BGer 2A.321/2003
 
BGer 2A.321/2003 vom 04.12.2003
Tribunale federale
2A.321/2003/KJE/elo
{T 0/2}
Arrêt du 4 décembre 2003
IIe Cour de droit public
Composition
MM. les Juges Wurzburger, Président,
Müller et Meylan, juge suppléant.
Greffière: Mme Kurtoglu-Jolidon.
Parties
X.________ Corporation, recourante,
représentée par Coresa.
contre
Administration fiscale cantonale du canton de Genève, rue du Stand 26, case postale 3937,
1211 Genève 3,
Tribunal administratif du canton de Genève, rue du Mont-Blanc 18, case postale 1956, 1211 Genève 1.
Objet
assujettissement à l'impôt fédéral direct, administration effective d'une personne morale,
recours de droit administratif contre l'arrêt du Tribunal administratif du canton de Genève du 27 mai 2003.
Faits:
A.
X.________ Corporation est une société active dans le commerce international du pétrole et du gasoil. Elle a été créée le 29 mars 1994 aux Iles Vierges britanniques. Elle y paie une taxe annuelle indépendante du résultat. Elle a pour bénéficiaire économique et administrateur unique A.________, ressortissant allemand d'origine russe, domicilié à Rome.
Le groupe X.________ est constitué de différentes sociétés dont la société suisse X.________ Management, ayant son siège à Genève, X.________ S.R.L., sise à Rome, et X.________ Oil, à Moscou.
X.________ Management, qui n'est pas en cause dans le cas présent, est considérée par les autorités fiscales genevoises comme une société de services et imposée comme telle. Elle a pour administrateur unique Maurice Taylor et pour directeur financier Vincent de Spoelberch.
X.________ Corporation achète du pétrole à la société genevoise Y.________ S.A., dont B.________ est depuis fin septembre 1994 l'administrateur unique et A.________ a été, pour un temps, un des actionnaires minoritaires. L'actionnaire d'abord majoritaire, puis unique est C.________, qui, par l'intermédiaire de ses sociétés russes, a pu obtenir des quotas d'exportation de pétrole russe et qui en a fourni à Y.________ S.A. De nombreux contrats ont ainsi été signés à Genève entre 1994 et 1997 entre X.________ Corporation, représentée par A.________, et Y.________ S.A., représentée par B.________. Ils ont porté sur un montant total de plus de 570 millions US$ et sur plus de 12 millions de tonnes de produits pétroliers. Ces contrats prévoient que le droit suisse est applicable et qu'en cas de litige le for est auprès des tribunaux genevois.
X.________ Corporation a recouru jusqu'en 1998 aux services d'un négociant indépendant, D.________, établi à Rome. Entendu en mai 1999 dans le cadre d'une enquête diligentée à Genève et dirigée contre C.________ et A.________, D.________ a déclaré avoir travaillé pour X.________ Corporation de 1994 à fin 1998. Il était rémunéré directement par cette dernière. II se chargeait en outre des travaux de dactylographie de X.________ S.R.L. et était, de ce chef, rémunéré par celle-ci, chez qui il sous-louait des locaux et qui ne comportait qu'un collaborateur unique, un dénommé E.________. II avait été introduit auprès de A.________ par un tiers; A.________ l'avait alors invité à se rendre à Genève où il avait été reçu, à son souvenir, dans les bureaux de Y.________ S.A. C.________ et B.________ assistaient à l'entrevue. D.________ était chargé, pour le compte de X.________ Corporation, de rechercher des acquéreurs pour du pétrole brut ou des produits dérivés, de préparer, rédiger et négocier des contrats pétroliers avec l'acquéreur et d'en suivre l'exécution. II prospectait uniquement sur les marchés occidentaux et a apporté des acquéreurs pour quelque 2 à 3 millions de tonnes. En ce qui concerne la partie du marché de "l'Est", il n'a pas participé à des négociations, n'a pas vu A.________ y prendre part non plus et il pensait qu'elles se déroulaient à Genève ou peut-être à Rome. II n'a pas eu le sentiment que ni A.________, ni B.________ fussent des spécialistes en matière pétrolière. Quant à F.________, il était "le responsable financier à Genève pour X.________ International". Tout ce qui était lié aux paiements dans les contrats passait par Genève et par celui-ci. II figure au dossier un contrat entre X.________ Corporation et D.________ conclu à Rome le 19 décembre 1995 dans lequel il est stipulé que toute notification devant être effectuée à X.________ Corporation en vertu de ce contrat doit être faite "c/o Y.________ SA".
Entendu en mars 2000 dans le cadre de la même enquête, B.________ a expliqué avoir travaillé, entre 1991 et fin avril 1993, pour la Banque Z.________ S.A. à Genève dans le service du financement international. Dès mai 1993, il s'est mis à son compte comme consultant indépendant, son activité dans le secteur du négoce international étant plus particulièrement concentrée dans le secteur pétrolier. C'est en été 1994 que son activité indépendante a vraiment démarré. Il a alors été mis en contact avec A.________, dont il lui était dit qu'il souhaitait développer une société de trading pétrolier en Suisse. Il a rencontré A.________ à Genève en août 1994. Celui-ci lui a alors expliqué qu'il voulait lui présenter ses partenaires et qu'il souhaitait que B.________ constitue une équipe pour gérer et administrer des opérations de trading pétrolier à Genève. Le lende- main, A.________ lui a présenté plusieurs personnes, dont C.________, comme étant ses associés.
Entendu lui aussi en mars 2000 dans le même cadre, F.________ a dit avoir travaillé trois ans à la Banque W.________ dont deux dans le négoce de matières premières, essentiellement voire exclusivement le négoce du pétrole, puis à la V.________ Bank, où il s'occupait de pétrole et de métaux. Il a été engagé par X.________ Management en 1996, étant précisé que c'est B.________ qui est venu le chercher. II a expliqué que le travail qu'il faisait pour X.________ Management était similaire à celui qu'il effectuait pour la V.________ Bank seulement en ce qui concerne le suivi des affaires: émission des lettres de crédit, réception de celles-ci couvrant la revente, suivi du bon déroulement de l'affaire, soit le chargement du bateau dans les délais prévus par les différentes lettres de crédit, suivi de la remise des documents, de la négociation des lettres de crédit couvrant la revente et, enfin, encaissement du montant lié à la vente et paiement du fournisseur. Toutefois, il devait également suivre l'évolution du financement et du risque de chaque opération ainsi que de la globalité des affaires conduites, s'occuper de la trésorerie et donner des instructions y relatives à la banque, gérer la facturation dans l'ensemble des opérations et vérifier aussi que les contrats de vente "soient conformes à ce qui est nécessaire pour une affaire particulière". Interrogé sur les activités du "bureau de Rome", F.________ a déclaré que D.________ ne travaillait plus pour ce bureau depuis le début de l'année 1998 et que son assistante était décédée "depuis plus d'une année" et n'avait pas été remplacée et que E.________ s'occupait toujours des "affaires de grains" pour ce bureau. II a encore expliqué que l'activité de X.________ Management était très réduite, étant donné qu'il n'y avait plus d'affaires pétrolières depuis juin 1999, que lui-même, dès cette époque, ne consacrait plus à cette société que 20 à 30% de son temps et, bien qu'il continuât à percevoir de celle-ci une pleine rémunération, qu'il consacrait le reste son temps à une société de services, détenue notamment par B.________, qui conseille des négociants en matières premières. II a enfin révélé que, sur le marché russe du pétrole, il était nécessaire de verser d'importantes commissions aux intervenants qui rendaient les affaires possibles, l'un d'eux étant C.________, à qui, sur instructions de A.________, il versait des montants importants en sus du prix payé à Y.________ S.A. pour les fournitures de pétrole. Parmi ces intervenants, il a nommé en outre D.________.
B.________ disposait de la procuration sur les comptes bancaires de X.________ Corporation auprès de la Banque W.________ S.A., de la U.________ Bank et de Banque Z.________ S.A. F.________ avait lui aussi une procuration sur le compte de la U.________ Bank. De plus, il a, sous sa seule signature, fait ouvrir, en date du 20 décembre 1996, un compte auprès de G.________ S.A. au nom de X.________ Corporation et signé de sa main le formulaire désignant A.________ comme bénéficiaire économique de ce compte. H.________ s'est vu conférer une procuration limitée sur le compte de X.________ Corporation auprès de la Banque W.________; ce document, daté du 27 octobre 1995, porte la signature de B.________. Sous la même signature, cette procuration a été annulée le 14 novembre 1996 et le nouveau document transmis par les soins de F.________. On note encore que C.________ a eu la signature sur le compte U.________ Bank précité jusqu'au 15 janvier 1996.
Le dossier contient de nombreux documents signés au nom et pour le compte de X.________ Corporation par F.________ et par H.________.
Outre la convention précitée entre D.________ et X.________ Corporation, plusieurs autres documents font apparaître une domici- liation de cette dernière chez Y.________ S.A. Un document daté du 26 mars 1996 communique à la Banque W.________ un changement d'adresse pour X.________ Corporation, la nouvelle adresse étant désormais celle de X.________ Management. Toutefois, un telex de la U.________ Bank daté du 7 juin 1996 est toujours adressé à X.________ Corporation "c/o Y.________" à l'attention de F.________. D'un telex de la U.________ Bank du 3 juin 1996, il résulte que le numéro de telex de Y.________ S.A. est xxxxxx et de la convention précitée que son numéro de fax est le ...... Par la suite, des documents seront reçus par F.________ sous ce même numéro de telex ou émis par lui toujours sous ce même numéro de telex mais sous un autre numéro de fax. Un telex de U.________ Bank du 1er juillet 1997 est adressé à Y.________ S.A. à l'attention de H.________ sous numéro yyyyyy avec copie conforme à F.________ sous numéro xxxxxx.
II résulte enfin du dossier que A.________ a effectué de nombreux et brefs séjours à Genève (notamment 16 fois en 1995, 19 fois en 1996, et 10 fois en 1997), mais ceux-ci ne coïncident jamais avec la date de conclusion, à Genève, des contrats d'achat avec Y.________ S.A., lesquels portent cependant sa signature.
B.
Par décision du 2 mars 1999, confirmée par décision sur réclamation du 20 janvier 2000, l'Administration fiscale cantonale du canton de Genève (ci-après: l'Administration fiscale cantonale), considérant que l'administration effective de X.________ Corporation était à Genève, a décidé d'assujettir celle-ci de manière illimitée à l'impôt fédéral direct, avec effet rétroactif au 1er janvier 1995.
X.________ Corporation a recouru auprès de la Commission cantonale de recours de l'impôt fédéral direct du canton de Genève (ci-après: la Commission de recours) qui, par décision du 5 décembre 2001, a annulé la décision attaquée et prononcé que X.________ Corporation n'était pas soumise à l'impôt fédéral direct, les indices sur lesquels l'Administration fiscale cantonale s'était fondée n'étant pas suffisants pour admettre la localisation à Genève de l'administration effective de X.________ Corporation.
L'Administration fiscale cantonale a recouru au Tribunal administratif du canton de Genève (ci-après: le Tribunal administratif) qui, par arrêt du 27 mai 2003, a admis le recours.
Ce Tribunal a considéré en substance que si, considérés isolément, es différents indices de l'activité ou de la présence de l'intimée à Genève n'étaient pas propres à démontrer qu'elle y aurait son administration effective, leur assemblage rendait en revanche cette thèse plus vraisemblable. Il a cité à cet égard les nombreux contrats négociés, en tout cas pour partie, par A.________, le contrôle de leur exécution effectué depuis Genève par des personnes disposant, en outre, d'importants pouvoirs sur les comptes bancaires ouverts à Genève au nom de l'intimée, le contrôle effectué par F.________ sur les contrats en cours de négociation. Il a considéré enfin que le rattachement à Genève était encore renforcé par le fait que l'intimée n'avait pas réussi à rendre vraisemblable que son administration effective serait localisée à Rome, d'où il résultait, en définitive, que le rattachement personnel genevois devait être retenu comme ayant été démontré avec un degré de vraisemblance suffisante.
C.
Agissant par la voie du recours de droit administratif, X.________ Corporation demande au Tribunal fédéral, sous suite de frais et dépens, d'annuler l'arrêt du Tribunal administratif du 27 mai 2003 et de confirmer la décision de la Commission cantonale de recours en matière d'impôt fédéral direct du 5 décembre 2001.
Le Tribunal administratif, sans formuler d'observations, déclare persister dans les termes et conclusions de son arrêt. L'Administration fiscale cantonale conclut au rejet du recours.
L'Administration fédérale des contributions se prononce dans le même sens et déclare faire siennes les considérations émises par l'Adminis tration fiscale cantonale.
Le Tribunal fédéral considère en droit:
1.
Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 129 I 173 consid. 1 p. 174, 129 II 225 consid. 1 p. 227 et la jurisprudence citée).
1.1 Déposé en temps utile et dans les formes prescrites par la loi contre une décision rendue par une autorité judiciaire statuant en dernière instance cantonale et fondée sur le droit public fédéral, le présent recours est recevable en vertu des art. 97 ss OJ, ainsi que de la règle particulière de l'art. 146 de la loi fédérale du 14 décembre 1990 sur l'impôt fédéral direct (ci-après: LIFD ou la loi sur l'impôt fédéral direct; RS 642.11), en vigueur depuis le 1er janvier 1995.
1.2 Conformément à l'art. 104 lettre a OJ, le recours de droit administratif peut être formé pour violation du droit fédéral, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation (ATF 128 II 145 consid. 1.2.1 p. 150). Le Tribunal fédéral revoit d'office l'application du droit fédéral qui englobe notamment les droits constitutionnels du citoyen (ATF 129 II 183 consid. 3.4 p. 188; 128 II 56 consid. 2b p. 60; 126 V 252 consid. 1a p. 254). Comme il n'est pas lié par les motifs que les parties invoquent, il peut admettre le recours pour d'autres raisons que celles avancées par le recourant ou, au contraire, confirmer l'arrêt attaqué pour d'autres motifs que ceux retenus par l'autorité intimée (art. 114 al. 1 in fine OJ; ATF 129 II 183 consid. 3.4 p. 188; 127 II 8 consid. 1b p. 12 , 264 consid. 1b p. 268; 125 II 497 consid. 1b/aa p. 500 et les arrêts cités).
En revanche, lorsque le recours est dirigé, comme en l'occurrence, contre l'arrêt d'une autorité judiciaire, le Tribunal fédéral est lié par les faits constatés dans l'arrêt, sauf s'ils sont manifestement inexacts ou incomplets ou s'ils ont été établis au mépris de règles essentielles de procédure (art. 104 lettre b et 105 al. 2 OJ; ATF 128 II 145 consid. 1.2.1 p. 150; 126 II 196 consid. 1 p. 198). En outre, le Tribunal fédéral ne peut pas revoir l'opportunité de l'arrêt entrepris, le droit fédéral ne prévoyant pas un tel examen en la matière (art. 104 lettre c ch. 3 OJ).
2.
Le Tribunal fédéral étant lié par les faits constatés dans l'arrêt attaqué (consid. 1.2; art. 105 al. 2 OJ), la possibilité d'alléguer des faits nouveaux ou de nouveaux moyens de preuve est très restreinte (ATF 125 II 217 consid. 3a p. 221; 124 II 409 consid. 3a p. 420; 121 II 97 consid. 1c p. 99; Fritz Gygi, Bundesverwaltungsrechtspflege, 2e éd., 1983, p. 286/287); seuls sont admissibles dans ce cas les preuves que l'autorité inférieure aurait dû retenir d'office et dont le défaut d'administration constitue une violation des règles essentielles de la procédure (ATF 124 II 409 consid. 3a p. 420; 121 II 97 consid. 1c p. 99).
La recourante a produit diverses pièces, à l'appui de son recours, qui toutes figuraient déjà au dossier du Tribunal administratif, à l'exception d'une, soit un extrait du Registre du commerce concernant X.________ Management au 27 juin 2003. Au vu de ce qui précède, cette nouvelle pièce produite par la recourante pour la première fois devant le Tribunal fédéral n'est pas recevable.
3.
3.1 Selon l'art. 50 LIFD, les personnes morales sont assujetties de manière illimitée à l'impôt en raison de leur rattachement personnel lorsqu'elles ont leur siège ou leur administration effective en Suisse. Ce second rattachement alternatif ne concerne que les sociétés ayant leur siège à l'étranger (StE 2002 B 91.3 no 3, 2A.196/2001)
Hormis l'arrêt précité, qui concernait une société suisse, le Tribunal fédéral n'a pas eu à se prononcer au sujet de ce second rattachement tel qu'il est consacré par l'art. 50 LIFD. II a eu, en revanche, à trancher à diverses reprises des conflits de double imposition intercantonale. Dans ce contexte, il a jugé que le lieu de l'administration effective se trouvait à l'endroit où la société avait le centre effectif et économique de son existence (ATF 54 I 301 consid. 2 p. 308), à l'endroit où est assurée la gestion qui, normalement, se déploie au siège de la société, à l'endroit où sont accomplis les actes qui, dans leur ensemble, servent à la réalisation du but statutaire (ATF 50 I 100 consid. 2 p. 103).
La doctrine (Peter Athanas/Stefan Widmer, in : Martin Zweifel/Peter Athanas, Kommentar zum schweizerischen Steuerrecht, I/2a, Bundesgesetz über die direkte Bundessteuer (DBG), n. 6 ss ad art. 50 LIFD, p. 553; Peter Athanas/Stefan Widmer, in : Martin Zweifel/Peter Athanas, Kommentar zum schweizerischen Steuerrecht, I/1, Bundesgesetz über die Harmonisierung der direkten Steuern der Kantone und Gemeinden (StHG), 2e éd., n. 28 ss ad art. 20 LHID, p. 320; Peter Locher, Einführung in das internationale Steuerrecht der Schweiz, 2e éd., p. 242; Peter Mäusli, Die Ansässigkeit von Gesellschaften im internationalen Steuerrecht, p. 66 ss) admet pour sa part que cette jurisprudence doit s'appliquer également s'agissant de l'administration effective au sens de l'art. 50 LIFD. La détermination du lieu de l'administration effective s'effectue à l'aide d'indices dont la résidence des organes directionnels de la société, le lieu où les opérations de gestion s'effectuent, voire celui où les documents sont conservés (Xavier Oberson, Droit fiscal suisse, 2e éd., p. 171). La doctrine définit l'administration effective comme la direction courante, notion qui s'oppose à une simple activité administrative d'exécution ainsi qu'à une activité des organes sociaux suprêmes de la société limitée soit à Ia prise des décisions fondamentales de principe, de caractère stratégique, soit au contrôle de la direction courante proprement dite. Elle ne considère comme nécessairement détermi- nants ni le lieu où se tiennent les séances du conseil d'administration ou les assemblées générales, ni le domicile des actionnaires. Enfin, lorsque cette activité de direction courante est exercée en plusieurs endroits, est déterminant celui où elle est déployée de manière prépondérante, celui où se situe son centre de gravité.
3.2 Il n'est en l'espèce pas contesté que l'administration effective ne se trouve en aucun cas localisée au siège statutaire de la recourante. La seule question qui se pose dès lors est de savoir si elle peut être considérée comme I'étant en Suisse.
La recourante soutient que toute ses activités commerciales (de « trading ») étaient le fait de son administrateur unique, A.________ qui, depuis Rome, prospectait les clients (en utilisant les services de D.________ pour le marché occidental), négociait et signait les contrats d'achat et de vente, en surveillait l'exécution et négociait les lignes de crédit avec les banques. L'activité du personnel de X.________ Management, société de service et d'ailleurs reconnue comme telle par les autorités fiscales genevoises, se bornerait au simple suivi administratif et financier.
Au vu des divers éléments du dossier, cette thèse n'est pas vraisemblable. II est exact que tous les contrats d'achat et de vente de pétrole figurant comme tels au dossier, respectivement énumérés dans des listes qui s'y trouvent, portent la signature de A.________. Toutefois, les contrats d'achat de pétrole de la recourante conclus avec Y.________ S.A. l'ont été à Genève, prévoient l'application du droit suisse et désignent comme compétents les tribunaux suisses. La recourante explique que cela n'a rien que de très naturel, dès lors que sa contrepartie, de surcroît partie venderesse, est une société suisse sise en Suisse. L'argumentation serait éventuellement convaincante s'il s'était par ailleurs avéré que, comme la recourante n'a cessé de le soutenir en procédure cantonale, Y.________ S.A. était une société totalement indépendante de X.________ Corporation. C'est une image totalement différente qui se dégage des divers éléments du dossier, lesquels font apparaître au contraire des liens multiples et de profondes imbrications, voire une véritable perméabilité entre les deux sociétés. Il est, à cet égard, tout à fait significatif que X.________ Corporation figure sur de nombreux documents avec la mention "c/o Y.________", dont un adressé à X.________ Corporation "c/o Y.________" et à l'attention de F.________ . Il est également notable que l'administrateur unique de Y.________ S.A. et de X.________ Management soit une seule et même personne, soit B.________, lequel, comme on va le voir, était sensiblement plus impliqué dans les opérations de direction courante de la recourante que celle-ci ne veut bien l'admettre. En outre, il est significatif que C.________, actionnaire majoritaire, puis unique de Y.________ S.A., dont A.________ avait été lui-même un temps actionnaire minoritaire, ait disposé de la signature sur un compte bancaire de X.________ Corporation. Il faut enfin relever que, de l'aveu même de la recourante, celle-ci est à nouveau domiciliée dans les locaux de Y.________ S.A.
La thèse d'une activité commerciale concentrée entre les seules mains de A.________ est démentie par la déposition de D.________ dans la procédure d'enquête pénale. Celui-ci a en effet déclaré qu'il était chargé, pour le compte de X.________ Corporation, de rechercher des acquéreurs pour du pétrole brut ou des produits dérivés, de préparer, rédiger et négocier des contrats avec l'acquéreur et d'en suivre l'exécution. Il a encore précisé qu'en ce qui concerne le marché de l'Est il n'avait pas participé à des négociations et n'avait pas vu A.________ y prendre part non plus. Il pensait que ces négociations se faisaient à Genève ou peut-être à Rome. Il n'avait pas eu le sentiment que A.________ fût un spécialiste en matière pétrolière. II résulte clairement de ces déclarations que, s'agissant des activités commerciales de X.________ Corporation déployées depuis l'Italie, D.________ exerçait une part importante, voire la plus importante, de la direction courante au sens défini ci-dessus (consid. 3.1). Tout porte à croire que l'autre partie des activités commerciales de X.________ Corporation s'exerçait depuis Genève selon un schéma semblable. II faut en effet rapprocher les déclarations de D.________ de celles faites, dans le même cadre, par B.________ et F.________. II en résulte que, contrairement à ce qu'affirme la recourante, ni l'un, ni l'autre ne sont dépourvus de compétence et d'expérience dans le domaine du négoce international et, plus particulièrement, du négoce international portant sur des produits pétroliers. B.________ a du reste indiqué que, lorsqu'il a quitté la Banque Z.________ S.A., une société pétrolière, qui était de ses clients lorsqu'il travaillait au service de cet établissement, l'avait "suivi". En outre, le premier contact entre B.________ et A.________ s'inscrivait dans la perspective du développement par celui-ci d'une société de trading pétrolier en Suisse. On sait aussi que B.________ avait eu, à la banque susmentionnée, divers clients de l'Est dans le secteur pétrolier.
Dans la description qu'il a faite des tâches qui lui incombaient, F.________ a distingué très clairement deux volets : le premier incluait des tâches similaires à celles qu'il accomplissait pour son employeur précédent, et qui peuvent effectivement être considérées comme relevant d'un simple suivi administratif et financier (déroule- ment au jour le jour d'opérations de crédits documentaires). Le deuxième volet de ses activités se situe à un niveau nettement plus élevé. Il s'agissait de suivre l'évolution du financement et du risque de chacune des différentes opérations ainsi que de celle de la globalité des affaires, de s'occuper de la trésorerie et donner des instructions y relatives à la banque, de gérer la facturation dans l'ensemble des opérations et vérifier aussi que les contrats de vente "soient conformes à ce qui est nécessaire pour une affaire particulière". Il n'est pas contestable que cette seconde catégorie de tâches ressortit au domaine des activités commerciales, par opposition à de simples opérations de pure exécution et de suivi administratif et, tout au moins pour certaines, à un niveau de direction courante.
Au vu de ces divers éléments, il est établi avec une suffisante vraisemblance qu'une partie au moins des opérations proprement commerciales et des opérations de direction courante de X.________ Corporation était effectuée depuis Genève. Une autre partie l'était, assurément, depuis Rome, s'agissant des activités déployées par D.________. Aux dires de celui-ci, les quantités qu'il a réussi à placer pendant la période où il a oeuvré pour le compte de la recourante a représenté de 2 à 3 millions de tonnes de produits pétroliers. Or, on sait que les quantités achetées à Y.________ S.A. durant cette même période ont représenté plus de 12 millions de tonnes; la part des activités commerciales de la recourante déployées en Italie ne saurait donc être qualifiée de prépondérante. Deux autres éléments achèvent de donner aux activités genevoises un caractère nettement prépondérant. II s'agit, d'une part, du fait que les contrats d'achat par X.________ Corporation à Y.________ S.A. ont été signés à Genève et, d'autre part, du fait que F.________ exerçait certaines tâches excédant nettement un simple suivi administratif et financier sur l'ensemble des opérations, soit également sur celles effectuées à partir de l'Italie. Pour ce qui est enfin des déplacements de A.________ à Genève, leur nombre et la brièveté des séjours effectués ne permet certes pas de retenir que celui-ci y exerçait d'importantes activités pour le compte de X.________ Corporation, comme le relevait justement la Commission de recours. Cette circonstance est précisément de nature à renforcer la thèse selon laquelle la part d'activités commerciales et de direction courante non localisée en Italie était exercée certes à Genève mais par d'autres que A.________.
Enfin, s'il est vrai que les activités pétrolières de X.________ Corporation en Suisse paraissent être au point mort depuis l'été 1999, il semble ne pas en aller très différemment en Italie depuis le départ de D.________ et le décès, en 1999, de son assistante qui n'a pas été remplacée. Cette circonstance n'est donc pas de nature à faire apparaître la répartition des activités commerciales et de direction courante entre Genève et Rome sous un jour différent, ni, partant, à avoir des incidences sur le sort du présent recours.
3.3 En définitive, le dossier fait apparaître un faisceau d'indices d'où il résulte avec une suffisante vraisemblance que, pour une part prépondérante, la direction courante de X.________ Corporation est exercée à Genève. En l'occurrence, le Tribunal fédéral ne peut s'écarter des faits constatés dans l'arrêt du Tribunal administratif que s'ils sont manifestement inexacts ou incomplets ou s'ils ont été établis au mépris de règles essentielles de procédure (cf. supra consid. 1.2). Les constatations qui précèdent permettent de dire que tel n'est pas le cas.
Inversement, la recourante a échoué à établir des faits propres à détruire cette vraisemblance. En confirmant l'assujettissement illimité de la recourante en application du rattachement de la direction effective, le Tribunal administratif n'a donc non seulement pas violé l'art. 50 LFID, mais il n'a pas non plus enfreint les règles sur la répartition du fardeau de la preuve, ainsi que la recourante le lui reproche également. En effet, Le Tribunal administratif a admis la réalité des faits tels que déterminés par l'Administration fiscale cantonale (cf. supra consid. 3.2). A cet égard, celle-ci a réuni de nombreux éléments allant dans le sens d'une administration effective de la recourante localisée à Genève et le Tribunal administratif a considéré que ce faisceau d'indices constituait une preuve suffisante. Il incombait alors à la recourante d'infirmer ces éléments par la preuve du contraire du moment que les faits établis, sur la base d'indices précis, étaient hautement vraisemblables (RDAF 1993 32 consid. 2b p. 35, 2A.299/1989; Archives 44 621 consid. 1b p. 623, P.524/1975 ; 39 284 consid. 3c p. 288). Or, la recourante s'est contentée de contester ces faits et n'a pas été en mesure de fournir de preuves les renversant ou permettant une autre interprétation. L'arrêt du Tribunal administratif est donc fondé sur une répartition correcte du fardeau de la preuve puisque celui-ci n'a pas mis ce fardeau à la charge de la recourante, mais à celle de l'Administration fiscale cantonale.
4.
II résulte de ce qui précède que le recours, entièrement mal fondé, doit être rejeté. Succombant, la recourante doit supporter un émolument judiciaire (art. 156 al. 1 OJ). II n'y a pas lieu d'allouer de dépens (art. 159 al. 1 OJ).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
1.
Le recours est rejeté.
2.
Un émolument judiciaire de 10'000 fr. est mis à la charge de la recourante.
3.
Le présent arrêt est communiqué en copie à la représentante de la recourante, à l'Administration fiscale cantonale et au Tribunal administratif du canton de Genève ainsi qu'à l'Administration fédérale des contributions, Division juridique de l'impôt fédéral direct.
Lausanne, le 4 décembre 2003
Au nom de la IIe Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
Le président: La greffière: