BGer I 779/2004
 
BGer I 779/2004 vom 01.04.2005
Eidgenössisches Versicherungsgericht
Tribunale federale delle assicurazioni
Tribunal federal d'assicuranzas
Cour des assurances sociales
du Tribunal fédéral
Cause
{T 7}
I 779/04
Arrêt du 1er avril 2005
IIe Chambre
Composition
MM. les Juges Borella, Président, Schön et Frésard. Greffière : Mme Fretz
Parties
D.________, recourant, représenté par Me Olivier Derivaz, avocat, rue de Venise 3B, 1870 Monthey,
contre
Office cantonal AI du Valais, avenue de la Gare 15, 1951 Sion, intimé
Instance précédente
Tribunal cantonal des assurances, Sion
(Jugement du 25 octobre 2004)
Faits:
A.
A.a D.________ a effectué un apprentissage d'électricien de réseau (avec CFC obtenu en 1996), profession qu'il a exercée pendant deux ans. Le prénommé a obtenu un brevet de pilote professionnel d'hélicoptère au Canada en mai 2000 et est en outre détenteur d'un brevet de pilote d'avion privé en Suisse. A partir de juin 2000, il a travaillé en tant qu'assistant de vol au service de l'entreprise X.________ SA, réalisant un salaire de 4'000 fr. par mois. Le 25 mars 2002, en déchargeant une élingue, D.________ a ressenti une violente douleur au dos, à la suite de laquelle il a été opéré d'une hernie discale L4-L5 à droite, le 6 septembre 2002.
D.________ s'est annoncé à l'assurance-invalidité le 22 juillet 2002 en demandant un reclassement dans une nouvelle profession. En raison des nombreuses secousses et du port de charges lourdes que suppose l'exercice de la profession de pilote d'hélicoptère, il a indiqué vouloir se diriger vers la profession de pilote de ligne. L'Office AI du canton de Vaud, puis l'Office AI du canton du Valais (à qui le dossier a été transmis après que l'assuré eut changé de domicile; ci-après : l'Office AI), ont recueilli divers renseignements économiques et médicaux, dont une expertise du docteur E.________, professeur-associé au service de neurologie de l'Hôpital V.________, du 7 mai 2003. Il ressort de cette expertise qu'une amélioration de la capacité de travail de l'assuré dans son activité d'assistant de vol, actuellement de l'ordre de 50 %, n'est plus envisageable. Selon le professeur E.________, une reconversion comme pilote d'hélicoptère professionnel ou pilote de ligne est cependant possible.
A.b Par décision du 23 janvier 2004, l'Office AI a rejeté la demande de D.________ tendant à la prise en charge d'une formation de pilote de ligne. Il a considéré que l'assuré avait une capacité de travail de 100 % aussi bien dans la profession de pilote d'hélicoptère que dans celle de pilote de ligne, de sorte qu'il n'était ni invalide, ni menacé d'une invalidité imminente. D.________ s'est opposé à cette décision, invoquant l'incompatibilité des professions d'assistant de vol ou de pilote d'hélicoptère avec l'état de son dos. A cet égard, il s'est référé à une fiche d'entreprise portant sur la description du poste de pilote d'hélicoptère par P.________, chef-pilote d'hélicoptère auprès de la société Y.________ SA. L'assuré a également versé au dossier une étude scientifique tendant à démontrer le rôle défavorable des positions de travail impliquant des inclinaisons, rotations du tronc et mode de soulèvement des charges dans la survenance des hernies discales. L'Office AI a transmis ces pièces au professeur E.________, lui demandant s'il maintenait son avis selon lequel la capacité de travail était totale dans l'exercice de la profession de pilote d'hélicoptère. Se fondant sur les indications de la société Y.________ SA, le professeur E.________ a estimé que les rotations du corps auxquelles étaient soumis les pilotes d'hélicoptère n'étaient pas compatibles avec l'affection lombaire de l'assuré. Il a ajouté que si ce dernier devait se soumettre quotidiennement à de telles rotations et autres vibrations, son état de santé s'aggraverait à court terme. L'expert a conclu qu'une reconversion professionnelle comme pilote de ligne était indiquée (rapport du 7 avril 2004).
A.c Par décision sur opposition du 9 juin 2004, l'Office AI a confirmé son refus d'allouer les prestations demandées. Il a considéré qu'à l'époque de l'accident, D.________ ne suivait pas une formation professionnelle de pilote d'hélicoptère et qu'il ne l'aurait pas non plus envisagée avant la survenance de l'accident.
B.
D.________ a recouru contre cette décision auprès du Tribunal des assurances du canton du Valais en concluant, sous suite de dépens, à l'annulation de celle-ci. Il a demandé à être mis au bénéfice de mesures de réadaptation ainsi que de l'assistance judiciaire.
Par jugement du 25 octobre 2004, la juridiction cantonale a rejeté le recours de l'assuré. Elle lui a accordé l'assistance judiciaire.
C.
D.________ interjette recours de droit administratif contre ce jugement dont il demande l'annulation. Il conclut à ce que son droit aux mesures de réadaptation soit constaté ainsi qu'au renvoi de la cause à l'administration pour complément d'instruction. Par ailleurs, il requiert le bénéfice de l'assistance judiciaire.
L'Office AI conclut au rejet du recours, tandis que l'Office fédéral des assurances sociales a renoncé à se déterminer.
Considérant en droit:
1.
Le litige porte sur le droit du recourant à la prise en charge, par l'assurance-invalidité, des frais d'un reclassement dans la profession de pilote de ligne.
2.
2.1 Selon l'art. 8 al. 1 LAI, les assurés invalides ou menacés d'une invalidité (art. 8 LPGA) imminente ont droit aux mesures de réadaptation nécessaires qui sont de nature à rétablir, à maintenir ou à améliorer leur capacité de gain ou leur capacité d'accomplir leurs travaux habituels, qu'ils aient ou non exercé une activité lucrative préalable. Ce droit est déterminé en fonction de toute la durée d'activité probable. Ces mesures de réadaptation comprennent, en particulier, des mesures d'ordre professionnel (art. 8 al. 3 let. b LAI). Selon l'art. 17 al. 1 LAI, l'assuré a droit au reclassement dans une nouvelle profession si son invalidité rend cette mesure nécessaire et que sa capacité de gain peut ainsi, selon toute vraisemblance, être maintenue ou améliorée. Sont considérées comme un reclassement les mesures de formation destinées à des assurés qui ont en besoin, en raison de leur invalidité, après achèvement d'une formation professionnelle initiale ou après le début de l'exercice d'une activité lucrative sans formation préalable, pour maintenir ou pour améliorer leur capacité de gain (art. 6 al. 1 RAI). L'assuré qui a droit au reclassement est défrayé par l'assurance de ses frais de formation ainsi que des frais de nourriture et de logement dans l'établissement de formation professionnelle (art. 6 al. 3 RAI).
2.2 Par reclassement, la jurisprudence entend l'ensemble des mesures de réadaptation de nature professionnelle qui sont nécessaires et suffisantes pour procurer à l'assuré une possibilité de gain à peu près équivalente à celle que lui offrait son ancienne activité. En règle ordinaire, l'assuré n'a droit qu'aux mesures nécessaires, propres à atteindre le but de réadaptation visé, mais non pas à celles qui seraient les meilleures dans son cas (ATF 124 V 109-110 consid. 2a et les références citées). En particulier, l'assuré ne peut prétendre une formation d'un niveau supérieur à celui de son ancienne activité, sauf si la nature et la gravité de l'invalidité sont telles que seule une formation d'un niveau supérieur permet de mettre à profit d'une manière optimale la capacité de travail à un niveau professionnel plus élevé. On notera aussi que si les préférences de l'intéressé quant au choix du genre de reclassement doivent être prises en considération, elles ne sauraient toutefois jouer un rôle déterminant (RCC 1988 p. 266 consid. 1, 495 consid. 2a et les arrêts cités, 1978 p. 527 consid. 2; voir aussi Meyer-Blaser, Rechtsprechung des Bundesgerichts zum IVG, p. 128 sv.).
3.
3.1 L'administration et la juridiction cantonale ont déduit des premières déclarations du recourant qu'il aurait embrassé la carrière de pilote de ligne, indépendamment de l'accident et de ses conséquences sur sa capacité de travail dans les professions d'assistant de vol et de pilote d'hélicoptère. De ce fait, cette formation ne lui occasionnait pas de frais supplémentaires en raison de ses troubles lombaires, si bien que le financement ne devrait pas en être supporté par l'AI.
Pour sa part, le recourant soutient qu'il n'a certes pas attendu une décision de l'Office AI pour déclarer qu'il désirait entreprendre une formation de pilote de ligne mais allègue qu'il n'a envisagé de suivre cette formation qu'après son accident. Il indique qu'à ce jour, il n'a toujours pas débuté cette formation, dont le suivi dépendra de l'aide financière de l'AI.
3.2 Le recourant a reconnu n'avoir pas débuté la formation de pilote d'hélicoptère en Suisse pour des raisons financières. En effet, selon les renseignements fournis par A.________, directeur de Y.________ SA, le coût de la formation de pilote professionnel dans le transport de matériel se chiffre à 150'000 fr. Si cette formation est généralement prise en charge par l'employeur, les chances de se faire embaucher restent minces, compte tenu du nombre - plus de 200 - de pilotes d'hélicoptère au chômage en Suisse. Dès lors, il n'est pas établi, au degré de la vraisemblance prépondérante, que ce dernier aurait suivi cette formation s'il n'avait pas été victime de l'accident.
3.3 On ne saurait davantage déduire de ce qui précède que le recourant, sans atteinte à la santé, aurait suivi la formation de pilote de ligne. Cette formation est certes moins onéreuse que celle de pilote d'hélicoptère, mais le recourant a admis qu'il n'aurait pas non plus été en mesure de la financer. D'autre part, le seul fait qu'il a effectué la majeure partie de ses heures de vol sur avion ne permet pas d'en déduire qu'il avait toujours eu l'intention de suivre une formation de pilote de ligne.
Au vu de ce qui précède, on doit conclure qu'en l'absence de ses problèmes de santé, le recourant aurait continué à exercer son activité d'assistant de vol. L'argumentation des premiers juges ne saurait donc être opposée au recourant pour lui refuser un droit à des mesures de réadaptation.
4.
Dans l'examen du cas, il faut cependant prendre en considération les possibilités concrètes de gain qui s'offrent à l'intéressé en fonction d'une mesure de réadaptation déterminée.
4.1 Dans le cas particulier, le Tribunal fédéral des assurances a eu récemment l'occasion de constater que les perspectives de trouver un emploi dans le domaine de l'aviation étaient très limitées, la demande étant largement supérieure à l'offre. Il est de plus notoire que ce domaine d'activité est soumis à d'importantes réductions de personnel (arrêt M. du 14 janvier 2005, C 147/04). Sur un marché déjà fortement déséquilibré, le recourant - même s'il est médicalement jugé apte à piloter un avion - serait de surcroît désavantagé : il lui serait encore plus difficile, par rapport à une personne pleinement valide, de trouver un emploi, si l'on considère les exigences de santé qui sont requises pour ce type de profession. Si le recourant est à même de supporter la station assise prolongée, des problèmes lombaires peuvent surgir à court ou moyen terme ou dans des situations plus ou moins exceptionnelles, ce qui peut être un élément d'appréciation non négligeable pour un refus d'engagement de la part d'un employeur potentiel.
4.2 Le but de la réadaptation ne pourrait donc que difficilement être atteint au moyen d'un reclassement dans la profession de pilote. A priori, il n'est cependant pas exclu que d'autres mesures de réadaptation puissent entrer en considération. Au demeurant, on ignore si le recourant serait ou non à même de reprendre l'activité d'électricien de réseau qu'il a apprise et qu'il a exercée pendant un temps. La question d'un reclassement dans une autre profession que celle de pilote ne fait pas l'objet de la décision attaquée et le recourant, visiblement, n'envisage pas une réadaptation hors du métier de pilote de ligne. Il n'est donc pas nécessaire d'inviter l'administration à examiner les autres mesures qui pourraient entrer en considération. Le recourant conserve néanmoins la faculté de présenter une demande dans ce sens. Le recours est ainsi mal fondé.
5.
Vu la nature du litige, il n'y a pas lieu de percevoir de frais de justice (art. 134 OJ). Par ailleurs, les conditions de l'assistance judiciaire gratuite sont réunies. Le requérant est cependant rendu attentif au fait qu'il devra rembourser la caisse du tribunal, s'il devient ultérieurement en mesure de le faire (art. 152 al. 3 OJ).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce:
1.
Le recours est rejeté.
2.
Il n'est pas perçu de frais de justice.
3.
L'assistance judiciaire est accordée au recourant. Les honoraires de Me Derivaz sont fixés à 1'000 fr. (y compris la taxe sur la valeur ajoutée) pour la procédure fédérale et seront supportés par la caisse du tribunal.
4.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal cantonal des assurances du canton du Valais et à l'Office fédéral des assurances sociales.
Lucerne, le 1er avril 2005
Au nom du Tribunal fédéral des assurances
Le Président de la IIe Chambre: La Greffière: