministre contre moi, parce que j'aurais pu dénoncer ses agissements", suppose notre interlocuteur.
Document authentifié
Eric Stauffer a toujours affirmé que ce financement s'était effectué avec l'aide de l'UEB. Le document que la Tribune a pu se procurer démontre que son hypothèse n'est pas totalement infondée. Il s'agit d'un rapport de voyage en île Maurice, signé par un fondé de pouvoir de l'établissement, aujourd'hui directeur général d'une autre succursale de la banque. Ce rapport relate sa rencontre, entre le 12 et le 17 février 1997, avec le ministre des Finances mauricien de l'époque (Vasant Bunwaree) et la société d'intermédiaires Erton, propriété du Genevois Eric Stauffer. Le voyage a eu lieu par l'entremise de l'ambassadrice Roussety.
Ce document (lire encadré) apporte une brique de plus à l'édifice que le Genevois Eric Stauffer tente de bâtir en justice contre l'UEB. Pour mémoire, Eric Stauffer avait déposé plainte, en juin 2002, pour délit manqué d'escroquerie contre l'UEB. La plainte de M. Stauffer a été classée pour manque d'indice d'infraction. Il accusait l'UEB d'avoir accepté le contrat proposé par les Mauriciens, sans lui avoir versé les commissions.
C'est ensuite le Ministère public de la Confédération qui reçoit une deuxième plainte de M. Stauffer pour corruption et blanchiment. Là aussi, pour défaut d'indices, le Ministère a renoncé à ouvrir une enquête. Un recours est pendant au Tribunal fédéral contre cette décision.
Ministre cité à comparaître
Reste à savoir si le document découvert par la Tribune constituera un indice suffisant pour ouvrir une enquête et lever ainsi le secret bancaire. Interrogé par téléphone, Eric Stauffer estime en tout cas que "le document recoupe ce que j'ai toujours affirmé".
Le premier ministre Rangoolam est cité à comparaître le 11 juin prochain pour diffamation. Sa déposition permettrait sans doute d'y voir plus clair, mais il est peu probable qu'il fasse le déplacement.»
L'article était accompagné d'une note explicative, intitulée «Petit précis de corruption active», qui se présentait de la façon suivante:
«Le document confidentiel découvert par la Tribune de Genève décrit dans les détails la procédure envisagée pour le financement occulte de la campagne électorale du Parti travailliste (PTr) mauricien. Rappelons que l'UEB ne conteste pas son authenticité, mais assure qu'il n'a donné lieu à aucune transaction. "Il faut le lire à la lumière de la législation en vigueur à l'époque, en 1997", commente Marc Weber, au service juridique de la banque. Précisément: la loi antiblanchiment est entrée en vigueur en 1995.
Comment financer une campagne électorale. Vasant Bunwaree occupe le poste de ministre des Finances entre août 1996 et septembre 2000. Le contrat qu'il propose à l'UEB - qui s'appelait à l'époque UOB, pour United Overseas Bank - est simple. Il s'agit de déposer 25 millions de dollars US, propriété de la Banque centrale, dans une banque en Suisse.
La législation mauricienne, pour lutter contre la fuite des capitaux, ne permet pas aux fonds placés hors du pays d'être rémunérés. Théoriquement, ces 25 millions de dollars ne sont donc pas censés rapporter de l'argent. Mais grâce au savoir-faire bancaire franco-allemand (l'UOB appartenant à BNP Paribas et à Dresdner Bank), M. Bunwaree espère bien une rentabilité. Citation du rapport: "Une rémunération de ces capitaux devrait être versée sur un compte à ouvrir à une société de domicile, dont l'ayant droit serait le parti politique actuellement au pouvoir. Notre interlocuteur recherche une rémunération la plus élevée possible". On l'a compris: le rendement de ces 25 millions de dollars irait tout droit dans les poches du PTr.
Comment rémunérer le banquier et l'entremetteur. Rien de plus simple, poursuit le rapport: "Il existe à Maurice trois caisses de prévoyance qui ne disposent pas statutairement du droit de déposer leurs capitaux hors du pays. Le ministre, qui considère que la modification statutaire n'est qu'une formalité, pense pouvoir faire déposer à l'étranger l'équivalent de 50 à 60 millions de dollars. La gestion pourrait nous être confiée, avec mandat pour partie à Erton, permettant ainsi une rétrocession."
Tout est clair: pour remercier l'UOB de gérer "gratuitement" 25 millions de dollars de fonds publics au bénéfice du PTr, ce même parti s'arrange pour lui confier, en plus, la gestion de 50 à 60 millions de dollars. Erton peut encaisser les commissions.»
Le vendredi 31 janvier 2003, la Tribune de Genève publiait un nouvel article dont la partie principale a la teneur suivante:
«Les OPF réclament 15 millions à l'UEB
L'affaire Eric Stauffer rebondit une nouvelle fois. Émoi à l'île Maurice.
La cellule d'assainissement de l'Office des faillites de Carouge réclame 15 millions de francs à la United European Bank (UEB). C'est ce qui ressort d'un courrier recommandé adressé le 28 janvier à la banque du quai des Bergues. Ces 15 millions représentent les commissions que le Genevois Eric Stauffer réclame depuis plusieurs mois à l'UEB suite à un contrat avec l'ancien Gouvernement mauricien.
Eric Stauffer en est certain: l'UEB a bel et bien hébergé plusieurs dizaines de millions de dollars en provenance de l'île Maurice. Mais elle refuse de lui verser les commissions qu'elle lui doit à titre d'apporteur de ce client.
Affaire relancée
La banque a jusqu'ici toujours nié avoir conclu un tel contrat avec le Gouvernement mauricien. Le Ministère public de la Confédération lui a donné raison en renonçant à ouvrir une enquête, faute d'indices suffisants. Même avis du côté du Tribunal fédéral. Mais un document interne de l'UEB, que la Tribune de Genève a publié samedi dernier, pourrait relancer l'affaire. Ce document prouve que des contacts ont bel et bien eu lieu en 1997 entre la banque et le ministre des Finances mauricien de l'époque. On y apprend comment le ministre proposait à l'UOB (ancienne raison sociale de l'UEB) de financer la campagne électorale de son parti en l'an 2000.
A cette époque, c'est la société Erton Assets Management SA, dont Eric Stauffer est l'actionnaire principal et le liquidateur, qui présente le ministre mauricien à l'UOB. Le document interne à la banque est très clair à ce sujet: "Le rendez-vous était organisé à l'initiative de l'apporteur Erton (...) afin de finaliser une éventuelle entrée en relation, pouvant déboucher par un dépôt de 25 millions de dollars."
La conclusion de ce contrat supposait le versement de pots-de-vin. C'est la raison pour laquelle Eric Stauffer et sa société Erton y renoncent. Pourtant Eric Stauffer est persuadé que l'UOB a malgré tout accepté l'offre, mais "dans mon dos, pour éviter d'avoir à me verser des commissions. Et surtout parce que, en versant ces commissions, la banque reconnaîtrait qu'elle a accepté tous les aspects illicites de cette affaire".
Un précédent guinéen
Eric Stauffer a présenté la même version des faits à l'Office des faillites, en sa qualité de liquidateur de la société Erton. Adjointe à la direction de l'Office, Claire Gambazzi explique: "Notre courrier à l'UEB ne constitue pas un jugement. Nous n'avons aucune preuve que la transaction ait eu lieu. Nous réclamons simplement aux débiteurs les sommes portées à l'inventaire par le liquidateur. Aux créanciers ensuite de porter l'affaire plus loin, s'ils ont des indices suffisants et les moyens de financer la procédure." Dans son courrier, l'Office des poursuites prie aussi l'UEB de fournir tous ses décomptes concernant une autre affaire qui oppose l'UEB à Eric Stauffer, ou plutôt à sa société Erton. Il s'agit encore d'un contrat gouvernemental, conclu cette fois-ci avec la Guinée Equatoriale. Le ministre des Finances de ce pays, Marcelin Oyono N'Tutum, avait déposé plus de 30 millions de dollars auprès de l'UOB. Ce client avait aussi été présenté par Erton. Mais la banque a dissimulé que le ministre avait ouvert un second compte, à titre personnel cette fois, qui abritait 193'500 euros fin juin 2002. L'UOB pouvait ainsi éviter de verser les commissions dues à M. Stauffer pour ce deuxième compte. Pour se justifier, elle avait d'abord nié qu'une convention de rétrocession la liait avec M. Stauffer. Puis elle a affirmé que ladite convention avait été résiliée, mais elle n'a jamais pu en produire la preuve.
Fait troublant: le fondé de pouvoir qui a conclu l'affaire guinéenne est le même que celui qui a rencontré le ministre mauricien en 1997. Contactée hier par téléphone, l'UEB n'a pas donné suite à cette information."
Un quatrième article sur le sujet a paru dans la Tribune de Genève du mardi 18 février 2003, sous le titre «Fonds publics mauriciens détournés: nouvel épisode» suivi du sous-titre «Une enquête déterminera si 24,5 millions (sic) ont été confiés à une banque genevoise».
Tous les articles précités ont été rédigés par Bernard Favre, collaborateur fixe de la rédaction de la Tribune de Genève, qui avait eu des contacts avec Eric Stauffer. Dominique von Burg, rédacteur en chef de la Tribune de Genève, a discuté avec Bernard Favre du contenu de ces articles avant leur parution, les a avalisés et a choisi les titres ainsi que les sous-titres.
B.
Le 26 février 2003, UEB a ouvert action contre Bernard Favre et Eric Stauffer devant la Cour de justice du canton de Genève. Elle estimait avoir été dénigrée dans les articles des 25/26 janvier 2003, 31 janvier 2003 et 18 février 2003. Se fondant sur l'art. 3 let. a de la loi fédérale contre la concurrence déloyale (LCD; RS 241), elle dénonçait le caractère mensonger ou trompeur des informations contenues dans la campagne de presse qui la visait, organisée conjointement par les défendeurs et destinée à procurer un enrichissement illégitime à Eric Stauffer. UEB concluait à la constatation du dénigrement, à la publication du jugement et à la condamnation des défendeurs, conjointement et solidairement, à lui payer 200'000 fr. Concernant cette dernière conclusion, elle n'a allégué aucun fait, au motif qu'elle établirait son dommage au cours des probatoires; elle affirmait toutefois qu'en l'état, et sauf à parfaire, elle était fondée à réclamer d'ores et déjà aux défendeurs 200'000 fr. au titre de l'atteinte à son image que la campagne de dénigrement avait provoquée.
Le 23 janvier 2004, UEB a ouvert une seconde action en raison des mêmes faits, contre Dominique von Burg. Des indications complémentaires ont été communiquées sur le dommage invoqué, lequel comprenait, en sus de l'atteinte à l'image et de la perte de clientèle, des dépenses liées à un rapport de révision exigé par la Commission fédérale des banques (6'778 fr.80), des honoraires d'avocat (96'419 fr.35) ainsi que des frais de justice (15'484 fr.30).
Statuant le 4 juin 2004, la cour cantonale a refusé de joindre les deux causes. Il a toutefois été convenu que les mesures probatoires ordonnées dans la première procédure seraient également valables pour la seconde.
Par arrêt du 17 mars 2006 (cause C/4728/2003), la Chambre civile de la Cour de justice s'est prononcée sur l'action introduite contre Bernard Favre et Eric Stauffer; le dispositif sur le fond a la teneur suivante:
«1. Constate que Bernard Favre a dénigré UEB (Switzerland) par des allégations fallacieuses contenues dans l'article publié dans la Tribune de Genève du 25-26 janvier 2003.
Constate que Bernard Favre et Eric Stauffer, agissant de concert, ont dénigré UEB (Switzerland) par des allégations fausses et fallacieuses contenues dans l'article publié le 31 janvier 2003 dans la Tribune de Genève.
2. Condamne Bernard Favre à payer, solidairement avec Dominique von Burg, et pour moitié avec Eric Stauffer, à UEB (Switzerland), la somme de 50'000 fr., plus intérêts au taux de 5% l'an dès le 1er février 2003.
Condamne Eric Stauffer à payer, solidairement avec Bernard Favre et Dominique von Burg, à UEB (Switzerland) la somme de 25'000 fr. plus intérêts au taux de 5% l'an dès le 1er février 2003.
3. Condamne Eric Stauffer, sous la menace des peines d'arrêts ou d'amende prévues à l'art. 292 CP, à publier sans commentaire et pendant six mois l'intégralité du présent arrêt sur son site Internet, en première section de la Home page du site, la publication devant intervenir dans les dix jours à compter de l'entrée en force dudit arrêt.»
Par arrêt du même jour (cause C/1091/2004), la Cour de justice a statué comme suit sur l'action dirigée contre Dominique von Burg:
«1. Constate que Dominique von Burg a participé au dénigrement de UEB (Switzerland) par des allégations fausses et fallacieuses contenues dans les articles publiés les 25-26 et 31 janvier 2003 dans la Tribune de Genève.
2. Condamne Dominique von Burg à payer, solidairement avec Bernard Favre et pour moitié avec Eric Stauffer, à UEB (Switzerland) la somme de 50'000 fr. plus intérêts au taux de 5% l'an dès le 1er février 2003.»
C.
Bernard Favre interjette un recours en réforme. Il conclut à la réforme de l'arrêt attaqué en ce sens que l'action de UEB est rejetée.
La procédure a été suspendue jusqu'à droit connu sur la demande de révision cantonale déposée en parallèle par Bernard Favre (art. 57 al. 1 OJ). L'autorité cantonale a rejeté ladite demande par arrêt du 13 octobre 2006.
Dans sa réponse au recours, le conseil de UEB expose que BNP Paribas (Suisse) SA (ci-après: BNP) a repris les actifs et passifs de UEB selon contrat de fusion du 14 septembre 2006 et que la raison sociale UEB a été radiée du registre du commerce en date du 2 octobre 2006. Pour le surplus, BNP conclut au rejet du recours dans la mesure où celui-ci est recevable.
En outre, Bernard Favre a déposé un recours de droit public contre l'arrêt du 17 mars 2006 (cause 4P.117/2006).
Pour sa part, Eric Stauffer a également interjeté un recours de droit public (cause 4P.115/2006) et un recours en réforme (cause 4C.171/2006) contre l'arrêt prononcé dans la cause C/4728/2003. Dominique von Burg en a fait de même (causes 4P.123/2006 et 4C.167/2006) contre l'arrêt du 17 mars 2006 rendu dans la cause C/1091/2004.
Le Tribunal fédéral considère en droit:
1.
L'arrêt querellé a été rendu avant l'entrée en vigueur, le 1er janvier 2007, de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral (LTF; RS 173.110). Par conséquent, la procédure reste soumise à l'ancienne loi fédérale d'organisation judiciaire (OJ; art. 132 al. 1 LTF).
2.
Selon la publication faite dans la Feuille officielle suisse du commerce (FOSC) n° 194 du 6 octobre 2006, BNP a repris les actifs et les passifs de UEB à la suite d'une fusion et la raison sociale UEB (Switzerland) a été radiée. Il s'ensuit que, dans la procédure fédérale, BNP a succédé de plein droit à la société radiée (art. 40 OJ et 17 al. 3 PCF; art. 22 LFus [RS 221.301]; ATF 106 II 346 consid. 1; plus récemment, arrêt 4P.288/2004 du 5 août 2005, consid. 1).
3.
Comme il est indiqué dans l'arrêt sur le recours de droit public interjeté parallèlement par le défendeur, les moyens soulevés dans les deux procédures commandent de renoncer à surseoir à l'arrêt sur le recours en réforme jusqu'à droit connu sur le recours de droit public et de traiter les deux recours simultanément, en dérogation à la règle générale de l'art. 57 al. 5 OJ.
4.
Interjeté dans un litige reposant sur la LCD par une partie qui a été déboutée et dirigé contre un arrêt final rendu en instance cantonale unique par le tribunal supérieur du canton de Genève (art. 48 al. 1 OJ; art. 1er de la loi genevoise du 3 mai 2001 sur la concurrence déloyale, les liquidations et opérations analogues et sur les jeux-concours publicitaires) sur une contestation civile dont la valeur litigieuse dépasse très largement le seuil de 8'000 fr. (l'art. 45 OJ n'étant pas applicable aux actions fondées sur la LCD, cf. Poudret, COJ II, n. 2.2 ad art 45 OJ), le recours est en principe recevable, puisqu'il a été déposé en temps utile (art. 54 al. 1 OJ) et dans les formes requises (art. 55 OJ).
5.
Invoquant l'art. 8 CC, le défendeur reproche à la cour cantonale d'avoir renversé le fardeau de la preuve en imposant au journaliste de démontrer la véracité de ses dires, concernant en particulier l'existence d'un compte privé d'un ministre guinéen auprès de UEB et l'absence de réaction du représentant de UEB contacté pour donner son avis sur le fait que le même collaborateur aurait traité les affaires mauricienne et guinéenne.
5.1 A teneur de l'art. 8 CC, chaque partie doit, si la loi ne prescrit pas le contraire, prouver les faits qu'elle allègue pour en déduire son droit.
Cette disposition s'applique en matière de concurrence déloyale (ATF 114 II 91 consid. 3), en particulier aux procédures pour actes de concurrence déloyale commis par un organe de presse. Selon la jurisprudence, il appartient à la personne qui se dit lésée par l'acte de concurrence déloyale de prouver les faits sur lesquels elle fonde ses prétentions. La seule exception prévue par la loi en matière de presse se rapporte à un cas particulier: le juge peut, s'il l'estime approprié dans un cas d'espèce, exiger de l'annonceur qu'il apporte des preuves de l'exactitude matérielle de données de fait contenues dans la publicité (art. 13a LCD). Selon le texte et la systématique de la loi, il s'agit d'une exception à la règle, et non d'un principe général applicable dans tous les cas de concurrence déloyale par voie de presse (cf. Mario Pedrazzini/Federico Pedrazzini, Unlauterer Wettbewerb UWG, 2e éd., n. 20.05 ss; Georg Rauber, Lauterkeitsrecht, in Schweizerisches Immaterialgüter- und Wettbewerbsrecht (SIWR), vol. V/1, 2e éd., p. 278; cf. Alois Troller, Immaterialgüterrecht, vol. II, 3e éd., p. 1057).
Carl Baudenbacher conteste ce point de vue en s'appuyant sur l'art. 173 al. 2 CP relatif à la preuve de la vérité ou de la bonne foi en matière de délits contre l'honneur. En droit pénal, la preuve de la vérité, ou du moins de la bonne foi, doit être fournie par l'auteur des propos attentatoires à l'honneur. Baudenbacher est d'avis que rien ne justifie d'appliquer une règle différente sur le plan civil. Sans méconnaître qu'il va à l'encontre du texte des art. 3 et 13a LCD, il soutient que le fardeau de la preuve de la véracité incombe à l'auteur des faits relatés dans l'article de presse (Lauterkeitsrecht, Kommentar zum UWG, n. 87 ss ad art. 3 let. a LCD).
La décision du législateur de faire supporter la preuve de la vérité ou de la bonne foi à l'auteur d'un délit contre l'honneur tient à des motifs liés à la spécificité tant des infractions intentionnelles que des procédures pénales en matière d'atteintes à l'honneur (cf. Günter Stratenwerth, Schweizerisches Strafrecht, BT I, 6e éd., § 11, n. 28 ss). Ces motifs ne peuvent pas sans autre être transposés dans une procédure civile, qui porte sur des actes qui ne sont pas nécessairement constitutifs d'une atteinte à l'honneur et qui peuvent avoir été commis par négligence, voire sans faute (cf. ATF 94 II 329 consid. 3a; Pedrazzini/Pedrazzini, op. cit., n. 4.79).
Cela étant, la question n'a pas besoin d'être tranchée en l'espèce, dès lors que l'autorité cantonale s'est expressément abstenue de se prononcer sur la controverse, contrairement à ce que le défendeur soutient. En effet, les juges genevois se sont bornés à relever que lorsqu'un article de presse reproduisait les déclarations d'un tiers, il appartenait au journaliste d'établir que la personne citée avait effectivement tenu le propos qu'on lui prêtait dans l'article.
Au demeurant, lorsque l'appréciation des preuves convainc le juge qu'un fait est établi à satisfaction de droit ou réfuté, la question de la répartition du fardeau de la preuve ne se pose plus et le grief tiré de la violation de l'art. 8 CC devient sans objet. Il s'agit alors d'une question d'appréciation des preuves qui relève du recours de droit public (cf. ATF 127 III 519 consid. 2a).
5.2 En l'espèce, l'autorité cantonale, sur la base de plusieurs éléments, a constaté que l'allégation relative au compte privé d'un ministre guinéen était fausse. La question du fardeau de la preuve ne se pose donc pas. La critique du défendeur porte d'ailleurs pour l'essentiel sur l'appréciation des preuves administrées; dans cette mesure, elle n'est pas recevable.
Certes, l'autorité cantonale a relevé que le défendeur avait refusé de donner l'origine de son information en se prévalant de la protection de sa source. Mais elle n'a pas retenu que l'information était inexacte au motif que le journaliste n'en avait pas démontré la justesse; elle n'a pas renversé le fardeau de la preuve en le faisant supporter au défendeur en tant qu'auteur de l'article de presse. Quoi qu'en dise le défendeur, la liberté de la presse et le droit à la protection des sources ne sont pas mis en cause; ni l'une ni l'autre n'impliquent que les informations fournies par une source non divulguée doivent nécessairement être considérées comme véridiques.
5.3 En outre, les juges précédents ont retenu que l'article était faux dans la mesure où il y est écrit que, contactée par téléphone, UEB n'avait pas donné suite à l'information selon laquelle le même collaborateur avait traité l'affaire mauricienne et rencontré le ministre guinéen. L'autorité cantonale a retenu que l'absence de réaction de la banque était une information inexacte, car le journaliste n'avait pas établi que le représentant de UEB avait eu le comportement qui lui était prêté dans l'article.
Le fait qu'une partie dispose d'un moyen de preuve auquel l'autre partie n'a pas accès, ne conduit pas à un renversement du fardeau de la preuve. Dans un tel cas, l'omission de la première partie à apporter cette preuve peut, le cas échéant, être interprétée en défaveur de cette partie; il s'agit alors d'une question d'appréciation des preuves, non de fardeau de la preuve (cf. Max Kummer, Berner Kommentar, n. 184 et 186 ad art. 8 CC). En l'espèce, le point litigieux porte sur le contenu d'une discussion entre le défendeur et un représentant de UEB; il ne s'agit donc pas d'une situation où seule une partie peut fournir la preuve. Conformément à l'art. 8 CC, il appartenait à la banque de démontrer que l'article était faux sur le point en question. A défaut de preuve de l'une ou l'autre version, l'autorité cantonale aurait dû trancher en faveur du défendeur. Il ne saurait dès lors être retenu que l'information sur l'attitude de la banque contactée par le journaliste était fausse.
6.
Le recourant se plaint d'une mauvaise application de l'art. 3 let. a LCD. Il soutient que la cour cantonale a admis à tort que les deux articles litigieux dénigraient UEB.
6.1 Aux termes de l'art. 3 let. a LCD, agit de façon déloyale celui qui dénigre autrui, ses marchandises, ses oeuvres, ses prestations, ses prix ou ses affaires par des allégations inexactes, fallacieuses ou inutilement blessantes.
6.1.1 L'application de la LCD ne suppose pas qu'il existe un rapport de concurrence entre l'auteur et le lésé. L'auteur peut être n'importe qui; il suffit que son comportement exerce une influence sur les relations entre concurrents ou entre fournisseurs et clients, c'est-à-dire qu'il ait un impact sur le marché et la concurrence économique. Le comportement de l'auteur doit être dirigé contre le jeu normal de la concurrence et être objectivement propre à influencer le marché (ATF 131 III 384 consid. 3; 126 III 198 consid. 2c/aa; 120 II 76 consid. 3a).
Partant, des journalistes ou des entreprises de presse peuvent être actionnés s'ils ne s'en tiennent pas aux règles de la concurrence loyale et donnent sur des tiers des informations inexactes ou fallacieuses (ATF 124 IV 162 consid. 3; 123 III 354 consid. 2a; Kamen Troller, Précis du droit suisse des biens immatériels, 2e éd., p. 348 ss; Lucas David/Reto Jacobs, Schweizerisches Wettbewerbsrecht, 4e éd., ch. 732, p. 192; Roland von Büren/Eugen Marbach, Immaterialgüter- und Wettbewerbsrecht, 2e éd., n. 882; Rauber, op. cit., p. 269; Pedrazzini/Pedrazzini, op. cit., n. 17.08 ss). La qualité pour défendre appartient à toutes les personnes qui ont contribué directement à la propagation des propos déloyaux; en font partie, outre le journaliste auteur de l'article, l'éditeur, le rédacteur responsable et le diffuseur du produit de presse (Baudenbacher, op. cit., n. 29 ad art. 11 LCD).
6.1.2 Dénigrer signifie s'efforcer de noircir, de faire mépriser (quelqu'un ou quelque chose) en disant du mal, en attaquant, en niant les qualités. Un propos est dénigrant lorsqu'il rend méprisable le concurrent, ses marchandises, etc. Tout propos négatif ne suffit pas: il doit revêtir un certain caractère de gravité. Dénigre par exemple un produit mis sur le marché celui qui le dépeint comme sans valeur, d'un prix surfait, inutilisable, entaché de défauts ou nuisible (ATF 122 IV 33 consid. 2c). Une allégation n'est pas déjà illicite au sens de l'art. 3 let. a LCD du seul fait qu'elle dénigre les marchandises d'un concurrent; il faut encore qu'elle soit inexacte - c'est-à-dire contraire à la réalité - ou bien fallacieuse - soit exacte en elle-même, mais susceptible, par la manière dont elle est présentée ou en raison de l'ensemble des circonstances, d'éveiller chez le destinataire une impression fausse - ou encore inutilement blessante - à savoir qu'elle donne du concurrent, respectivement de ses prestations au sens large, une image négative, outrancière, que la lutte économique ne saurait justifier (ATF 124 III 72 consid. 2b/aa p. 76; arrêt 4C.224/2005 du 12 décembre 2005, consid. 3.2, reproduit in SJ 2006 I p. 274; 4C.205/2000 du 13 septembre 2000, consid. 2a, reproduit in sic! 9/2000 p. 808/809; arrêt 4C.109/2000 du 26 juillet 2000, consid. 2b, reproduit in sic! 8/2000 p. 713).
La presse ne jouit d'aucune position particulière en droit de la concurrence. Si sa responsabilité obéit aux principes généraux, la notion de caractère déloyal (Unlauterkeit), c'est-à-dire d'illicéité, doit cependant être interprétée conformément à la Constitution, en particulier à la lumière de l'art. 16 Cst. (libertés d'opinion et d'information) et 17 Cst. (liberté des médias) (Baudenbacher, op. cit., n. 24 ad art. 11 LCD; Andreas Auer/Giorgio Malinverni/Michel Hottelier, Droit constitutionnel suisse, vol. II, ch. 544/545, p. 282 ss). L'application de la LCD ne doit pas faire obstacle au but assigné par le Constituant à la fonction même des médias dans le monde économique, qui consiste à susciter un débat, informer le public sur les faits d'intérêt général, sur les événements économiques, de façon à favoriser l'échange des opinions et la discussion publique (cf. Jean-François Aubert/Pascal Mahon, Petit commentaire de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999, n. 6 ad art. 17 Cst.; Auer/Malinverni/Hottelier, op. cit., ch. 545, p. 283). A cet égard, la doctrine a souligné la difficulté qu'il y a de concilier la liberté des médias consacrée par le droit constitutionnel et la nécessité de garantir une concurrence loyale; elle a exprimé ses craintes qu'une application trop rigide de la LCD puisse entraver l'activité des médias, singulièrement le journalisme économique (cf. von Büren/Marbach, op. cit., n. 921 ss; Andreas Meili, Wirtschaftsjournalismus im Konflikt zwischen freier Meinungsäusserung und Lauterkeitsrecht, Medialex 1998, p. 75 ss; Martin Taufer, Einbezug von Dritten im UWG, thèse Zurich 1997, p. 85 à 93). Le Tribunal fédéral en a conclu que si l'on veut interpréter la LCD d'une manière conforme à la Constitution et tenir compte notamment du droit fondamental à la liberté d'opinion, il convient de n'admettre qu'avec retenue l'existence d'un dénigrement déloyal commis par voie de presse (ATF 123 IV 211 consid. 3; arrêt précité du 12 décembre 2005, consid. 3.2; arrêt 6S.648/1994 du 13 décembre 1994, consid. 2c/aa, reproduit in SMI 1995 II p. 438; plus nuancé: arrêt 6S.858/1999 du 16 août 2001, consid. 7 b/cc, reproduit in sic! 8/2001 p. 754).
Pour déterminer si une ou plusieurs expressions contenues dans un article de presse sont dénigrantes au sens de l'art. 3 let. a LCD, il y a lieu de se fonder sur l'impression que se forge le lecteur moyen non prévenu; il s'agit là d'une question ressortissant à l'application du droit (ATF 126 III 209 consid. 3a; 119 II 97 consid. 4a). Chaque déclaration incriminée doit être passée séparément au crible de l'art. 3 let. a LCD. En effet, il ne suffit pas de créer une impression d'ensemble négative pour qu'il y ait dénigrement déloyal, même si l'impression d'ensemble peut jouer un rôle pour interpréter les différentes allégations dans le contexte où elles ont été émises (ATF 124 IV 162 consid. 3).
6.2
6.2.1 La Cour de justice a jugé que le défendeur avait dénigré UEB de manière déloyale en donnant l'impression, dans l'article de l'édition des 25/26 janvier 2003 (alinéa 1er), que la banque avait, à un moment donné, participé activement à une affaire illicite; le passage litigieux est celui où il est écrit que, selon un rapport interne, UEB avait «envisagé» une «participation» à un «montage financier» lié à la corruption et au financement occulte d'un parti politique à l'île Maurice. Nonobstant la précision que la banque assurait avoir immédiatement renoncé à l'affaire en raison de son caractère illicite, l'autorité cantonale y a vu un dénigrement au motif qu'à défaut d'autre précision, il découlait du passage précité l'impression que UEB s'était, à un moment donné, activement impliquée dans l'affaire.
Le passage en question est certes ambigu. Envisager une participation à une opération bancaire signifie la prendre en considération, ne pas l'écarter d'emblée. A défaut de fournir de plus amples précisions sur les renseignements dont UEB disposait au moment où elle avait envisagé d'entrer en relation d'affaires avec les clients mauriciens, le passage en cause peut être compris dans le sens que la banque avait envisagé l'affaire en connaissance de cause, qu'elle avait dès lors été prête, à un moment donné, à participer à une affaire qu'elle savait illégale.
Cette impression est toutefois corrigée, ou du moins largement relativisée, par la phrase suivant le passage en cause, dans laquelle il est relevé que UEB ne conteste pas le contenu du rapport interne, mais précise avoir immédiatement renoncé à l'affaire à cause de son caractère illicite. Or, la renonciation immédiate à un acte envisagé sous-entend que l'acte n'a pas atteint le stade de la réalisation et que la décision d'y renoncer a été prise sans longue hésitation. On ne saurait dès lors suivre l'autorité cantonale lorsqu'elle déduit de l'article que UEB se voit reprocher «une participation active» à une affaire illégale. En outre, de l'article en question, il ressort qu'en toile de fond, un long litige oppose Eric Stauffer à UEB et que celui-là a déjà déposé contre celle-ci diverses plaintes, lesquelles ont toutes été classées faute d'indices, tant par le Ministère public du canton de Genève que par celui de la Confédération; cela permet au lecteur moyen de faire la part des choses.
Il est certes désagréable pour UEB de se voir citée en relation avec des affaires de corruption et de financement illégal à l'île Maurice. Mais l'information n'est pas fausse dès lors qu'il n'est pas contesté que des contacts ont eu lieu avec des personnages impliqués. En revanche, il ressort de l'article que la banque n'a finalement pas conclu l'affaire et qu'elle y a renoncé à cause de son caractère illicite. Dans ces conditions, contrairement à l'opinion de la cour cantonale, on ne saurait admettre que l'article donne de UEB une image négative dans le sens qu'elle se livre à des affaires illégales.
6.2.2 Selon l'arrêt attaqué, le défendeur a également dénigré UEB dans l'article du 31 janvier 2003. Au début de cet article, il est écrit que l'Office des faillites réclame «15 millions» à UEB. D'après la cour cantonale, le lecteur moyen comprend par là qu'il s'agit d'une simple communication à un débiteur potentiel et que la réalité de la prétention, élevée par Eric Stauffer, n'est pas établie. En conséquence, les juges genevois ont considéré la publication comme admissible dans cette mesure. Néanmoins, ils ont tenu la présentation des faits pour fallacieuse parce que l'article ne relève pas que l'information a été fournie par Eric Stauffer et ne dit mot de la vraisemblance de la créance.
Pour une banque, il n'y a rien de méprisable à être en litige avec un prétendu créancier au sujet d'une commission d'un montant très important et à être engagée dans une procédure. L'autorité cantonale ne le soutient d'ailleurs pas et relève, au contraire, que la publication était admissible. Le passage en question ne revêt ainsi pas un caractère dénigrant. Le fait que l'article ne mentionne pas certains éléments propres à se faire une idée plus précise sur le fond du litige et le bien-fondé de la créance en cause n'y change rien.
6.2.3 L'article du 31 janvier 2003 reproduit ensuite les propos d'Eric Stauffer selon lesquels UEB aurait finalement accepté le dépôt de fonds publics provenant de l'Ile Maurice, mais le nierait afin d'éviter de payer à l'homme d'affaires la commission prévue. L'autorité cantonale reproche au passage en cause de n'apporter aucune nuance, en particulier de taire la part d'Eric Stauffer dans la préparation de l'affaire mauricienne, et d'éveiller ainsi, dans l'esprit du lecteur, une fausse impression sur le rôle joué par UEB.
Sous le titre «affaire relancée», l'article ne fait que rapporter la thèse d'Eric Stauffer, sans se prononcer sur sa véracité. Il y est aussi écrit que UEB a toujours nié avoir passé un contrat avec des membres du gouvernement mauricien et que les autorités pénales lui ont donné raison jusqu'à ce jour. L'article relate le litige entre Eric Stauffer et UEB, en exposant les deux versions et sans prendre parti. Cela n'est pas constitutif de dénigrement.
6.2.4 L'article du 31 janvier 2003 mentionne enfin que UEB a ouvert un compte privé au nom du ministre des finances guinéen et qu'un montant de 193'500 € a été déposé sur ce compte. Comme la cour cantonale l'a constaté souverainement (cf. art. 63 al. 2 OJ), cette information est inexacte.
A partir de cette fausse allégation, l'article laisse entendre que UEB a prêté main forte au ministre précité pour mettre de l'argent à l'abri en Suisse. Le lecteur moyen non prévenu ne peut qu'en retirer l'impression que la banque, dans ce cas, s'est consciemment faite la complice d'une opération illicite d'enrichissement personnel d'un membre d'un gouvernement étranger qui s'est approprié des fonds publics. Par conséquent, l'allégation inexacte rapportée dans l'article du 31 janvier 2003 est constitutive de dénigrement. Sur ce point, c'est à bon droit que la cour cantonale a admis un comportement déloyal au sens de l'art. 3 let. a LCD.
6.3 En résumé, parmi les quatre allégations qualifiées de dénigrantes par la Cour de justice, seule l'allégation inexacte relative au compte privé du ministre guinéen, figurant dans l'article du 31 janvier 2003, constitue un acte déloyal au sens de l'art. 3 let. a LCD.
7.
Le défendeur se plaint également d'une violation des art. 41 et 42 CO ainsi que de l'art. 8 CC. Il reproche à l'autorité cantonale d'avoir méconnu les règles sur le fardeau de la preuve du dommage telles qu'elles découlent de l'art. 42 al. 1 CO et de l'art. 8 CC, la notion de dommage au sens de l'art. 41 CO ainsi que la portée de l'art. 42 al. 2 CO. Par ailleurs, il fait grief à la Cour de justice d'avoir admis un lien de causalité adéquate et une faute en violation de l'art. 41 CO.
7.1 A teneur de l'art. 42 al. 2 CO, lorsque le montant exact du dommage ne peut pas être établi, le juge le détermine équitablement en considération du cours ordinaire des choses et des mesures prises par la partie lésée. Cette disposition édicte une règle de preuve de droit fédéral dont le but est de faciliter au lésé l'établissement du dommage. Elle s'applique aussi bien à la preuve de l'existence du dommage qu'à celle de son étendue (ATF 122 III 219 consid. 3a p. 221 et les références). Savoir si c'est à bon droit que le juge a fait usage de cette règle est une question de droit fédéral qui peut faire l'objet d'un recours en réforme. En revanche, la détermination équitable de l'existence et du montant du dommage sont des questions de fait, sur lesquelles l'autorité cantonale se prononce définitivement. Le pouvoir d'estimation élargi découlant de l'art. 42 al. 2 CO n'est pas un pouvoir d'appréciation juridique (au sens de l'art. 4 CC); déterminer s'il y a un dommage et, le cas échéant, quel est son montant relève de la constatation des faits (ATF 131 III 360 consid. 5.1; 122 III 219 consid. 3b p. 222). Cette constatation n'est pas susceptible d'être mise en cause par le biais d'un recours en réforme; elle peut uniquement faire l'objet d'un recours de droit public pour violation de l'interdiction constitutionnelle de l'arbitraire.
A titre exceptionnel, le Tribunal fédéral peut toutefois revoir une constatation du juge cantonal, lorsque celle-ci est fondée uniquement sur l'expérience générale de la vie et formulée en termes abstraits lui conférant le caractère d'une norme valable non seulement pour le cas d'espèce, mais pour tous les cas du même genre. En revanche, une décision cantonale qui ne se réfère à l'expérience générale de la vie que pour constater l'existence ou le montant du dommage dans un cas particulier, compte tenu des preuves administrées ou d'autres facteurs d'appréciation, échappe au contrôle du Tribunal fédéral saisi d'un recours en réforme (ATF 122 III 61 consid. 2c/bb p. 65).
L'art. 42 al. 2 CO allège le fardeau de la preuve, mais ne dispense pas le lésé de fournir au juge, dans la mesure du possible, tous les éléments de fait constituant des indices de l'existence du préjudice et permettant l'évaluation ex aequo et bono du montant du dommage. Les circonstances alléguées par le lésé doivent faire apparaître un dommage comme pratiquement certain; une simple possibilité ne suffit pas pour allouer des dommages-intérêts. L'exception de l'art. 42 al. 2 CO à la règle du fardeau de la preuve doit être appliquée de manière restrictive (ATF 122 III 219 consid. 3a p. 221; cf. également ATF 128 III 271 consid. 2b/aa p. 276/277; François Chaix, La fixation du dommage par le juge (art. 42 al. 2 CO), in Le préjudice - une notion en devenir, Zurich 2005, p. 39 ss, n. 22; Franz Werro, La responsabilité civile, n. 964; Roland Brehm, Commentaire bernois, n. 52 ad art. 42 CO; Alfred Keller, Haftpflicht im Privatrecht, vol. I, 6e éd., p. 77). Ainsi, des allégations fallacieuses, publiées dans un organe de presse largement distribué, sont certes susceptibles de causer un dommage, mais cela n'est pas nécessairement toujours le cas. Selon la jurisprudence récente, la seule expérience générale de la vie ne permet pas d'établir, dans une telle situation, l'existence d'un dommage ni son ordre de grandeur (ATF 122 III 219 consid. 4 p. 224). Il appartient dès lors au lésé d'apporter des éléments concrets, quitte à prendre, le cas échéant, des mesures de protection des secrets d'affaires; à défaut, il n'y a pas place pour une application de l'art. 42 al. 2 CO. Antérieurement, la pratique était, semble-t-il, moins restrictive (cf. ATF 83 II 154 consid. 6b; 79 II 409 consid. 5); cette jurisprudence a été expressément abandonnée (ATF 122 III 219 consid. 3a et 4).
7.2 En l'espèce, l'autorité cantonale est d'avis que UEB a subi un tort commercial indiscutable, qu'elle ne chiffre toutefois pas, sans indiquer de motif pour justifier cette conclusion et nonobstant le fait que l'instruction n'a pas démontré que des clients auraient effectivement quitté l'établissement genevois de la banque en raison des publications incriminées. UEB n'avait pas allégué de faits à ce sujet dans sa demande. L'autorité cantonale n'a pas non plus constaté de faits qui seraient ressortis de l'instruction. L'existence d'un dommage a ainsi été admise comme une constatation de portée générale, valable dans tous les cas similaires de concurrence déloyale par voie de presse, fondée sur la seule expérience de la vie. Sur ce point, il y a violation du droit fédéral.
La Cour de justice se réfère ensuite à des perturbations au niveau de l'exploitation de l'établissement et dans l'esprit du personnel, ainsi qu'au temps perdu par plusieurs collaborateurs. Là encore, UEB n'a pas présenté d'allégués concrets à ce sujet et l'autorité cantonale n'a pas constaté des faits qui seraient ressortis de l'instruction. Or, il était possible de préciser ces éléments et leur incidence financière, ainsi que d'offrir des moyens de preuve. Dans ces circonstances, il n'y a pas place pour une estimation de ces postes du dommage conformément à l'art. 42 al. 2 CO.
Le moyen tiré de la violation de l'art. 42 al. 2 CO est fondé. La condamnation du défendeur à payer le montant de 50'000 fr. sera ainsi annulée, de sorte que les autres moyens relatifs au dommage, à la causalité et à la faute sont sans objet.
8.
Le recours est admis dans la mesure où certains passages des articles litigieux ont été qualifiés à tort de déloyaux dans l'arrêt attaqué; en outre, la cour cantonale a violé le droit fédéral en se référant à l'art. 42 al. 2 CO pour admettre l'existence d'un dommage et calculer ce dernier.
Comme relevé plus haut, UEB n'a pas allégué, dans sa demande, de faits relatifs au dommage. En outre, la cour cantonale n'a pas constaté de faits qui seraient ressortis de l'instruction. Dans sa réponse au recours, la demanderesse soutient toutefois avoir valablement introduit et prouvé de tels faits en cours de procédure. La cour de céans n'est dès lors pas en mesure de juger la cause, qui sera renvoyée à l'autorité cantonale pour nouvelle décision dans le sens des considérants.
9.
Le défendeur et la demanderesse obtiennent chacun partiellement gain de cause. Il se justifie dès lors de mettre les frais judiciaires par moitié à la charge de chaque partie (art. 156 al. 3 OJ) et de compenser les dépens (art. 159 al. 3 OJ).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
1.
Le recours est partiellement admis.
Le chiffre 1 de l'arrêt attaqué est réformé dans le sens suivant:
«Constate que Bernard Favre a dénigré UEB (Switzerland) SA par des allégations fausses contenues dans l'article publié le 31 janvier 2003 dans la Tribune de Genève.»
L'arrêt attaqué est annulé pour le surplus en tant qu'il concerne Bernard Favre et la cause est renvoyée à la cour cantonale pour nouvelle décision dans le sens des considérants.
2.
Un émolument judiciaire de 2'000 fr. est mis par moitié à la charge de chaque partie.
3.
Il n'est pas alloué de dépens.
4.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties et à la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève.
Lausanne, le 16 mai 2007
Au nom de la Ire Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse
La Juge présidant: La Greffière: