BGer 1P.421/2006
 
BGer 1P.421/2006 vom 15.05.2007
Tribunale federale
{T 0/2}
1P.421/2006 /col
Arrêt du 15 mai 2007
Ire Cour de droit public
Composition
MM. les Juges Féraud, Président,
Aemisegger et Reeb.
Greffier: M. Jomini.
Parties
Commune de Lausanne, 1002 Lausanne,
recourante, représentée par Me Denis Bettems, avocat,
contre
A.________,
intimée, représentée par Me Laurent Maire, avocat,
Tribunal administratif du canton de Vaud,
avenue Eugène-Rambert 15, 1014 Lausanne.
Objet
autorisation de construire, établissement public (cabaret night-club),
recours de droit public contre l'arrêt du Tribunal administratif du canton de Vaud du 2 juin 2006.
Faits:
A.
A.________ est propriétaire en ville de Lausanne de la parcelle n° 2014 du registre foncier, où se trouve un bâtiment abritant un établissement public (café-restaurant et pub, avec terrasse extérieure). A.________ a déposé le 26 septembre 2003 une demande de permis de construire pour un projet consistant à transformer des locaux existants (salle de billard, garage) en cabaret night-club. La Municipalité de la commune de Lausanne (ci-après: la municipalité) a, le 1er juillet 2004, refusé le permis de construire, en fondant sa décision sur l'art. 77 du projet de règlement du plan général d'affectation de la commune (RPGA), en relation avec l'art. 79 de la loi cantonale sur l'aménagement du territoire et les constructions (LATC). Cette décision a été envoyée le 20 juillet 2004. L'art. 77 RPGA permet à la municipalité d'imposer aux établissements publics des restrictions d'usage, ou de les interdire, s'ils sont susceptibles de provoquer des inconvénients appréciables dans les secteurs où l'habitat est prépondérant. Le nouveau plan général d'affectation (PGA), avec son règlement, avait été mis à l'enquête publique du 1er au 30 juin 2004. Le régime précédent, en vigueur à la date de la décision municipale, était défini par un plan de quartier adopté en 1946 (plan n° 290, partie supérieure du quartier de la Pontaise) ainsi que par le règlement communal concernant le plan d'extension, du 3 novembre 1942 (révisé à plusieurs reprises).
A.________ a recouru contre la décision municipale auprès du Tribunal administratif du canton de Vaud, qui a rejeté le recours et confirmé la décision municipale par un arrêt rendu le 15 juin 2005. A.________ a formé contre cette décision un recours de droit public, que le Tribunal fédéral a rejeté le 24 février 2006 (arrêt 1P.501/2005).
B.
Le 29 août 2005, A.________ a renouvelé sa demande de permis de construire. Le 10 novembre 2005, la municipalité a derechef refusé cette autorisation, en invoquant une fois encore l'art. 77 du règlement du "futur plan général d'affectation en cours de procédure, conformément au dispositif transitoire prévu par les art. 77 et 79 LATC, dont la durée doit être prolongée en raison des circonstances". A titre subsidiaire, la municipalité a invoqué la nécessité d'élaborer un plan partiel d'affectation (PPA) pour le secteur en question, et de "faire valoir l'effet anticipé de ce projet de norme (art. 77 LATC)". Cette décision a été communiquée à la requérante le 17 novembre 2005.
C.
A.________ a recouru au Tribunal administratif contre la décision du 10 novembre 2005, en concluant à l'octroi du permis de construire. Le Tribunal administratif a rendu son arrêt le 2 juin 2006. Il a admis le recours, annulé la décision attaquée et renvoyé le dossier à la municipalité pour nouvelle décision au sens des considérants. Selon le consid. 4 de l'arrêt, il incombe à la municipalité de délivrer le permis de construire; elle doit statuer sans délai et exclusivement sur la base de la réglementation ancienne. Il est par ailleurs indiqué que le nouveau plan général d'affectation (PGA) a été adopté, avec son règlement (RPGA), le 22 novembre 2005 par le conseil communal.
D.
Agissant par la voie du recours de droit public, la Commune de Lausanne demande au Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt du Tribunal administratif. Elle se plaint d'une violation de son autonomie à cause d'une application arbitraire de dispositions du droit cantonal en matière d'aménagement du territoire et de constructions. Elle invoque également son droit d'être entendue, en tant que partie à la procédure de recours, car le Tribunal administratif aurait dû l'inviter à déposer des déterminations complémentaires.
A.________ conclut au rejet du recours. Le Tribunal administratif a renoncé à déposer une réponse.
E.
Par ordonnance du 31 août 2006, le Président de la Ire Cour de droit public a admis la requête d'effet suspensif présentée par la recourante.
Le Tribunal fédéral considère en droit:
1.
La décision attaquée ayant été rendue avant le 1er janvier 2007, la loi fédérale d'organisation judiciaire (OJ) demeure applicable (art. 132 al. 1 de la loi sur le Tribunal fédéral [LTF; RS 173.110]).
2.
Le recours de droit public formé par une commune pour violation de son autonomie - lorsqu'elle est atteinte, comme en l'espèce, en tant que détentrice de la puissance publique - est traité comme un recours pour violation de droits constitutionnels des citoyens, au sens de l'art. 84 al. 1 let. a OJ, et les conditions légales de recevabilité des art. 84 ss OJ s'y appliquent. Dans la mesure où son autonomie est en cause, la commune peut exiger que l'autorité cantonale respecte les limites de sa compétence et qu'elle applique correctement les dispositions du droit fédéral, cantonal ou communal qui règlent la matière. La commune peut aussi invoquer, en tant que partie au procès, les garanties générales de procédure de l'art. 29 Cst. (ATF 131 I 91 consid. 1 p. 93; 128 I 3 consid. 2b p. 9; 121 I 155 consid. 4 p. 159; 116 Ia 52 consid. 2 p. 54 et les arrêts cités).
L'arrêt attaqué, qui est une décision de renvoi à une autorité inférieure, a un caractère incident. L'affaire a cependant été renvoyée à l'exécutif de la commune recourante, afin qu'il statue à nouveau. En pareil cas, la jurisprudence admet qu'il peut en résulter un préjudice irréparable, au sens de l'art. 87 al. 2 OJ , pour la commune qui doit se soumettre aux injonctions du Tribunal administratif sans pouvoir ensuite attaquer la nouvelle décision qu'elle est tenue de rendre (ATF 128 I 3 consid. 1b p. 7; 120 Ib 207 consid. 1a p. 209). Le recours de droit public est donc recevable de ce point de vue. Les autres exigences formelles des art. 86 ss OJ sont satisfaites et il y a lieu d'entrer en matière.
3.
La recourante se plaint d'une violation de son autonomie parce que, en substance, le Tribunal administratif a refusé d'appliquer l'art. 77 de son nouveau règlement du plan général d'affectation (RPGA); sur la base de cette disposition, le permis de construire devrait être refusé.
3.1 L'art. 50 al. 1 Cst. dispose que l'autonomie communale est garantie dans les limites fixées par le droit cantonal. En droit cantonal vaudois, les communes jouissent d'une autonomie lorsqu'elles définissent, par des plans, l'affectation de leur territoire, et lorsqu'elles appliquent le droit des constructions. Cela résulte de dispositions constitutionnelles et légales que la recourante a invoquées. Le fondement de l'autonomie communale dans ce domaine a du reste souvent été examiné dans la jurisprudence et il n'est pas contesté, de sorte qu'il n'y a pas lieu d'y revenir dans le présent arrêt (cf. arrêt 1P.402/2006 du 6 mars 2007, consid. 3 et les arrêts cités).
Lorsqu'elle est reconnue autonome dans un domaine spécifique, une commune peut se plaindre, par la voie du recours de droit public, d'un excès voire d'un abus du pouvoir d'appréciation, ou d'une fausse application par la juridiction cantonale des normes de droit cantonal et communal régissant le domaine en cause. Le Tribunal fédéral revoit l'interprétation et l'application de ces normes sous l'angle de l'arbitraire (art. 9 Cst.). Il ne s'écarte donc de la solution retenue que si celle-ci se révèle insoutenable, en contradiction manifeste avec la situation effective, ou si elle a été adoptée sans motifs objectifs et en violation d'un droit certain (ATF 132 I 13 consid. 5.1 p. 17, 175 consid. 1.2 p. 177 et les arrêts cités).
3.2 La contestation porte sur une demande de permis de construire qui, après un premier dépôt en 2003, a été présentée une seconde fois en 2005. Le renouvellement d'une demande de permis de construire est prévu à l'art. 77 al. 5 LATC, après un refus d'autorisation fondé non pas sur une norme d'un plan d'affectation en vigueur, mais sur une norme en voie d'élaboration. Lorsque le plan d'affectation, ou son règlement, n'a pas encore été mis à l'enquête publique, cet effet anticipé de la norme en voie d'élaboration est réglé à l'art. 77 LATC. Pour la phase postérieure à l'enquête publique, jusqu'à l'entrée en vigueur de la norme, l'effet anticipé découle de l'art. 79 LATC, qui renvoie notamment à l'art. 77 al. 5 LATC, applicable par analogie. En l'occurrence, la décision municipale du 1er juillet 2004 refusant pour la première fois l'autorisation de construire était fondée sur un article du règlement d'un plan en voie d'élaboration, l'art. 77 RPGA, auquel un effet anticipé a été reconnu (dans le cadre prévu à l'art. 79 LATC). C'est en vain que la propriétaire avait contesté, devant le Tribunal administratif puis le Tribunal fédéral, la prise en considération de cette norme non encore en vigueur (cf. arrêt 1P.501/2005 du 24 février 2006, consid. 3).
Les art. 77 et 79 LATC prévoient la possibilité de renouveler la demande de permis de construire après un certain délai à partir du premier refus. Lorsque le droit cantonal prévoit l'effet anticipé négatif d'une norme non encore approuvée, et empêche ainsi la construction d'un ouvrage supposé conforme au droit en vigueur, il est nécessaire que cette mesure soit limitée dans le temps (cf. Manuel Bianchi, La révision du plan d'affectation communal, thèse Lausanne 1990, p. 187). Cette limitation découle de la nature juridique de l'effet anticipé, qui équivaut à une suspension de la procédure ou à un blocage temporaire, en d'autres termes à des mesures provisionnelles (cf. Pierre Moor, Droit administratif, vol. I, 2e éd., Berne 1994 p. 182; cf. également arrêt 1P.501/2005 du 24 février 2006, consid. 3.1). Ces mesures provisionnelles durent, en droit vaudois, jusqu'à l'adoption du projet de plan ou de norme par l'autorité compétente, pour autant que cette décision intervienne dans un certain délai. Dans le cas particulier, ce délai était d'une année après la communication de la décision du refus du permis de construire (décision du 1er juillet 2004), selon l'art. 77 al. 3 et 4 LATC par renvoi de l'art. 79 al. 2 LATC (six mois, avec une prolongation possible de six mois, dont on peut déduire de l'arrêt attaqué qu'elle a été accordée en l'occurrence). Passé le délai d'une année, quand le projet de plan ou de norme n'a pas été adopté, l'art. 77 al. 5 LATC (par renvoi de l'art. 79 al. 2 LATC) dispose que le requérant peut renouveler sa demande de permis de construire, et que la municipalité doit statuer dans les trente jours, après avoir consulté le département cantonal.
Le nouveau plan général d'affectation, avec en particulier l'art. 77 RPGA, n'étant pas encore adopté par le conseil communal à la date du renouvellement de la demande de permis de construire, le 29 août 2005, l'intimée était fondée à requérir une nouvelle décision de la municipalité sur la base de l'art. 77 al. 5 LATC.
3.3 Le Tribunal administratif a évoqué la possibilité d'un effet anticipé d'une norme autre que l'art. 77 RPGA, dès lors que dans sa décision du 10 novembre 2005, la municipalité avait mentionné à titre subsidiaire "la nécessité d'élaborer un plan partiel d'affectation pour le secteur en question". Comme cela ressort de l'argumentation du recours de droit public, ce motif subsidiaire avait été invoqué pour refuser le permis de construire, dans l'hypothèse où le conseil communal n'adopterait pas le nouveau plan général d'affectation. Or quelques jours plus tard, le 22 novembre 2005, ce plan a été adopté avec son règlement.
Dans l'arrêt attaqué, le Tribunal administratif a considéré que l'hypothèse du défaut d'adoption du plan général d'affectation n'était pas déterminante car on se trouvait "dans un cas de figure différent" puisque la procédure d'adoption du nouveau plan d'affectation suivait son cours. Dans cette situation, la municipalité n'était pas en mesure de démontrer l'existence d'intentions sérieuses d'élaborer une nouvelle réglementation (un PPA), et un nouvel effet anticipé, fondé désormais sur l'art. 77 LATC, ne pouvait pas être imposé après l'effet anticipé du nouveau PGA, fondé sur l'art. 79 LATC.
La commune recourante estime que le Tribunal administratif l'a privée arbitrairement de la possibilité d'invoquer successivement les art. 79 et 77 LATC. Elle ne conteste pas que l'effet anticipé négatif d'un plan ou règlement d'affectation envisagé mais non encore mis à l'enquête publique, selon l'art. 77 al. 1 LATC, suppose une intention sérieuse de modifier les normes existantes, mais elle affirme que sa volonté était claire et sérieuse d'élaborer une réglementation sur la base de laquelle elle pourrait refuser le permis de construire litigieux.
L'adoption de l'art. 77 RPGA était censée permettre à la commune d'atteindre cet objectif. Une fois cette norme adoptée, la solution subsidiaire consistant à élaborer une autre mesure de planification, dans le même but, n'était plus actuelle. Le Tribunal administratif pouvait donc sans arbitraire considérer ensuite que l'éventuel plan partiel d'affectation - mentionné en réalité par précaution, à cause de l'incertitude au sujet de l'adoption de la règle de l'art. 77 RPGA, destinée à s'appliquer à toutes les zones du nouveau plan général d'affectation - n'avait jamais eu en tant que tel un effet anticipé négatif. Il n'est en effet pas insoutenable de retenir que la mesure de blocage temporaire des procédures d'autorisation de construire pour certains établissements publics avait dans cette situation un fondement unique, à savoir l'effet anticipé du règlement du nouveau plan général d'affectation conformément à l'art. 79 LATC. Le Tribunal administratif a mentionné la volonté du législateur de limiter la durée de l'effet anticipé négatif, et la recourante ne conteste pas cette interprétation du sens de la loi. Or s'il suffisait d'invoquer, à l'échéance du délai, l'effet anticipé d'une autre norme envisagée à titre subsidiaire et poursuivant le même objectif d'urbanisme, cela permettrait de prolonger indéfiniment le blocage. Il n'est pas arbitraire de considérer que cela serait incompatible avec la nature des mesures provisionnelles des art. 77 et 79 LATC.
3.4 La question qu'il reste à résoudre, dans ces conditions, est celle du droit matériel applicable à la décision sur la demande de permis de construire renouvelée, après une mesure de blocage et l'échéance du délai prévu par la loi (cf. supra, consid. 3.3).
3.4.1 Le Tribunal administratif a considéré que le droit applicable était celui en vigueur au moment où la municipalité a statué sur la demande de permis. Selon l'arrêt attaqué, l'autorité communale n'a jamais prétendu que le projet devrait être refusé, comme non conforme au droit des constructions, sur la base de la réglementation antérieure. Ce point n'est pas discuté dans le recours de droit public et il n'y a pas lieu de l'examiner dans le présent arrêt.
3.4.2 Pour justifier l'application de l'ancien droit, le Tribunal administratif a retenu deux motifs. En premier lieu, il a considéré que l'entrée en vigueur de l'art. 77 RPGA, après son adoption par le conseil communal, n'avait pas été démontrée. En second lieu ("par surabondance"), admettant par hypothèse que l'art. 77 RPGA était déjà en vigueur, il a examiné, au regard des principes généraux du droit administratif, l'effet d'une modification législative intervenue pendant la procédure de recours.
En critiquant le premier de ces motifs, la commune recourante se plaint d'une violation du droit d'être entendu (art. 29 al. 2 Cst.). Selon elle, le Tribunal administratif aurait dû l'inviter à se déterminer spécialement sur la question de l'entrée en vigueur de l'art. 77 RPGA, qui ne découle pas directement de l'adoption du règlement du plan général d'affectation mais nécessite une autre décision. Le droit fédéral prévoit en effet que les plans d'affectation des communes doivent être approuvés par une autorité cantonale, ce qui leur confère force obligatoire (art. 26 LAT). Cette approbation est, dans le canton de Vaud, de la compétence du département chargé de l'aménagement du territoire (art. 61 et 61a LATC).
D'après la jurisprudence, le droit de se prononcer sur l'argumentation qui sera retenue est reconnu lorsque le juge envisage de fonder sa décision sur une norme ou un motif juridique non évoqué dans la procédure antérieure, dont aucune partie en présence ne s'est prévalu et ne pouvait supputer la pertinence dans le cas particulier (ATF 126 I 19 consid. 2c p. 22 et les arrêts cités). En l'espèce, la contestation portant précisément sur la possibilité d'appliquer le nouvel art. 77 RPGA, soit directement soit en vertu d'un effet anticipé, il était évident que le Tribunal administratif pouvait examiner toutes les exigences posées par le droit fédéral et cantonal pour l'entrée en vigueur de cette disposition. Les parties à la procédure étaient donc en mesure de présenter spontanément leur argumentation à ce sujet, lors de l'échange d'écritures. Le grief de violation du droit d'être entendu est manifestement mal fondé. Cela étant, sur le fond, il se justifie d'examiner uniquement le second motif retenu ("par surabondance") par le Tribunal administratif pour refuser l'application de l'art. 77 RPGA.
3.4.3 Le Tribunal administratif a énoncé, en citant la doctrine et la jurisprudence, une règle générale ou un principe qui voudrait que la validité d'une décision administrative soit examinée selon le droit applicable au moment où elle a été prise, sous réserve de l'hypothèse où la loi modifiée postérieurement à la décision serait une loi de police destinée à protéger l'ordre public; en pareil cas, l'autorité de recours devrait appliquer la nouvelle norme, pour autant qu'elle soit déjà en vigueur. S'agissant du projet litigieux, l'arrêt attaqué retient qu'il n'entraînerait pas pour le voisinage des atteintes nuisibles ou incommodantes au sens de la loi fédérale sur la protection de l'environnement (LPE), et notamment qu'il n'aurait pas d'incidence sur la santé des voisins. Dès lors, en l'absence d'un intérêt public relevant de l'ordre public et clairement prédominant, il n'y aurait pas lieu de faire exception à la règle générale de l'application du droit en vigueur au moment de la décision, soit à la date où la municipalité a statué sur la demande de permis de construire. Le Tribunal administratif a considéré au surplus qu'il ne fallait "admettre qu'avec retenue l'application d'une nouvelle disposition d'un règlement communal dans le cadre de la procédure de recours lorsque l'autorité communale s'est fondée sur cette disposition pour refuser un permis de construire et n'a ensuite pas été en mesure de respecter les délais des art. 77 et 79 LATC"; sinon, cela "implique[rait] de facto la prolongation de ces délais et remet[trait] par conséquent en cause leur caractère impératif".
La commune recourante qualifie d'excessivement restrictive la conception du Tribunal administratif qui n'admet l'application du nouveau droit que pour des motifs d'ordre public; cela conduirait selon elle à nier l'importance de l'aménagement du territoire et, en l'occurrence, à privilégier les intérêts d'un propriétaire foncier au détriment de ceux de la collectivité publique, d'une part, et de l'ensemble des habitants d'un quartier, d'autre part.
Il n'y a pas lieu, dans le présent arrêt, de se prononcer sur la portée de la règle générale invoquée par le Tribunal administratif. Il suffit de rappeler que, selon la jurisprudence, le droit applicable à la date de l'acte administratif attaqué est effectivement en principe déterminant pour l'autorité de recours, et qu'il faut des raisons impératives pour appliquer le nouveau droit (ATF 125 II 591 consid. 5e/aa p. 598 et les arrêts cités). En l'espèce, la situation juridique est particulière car c'est à cause d'une "mesure de blocage", fondée sur l'art. 79 LATC, que la demande de permis de construire n'a pas été, initialement, examinée au regard du droit en vigueur; cette demande d'autorisation a pu être renouvelée avant l'adoption de la norme en question (l'art. 77 RPGA) et la municipalité, tenue par la loi de statuer à bref délai (dans les trente jours - cf. supra, consid. 3.2), s'est également prononcée avant la modification du droit. Dans cette situation, il n'est en tout cas pas insoutenable d'accorder la priorité au droit applicable lors des deux décisions successives de la municipalité au sujet de la demande de permis de construire, c'est-à-dire à l'ancien règlement communal. Cette solution tient compte du caractère exceptionnel, et nécessairement limité dans le temps, de l'effet anticipé négatif d'une norme en voie d'élaboration. En pareil cas, la pesée des intérêts n'est donc pas comparable à celle qu'il y a lieu d'effectuer dans une situation "ordinaire" de changement de législation durant la procédure de recours. Dès lors, le Tribunal administratif a considéré sans arbitraire qu'il incombait à la municipalité de statuer sur la demande de permis de construire en application de l'ancien droit.
3.5 Il s'ensuit que les griefs de la commune recourante sont entièrement mal fondés. Le recours de droit public doit en conséquence être rejeté.
4.
Le présent arrêt doit être rendu sans frais (art. 156 al. 2 OJ). Conformément à l'art. 159 al. 1 et 2 OJ, la commune recourante aura à payer des dépens à l'intimée, assistée d'un avocat.
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
1.
Le recours de droit public est rejeté.
2.
Il n'est pas perçu d'émolument judiciaire.
3.
Une indemnité de 2'000 fr., à payer à titre de dépens à l'intimée A.________, est mise à la charge de la Commune de Lausanne.
4.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties et au Tribunal administratif du canton de Vaud.
Lausanne, le 15 mai 2007
Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
Le président: Le greffier: