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Informationen zum Dokument  BGer 5A_298/2015  Materielle Begründung
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BGer 5A_298/2015 vom 30.09.2015
 
{T 0/2}
 
5A_298/2015
 
 
Arrêt du 30 septembre 2015
 
 
IIe Cour de droit civil
 
Composition
 
MM. les Juges fédéraux von Werdt, Président,
 
Marazzi et Bovey.
 
Greffière : Mme Mairot.
 
 
Participants à la procédure
 
A.A.________,
 
représenté par Me Marc Oederlin, avocat,
 
recourant,
 
contre
 
B.A.________,
 
représentée par Me Magda Kulik, avocate,
 
intimée.
 
Objet
 
mesures protectrices de l'union conjugale (contribution d'entretien),
 
recours contre l'arrêt de la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève du 6 mars 2015.
 
 
Faits :
 
A. A.A.________, né en 1963, et B.A._______, née en 1960, tous deux de nationalité suisse, se sont mariés le 3 février 1994 à Cologny (Genève). Deux enfants sont issus de cette union: C.________, née le 23 avril 1997 et D.________, née le 10 août 2001.
1
B. Par jugement du 5 août 2014, le Tribunal de première instance de Genève, statuant sur mesures protectrices de l'union conjugale, a notamment autorisé les époux à vivre séparés, attribué à la mère la garde des enfants, réservé au père un droit de visite usuel, attribué à l'épouse la jouissance exclusive du logement familial et ordonné au mari de le quitter dans un certain délai, enfin, condamné celui-ci à payer en faveur de ses filles, allocations familiales en sus, dès l'expiration d'un délai d'un mois à compter du prononcé du jugement, des contributions d'entretien d'un montant de 2'250 fr. par mois pour la cadette, respectivement de 2'000 fr. par mois pour l'aînée, jusqu'à la majorité de cette dernière, voire jusqu'à 25 ans en cas d'études sérieuses.
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C. Par acte posté le 14 avril 2015, le mari exerce un recours en matière civile au Tribunal fédéral contre l'arrêt du 6 mars 2015. Il conclut principalement à ce qu'il soit constaté qu'il ne doit aucune contribution d'entretien à l'intimée, l'arrêt querellé étant confirmé pour le surplus. Subsidiairement, il demande l'annulation de cet arrêt et le renvoi de la cause à l'autorité cantonale pour nouvelle décision dans le sens des considérants.
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D. Par ordonnance du 30 avril 2015, le Président de la cour de céans a refusé l'effet suspensif au recours.
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Considérant en droit :
 
 
Erwägung 1
 
1.1. Le présent recours a été déposé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) et dans la forme légale (art. 42 LTF), contre une décision finale (art. 90 LTF; ATF 134 III 426 consid. 2.2; 133 III 393 consid. 4) rendue en matière civile (art. 72 al. 1 LTF; ATF 133 III 393 consid. 2) par une autorité cantonale supérieure statuant en dernière instance et sur recours (art. 75 al. 1 et 2 LTF). Le litige porte sur le versement d'une contribution à l'entretien de l'épouse durant la séparation des époux, à savoir une cause de nature pécuniaire, dont la valeur litigieuse est supérieure à 30'000 fr. (art. 51 al. 1 let. a et al. 4, 74 al. 1 let. b LTF). Le recourant a en outre pris part à la procédure devant l'autorité précédente (art. 76 al. 1 let. a LTF) et, ayant succombé dans ses conclusions, a un intérêt à l'annulation ou à la modification de la décision attaquée (art. 76 al. 1 let. b LTF) Le recours en matière civile est donc recevable au regard des dispositions qui précèdent.
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1.2. Dès lors que la décision attaquée porte sur des mesures protectrices de l'union conjugale, lesquelles sont considérées comme des mesures provisionnelles au sens de l'art. 98 LTF (ATF 133 III 393), seule peut être invoquée la violation de droits constitutionnels. Le Tribunal fédéral n'examine de tels griefs que s'ils ont été invoqués et motivés ("principe d'allégation", art. 106 al. 2 LTF), à savoir expressément soulevés et exposés de manière claire et détaillée (ATF 134 I 83 consid. 3.2 et les références). Le recourant qui se plaint de la violation d'un droit fondamental ne peut donc se borner à critiquer la décision attaquée comme il le ferait en instance d'appel, où l'autorité de recours jouit d'une libre cognition; il ne peut, en particulier, se contenter d'opposer sa thèse à celle de l'autorité cantonale, mais doit démontrer ses allégations par une argumentation précise (ATF 134 II 349 consid. 3; 133 II 396 consid. 3.2). Les critiques de nature appellatoire sont irrecevables (ATF 139 II 404 consid. 10.1 et les arrêts cités).
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1.3. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits constatés dans la décision attaquée (art. 105 al. 1 LTF). Dans l'hypothèse d'un recours soumis à l'art. 98 LTF, le recourant ne peut obtenir la rectification ou le complètement des constatations de fait que s'il démontre la violation de droits constitutionnels par l'autorité cantonale (ATF 133 III 585 consid. 4.1). Le Tribunal fédéral se montre réservé en ce qui concerne l'appréciation des preuves et la constatation des faits, vu le large pouvoir qu'il reconnaît en la matière à l'autorité cantonale (ATF 120 Ia 31 consid. 4b; 118 Ia 28 consid. 1b; 104 Ia 381 consid. 9 et les références). Il n'intervient, pour violation de l'art. 9 Cst., que si le juge du fait n'a manifestement pas compris le sens et la portée d'un moyen de preuve, a omis sans motifs objectifs de tenir compte de preuves pertinentes ou a opéré, sur la base des éléments recueillis, des déductions insoutenables (ATF 137 I 58 consid. 4.1.2; 134 V 53 consid. 4.3 et les références); encore faut-il que la correction du vice soit susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF). Cette retenue est d'autant plus grande lorsque, comme ici, le juge n'examine la cause que d'une manière sommaire et provisoire (ATF 130 III 321 consid. 3.3).
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2. Se référant aux art. 9 Cst. et 272 CPC, le recourant soutient que l'autorité cantonale a arbitrairement établi les faits en arrêtant sa charge fiscale mensuelle à 1'321 fr. et celle de l'intimée à 1'570 fr. Il reproche aux juges précédents d'avoir faussement déduit de ses revenus un montant de 51'000 fr. correspondant aux contributions d'entretien versées pour ses deux filles durant un an (2'250 fr. + 2'000 fr. = 4'250 fr. x 12). Selon lui, il a commencé à verser ces contributions à partir de septembre 2014, en sorte que cette année-là, il n'a payé que 17'000 fr. à ce titre (4'250 fr. x 4). En outre, sa fille aînée ayant atteint l'âge de 18 ans le 23 avril 2015, les contributions versées en sa faveur ne pourraient plus être déduites à partir de cette date. En tenant compte, à l'instar de la cour cantonale, d'un revenu annuel net de 134'480 fr. 50 et de primes d'assurance-maladie de 6'335 fr. 40, ses impôts mensuels, estimés au moyen de la calculette en ligne mise à disposition par l'administration fiscale cantonale, seraient ainsi de 2'303 fr. en 2014 et de 1'773 fr. en 2015. Cette inadvertance manifeste aurait aussi une incidence directe sur le calcul des impôts dus par l'intimée, dont la charge fiscale s'élèverait à 1'180 fr. par mois. L'arbitraire dans l'établissement de la situation financière des parties aurait dès lors conduit la Cour de justice à accorder une contribution d'entretien à l'intimée alors que celle-ci disposerait, après couverture de ses charges, d'un solde disponible plus élevé que le sien.
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Erwägung 2.1
 
2.1.1. L'art. 33 al. 1 let. c de la loi fédérale du 14 décembre 1990 sur l'impôt fédéral direct (LIFD; RS 642.11) prévoit que sont déduits du revenu la pension alimentaire versée au conjoint divorcé, séparé judiciairement ou de fait, ainsi que les contributions d'entretien versées à l'un des parents pour les enfants sur lesquels il a l'autorité parentale, à l'exclusion toutefois des prestations versées en exécution d'une obligation d'entretien ou d'assistance fondée sur le droit de la famille. L'art. 23 let. f LIFD précise que sont imposables la pension alimentaire obtenue pour lui-même par le contribuable divorcé ou séparé judiciairement ou de fait, ainsi que les contributions d'entretien obtenues par l'un des parents pour les enfants sur lesquels il a l'autorité parentale. Quant à l'art. 24 let. e LIFD, il mentionne que sont exonérées de l'impôt les prestations versées en exécution d'une obligation fondée sur le droit de la famille, à l'exception des pensions alimentaires et des contributions d'entretien mentionnées à l'art. 23 let. f LIFD.
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2.1.2. En matière de mesures protectrices de l'union conjugale, la maxime inquisitoire est applicable (art. 272 CPC). Cette disposition ne prévoit que la maxime inquisitoire limitée (dite aussi simple ou atténuée ou encore sociale), qui - contrairement aux questions relatives aux enfants, pour lesquelles la maxime inquisitoire illimitée (art. 296 al. 1 CPC) et, en sus, la maxime d'office (art. 296 al. 2 CPC) sont applicables - n'oblige pas le juge à rechercher lui-même l'état de fait pertinent. La maxime inquisitoire ne dispense pas les parties de collaborer activement à la procédure et d'étayer leurs propres thèses; il leur incombe de renseigner le juge sur les faits de la cause et de lui indiquer les moyens de preuve disponibles (ATF 128 III 411 consid. 3.2.1 et les citations; arrêt 5A_608/2014 du 16 décembre 2014 consid. 4.2.1).
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2.2. En l'espèce, l'autorité cantonale a considéré que la charge fiscale du mari pouvait être évaluée à 1'321 fr. par mois, selon le simulateur de calcul figurant sur le site internet de l'État de Genève. Cette somme tenait compte d'un salaire annuel net de 134'480 fr. 50, de primes d'assurance-maladie de 527 fr. 95 par mois sur un an et des contributions à l'entretien des enfants, d'un montant total de 4'250 fr. par mois ou 51'000 fr. par an. La Cour de justice a cependant retenu que le père avait versé les contributions d'entretien dues pour ses filles à partir de septembre 2014, conformément au jugement de première instance. Il est par ailleurs établi que l'aînée des enfants est devenue majeure le 23 avril 2015. Dans ces conditions, la constatation selon laquelle le mari peut déduire de son revenu, sur le plan fiscal, un montant de 51'000 fr. par an au titre des contributions d'entretien pour ses enfants apparaît insoutenable. En effet, les sommes effectivement versées en 2014, et par conséquent déductibles, représentent au plus 17'000 fr. (4'250 fr. de septembre à décembre). De surcroît, à compter du 23 avril 2015, les pensions versées en faveur de sa fille aînée ne peuvent plus être déduites (cf. supra consid. 2.1.1).
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3. Selon le recourant, la Cour de justice aurait en outre arbitrairement appliqué les art. 163 et 176 al. 1 ch. 1 CC en allouant une contribution d'entretien à l'épouse sans examiner la possibilité de lui imputer un revenu hypothétique, au motif que la situation financière favorable du couple était suffisante pour couvrir les frais supplémentaires occasionnés par la vie séparée.
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3.1. Lors de la fixation de la contribution d'entretien selon l'art. 176 al. 1 ch. 1 CC, le juge doit prendre comme point de départ l'accord exprès ou tacite des époux sur la répartition des tâches et des ressources entre eux, l'art. 163 CC demeurant la cause de l'obligation d'entretien réciproque des époux même lorsqu'on ne peut plus sérieusement compter sur une reprise de la vie commune (ATF 138 III 97 consid. 2.2; 137 III 385 consid. 3.1). Cette disposition prévoit que mari et femme contribuent, chacun selon ses facultés, à l'entretien convenable de la famille (al. 1), qu'ils conviennent de la façon dont chacun apporte sa contribution [...] (al. 2) et que, ce faisant, ils tiennent compte des besoins de l'union conjugale et de leur situation personnelle (al. 3).
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Un conjoint peut se voir imputer un revenu hypothétique, pour autant qu'il puisse gagner plus que son revenu effectif en faisant preuve de bonne volonté et en accomplissant l'effort que l'on peut raisonnablement exiger de lui; il s'agit là d'une question de droit. L'obtention d'un tel revenu doit être effectivement possible, condition qui relève du fait (ATF 137 III 102 consid. 4.2.2.2; 128 III 4 consid. 4c/bb). Si le juge entend exiger de lui la prise ou la reprise d'une activité lucrative, il doit généralement lui accorder un délai approprié pour s'adapter à sa nouvelle situation (ATF 129 III 417 consid. 2.2).
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3.2. Il résulte de l'arrêt attaqué que le mari est employé à plein temps comme pharmacien et réalise un revenu mensuel net de 11'207 fr. L'épouse exerce quant à elle, à temps partiel, la profession de médecin psychiatre indépendant, pour un revenu mensuel net moyen estimé à 6'605 fr. Elle suit depuis plus d'une dizaine d'années une psychothérapie auprès d'un confrère en raison d'une anxiété et d'un stress en relation avec son activité professionnelle, selon l'attestation de ce dernier du 6 mai 2014. Ledit médecin lui a délivré une dispense de garde et lui a recommandé de sélectionner ses patients afin d'éviter ceux qui sont les plus anxiogènes pour elle. Durant la vie commune, les conjoints étaient convenus de contribuer aux charges de la famille proportionnellement à leurs revenus, soit à raison de 65% pour le mari, cours de tennis des enfants en sus, et de 35% pour l'épouse. Aucune des parties n'avait toutefois sollicité le maintien de cet accord de répartition ou son adaptation à la nouvelle situation, ayant fondé leur argumentation en fonction de la méthode du minimum vital avec répartition de l'excédent, laquelle était en l'occurrence admissible vu leur absence d'économie. En outre, compte tenu de leur situation favorable, les époux pouvaient assumer la charge supplémentaire que représentait le loyer du mari, d'un montant de 2'420 fr. Une éventuelle augmentation du taux d'activité de l'épouse n'avait donc pas à être examinée.
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4. En conclusion, le recours apparaît mal fondé et ne peut dès lors qu'être rejeté, dans la mesure où il est recevable. Le recourant, qui succombe, supportera par conséquent les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF) et versera en outre des dépens à l'intimée (art. 68 al. 1 et 2 LTF).
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Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
 
1. Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.
 
2. Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge du recourant.
 
3. Une indemnité de 2'500 fr., à verser à l'intimée à titre de dépens, est mise à la charge du recourant.
 
4. Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève.
 
Lausanne, le 30 septembre 2015
 
Au nom de la IIe Cour de droit civil
 
du Tribunal fédéral suisse
 
Le Président : von Werdt
 
La Greffière : Mairot
 
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