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Informationen zum Dokument  BGer 1B_23/2019  Materielle Begründung
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BGer 1B_23/2019 vom 28.01.2019
 
 
1B_23/2019
 
 
Arrêt du 28 janvier 2019
 
 
Ire Cour de droit public
 
Composition
 
MM. les Juges fédéraux Chaix, Président,
 
Merkli et Muschietti.
 
Greffière : Mme Kropf.
 
 
Participants à la procédure
 
recourant,
 
contre
 
Ministère public du canton de Vaud,
 
avenue de Longemalle 1, 1020 Renens.
 
Objet
 
Détention pour des motifs de sûreté,
 
recours contre la décision du Président de la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud du 28 décembre 2018 (468 PE15.019495-CED/PBR).
 
 
Faits :
 
A. Par jugement du 21 novembre 2017, le Tribunal correctionnel de l'arrondissement de Lausanne a reconnu A.________ coupable de recel par métier, d'escroquerie et de blanchiment d'argent par métier; le prévenu a été condamné à une peine privative de liberté de quatre ans et demi. L'appel intenté contre ce prononcé a été rejeté le 16 mai 2018 par la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal vaudois. Par arrêt du 31 octobre 2018, le Tribunal fédéral a admis partiellement le recours formé contre cet arrêt, retenant une période plus courte s'agissant de l'infraction d'escroquerie et libérant le prévenu du chef de prévention de blanchiment d'argent; la cause a été renvoyée au Tribunal cantonal, celui-ci devant notamment statuer à nouveau sur la peine (cause 6B_880/2018).
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A la suite de ce renvoi, la Cour d'appel pénale a, le 20 décembre 2018, reconnu A.________ coupable d'escroquerie et de recel par métier (cf. II/I du dispositif). Elle l'a condamné à une peine privative de liberté de trois ans et demi, sous déduction des jours de détention avant jugement subis (cf ch. II/II et III du dispositif). Le maintien en détention pour des motifs de sûreté du prévenu a été ordonné (cf. ch. IV).
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Le 21 décembre 2018, A.________ a demandé sa libération, requête rejetée le 28 suivant par le Président de la Cour d'appel pénale.
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B. Par acte du 11 janvier 2019, A.________ forme un recours en matière pénale contre cet arrêt, concluant à son annulation et à sa libération immédiate. A titre subsidiaire, le recourant demande sa remise en liberté moyennant le prononcé des mesures de substitution suivantes : dépôt de ses documents d'identité - suisses et marocaines - au Tribunal cantonal, l'assignation à demeurer à son domicile [...], assortie du port d'un bracelet électronique muni d'un GPS. Le recourant sollicite également l'octroi de l'assistance judiciaire.
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L'autorité précédente s'est référée à sa décision, relevant que l'arrêt au fond avait été envoyé pour notification aux parties le 15 janvier 2019. Quant au Ministère public, il a renoncé à déposer des déterminations.
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Considérant en droit :
 
1. Le recours en matière pénale (art. 78 al. 1 LTF) est ouvert contre une décision relative à la détention provisoire ou pour des motifs de sûreté au sens des art. 212 ss CPP. Selon l'art. 81 al. 1 let. a et b ch. 1 LTF, le recourant, prévenu détenu, a qualité pour recourir. Le recours a été formé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) contre une décision rendue par une autorité statuant en tant qu'instance cantonale unique (art. 80 al. 2 in fine LTF et 233 2ème phrase CPP) et les conclusions présentées sont recevables au regard de l'art. 107 al. 2 LTF. Il y a donc lieu d'entrer en matière.
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2. Le recourant ne conteste pas l'existence de soupçons suffisants (art. 221 al. 1 CPP). Il reproche en revanche à l'autorité précédente d'avoir considéré qu'il existerait un risque de fuite, respectivement que celui-ci ne pourrait pas être pallié par des mesures de substitution, ainsi qu'un danger de réitération. S'il y a lieu de douter de l'intensité, voire de l'existence même des risques retenus, ces questions peuvent en l'état rester indécises.
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En effet, le recourant se prévaut également en substance d'une violation du principe de proportionnalité eu égard à la durée de la détention avant jugement subie; il soutient en particulier qu'il serait en droit d'obtenir sa libération conditionnelle, ayant effectué plus des deux tiers de la peine prévisible.
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2.1. L'art. 212 al. 3 CPP prévoit que la détention provisoire et la détention pour des motifs de sûreté ne doivent pas durer plus longtemps que la peine privative de liberté prévisible.
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Le juge peut dès lors maintenir la détention provisoire ou pour des motifs de sûreté aussi longtemps qu'elle n'est pas très proche de la durée de la peine privative de liberté à laquelle il faut s'attendre concrètement en cas de condamnation. Il convient d'accorder une attention particulière à cette limite, car il y a lieu de veiller à ce que les autorités de jugement ne prennent pas en considération dans la fixation de la peine la durée de la détention avant jugement à imputer selon l'art. 51 CP. Afin d'éviter d'empiéter sur les compétences du juge du fond, le juge de la détention ne tient en principe pas compte de la possibilité éventuelle de l'octroi, par l'autorité de jugement, d'un sursis, d'un sursis partiel ou d'une libération conditionnelle au sens de l'art. 86 al. 1 CP (ATF 143 IV 168 consid. 5.1 p. 173); pour entrer en considération sur cette dernière hypothèse, son octroi doit être d'emblée évident (arrêt 1B_82/2013 du 27 mars 2013 consid. 3.2 in Pra 2013 74 543; sur l'éventuelle application de l'art. 86 CP dans des cas de détention provisoire ou pour motifs de sûreté, cf. arrêt 1B_363/2015 du 30 octobre 2015 consid. 2.4 et 2.5). Lorsque le détenu a déjà été jugé en première instance - respectivement en appel -, ce prononcé constitue un indice important quant à la peine susceptible de devoir être finalement exécutée (ATF 143 IV 168 consid. 5.1 p. 173).
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Le Tribunal fédéral a en particulier considéré dans deux affaires où le pronostic au sens de l'art. 86 al. 1 CP était incertain que le principe de proportionnalité était tout de même violé lorsque la durée de la détention avant jugement dépassait les trois quarts de la peine encourue et que celle-ci, vu le stade de la procédure, ne pouvait être que confirmée ou diminuée (arrêts 1P.256/2000 du 12 mai 2000 consid. 2d et 1P.219/2000 du 20 avril 2000 consid. 2c et d, jurisprudence rappelée récemment dans l'arrêt 1B_566/2018 du 21 janvier 2019 consid. 4.2).
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2.2. En l'occurrence, le recourant se trouve en détention avant jugement depuis le 14 janvier 2016 (cf. l'arrêt de la Cour d'appel pénale du 16 mai 2018 ad 1.2 p. 10; art. 105 al. 2 LTF).
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Le 20 décembre 2018, la Cour d'appel pénale l'a condamné à une peine privative de liberté de trois ans et demi (soit par simplification, 42 mois = [3 ans * 12 mois] + 6 mois). Si ce jugement devait devenir définitif, notamment sur ce point, il apparaît que le recourant aurait déjà effectué les trois quarts de cette peine (31 mois et demi [¾ de 42 mois]). En effet, au jour de l'arrêt attaqué, le recourant a passé 35 mois et 14 jours en détention avant jugement. Faute d'indication, notamment de la part du Ministère public quant à ses intentions (arrêt 1B_78/2016 du 16 mars 2016 consid. 2.3), rien ne permet dans le cas d'espèce de considérer, même sous l'angle de la vraisemblance, que ce magistrat entendrait contester la peine prononcée par la Cour d'appel pénale - qui statuait sur renvoi du Tribunal fédéral - et donc que la durée de la privation de liberté ordonnée pourrait être augmentée.
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Au regard de ces considérations et vu la jurisprudence susmentionnée, peu importe donc qu'un pronostic favorable au sens de l'art. 86 CP soit incertain. On peut au demeurant douter de l'appréciation retenue à cet égard par l'autorité précédente, qui ne semble en particulier pas prendre en compte le rapport du 19 décembre 2018 du Service pénitentiaire sur le comportement du recourant en prison.
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Vu la durée de la détention provisoire subie dans le cas d'espèce qui dépasse clairement les trois quarts de la peine prononcée en appel, le maintien en détention pour des motifs de sûreté du recourant viole ainsi le principe de proportionnalité (art. 212 al. 3 CPP).
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3. Il s'ensuit que le recours est admis. La libération immédiate du recourant est ordonnée, à la charge du Ministère public vaudois d'organiser sans délai les modalités de celle-ci.
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Le recourant a demandé l'assistance judiciaire. Vu l'issue du litige, cette requête est sans objet. Il n'y a pas lieu de percevoir de frais judiciaires (art. 66 al. 4 LTF). Le recourant, qui obtient gain de cause avec l'assistance d'un avocat, a droit à des dépens à la charge du canton de Vaud (art. 68 al. 1 LTF).
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 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
 
1. Le recours est admis. La décision du 28 décembre 2018 du Président de la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal vaudois est annulée.
 
2. La libération immédiate du recourant est ordonnée, à charge du Ministère public vaudois d'en organiser sans délai les modalités.
 
3. La requête d'assistance judiciaire est sans objet.
 
4. Il n'est pas perçu de frais judiciaires.
 
5. Une indemnité de dépens, fixée à 2'000 fr., est allouée à la mandataire du recourant, à la charge du canton de Vaud.
 
6. Le présent arrêt est communiqué à la mandataire du recourant, au Ministère public du canton de Vaud, au Président de la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud et à l'Office d'exécution des peines du Service pénitentiaire du canton de Vaud.
 
Lausanne, le 28 janvier 2019
 
Au nom de la Ire Cour de droit public
 
du Tribunal fédéral suisse
 
Le Président : Chaix
 
La Greffière : Kropf
 
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