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Informationen zum Dokument  BGer 4A_443/2019  Materielle Begründung
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BGer 4A_443/2019 vom 20.01.2020
 
 
4A_443/2019
 
 
Arrêt du 20 janvier 2020
 
 
Ire Cour de droit civil
 
Composition
 
Mmes les juges Kiss, présidente, Niquille et May Canellas.
 
Greffier : M. Thélin.
 
 
Participants à la procédure
 
V.________ et
 
W.________,
 
représentées par Me Pascal Pétroz,
 
défenderesses et recourantes,
 
contre
 
Z.________,
 
demandeur et intimé.
 
Objet
 
bail à loyer; prolongation du contrat
 
recours contre l'arrêt rendu le 15 juillet 2019 par la Chambre des baux et loyers de la Cour de justice du canton de Genève
 
(C/17946/2017 ACJC/1072/2019).
 
 
Considérant en fait et en droit :
 
1. Dès le 1er septembre 2011, Z.________ a pris à bail une villa avec annexe sise dans la commune de Vandoeuvres; le loyer mensuel était fixé à 14'500 fr., frais accessoires en sus. Conclu pour une durée initiale de trois ans, le contrat était ensuite résiliable pour le 31 août de chaque année moyennant préavis de trois mois.
1
2. Le 3 mars 2017 et par l'entremise de leur régie, les bailleresses V.________ et W.________ ont déclaré résilier le contrat avec effet au 31 août suivant. Propriétaires de l'immeuble, elles affirmaient vouloir le vendre libre d'occupants. Le locataire a contesté ce congé par une requête à l'autorité de conciliation compétente.
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Le 9 mai 2017, le locataire a saisi la même autorité d'une deuxième requête dirigée contre les bailleresses. Il prétendait au remboursement de frais indument payés à hauteur de 566 fr.65.
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L'autorité de conciliation a tenu audience le 6 juin 2017. Les bailleresses ont alors reconnu que le congé était nul au regard de l'art. 266o CO parce que le locataire s'était marié, que la villa était devenue un logement familial selon l'art. 266m al. 1 CO, et que le congé n'avait pas été notifié séparément à l'épouse ainsi que l'exigeait l'art. 266n CO. Les bailleresses ont aussi acquiescé à la réclamation du locataire portant sur le remboursement de 566 fr.65.
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3. Le 14 juillet 2017, usant de formules officielles notifiées séparément au locataire et à son épouse, les bailleresses ont résilié le contrat avec effet au 31 août 2018; elles persistaient à vouloir vendre l'immeuble libre d'occupants.
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En temps utile, devant l'autorité de conciliation puis devant le Tribunal des baux et loyers du canton de Genève, Z.________ a ouvert action contre les bailleresses; il concluait principalement à l'annulation du congé et subsidiairement à la prolongation du contrat pour une durée de quatre ans. Il se prévalait notamment du moyen d'annulation du congé prévu par l'art. 271a al. 1 let. e CO, relatif à la protection du locataire durant un laps de trois ans après la fin d'une procédure de conciliation.
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Les défenderesses ont conclu au rejet de l'action.
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Le tribunal s'est prononcé le 1er octobre 2018. Il a constaté la validité du congé et accordé au demandeur une prolongation unique d'une durée de deux ans, venant à échéance le 31 août 2020.
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4. Le demandeur a appelé de ce jugement. Sans plus contester la validité du congé, il réclamait une prolongation de quatre ans ou, subsidiairement, une deuxième prolongation de deux ans.
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La Chambre des baux et loyers de la Cour de justice a statué le 15 juillet 2019. Elle a accueilli l'appel et accordé au demandeur une prolongation de quatre ans venant à échéance le 31 août 2022.
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5. Agissant par la voie du recours en matière civile, les défenderesses requièrent le Tribunal fédéral de confirmer le jugement du Tribunal des baux et loyers.
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Procédant personnellement, le demandeur conclut principalement à l'irrecevabilité du recours et subsidiairement à son rejet.
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6. Sous réserve des exigences concernant la motivation des griefs, les conditions de recevabilité du recours en matière civile sont en principe satisfaites, notamment à raison de la valeur litigieuse; celle-ci correspond au loyer de la villa durant deux ans, du 1er septembre 2020 au 31 août 2022.
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7. Le recours en matière civile est recevable pour violation du droit fédéral (art. 95 let. a LTF). Le Tribunal fédéral doit conduire son raisonnement juridique sur la base des faits constatés dans la décision attaquée (art. 105 al. 1 LTF); il peut toutefois compléter ou rectifier même d'office les constatations de fait qui se révèlent manifestement inexactes, c'est-à-dire arbitraires aux termes de l'art. 9 Cst. (art. 105 al. 2 LTF; ATF 141 IV 249 consid. 1.3.1 p. 253; 140 III 264 consid. 2.3 p. 266; 137 I 58 consid. 4.1.2 p. 62). La partie recourante est autorisée à attaquer des constatations de fait ainsi irrégulières si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF). Il lui incombe alors d'indiquer de façon précise en quoi les constatations critiquées sont contraires au droit ou entachées d'une erreur indiscutable; les critiques dites appellatoires, tendant simplement à une nouvelle appréciation des preuves, sont irrecevables (ATF 133 II 249 consid. 1.4.3 p. 254; voir aussi ATF 141 IV 249 consid. 1.3.1 p. 253; 140 III 264 consid. 2.3 p. 266; 137 I 58 consid. 4.1.2 p. 62).
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8. La contestation soumise au Tribunal fédéral porte exclusivement sur la prolongation du contrat de bail à loyer conclu entre les parties, prolongation qui n'est plus litigieuse dans son principe mais seulement dans sa durée: les défenderesses réclament qu'elle soit limitée à deux ans, conformément au jugement du Tribunal des baux et loyers, alors que l'arrêt de la Cour de justice l'étend à quatre ans.
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9. Aux termes des art. 272 al. 1 et 272b al. 1 CO, le locataire peut demander la prolongation d'un bail d'habitation pour une durée de quatre ans au maximum, lorsque la fin du contrat aurait pour lui des conséquences pénibles et que les intérêts du bailleur ne les justifient pas. Dans cette limite de temps, le juge peut accorder une ou deux prolongations. Le juge apprécie librement, selon les règles du droit et de l'équité, s'il y a lieu de prolonger le bail et, dans l'affirmative, pour quelle durée. Il doit procéder à la pesée des intérêts en présence et tenir compte du but d'une prolongation, consistant à donner du temps au locataire pour trouver des locaux de remplacement. Il lui incombe de prendre en considération tous les éléments du cas particulier, soit notamment la durée du bail, la situation personnelle et financière de chaque partie, leur comportement, ainsi que l'état du marché locatif local (art. 272 al. 2 CO; ATF 136 III 190 consid. 6 p. 195; 135 III 121 consid. 2 p. 123; 125 III 226 consid. 4b p. 230). Le juge tient compte de la situation présente au moment de son prononcé, telle qu'elle ressort des faits allégués et prouvés conformément aux règles du procès civil (arrêt 4A_128/2019 du 3 juillet 2019, consid. 5.1).
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Le Tribunal fédéral ne contrôle qu'avec retenue une décision de dernière instance cantonale prise dans l'exercice du pouvoir d'appréciation. Le tribunal intervient lorsque le prononcé s'écarte sans raison des règles établies en la matière par la doctrine et la jurisprudence, ou lorsqu'il repose sur des faits qui, dans le cas particulier, ne devaient jouer aucun rôle, ou encore lorsqu'il méconnaît des éléments qui auraient absolument dû être pris en considération; en outre, le Tribunal fédéral redresse les décisions d'appréciation qui aboutissent à un résultat manifestement injuste ou à une iniquité choquante (ATF 143 III 261 consid. 4.2.5 i.f. p. 269; 138 III 252 consid. 2.1 p. 254; 137 III 303 consid. 2.1.1 p. 305).
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10. La Cour de justice porte une appréciation nuancée sur la durée du contrat conclu en 2011, « qui sans être longue n'était pas particulièrement brève ». La Cour constate que le demandeur habite la villa avec son épouse; elle constate aussi que leurs sept enfants, « qui ne sont certes plus en bas âge » et dont trois « étudient à l'étranger », l'habitent aussi, au moins par intermittence. Selon la Cour, il n'est « pas aisé » de trouver un autre logement de grandeur comparable. Le demandeur a d'ailleurs fait des recherches, restées infructueuses. Les défenderesses sont établies dans un pays lointain et elles n'ont actuellement plus d'attaches avec la région genevoise; elles sont l'une et l'autre atteintes dans leur santé et c'est pourquoi elles ne voyagent plus. Elles souhaitent donc vendre l'immeuble. Cette vente ne revêt toutefois, selon la Cour, aucune urgence; les défenderesses ont certes allégué qu'elles subissent des frais médicaux importants, à couvrir par le produit de la vente, mais elles n'ont pas offert de prouver ce fait. Pour le surplus, la prolongation du contrat ne leur cause aucun préjudice particulier. En définitive, la Cour juge la prolongation de deux ans « trop brève » et elle l'étend à quatre ans.
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11. A l'appui du recours en matière civile, les défenderesses affirment qu'il n'existe pas de pénurie sur le marché locatif local des logements comparables à la villa concernée. Elles omettent cependant d'indiquer précisément quelles sont les constatations de fait auxquelles la Cour de justice aurait dû parvenir, et sur quelles bases, au sujet de ce marché. Elles affirment qu'en raison de l'âge et de la situation des sept enfants, le demandeur n'a pas besoin d'un logement lui permettant d'offrir une chambre individuelle à chacun d'eux. Il est établi que le frère du demandeur est « régisseur ». Selon les défenderesses, ce fait devrait aider le demandeur à trouver un logement de remplacement; elles font grief à la Cour de justice d'avoir écarté cet élément, au contraire retenu par le Tribunal des baux et loyers. A la durée de quatre ans allouée par la Cour, les défenderesses ajoutent le laps écoulé entre le premier congé signifié le 3 mars 2017 et la fin du contrat provoquée par le deuxième congé, le 31 août 2018; il en résulte à leur avis une prolongation illégale de « presque six ans ». Enfin, les défenderesses font grief à la Cour de n'avoir pas constaté que leur santé se dégrade inexorablement en raison du caractère évolutif de leur maladie, et qu'il est pour elles urgent de vendre la villa afin de couvrir les frais de traitement médical. Sur ces deux points aussi, toutefois, elles omettent de désigner précisément les preuves topiques et régulièrement offertes que la Cour a éventuellement méconnues.
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Sur des points importants, en particulier sur la prétendue urgence de vendre la villa pour financer un traitement médical, l'argumentation ainsi développée diverge des constatations de fait qui lient le Tribunal fédéral selon l'art. 105 al. 1 LTF. Les défenderesses tiennent ces constatations pour arbitraires mais elles ne mettent en évidence, dans le mémoire de recours, aucun élément apte à justifier une éventuelle rectification en application des art. 97 al. 1 et 105 al. 2 LTF. L'argumentation est à cet égard irrecevable.
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Les défenderesses ne peuvent pas arguer utilement du congé signifié le 3 mars 2017 dont elles ont reconnu la nullité. Il est au demeurant vrai que plus de treize mois se sont écoulés entre le deuxième congé et la fin du contrat. La validité de ce congé était toutefois contestée et incertaine; elle est demeurée litigieuse jusqu'au jugement du 1er octobre 2018. Le demandeur n'a pas prolongé cette contestation au delà de ce jugement et il ne semble donc pas avoir procédé de manière téméraire ni dilatoire. Pour le surplus, les défenderesse opposent simplement leur propre appréciation, avec celle du Tribunal des baux et loyers, à celle de la Cour de justice. Or, bien que la prolongation d'une durée de quatre ans corresponde au maximum légal et semble importante au regard de circonstances de la cause, cette appréciation-ci ne présente aucune anomalie caractérisée et propre à justifier une intervention du Tribunal fédéral. Cette appréciation ne saurait être invalidée au seul motif qu'une prolongation de deux ans pourrait aussi être jugée suffisante. A cet égard, l'argumentation présentée est donc recevable mais privée de fondement, ce qui entraîne le rejet du recours.
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12. A titre de parties qui succombent, les défenderesses doivent acquitter l'émolument à percevoir par le Tribunal fédéral. Il n'est pas alloué de dépens au demandeur car celui-ci n'assume pas de frais d'avocat.
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Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
 
1. Le recours est rejeté, dans la mesure où il est recevable.
 
2. Les défenderesses acquitteront un émolument judiciaire de 6'000 francs.
 
3. Il n'est pas alloué de dépens.
 
4. Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour de justice du canton de Genève.
 
Lausanne, le 20 janvier 2020
 
Au nom de la Ire Cour de droit civil
 
du Tribunal fédéral suisse
 
La présidente : Kiss
 
Le greffier : Thélin
 
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