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Informationen zum Dokument  BGer 6B_763/2016  Materielle Begründung
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BGer 6B_763/2016 vom 07.12.2016
 
{T 0/2}
 
6B_763/2016
 
 
Arrêt du 7 décembre 2016
 
 
Cour de droit pénal
 
Composition
 
MM. et Mme les Juges fédéraux Denys, Président, Jacquemoud-Rossari et Oberholzer.
 
Greffière : Mme Musy.
 
 
Participants à la procédure
 
X.________, représenté par Me Mathias Keller, avocat,
 
recourant,
 
contre
 
Ministère public central du canton de Vaud,
 
intimé.
 
Objet
 
Déduction d'une peine privative de liberté de la durée d'un placement ordonné à titre provisionnel (art. 32 DPMin), violation du droit d'être entendu, arbitraire,
 
recours contre le jugement de la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud du 12 mai 2016.
 
 
Faits :
 
A. Par jugement du 3 février 2016, le Tribunal des mineurs du canton de Vaud a constaté que X.________, né le *** 1997, s'était rendu coupable de lésions corporelles simples qualifiées, vol, dommages à la propriété, faux dans les certificats, mutinerie de détenus et contravention à la LStup. Il l'a condamné à 5 mois de privation de liberté, sous déduction de 12 jours de détention avant jugement.
1
B. Par jugement du 12 mai 2016, la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal vaudois a rejeté l'appel formé par X.________, confirmant, en particulier, la peine de 5 mois de privation de liberté sous déduction de 12 jours de détention avant jugement, soit 5 jours de détention provisoire et 7 jours en consignation stricte effectués dans le cadre du placement provisionnel. La cour cantonale n'a, en revanche, pas imputé 359 jours (366 de placement total moins la déduction de 7 jours) de placement provisionnel en milieu fermé, dont 32 jours d'évasion.
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C. X.________ recourt en matière pénale au Tribunal fédéral contre ce jugement, concluant avec suite de frais, principalement, à sa réforme en ce sens que 339 jours de détention avant jugement (366 jours de placement moins 32 jours d'évasion, ajoutés à 5 jours de détention provisoire) sont imputés sur sa peine privative de liberté, qui a ainsi déjà été entièrement exécutée. A titre subsidiaire, il demande le renvoi de la cause à la cour cantonale pour nouvelle décision au sens des considérants. X.________ requiert, par ailleurs, le bénéfice de l'assistance judiciaire.
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D. Invités à se déterminer sur le recours, la Cour d'appel pénale y a renoncé, se référant aux considérants du jugement entrepris, et le Ministère public a conclu au rejet du recours. Le recourant a répliqué.
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Considérant en droit :
 
1. Invoquant une violation de l'art. 32 al. 3 DPMin, le recourant reproche aux juges cantonaux d'avoir retenu que la durée du placement provisionnel ne devait pas être automatiquement déduite de la privation de liberté infligée mais qu'ils disposaient d'un pouvoir d'appréciation en la matière. En outre, il fait grief à l'autorité précédente de ne pas avoir considéré son placement provisionnel en milieu fermé au Foyer A.________ comme de la détention avant jugement au sens de l'art. 110 al. 7 CP et de ne pas avoir imputé sa durée sur la peine qui lui a été infligée, conformément à l'art. 51 CP.
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1.1. La cour cantonale a jugé, en se référant à l'ATF 137 IV 7, que les mesures de protection ordonnées à titre provisionnel, comme le placement, ne devaient pas être assimilées à la détention avant jugement visée par les art. 110 al. 7 et 51 CP. Elles ne devaient pas automatiquement être imputées sur la privation de liberté lorsque le but n'avait pas été atteint, dès lors qu'il appartenait à l'autorité de jugement de trancher la question de savoir si l'exécution de tout ou partie de la privation de liberté devait ou non être ordonnée. Or, en l'occurrence, le placement, qui avait principalement pour but de permettre au recourant de préparer son avenir et de faire cesser sa consommation de stupéfiants et la commission d'infractions, avait à l'évidence échoué, ce qui n'était pas contesté par l'intéressé. Le recourant n'était pas preneur de la mesure, car il n'avançait pas dans la construction de projets d'avenir et peinait à prendre ses responsabilités et à respecter les règles de base. En outre, les faits les plus graves réprimés par le jugement de première instance, à savoir une évasion violente commise en compagnie de quatre autres résidents et à la suite de laquelle une éducatrice et un agent de sécurité avaient été blessés, s'étaient déroulés dans le strict cadre du placement concerné, et ce après huit mois de mesure. La cour cantonale en a conclu que l'autorité de première instance avait, à juste titre, refusé de déduire de la peine infligée au recourant la durée de son placement provisionnel au sein du Foyer A.________, sous réserve des 7 jours passés en consignation stricte.
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1.2. Conformément à l'art. 32 DPMin, s'il est mis fin au placement parce qu'il a atteint son objectif, la privation de liberté n'est plus exécutée (al. 2). S'il est mis fin au placement pour un autre motif, l'autorité de jugement décide si la privation de liberté doit être exécutée et dans quelle mesure elle doit l'être. En pareil cas, la durée du placement est imputée sur la privation de liberté (al. 3). Cette norme s'applique aussi au placement ordonné à titre provisionnel (ATF 137 IV 7 consid. 1.6.2 p. 11; arrêt 6B_173/2015 du 6 septembre 2016 consid. 2 destiné à la publication).
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Dans l'arrêt 6B_173/2015 précité, le Tribunal fédéral s'est penché sur la question de savoir si l'exécution d'un placement provisionnel au sens de l'art. 15 DPMin devait être imputée sur la peine privative de liberté. Il a constaté que dans l'arrêt publié aux ATF 137 IV 7, l'application par analogie des art. 51 et 110 al. 7 CP, qui aurait, dans tous les cas, imposé au juge, au moment de fixer la peine, de statuer sur l'imputation de la privation de liberté résultant du placement provisionnel, avait été exclue. Cependant, cet arrêt ne réglait pas la question de savoir à quelles conditions et dans quelle mesure la durée d'un placement provisionnel devait être imputée sur la peine privative de liberté susceptible d'être exécutée ensuite de l'échec de cette mesure, mais uniquement celle de savoir à quel moment devait intervenir la décision sur l'imputation. Examinant dès lors ce point dans l'arrêt 6B_173/2015, le Tribunal fédéral a relevé que le droit pénal des mineurs entré en vigueur le 1er janvier 2007 consacrait, à l'instar du Code pénal pour les adultes, le système dualiste dans lequel, dans la règle, en plus d'une mesure, une peine devait être prononcée si le mineur avait agi de manière coupable (art. 11 al. 1 DPMin). Si, en droit pénal des mineurs, la peine elle-même visait prioritairement l'éducation et l'amendement dans la perspective de favoriser le développement du mineur, soit la prévention spéciale, et si, sous cet angle, la délimitation entre exécution des peines privatives de liberté et des mesures était moins nette qu'en droit pénal ordinaire, une approche différente de celle du droit pénal ordinaire quant à l'imputation ne se justifiait pas. Le placement en milieu fermé au sens de l'art. 15 al. 2 DPMin entraînait une restriction importante à la liberté personnelle, notamment de mouvement, du mineur. Sous cet angle, la situation n'était pas fondamentalement différente de celle d'une mesure institutionnelle du droit pénal des adultes, exécutée en milieu fermé lorsqu'il existait un risque de fuite ou de nouvelles infractions (cf. art. 59 al. 3 CP). En cas de levée d'une telle mesure, notamment lorsqu'elle apparaissait vouée à l'échec, l'art. 62c al. 2 première phrase CP prévoyait que si la durée de la privation de liberté entraînée par la mesure était inférieure à celle de la peine privative de liberté suspendue, le reste de la peine était exécuté. En d'autres termes, la durée de la privation de liberté résultant de la mesure devait, en principe, être imputée sur la peine, sans égard au motif pour lequel la mesure avait pris fin. L'art. 32 al. 3 deuxième phrase DPMin traduisant, en droit pénal des mineurs, la même conséquence du système dualiste, il n'y avait aucune raison de donner à cette norme une interprétation distincte de celle de l'art. 62c al. 2 première phrase CP. Le Tribunal fédéral a donc posé le principe de l'imputation du placement provisionnel d'un mineur sur la durée d'une peine privative de liberté (arrêt 6B_173/2015 précité consid. 2.2 - 2.3).
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Cela fait, le Tribunal fédéral a examiné la question de savoir quelle devait être l'ampleur de l'imputation. Il a retenu que la fraction imputable de la durée de la privation de liberté résultant de l'exécution de la mesure devait être déterminée en fonction de différents facteurs englobant notamment l'importance de la privation de liberté en résultant (soit les conditions effectives d'exécution de la mesure), les perspectives d'amendement de l'intéressé ainsi que les causes de l'échec de la mesure, attendu que lorsque l'échec du placement résultait du refus de toute coopération, le mineur ne devait pas en être récompensé par une imputation intégrale de la durée de la mesure (arrêt 6B_173/2015 précité consid. 2.4).
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1.2.1. En l'espèce, le recourant a subi 5 jours de détention provisoire, lesquels ont été intégralement imputés et ne sont donc pas litigieux.
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En ce qui concerne le placement, il découle de ce qui précède que, contrairement à ce que soutient le recourant, sa durée ne doit pas être automatiquement déduite de la peine dans son intégralité. Afin de déterminer l'ampleur de l'imputation, il était pertinent de relever, comme l'a fait la cour cantonale, que l'échec de la mesure était imputable au comportement du recourant, qui n'en était pas preneur. Les 32 jours de liberté qu'il a obtenus grâce à son évasion, en plus du fait qu'ils ne sauraient être pris en considération dans l'imputation car le recourant n'a pas exécuté la mesure pendant ce laps de temps, ont eu pour effet d'alléger les contraintes liées au placement en régime fermé, à tout le moins pour la période suivant cette évasion. Enfin, s'agissant des perspectives d'amendement de l'intéressé, la cour cantonale a observé que le recourant avait commis des infractions pénales dans le cadre du placement concerné, et ce après huit mois de mesure.
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En revanche, la cour cantonale n'a pas du tout examiné les conditions effectives du placement. A cet égard, le recourant se plaint d'arbitraire (art. 9 Cst.) au motif que des faits pertinents ont été omis (art. 97 al. 1 et 105 al. 2 LTF). Il fait valoir qu'il avait été placé dans le secteur fermé bbb, lequel constitue le régime le plus sévère du Foyer A.________, que, sous ce régime, les effets personnels susceptibles d'être remis étaient très limités (en particulier, les ordinateurs, téléviseurs, consoles de jeux, appareils photographiques, les moyens de communication et les supports de données étaient interdits) et que les visites des proches étaient limitées à une visite toutes les trois semaines. La cour cantonale n'a pas examiné la réalité et la portée de ces faits, pourtant dûment allégués devant elle. Dans la mesure où l'importance de la privation de liberté résultant de la mesure est pertinente s'agissant de déterminer l'ampleur de l'imputation du placement sur la peine, c'est en violation de l'interdiction de l'arbitraire que la cour cantonale a omis d'établir les faits concernant les conditions effectives du placement (art. 97 al. 1 LTF). De surcroît, en focalisant son analyse sur le mauvais comportement du recourant et en omettant ainsi de prendre en compte l'importance de la restriction de liberté subie par celui-ci, l'autorité précédente a appliqué l'art. 32 DPMin de manière inadmissible.
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1.2.2. Par ailleurs, la cour cantonale a rejeté la requête de réquisition de preuve du recourant tendant à la production d'un rapport du Foyer A.________ relatif aux conditions d'exécution de son placement provisionnel. Elle s'est limitée à constater que la requête ne répondait pas aux conditions de l'art. 389 CPP, sans préciser en quoi ces conditions n'étaient pas remplies. Dénuée de toute motivation, cette décision viole le droit d'être entendu du recourant (art. 29 al. 2 Cst. et 3 al. 2 let. c CPP). Le recours est donc également admis sur ce point et il appartiendra à la cour cantonale, statuant sur renvoi, de motiver le refus de la réquisition de preuve formulée par le recourant ou, à l'inverse, d'admettre ladite réquisition, selon qu'elle s'estime, en vertu de son pouvoir d'appréciation, suffisamment renseignée ou non sur les conditions d'exécution du placement.
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2. Sur le vu de ce qui précède, le recours est admis et la cause renvoyée à la cour cantonale pour qu'elle rende une nouvelle décision relative à l'imputation de la durée du placement provisionnel du recourant sur sa peine, après avoir instruit et apprécié les conditions effectives de son placement, qu'elle pondérera avec les autres critères pertinents (causes de l'échec de la mesure, perspectives d'amendement de l'intéressé).
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Le canton de Vaud sera dispensé des frais (art. 66 al. 4 LTF). Il versera en revanche au recourant une indemnité de dépens pour la procédure devant le Tribunal fédéral (art. 68 al. 2 LTF). La requête d'assistance judiciaire devient ainsi sans objet.
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 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
 
1. Le recours est admis, le jugement attaqué annulé et la cause renvoyée à l'autorité cantonale pour nouvelle décision.
 
2. Il n'est pas perçu de frais judiciaires.
 
3. Le canton de Vaud versera en mains du conseil du recourant une indemnité de 3000 fr. à titre de dépens.
 
4. Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud.
 
Lausanne, le 7 décembre 2016
 
Au nom de la Cour de droit pénal
 
du Tribunal fédéral suisse
 
Le Président : Denys
 
La Greffière : Musy
 
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