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Informationen zum Dokument  BGer 4A_576/2019  Materielle Begründung
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BGer 4A_576/2019 vom 03.02.2020
 
 
4A_576/2019
 
 
Arrêt du 3 février 2020
 
 
Ire Cour de droit civil
 
Composition
 
Mme la Juge fédérale Kiss, présidente.
 
Greffière Monti.
 
 
Participants à la procédure
 
A.________,
 
recourante,
 
contre
 
1. B.________,
 
2. Association C.________, en liquidation,
 
intimées.
 
Objet
 
capacité d'être partie; motivation du recours,
 
recours contre l'arrêt rendu le 30 octobre 2019 par la Chambre des prud'hommes de la Cour de justice du canton de Genève (C/18429/2018-5; CAPH/186/2019).
 
 
Considérant en fait et en droit:
 
1. A.________ a été liée à l'Association C.________ par un contrat de travail à durée limitée. B.________ était la présidente de cette personne morale sise à Genève; elle a été condamnée par ordonnance pénale du 19 mars 2015, notamment pour vol commis au préjudice de A.________. Cette dernière a été renvoyée à agir devant la justice civile pour ses éventuelles prétentions civiles.
 
2. Le 28 juillet 2016, A.________ a déposé une demande en paiement de 25'000 fr. contre B.________, par-devant le Tribunal des prud'hommes du canton de Genève. Cette juridiction est compétente pour connaître des litiges découlant d'un contrat de travail (art. 1 al. 1 let. a de la loi genevoise sur le Tribunal des prud'hommes, [LTPH; RS/GE E 3 10]).
 
La demanderesse a été déboutée par les deux instances cantonales. Celles-ci ont notamment constaté que la demanderesse avait conclu un contrat de travail avec l'association précitée; la défenderesse n'était redevable d'aucune prétention en lien avec ladite convention, à laquelle elle n'était pas personnellement partie.
 
Le recours interjeté au Tribunal fédéral a été jugé irrecevable en raison d'une motivation manifestement insuffisante.
 
3. L'association précitée a été dissoute par décision de l'assemblée générale prise le... février 2018. B.________ a été nommée liquidatrice.
 
4. Le 9 août 2018, A.________ a derechef saisi la juridiction prud'homale d'une action en paiement de 25'000 fr., dirigée cette fois contre l'association.
 
A la lumière des explications données en audience, le Tribunal des prud'hommes a constaté que la demanderesse prétendait à une indemnité de 10'500 fr. pour des objets volés, à une réparation du tort moral subi et à une participation au chiffre d'affaires de l'employeuse. Le Tribunal a condamné l'association au paiement de 560 fr. bruts pour le dernier poste, rejetant la demande au surplus.
 
Par arrêt du 30 octobre 2019, la Cour de justice a confirmé cette décision. Elle a notamment expliqué que B.________ avait agi à titre privé et en dehors de ses fonctions, de sorte que l'acte illicite de cet organe n'était pas imputable à l'association défenderesse; au demeurant, la demanderesse s'était bornée à donner une liste d'objets volés sans en détailler la valeur ni fournir des pièces justificatives suffisantes, de sorte que le dommage n'était pas suffisamment établi. Par ailleurs, les conditions requises pour réclamer à l'association employeuse une réparation du tort moral n'étaient pas réalisées. La demanderesse n'avait pas allégué quelle violation contractuelle aurait été commise à son encontre; elle n'établissait pas avoir subi une atteinte objectivement grave à sa personnalité.
 
5. A.________ a saisi le Tribunal fédéral d'un recours dirigé contre "Madame B.________ et l'Association C.________", à l'issue duquel elle conclut à "la condamnation de B.________, Présidente de C.________, conjointement et solidairement", respectivement au prononcé "d'un commandement de payer [...] la somme de CHF 25'000.- [...] à titre de dommages et intérêts ainsi que pour tort moral". Elle a produit une liasse de pièces à l'appui de son recours.
 
Par courrier du 29 novembre 2019, B.________ a fait savoir que l'association précitée avait été radiée le... novembre 2019 et a sollicité "le retrait de la procédure". Elle a joint un extrait du Registre du commerce à l'appui de sa missive.
 
Le 10 décembre 2019, la recourante a déposé une nouvelle écriture assortie de pièces dans laquelle elle indiquait notamment ne pas avoir l'intention de retirer son appel tant qu'elle n'aurait pas obtenu gain de cause.
 
Les intimées n'ont pas été invitées à se déterminer sur le recours.
 
 
6.
 
6.1. Le recours est dirigé contre une association qui a été radiée le...
 
Il s'agit d'un fait nouveau dont l'autorité de céans tient compte, puisqu'il a trait aux parties à la procédure. Les pièces nouvelles produites à l'appui d'un tel fait sont également recevables (BERNARD CORBOZ, in Commentaire de la LTF, 2 e éd. 2014, n° 21 ad art. 99 LTF; JOHANNA DORMANN, in Basler Kommentar, 3 e éd. 2018, n° 34a ad art. 99 LTF).
 
Se pose la question de savoir si l'association radiée du Registre du commerce a perdu sa capacité d'être partie. La recourante n'a pas fait état d'une demande de réinscription (cf. art. 164 al. 1 de l'Ordonnance sur le registre du commerce [ORC; RS 221.411]).
 
6.2. L'entité radiée est une association au sens des art. 60 ss CC. Celle-ci acquiert la personnalité juridique dès qu'elle exprime dans ses statuts la volonté d'être organisée corporativement (art. 60 al. 1 CC; cf. ATF 87 I 301 spéc. p. 304; STEPHANIE HRUBESCH-MILLAUER, in Schweizerische Zivilprozessordnung, [Brunner et alii] 2
 
La radiation de l'association au Registre du commerce entraîne-t-elle la perte de sa personnalité juridique? La doctrine répond généralement par la négative, en relevant que la personnalité s'acquiert indépendamment de l'inscription au Registre et se perd uniquement une fois la liquidation achevée, laquelle peut être postérieure à la radiation (MEIER-HAYOZ ET ALII, op. cit., § 6 n. 118 et § 20 n. 101; SCHERRER/BRÄGGER, op. cit., n° 5 ad art. 79 CC; J EANNERET/HARI, op. cit., n os 13-15 ad art. 76 CC et n° 7 ad art. 79 CC; BILEK/VON DER CRONE, Voraussetzungen und Kognition hinsichtlich der Wiedereintragung einer Gesellschaft, in RSDA 2006 p. 82; GUILLAUME VIANIN, L'inscription au registre du commerce et ses effets, 2000, p. 247; RIEMER, op. cit., n° 136 ad art. 76-79 CC).
 
La jurisprudence a précisément effectué une telle analyse à propos de la société en nom collectif, qui bénéficie de certains attributs de la personne morale et peut en particulier actionner et être actionnée en justice (art. 562 CO; cf. ATF 134 III 643 consid. 5.1). L'autorité de céans a ainsi jugé que si l'inscription de cette entité au Registre du commerce n'a qu'un effet déclaratif, tel est aussi le cas de la radiation. Malgré celle-ci, la société en nom collectif continue d'exister aussi longtemps que sa liquidation n'est pas terminée dans les faits. Partant, elle continue d'être partie en justice, nonobstant sa radiation, et de nouveaux procès peuvent être engagés pour ou contre elle (ATF 135 III 370 consid. 3.2.1; 81 II 358 consid. 1 p. 361; 59 II 53 consid. 2; TANJA DOMEJ, in Kurzkommentar ZPO, [Oberhammer et alii] 2 e éd. 2014, n° 6 ad art. 66 CPC; STAEHELIN/SCHWEIZER, in Kommentar zur Schweizerischen Zivilprozessordnung, [Sutter-Somm et alii] 3 e éd. 2016, n° 19 ad art. 66 CPC; DAVID RÜETSCHI, in Handelsregisterverordnung, [Siffert/Turin] 2013, n° 14 ad art. 164 ORC). Elle reste un sujet de poursuite et, comme tel, s'expose de par l'art. 40 al. 1 LP à la poursuite par voie de faillite pendant six mois à compter de la publication de sa radiation (ATF 135 III 370 consid. 3.2.3; cf. DOMENICO ACOCELLA, in Basler Kommentar, 2 e éd. 2010, n os 3 et 7 ad art. 40 LP; BENNO KRÜSI, in Kommentar zum Bundesgesetz über Schuldbetreibung und Konkurs, [Kren Kostkiewicz/Vock] 4 e éd. 2017, n os 7 s. ad art. 40 LP; INGRID JENT-SØRENSEN, in Kurzkommentar SchKG, 2e éd. 2014, n° 3 ad art. 40 LP).
 
Le raisonnement sous-tendant cette jurisprudence doit aussi valoir pour l'association qui, comme le soulignent les auteurs susmentionnés, ne perd sa personnalité juridique qu'une fois la liquidation achevée, indépendamment d'une éventuelle radiation au Registre du commerce. Aussi une telle radiation n'affecte-t-elle pas la capacité d'être partie dans le procès civil en cours. De même, la doctrine admet que l'association radiée reste un sujet de poursuite et s'expose, de par l'art. 40 al. 1 LP, à la poursuite par voie de faillite pendant six mois dès la publication de sa radiation (SCHERRER/BRÄGGER, op. cit., n° 6 ad art. 79 CC; RIEMER, op. cit., n° 143 ad art. 76-79 CC). La possibilité de demander une réinscription au Registre du commerce reste utile si, à l'issue dudit délai, toutes les opérations n'ont pas encore été accomplies (art. 164 al. 1 ORC; ATF 59 II 53 consid. 2 p. 61; KRÜSI, op. cit., n° 8 ad art. 40 LP; ACOCELLA, op. cit., n° 7 ad art. 40 LP).
 
6.3. Au vu de ce qui précède, l'association défenderesse n'a pas perdu sa capacité d'être partie, n'en déplaise à l'auteur de la réquisition de radiation adressée au Registre du commerce. Le simple fait d'être partie au procès civil en cours décrit ci-dessus atteste que la liquidation n'était pas achevée.
 
 
7.
 
7.1. Cela étant, l'article 42 LTF requiert que le recours adressé au Tribunal fédéral soit motivé (al. 1) et que les motifs exposent succinctement en quoi la décision attaquée viole le droit (al. 2). La partie recourante doit discuter les motifs de la décision attaquée et indiquer en quoi, de son point de vue, l'autorité précédente aurait méconnu le droit (ATF 140 III 86 consid. 2 p. 89). La motivation doit avoir un lien avec la décision attaquée: le recourant doit se déterminer au moins brièvement par rapport aux considérants de l'arrêt entrepris, en expliquant en quoi Sous réserve d'exceptions telles que celles évoquées ci-dessus (consid. 6.1), la production de pièces nouvelles est prohibée devant le Tribunal fédéral (art. 99 al. 1 LTF); il n'est pas possible de présenter des pièces que l'on a négligé de produire devant l'autorité précédente (ATF 136 III 123 consid. 4.4.3). De même, la prise de conclusions nouvelles est prohibée (art. 99 al. 2 LTF).
 
7.2. Le présent recours ne satisfait pas aux exigences précitées. A aucun moment, la recourante ne tente de contrer, ne serait-ce que par une brève argumentation, les considérants résumés ci-dessus ( La recourante semble se braquer sur le fait que son contrat de travail n'avait pas une durée limitée à un mois. Cet élément est cependant sans pertinence pour l'issue de la cause, ce qui constitue déjà un écueil en soi.
 
Pour le surplus, on soulignera que la production de pièces nouvelles n'est pas admissible. Quant à la mise à l'écart des pièces produites devant l'autorité précédente, la recourante n'explique pas en quoi celle-ci aurait enfreint le droit fédéral, ni ne contre l'argument alternatif selon lequel ces pièces étaient de toute façon dépourvues de pertinence, ce qui clôt toute discussion.
 
Enfin, en tant qu'elle prend désormais des conclusions contre la présidente et liquidatrice de l'association, la recourante se heurte à l'art. 99 al. 2 LTF.
 
8. En définitive, le recours est irrecevable en raison d'une motivation manifestement insuffisante, ce qui peut être constaté en la procédure simplifiée (art. 108 al. 1 let. b LTF).
 
Un émolument judiciaire de 300 fr. est mis à la charge de la recourante, qui succombe (art. 66 al. 1 LTF).
 
 
 Par ces motifs, la Présidente de la Ire Cour de droit civil prononce :
 
1. Le recours est irrecevable.
 
2. Un émolument judiciaire de 300 fr. est mis à la charge de la recourante.
 
3. Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour de justice du canton de Genève.
 
Lausanne, le 3 février 2020
 
Au nom de la Ire Cour de droit civil
 
du Tribunal fédéral suisse
 
La présidente: Kiss
 
La greffière: Monti
 
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