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Informationen zum Dokument  BGer 8C_7/2018  Materielle Begründung
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BGer 8C_7/2018 vom 22.02.2019
 
 
8C_7/2018
 
 
Arrêt du 22 février 2019
 
 
Ire Cour de droit social
 
Composition
 
MM. les Juges fédéraux Maillard, Président,
 
Frésard et Wirthlin.
 
Greffière : Mme von Zwehl.
 
 
Participants à la procédure
 
Helvetia Compagnie Suisse d'Assurances SA, Dufourstrasse 40, 9001 St-Gall,
 
recourante,
 
contre
 
A.________,
 
représentée par Me Marc Mathey-Doret, avocat,
 
intimée.
 
Objet
 
Assurance-accidents (rente d'invalidité; révision),
 
recours contre le jugement de la Chambre des assurances sociales de la Cour de justice de la République et canton de Genève du 20 novembre 2017 (A/662/2017 ATAS/1037/2017).
 
 
Faits :
 
 
A.
 
A.a. Le 24 novembre 2003, A.________, née en 1968, alors enceinte de cinq mois, a été renversée sur un passage piétons par un cycliste qui n'a pas respecté le feu rouge. Cet accident lui a occasionné un traumatisme crânio-cérébral avec perte de connaissance, un trait de fracture du rocher gauche et une fracture de l'écaille temporale gauche, une contusion hémorragique frontale droite, une cupulolithiase gauche, une anosmie, des troubles visuels et une déviation de la mâchoire du côté gauche. A.________ travaillait à l'époque en qualité de secrétaire 2 au service de l'Etat de Genève à plein temps. L'assureur-accidents, la Nationale Suisse Assurances SA (ci-après: la Nationale), a pris en charge le cas.
1
A.b. A partir du 1er septembre 2004, l'assurée a pu reprendre son travail à 60 %. La Nationale a confié une expertise pluridisciplinaire au Centre d'Expertise Médicale (CEMed), laquelle a été réalisée les 25 octobre et 8 novembre 2005. Dans leur rapport du 17 janvier 2006 et son complément du 21 mars 2006, les médecins du CEMed ont constaté que l'évolution des troubles était globalement favorable mais qu'il persistait un syndrome post-commotionnel modéré, quelques cervico-scapulalgies post-traumatiques et vertiges positionnels. L'examen neurologique était sans anomalie objective en dehors de l'anosmie, qui était définitive. L'examen neuropsychologique était également dans la norme. L'assurée se plaignait néanmoins de difficultés fréquemment décrites après un TCC (fatigabilité et irritabilité accrue; légères difficultés attentionnelles) susceptibles d'interférer avec une reprise professionnelle à plein temps. Selon les experts, au vu de la gravité des atteintes initiales, une incapacité de travail de 40 % paraissait justifiée pour une période de cinq ans à partir de la survenance de l'accident. Si l'incapacité devait se poursuivre au-delà cette date, une nouvelle appréciation par une expertise était indiquée. L'atteinte à l'intégrité s'élevait à 25 % (anosmie 15 %; syndrome post-commotionnel et cervicalgies 10 %). Le docteur B.________, ophtalmologue, a évalué les séquelles ophtalmologiques à 6 % (rapport du 3 novembre 2006).
2
A.c. Sur cette base, la Nationale a alloué à l'assurée une indemnité pour atteinte à l'intégrité de 31 % ainsi qu'une rente d'invalidité LAA de 40 % avec effet au 1er décembre 2005 (décisions des 7 mai et 11 juin 2007). De son côté, l'Office cantonal genevois de l'assurance-invalidité (ci-après: l'office AI) l'a mise au bénéfice d'un quart de rente d'invalidité dès le 1er mai 2005 (décision du 24 avril 2007).
3
A.d. En septembre 2007, A.________ a annoncé à l'office AI une aggravation de son état de santé. Une déclaration de rechute indiquant une capacité de travail réduite à 20 % depuis le 19 septembre 2007 a également été transmise à la Nationale. L'assurée a produit un rapport du docteur C.________, spécialiste en neurochirurgie, faisant état d'une augmentation des migraines et d'une situation d'épuisement justifiant une capacité de travail exigible de 50 %.
4
A.e. A la demande de la Nationale, le docteur D.________, du CEMed, a réexaminé l'assurée. Ce médecin n'a pas retenu de dégradation significative de la capacité de travail, tout en suggérant la mise en place d'un traitement spécifique pour les maux de tête (rapport du 19 mars 2008). Le docteur C.________ a exprimé son désaccord avec le point de vue de son confrère (rapport du 30 mai 2008). L'office AI, pour sa part, a refusé d'entrer en matière sur la demande de révision présentée par A.________. Ce refus, contesté par la prénommée au moyen notamment d'un rapport de la doctoresse E.________, psychiatre, a donné lieu à une procédure contentieuse (voir les arrêts du Tribunal fédéral des 1er mars 2010 [cause 9C_537/2009], 7 septembre 2012 [9C_205/2012] et 26 mai 2015 [9C_140/2015]). Cette procédure a eu pour résultat la mise en oeuvre par l'office AI d'une expertise pluridisciplinaire à la Policlinique médicale universitaire (PMU). Dans l'intervalle, la Nationale a accepté de surseoir à rendre une décision formelle.
5
A.f. Dans leur rapport d'expertise du 8 septembre 2015, les médecins de la PMU ont posé les diagnostics (avec influence sur la capacité de travail) suivants: syndrome post-commotionnel après TCC le 24 novembre 2003 (F07. 2); trouble dépressif récurrent, épisode actuel au décours (F33.0); céphalées d'origine multifactorielle dans le cadre du syndrome post-commotionnel et à caractère migraineux (G43.9). L'évaluation neuropsychologique était dans la norme. En conclusion, les experts de la PMU, suivant en cela l'avis de la doctoresse E.________, ont admis une aggravation de l'état psychique liée à un état dépressif entre septembre 2007 et la mi-année 2009 avec une incapacité de travail 60 %; après cette date, ils ont retenu que la limitation de la capacité de travail était de l'ordre de 20 à 30 % au maximum en raison du syndrome post-commotionnel (fatigabilité, irritabilité, intolérance au stress).
6
A.g. Se fondant sur cette expertise, Helvetia Compagnie Suisse d'Assurances SA (qui a repris le portefeuille LAA de la Nationale; ci-après: Helvetia) a retenu que l'état de santé de A.________ s'était amélioré et qu'elle disposait désormais d'une capacité de travail de 80 % dans sa profession d'employée de bureau. Par décision du 17 mai 2016, confirmée sur opposition le 27 janvier 2017, elle a dès lors réduit la rente d'invalidité LAA de 40 % à 20 % avec effet au 1er juin 2016.
7
B. Par jugement du 20 novembre 2017, la Chambre des assurances sociales de la Cour de Justice de la République et canton de Genève, a admis le recours de l'assurée en ce sens qu'elle a annulé la décision sur opposition du 27 janvier 2017 et condamné Helvetia à reprendre le versement de la rente d'invalidité à 40 % à partir du 1er juin 2016.
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C. Helvetia interjette un recours en matière de droit public, en concluant à l'annulation du jugement cantonal et à la confirmation de sa décision sur opposition. Elle demande également l'effet suspensif.
9
A.________ conclut au rejet de la requête d'effet suspensif et du recours; elle sollicite l'assistance judiciaire. L'Office fédéral de la santé publique ne s'est pas déterminé.
10
D. Par ordonnance du 5 mars 2018, le juge instructeur a admis la requête d'effet suspensif.
11
 
Considérant en droit :
 
1. Le recours est dirigé contre un arrêt final (art. 90 LTF) rendu en matière de droit public (art. 82 ss LTF) par une autorité cantonale de dernière instance (art. 86 al. 1 let. d LTF). Il a été déposé dans le délai (art. 100 LTF) et la forme (art. 42 LTF) prévus par la loi. Il est donc recevable.
12
 
Erwägung 2
 
2.1. Le litige porte sur la réduction de la rente LAA allouée à l'intimée depuis le 1er décembre 2005 dans le contexte d'une procédure de révision (art. 17 LPGA [RS 830.1]).
13
2.2. Lorsque la décision qui fait l'objet d'un recours concerne l'octroi ou le refus de prestations en espèces de l'assurance-accidents, le Tribunal fédéral n'est pas lié par les faits établis par la juridiction précédente (art. 105 al. 3 LTF).
14
3. En vertu de l'art. 17 al. 1 LPGA, si le taux d'invalidité du bénéficiaire de la rente subit une modification notable, la rente est, d'office ou sur demande, révisée pour l'avenir, à savoir augmentée ou réduite en conséquence, ou encore supprimée. Tout changement important des circonstances propre à influencer le degré d'invalidité, et donc le droit à la rente, peut motiver une révision. Pour déterminer si un tel changement s'est produit, il y a lieu de comparer, d'une part, les faits tels qu'ils se présentaient au moment de la dernière décision entrée en force reposant sur un examen matériel du droit à la rente avec une constatation des faits pertinents, une appréciation des preuves et une comparaison des revenus conformes au droit, et d'autre part, les circonstances prévalant à l'époque de la décision litigieuse (ATF 133 V 108 consid. 5 p. 110 ss). Peut en particulier justifier une révision, une modification sensible de l'état de santé ou des conséquences sur la capacité de gain d'un état de santé resté en soi le même (ATF 130 V 343 consid. 3.5 p. 349 s. et les arrêts cités). En revanche, une simple appréciation différente d'un état de fait, qui, pour l'essentiel, est demeuré inchangé n'appelle pas à une révision au sens de l'art. 17 al. 1 LPGA (ATF 141 V 9 consid. 2.3 p. 10 s. et les références).
15
 
Erwägung 4
 
4.1. En substance, après avoir comparé les constatations faites par les médecins du CEMEd à celles des médecins de la PMU, la cour cantonale a nié l'existence d'une modification sensible de l'état de santé de l'assurée entre ces deux expertises. Sauf pour la dysthymie, les diagnostics posés étaient similaires; les plaintes rapportées par l'assurée également, hormis le fait que celle-ci se plaignait d'une augmentation des céphalées depuis 2007, tandis qu'elle s'était accoutumée à l'anosmie et ne présentait plus d'acouphènes ou de douleurs à la mâchoire. Selon le docteur F.________, de la PMU, il n'y avait aucune modification - en particulier aucune aggravation - sur le plan neurologique par rapport aux examens précédents. Ces constats étaient confirmés par l'expertise privée du docteur G.________ produite en cours d'instance par l'assurée. Ce médecin indiquait que si certains symptômes liés aux diagnostics - restés inchangés - avaient moins d'impact sur la santé de l'assurée en raison d'un phénomène de tolérance et d'adaptation, d'autres s'étaient accentués, en particulier les céphalées, de sorte que, dans l'ensemble, il n'y avait pas eu de modification importante de son état de santé. Aussi bien, la cour cantonale a-t-elle considéré que l'expertise des médecins de la PMU ne faisait qu'évaluer différemment la capacité de travail de l'assurée en fonction d'une situation médicale globalement inchangée.
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4.2. La recourante conteste ce point de vue. Les experts du CEMed n'avaient pas fixé l'incapacité de travail de l'assurée de manière définitive, mais sur une durée de cinq ans compte tenu d'une situation en cours d'évolution. Par ailleurs, l'examen neurologique et neuropsychologique réalisé à la PMU ne confirmait pas les plaintes subjectives de l'assurée puisqu'il montrait des résultats normaux. Il n'y avait donc aucune raison de ne pas suivre les conclusions des experts de la PMU, selon lesquelles l'intimée était à même de mettre à profit une capacité de travail dans son activité habituelle de secrétaire avec un rendement de 80 %. A cela s'ajoutait que l'assurée avait participé à des courses à pied et effectué le trajet de Genève à Lausanne en voiture sans problèmes, ce qui demandait de l'endurance et de la concentration. Tout ces éléments mettaient en évidence que son état s'était amélioré. Quant au docteur G.________, neurochirurgien, il se fondait essentiellement sur les données subjectives. Son opinion ne pouvait l'emporter sur le rapport de synthèse des médecins de la PMU.
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4.3. En l'occurrence et quoi qu'en dise la recourante, il ressort explicitement de l'expertise de la PMU que l'état de santé de l'intimée ne s'est pas sensiblement modifié aussi bien au plan neurologique (voir le consilium du docteur F.________, neurologue) que neuropsychologique (les résultats étaient dans les normes en 2005 et en 2015). Dans les deux expertises (du CEMed et de la PMU), le syndrome post-commotionnel est le diagnostic principal qui fonde une limitation de la capacité de travail de l'assurée. A ce titre, les médecins du CEMed ont retenu une diminution de rendement de 40 % alors que les médecins de la PMU l'ont estimée entre 20 et 30 %. Certes, les médecins du CEMed avaient précisé qu'on pouvait espérer une augmentation ultérieure de la capacité de travail, probablement jusqu'à un taux d'activité de 70 à 80 %, grâce à l'accoutumance et une amélioration spontanée de l'état neurologique de l'assurée (voir la page 29 de leur rapport). Il n'en reste pas moins que cette dernière a présenté un état d'épuisement en 2007 et qu'à l'issue de leurs examens, les médecins de la PMU n'ont pas fait état d'une diminution des symptômes associés au syndrome post-commotionnel (fatigabilité accrue, irritabilité), mais ont au contraire mentionné qu'ils étaient toujours présents et susceptibles d'entraîner une baisse de rendement dans toute activité professionnelle (voir la page 25 de leur rapport). En définitive, les experts de la PMU n'ont fait qu'apprécier différemment les répercussions du diagnostic précité comme cela ressort d'ailleurs de leur remarque, selon laquelle la reconnaissance d'une incapacité de travail de 40 % leur semblait "généreuse" compte tenu de l'absence d'anomalie objective déjà constatée à l'époque. Cela ne suffit pas pour justifier une révision au sens de l'art. 17 LPGA. On ne saurait non plus voir un élément significatif à cet égard dans le fait que l'assurée peut conduire une voiture ou qu'elle a participé une fois à une course à pied.
18
4.4. Il s'ensuit que le jugement entrepris n'est pas critiquable et le recours mal fondé.
19
5. Vu l'issue du litige, les frais judiciaires sont mis à la charge de la recourante (art. 66 al. 1 LTF). Par ailleurs, l'intimée a droit à une indemnité de dépens (art. 68 al. 1 LTF), de sorte que sa requête d'assistance judiciaire est sans objet.
20
 
 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
 
1. Le recours est rejeté.
 
2. Les frais judiciaires, arrêtés à 800 fr., sont mis à la charge de la recourante.
 
3. La recourante versera à l'intimée la somme de 2'800 fr. à titre de dépens pour la procédure fédérale.
 
4. Le présent arrêt est communiqué aux parties, à la Chambre des assurances sociales de la Cour de justice de la République et canton de Genève et à l'Office fédéral de la santé publique.
 
Lucerne, le 22 février 2019
 
Au nom de la Ire Cour de droit social
 
du Tribunal fédéral suisse
 
Le Président : Maillard
 
La Greffière : von Zwehl
 
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