BGer I 540/2006
 
BGer I 540/2006 vom 26.10.2006
Eidgenössisches Versicherungsgericht
Tribunale federale delle assicurazioni
Tribunal federal d'assicuranzas
Cour des assurances sociales
du Tribunal fédéral
Cause {T 7}
I 540/06
Arrêt du 26 octobre 2006
IIe Chambre
Composition
Mme et MM. les Juges Leuzinger, Présidente, Borella et Kernen. Greffier : M. Wagner
Parties
G.________, recourante, représentée par Me Elisabeth Gabus-Thorens, avocate, rue du Général-Dufour 11, 1204 Genève,
contre
Office cantonal AI Genève, 97, rue de Lyon, 1203 Genève, intimé
Instance précédente
Tribunal cantonal des assurances sociales, Genève
(Jugement du 8 mai 2006)
Faits:
A.
Par décision du 17 février 2006, l'Office cantonal de l'assurance-invalidité du canton de Genève a supprimé le droit de G.________ à une rente d'invalidité. Il a retiré l'effet suspensif à une éventuelle opposition contre cette décision.
G.________ a formé opposition contre cette décision, en demandant que l'effet suspensif soit restitué.
Par décision incidente sur opposition du 5 avril 2006, l'office AI a rejeté la requête en rétablissement de l'effet suspensif et réservé le fond.
B.
G.________ a formé recours contre cette décision devant le Tribunal cantonal des assurances sociales de la République et canton de Genève, en concluant à l'annulation de celle-ci et à la restitution de l'effet suspensif à l'opposition formée contre la décision du 17 février 2006.
Par jugement du 18 mai 2006, le Tribunal cantonal des assurances sociales a rejeté le recours.
C.
G.________ interjette un recours de droit administratif contre ce jugement, dont elle demande l'annulation, avec suite de dépens, en concluant à ce que l'effet suspensif soit restitué à l'opposition et au recours cantonal.
L'Office cantonal de l'assurance-invalidité du canton de Genève conclut au rejet du recours. L'Office fédéral des assurances sociales a renoncé à se déterminer.
Considérant en droit:
1.
1.1 Le Tribunal fédéral des assurances connaît en dernière instance des recours de droit administratif contre des décisions au sens de l'art. 5 PA en matière d'assurances sociales (art. 128 en corrélation avec l'art. 97 OJ). D'après l'art. 5 al. 2 PA, sont considérées comme des décisions également les décisions incidentes au sens de l'art. 45 PA. Selon l'art. 45 al. 1 PA, de telles décisions ne sont susceptibles de recours - séparément d'avec le fond - que si elles peuvent causer un préjudice irréparable. En outre, dans la procédure devant le Tribunal fédéral des assurances, le recours de droit administratif contre des décisions incidentes est recevable, en vertu de l'art. 129 al. 2 en liaison avec l'art. 101 let. a OJ, seulement lorsqu'il l'est également contre la décision finale (ATF 131 V 43 consid. 1.1, 128 V 201 consid. 2a, 124 V 85 consid. 2 et les références).
Parmi les décisions incidentes qui peuvent être déférées au Tribunal fédéral des assurances par la voie du recours de droit administratif figurent, d'après les art. 45 al. 2 let. g et 55 PA, les décisions portant sur l'effet suspensif.
1.2 Par ailleurs, le recours de droit administratif est ouvert contre une décision finale en ce qui concerne la suppression du droit à la rente d'invalidité. Quant à la notion du préjudice irréparable, la jurisprudence admet qu'elle est remplie lorsque la cessation subite du versement d'une rente est susceptible de compromettre la situation financière de l'assuré et de le contraindre à prendre des mesures onéreuses ou d'autres dispositions qui ne sont pas raisonnablement exigibles (ATF 119 V 487 consid. 2b et les références). La recourante a un intérêt à l'annulation immédiate du jugement du 18 mai 2006, attendu que le versement de la rente d'invalidité a cessé à la suite de la suppression de son droit à la rente par décision du 17 février 2006.
Les conditions de recevabilité sont ainsi réalisées.
2.
2.1 La loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales du 6 octobre 2000 (LPGA) et l'ordonnance sur la partie générale du droit des assurances sociales (OPGA) du 11 septembre 2002 sont entrées en vigueur le 1er janvier 2003, entraînant la modification de diverses dispositions matérielles et de procédure dans le domaine de l'assurance-invalidité. Selon la jurisprudence, les nouvelles règles de procédure sont en principe immédiatement et pleinement applicables dès leur entrée en vigueur, à défaut de dispositions transitoires contraires (ATF 129 V 115 consid. 2.2, 117 V 93 consid. 6b, 112 V 360 consid. 4a et 111 V 47 et les références; RAMA 1998 n° KV 37 p. 316 consid. 3b). Sont applicables en l'espèce les nouvelles règles de procédure entrées en vigueur le 1er janvier 2003 qui figurent dans la LPGA et l'OPGA ou ont été instituées sur cette base dans des lois spéciales (arrêt P.-S. du 24 février 2004 consid. 1.1 [I 46/04], in HAVE 2004 p. 127).
En outre, la loi fédérale du 16 décembre 2005 modifiant la loi fédérale sur l'assurance-invalidité est entrée en vigueur le 1er juillet 2006 (RO 2006 2003), apportant des modifications qui concernent la procédure conduite devant le Tribunal fédéral des assurances (art. 132 al. 2 et 134 OJ), devant les instances inférieures et les offices AI (art. 69 al. 1 LAI). Toutefois, le présent cas n'est pas soumis au nouveau droit, du moment que le recours de droit administratif a été formé avant le 1er juillet 2006 (ch. II let. c des dispositions transitoires relatives à la modification du 16 décembre 2005) et que la décision sur opposition est antérieure au 1er juillet 2006.
2.2 L'entrée en vigueur de la LPGA et de l'OPGA n'a rien changé à la jurisprudence en matière de retrait par l'administration de l'effet suspensif à une opposition ou à un recours ou de restitution de l'effet suspensif (arrêt précité P.-S. du 24 février 2004). Ainsi, la possibilité de retirer l'effet suspensif au recours ou à l'opposition (art. 11 al. 1 et 2 OPGA) n'est pas subordonnée à la condition qu'il existe, dans le cas particulier, des circonstances tout à fait exceptionnelles qui justifient cette mesure. Il incombe bien plutôt à l'autorité appelée à statuer d'examiner si les motifs qui parlent en faveur de l'exécution immédiate de la décision l'emportent sur ceux qui peuvent être invoqués à l'appui de la solution contraire. L'autorité dispose sur ce point d'une certaine liberté d'appréciation. En général, elle se fondera sur l'état de fait tel qu'il résulte du dossier, sans effectuer de longues investigations supplémentaires. En procédant à la pesée des intérêts en présence, les prévisions sur l'issue du litige au fond peuvent également être prises en considération; il faut cependant qu'elles ne fassent aucun doute. Par ailleurs, l'autorité ne saurait retirer l'effet suspensif au recours lorsqu'elle n'a pas de raisons convaincantes pour le faire (ATF 124 V 88 s. consid. 6a, 117 V 191 consid. 2b et les références). Ces principes s'appliquaient également dans le cadre de l'art. 97 al. 2 LAVS (teneur en vigueur jusqu'au 31 décembre 2002; ATF 110 V 46), applicable par analogie à l'assurance-invalidité en vertu de l'art. 81 LAI (abrogé par la LPGA).
3.
3.1 Dans un arrêt B. du 21 octobre 2005 (U 283/05), le Tribunal fédéral des assurances a admis que l'intérêt de l'assureur-accidents à suspendre l'allocation de ses prestations l'emportait sur celui de l'assuré à percevoir la rente litigieuse pendant toute la durée du procès. En effet, de deux choses l'une : ou bien la situation de l'assuré était aussi précaire que l'admettait la juridiction cantonale et dans ce cas, il était à craindre que dans l'hypothèse où celui-ci n'obtiendrait pas gain de cause sur le fond de la contestation, la procédure en restitution des prestations versées à tort ne se révèle infructueuse, ce qui justifiait le retrait de l'effet suspensif (ATF 119 V 507 consid. 4 et les références citées). Ou bien l'assuré avait, comme il le concédait lui-même, des ressources suffisantes pour couvrir une créance de plus de 600'000 fr., et dans ce cas, ses intérêts n'étaient pas mis en péril par le retrait de l'effet suspensif.
3.2 Se fondant sur l'arrêt B. précité du 21 octobre 2005, les premiers juges, prenant acte que la recourante dispose d'un bien immobilier, ont considéré qu'elle disposait ainsi de ressources suffisantes pour faire face au retrait de l'effet suspensif. Si tel n'était pas le cas, il faudrait alors craindre qu'elle ne puisse faire face au remboursement des prestations qui lui seraient - le cas échéant - indûment allouées.
3.3 La recourante conteste que l'arrêt B. précité entre en considération dans le cas particulier, les situations n'étant pas les mêmes. Produisant copie de plusieurs pièces donnant des renseignements sur les ressources et les charges de sa famille, elle a établi un budget. Elle en conclut qu'en tenant compte des rentes qu'elle perçoit, le solde disponible est de 2'586 fr. 25. Depuis qu'elle se voit privée de la rente AI et par la même occasion de la rente versée par son ancien employeur, le budget de la famille accuse une perte de 4'706 fr. 75. Dès lors, si elle n'obtient pas la restitution de l'effet suspensif, elle se verra contrainte de vendre la maison où elle vit avec toute sa famille. En revanche, si la rente continue à lui être versée pendant la durée de la procédure, les intérêts financiers de l'office AI ne seront pas mis en péril, puisque le remboursement des rentes serait alors garanti par les fonds propres investis dans la maison ainsi que par les amortissements effectués depuis l'achat qui se montent en l'état à 5'650 fr. environ.
3.4 Si la situation de la recourante est aussi précaire qu'elle le prétend, il est à craindre, comme l'ont considéré les premiers juges, que dans l'hypothèse où elle n'obtiendrait pas gain de cause sur le fond de la contestation, la procédure en restitution des prestations versées à tort ne se révèle infructueuse, ce qui justifie le retrait de l'effet suspensif (ATF 119 V 507 consid. 4 et les références citées). Ou bien, comme l'indique la recourante dans son mémoire du 12 juin 2006, la maison achetée par les époux pour un montant de 890'000 fr. constitue une réserve financière qui peut garantir leur solvabilité, et dans ce cas, les intérêts de l'assurée ne sont pas mis en péril par le retrait de l'effet suspensif.
Quant aux prévisions sur l'issue du litige, elles ne présentent pas, pour la recourante, un degré de certitude suffisant pour être pris en compte en l'espèce. A première vue, les chances de succès de l'opposition sur le fond ne paraissent pas évidentes, au vu notamment du rapport d'expertise du COMAI du 9 décembre 2005 et de l'avis médical du Service médical régional AI du 13 février 2006.
Il s'ensuit que les motifs qui parlent en faveur de l'exécution immédiate de la décision de suppression du droit à la rente l'emportent, en l'espèce, sur l'intérêt de la recourante à percevoir la rente pendant toute la durée de la procédure. Le recours se révèle ainsi mal fondé.
4.
La procédure est gratuite, s'agissant d'une décision incidente concernant l'effet suspensif dans un litige qui concerne, au fond, l'octroi ou le refus de prestations d'assurance (ATF 121 V 180 consid. 4a; VSI 2000 p. 185 consid. 2b).
Représentée par une avocate, la recourante, qui succombe, ne saurait prétendre une indemnité de dépens pour l'instance fédérale (art. 159 al. 1 en corrélation avec l'art. 135 OJ).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce:
1.
Le recours est rejeté.
2.
Il n'est pas perçu de frais de justice.
3.
L'avance de frais versée par la recourante, d'un montant de 500 fr., lui est restituée.
4.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal cantonal des assurances sociales et à l'Office fédéral des assurances sociales.
Lucerne, le 26 octobre 2006
Au nom du Tribunal fédéral des assurances
La Présidente de la IIe Chambre: Le Greffier: