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Informationen zum Dokument  BGer 1C_167/2015  Materielle Begründung
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BGer 1C_167/2015 vom 18.08.2015
 
{T 0/2}
 
1C_167/2015
 
 
Arrêt du 18 août 2015
 
 
Ire Cour de droit public
 
Composition
 
MM. les Juges fédéraux Fonjallaz, Président,
 
Chaix et Kneubühler.
 
Greffier : M. Alvarez.
 
 
Participants à la procédure
 
1. A.A.________,
 
2. B.A.________,
 
3. C.A.________,
 
4. D.A.________,
 
tous les quatre représentés par Me Damien Bender, avocat,
 
recourants,
 
contre
 
Commune de Bagnes, Administration communale, route de Clouchèvre 30, 1934 Le Châble,
 
Conseil d'Etat du canton du Valais, place de la Planta, Palais du Gouvernement, 1950 Sion.
 
Objet
 
régularisation de travaux de construction, déni de justice,
 
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton du Valais, Cour de droit public, du 12 février 2015.
 
 
Faits :
 
A. E.E.________ et F.E.________ sont propriétaires de la parcelle n° 974 du cadastre de la Commune de Bagnes. Le 26 septembre 2005, le conseil municipal a octroyé à E.E.________ une autorisation de construire portant sur la démolition du chalet supporté par cette parcelle et la construction d'un chalet double avec parking. Le 22 novembre 2006, un permis portant sur l'agrandissement du chalet lui a également été délivré.
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B. Le 13 février 2014, les consorts A.________ ont interjeté un nouveau recours pour déni de justice, se plaignant d'une part du retard pris par les autorités communales dans la régularisation des travaux illicites effectués par les époux E.________ et, d'autre part, de n'avoir pas traité leur requête tendant à faire interdire à ces derniers d'occuper leur chalet.
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C. Agissant par la voie du recours en matière de droit public, les consorts A.________ demandent principalement au Tribunal fédéral de réformer l'arrêt de la cour cantonale en ce sens qu'un délai de dix jours est imparti à la Commune de Bagnes pour ordonner la remise en état des travaux illicites effectués sur la parcelle n° 974, conformément aux autorisations délivrées en 2005 et 2006. Ils sollicitent également qu'il soit fait interdiction aux époux E.________ d'habiter le chalet érigé sur cette parcelle, tant que ces derniers n'auront pas obtenu de permis d'habiter. Subsidiairement, ils concluent à l'annulation de l'arrêt attaqué et au renvoi de la cause à l'instance précédente pour nouvelle décision dans le sens des considérants.
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Considérant en droit :
 
1. Dirigé contre une décision finale (art. 90 LTF) prise en dernière instance cantonale (art. 86 al. 1 let. d LTF) dans le domaine du droit public de l'aménagement du territoire et des constructions (art. 82 let. a LTF), le recours est en principe recevable comme recours en matière de droit public selon les art. 82 ss LTF, aucune des exceptions prévues à l'art. 83 LTF n'étant réalisée. Les recourants ont pris part à la procédure de recours devant le Tribunal cantonal. Ils sont particulièrement touchés par l'arrêt attaqué qui concerne des travaux de construction effectués sur une parcelle voisine à la leur, travaux qu'ils considèrent comme illicites et contraires aux autorisations délivrées: ils peuvent ainsi se prévaloir d'un intérêt digne de protection au sens de l'art. 89 al. 1 LTF et ont donc qualité pour agir. Les autres conditions de recevabilité du recours en matière de droit public sont réunies, si bien qu'il y a lieu d'entrer en matière sur le fond.
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2. Le Tribunal fédéral statue en principe sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF), sous réserve des cas prévus à l'art. 105 al. 2 LTF. Selon l'art. 97 LTF, il ne peut s'en écarter que si les constatations de ladite autorité ont été établies en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF ou de façon manifestement inexacte, c'est-à-dire arbitraire (art. 105 al. 2 LTF), et pour autant que la correction du vice soit susceptible d'influer sur le sort de la cause (ATF 137 I 58 consid. 4.1.2 p. 62; 136 II 304 consid. 2.4 p. 313 s.). Si le recourant entend se prévaloir de constatations de fait différentes de celles de l'autorité précédente (cf. art. 97 al. 1 LTF), il doit expliquer de manière circonstanciée en quoi les conditions d'une exception prévue par l'art. 105 al. 2 LTF seraient réalisées. A défaut, il n'est pas possible de tenir compte d'un état de fait divergent de celui retenu dans l'acte attaqué. En particulier, le Tribunal fédéral n'entre pas en matière sur des critiques de type appellatoire portant sur l'état de fait ou l'appréciation des preuves (ATF 137 II 353 consid. 5.1 p. 356 et les arrêts cités).
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2.1. En début de mémoire, les recourants présentent leur propre version des faits et apportent de nombreuses précisions aux constatations cantonales. Une telle argumentation, dans la mesure où elle s'écarte des faits constatés dans l'arrêt attaqué ou les complète, sans qu'il soit indiqué que ceux-ci seraient manifestement inexacts ou arbitraires, est irrecevable, le Tribunal fédéral n'étant pas une instance d'appel.
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2.2. Par ailleurs, et à les comprendre, les recourants reprochent à la cour cantonale d'avoir écarté leur offre de preuve tendant à la production de l'ensemble des dossiers en lien avec les travaux litigieux (précédents dossiers d'enquête, procédures antérieures de recours pour déni de justice) et d'avoir ainsi omis de retenir que la commune s'était déjà prononcée à deux reprises sur la question de la remise en état; cela commandait - selon eux - de refuser le dépôt de demandes de régularisation ultérieures. A l'appui de leur grief, les recourants produisent une copie de deux décisions communales: la première, datée du 21 décembre 2010, fait état d'un accord intervenu avec E.E.________, aux termes duquel ce dernier s'est engagé à respecter les plans autorisés le 22 novembre 2006; la deuxième, du 2 mars 2011, prend acte de cet accord et ordonne en conséquence le retrait et l'abandon du dossier de régularisation publié au BO du 18 décembre 2009.
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3. Toujours sous l'angle formel, les recourants se plaignent d'un défaut de motivation de l'arrêt attaqué et invoquent à cet égard également une violation de leur droit d'être entendus.
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4. Sur le fond les recourants se plaignent d'arbitraire dans l'application du droit cantonal.
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4.1. Le Tribunal fédéral ne revoit l'interprétation et l'application du droit cantonal et communal que sous l'angle de l'arbitraire. Une décision est arbitraire lorsqu'elle viole gravement une norme ou un principe juridique clair et indiscuté, ou lorsqu'elle contredit d'une manière choquante le sentiment de la justice et de l'équité. Le Tribunal fédéral n'a pas à déterminer quelle est l'interprétation correcte que l'autorité cantonale aurait dû donner des dispositions applicables; il doit uniquement examiner si l'interprétation qui a été faite est défendable. Par conséquent, si celle-ci ne se révèle pas déraisonnable ou manifestement contraire au sens et au but de la disposition ou de la législation cantonale en cause, elle sera confirmée, même si une autre solution paraît également concevable, voire préférable. De plus, il ne suffit pas que les motifs de la décision attaquée soient insoutenables, encore faut-il que cette dernière soit arbitraire dans son résultat (ATF 138 I 305 consid. 4.3 p. 319; 138 III 378 consid. 6.1 p. 379 s.). Dans ce contexte, le recourant est soumis aux exigences accrues de motivation de l'art. 106 al. 2 LTF. La partie recourante doit alors indiquer les principes constitutionnels qui n'auraient pas été respectés et expliquer de manière claire et précise en quoi ces principes auraient été violés; de même, elle doit citer les dispositions du droit cantonal dont elle se prévaut et démontrer en quoi ces dispositions auraient été appliquées arbitrairement ou d'une autre manière contraire au droit (cf. ATF 136 II 489 consid. 2.8 p. 494; 133 IV 286 consid. 1.4 p. 287).
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5. Les recourants affirment que le Tribunal cantonal aurait violé l'art. 34 al. 2 LPJA en confirmant que le Conseil d'Etat, après avoir constaté le déni de justice, avait donné aux autorités communales des instructions suffisantes pour la remise en état des lieux. Ils estiment par ailleurs que l'art. 51 de la loi cantonale sur les constructions du 8 février 1996 (LC; RS/VS 705.1) ne permettait pas à la commune d'accepter le dépôt, respectivement le retrait, de dossiers de régularisation successifs, mais lui imposait au contraire de rendre une décision de remise en état.
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5.1. Selon l'art. 34 LPJA, une partie peut en tout temps recourir pour déni de justice ou retard injustifié à l'autorité ordinaire de recours (al. 1). Si l'autorité saisie admet le recours, elle renvoie l'affaire à l'autorité inférieure en lui donnant des instructions impératives (al. 2).
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5.2. En l'espèce, dans sa décision du 28 mai 2014, le Conseil d'Etat a admis le recours pour déni de justice formé devant lui par les voisins recourants, constatant que la commune avait fautivement tardé à agir à la suite du retrait de la demande de régularisation du 18 décembre 2009. Aux termes des considérants, le Conseil d'Etat a invité le conseil communal à "statuer dans un délai qui, d'une part, lui permet de procéder à un examen des réquisits légaux en relation avec la procédure de remise en état des lieux et qui, d'autre part, doit être court au vu des circonstances et des travaux connus depuis plusieurs années par les autorités communales". La cour cantonale, tout en relevant que le dispositif de cette décision ne renfermait aucune instruction impérative au sens de l'art. 34 al. 2 LPJA, a toutefois jugé que l'invitation figurant dans les considérants suffisait à répondre aux exigences de cette disposition.
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5.3. Les recourants soutiennent encore que c'est en violation de l'art. 51 al. 4 LC que la cour cantonale n'aurait pas écarté le dossier de régularisation déposé ultérieurement au recours pour déni de justice du 13 février 2014 (et faisant l'objet d'une publication au BO du 14 avril 2014). Selon eux, compte tenu des dossiers successifs de régularisation déposés, puis retirés, par les constructeurs, le Tribunal cantonal ne pouvait considérer que cette dernière demande suspendait une nouvelle fois le rétablissement de la situation.
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5.4. A l'appui des griefs qui précèdent, les recourants discutent longuement et de manière essentiellement appellatoire le caractère prétendument non autorisable des travaux illicites réalisés par les constructeurs, particulièrement s'agissant des aménagements effectués sur le torrent communal - dont une protection par le droit fédéral n'apparaît du reste pas d'emblée exclue (cf. art. 1 de la loi fédérale sur la protection des eaux du 24 janvier 1991 [LEaux; RS 814.20]). Ces remarques ne sont toutefois pas pertinentes à ce stade: il est constant que certains de ces aménagements ont été réalisés contrairement aux autorisations de construire délivrées en 2005 et 2006, ce qui impose déjà 
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5.5. Sur le vu de ce qui précède, en confirmant la décision du Conseil d'Etat, qui reconnaît l'existence d'un déni de justice sur le plan de la remise en état, l'arrêt attaqué n'est pas arbitraire dans son résultat.
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6. Selon les recourants, c'est à tort que le Tribunal cantonal a confirmé que des tiers n'étaient en principe pas intéressés à la procédure d'interdiction d'habiter pour refuser d'entrer en matière sur cette question. Ils invoquent à cet égard une application arbitraire des art. 51 al. 1 LC et 59 de l'ordonnance sur les constructions (OC; RS/VS 705.100).
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6.1. Il est rappelé qu'aux termes de l'art. 51 al. 1 LC, lorsqu'un projet est exécuté sans autorisation de construire ou contrairement à l'autorisation délivrée, ou que lors de l'exécution d'un projet autorisé des dispositions sont violées, l'autorité compétente en matière de police des constructions ordonne l'arrêt total ou partiel des travaux et le fait observer; lorsque les circonstances l'exigent, elle peut ordonner l'interdiction d'utiliser les bâtiments et installations illicites. Ces décisions sont immédiatement exécutoires. L'art. 59 al. 1 OC précise que les constructions reconnues conformes à l'autorisation de construire et aux conditions et charges liées à cette autorisation, ne peuvent être occupées ou exploitées avant l'établissement d'un permis d'habiter ou d'exploiter.
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6.2. En l'espèce, la cour cantonale a jugé que c'est à juste titre que le Conseil d'Etat s'est refusé à discuter le grief des recourants, la procédure d'octroi du permis d'habiter ne permettant pas de remettre en cause la régularité, matérielle ou formelle, du permis de construire. Elle a en outre considéré que les recourants disposaient de la possibilité de faire valoir leurs droits dans le cadre de la procédure d'enquête portant sur la régularisation des travaux illicites. Le Tribunal cantonal a enfin estimé qu'aucune circonstance particulière, au sens de l'art. 51 al. 1 LC, n'exige en l'espèce le prononcé d'une interdiction d'utiliser le bâtiment, seules des modalités de réalisation et des aménagements extérieurs étant encore en discussion.
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7. Les considérants qui précèdent conduisent au rejet du recours dans la mesure de sa recevabilité. Les recourants, qui succombent, supporteront les frais judiciaires (art. 65 et 66 LTF). Il n'est pas alloué de dépens (art. 68 al. 3 LTF).
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 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
 
1. Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.
 
2. Les frais judiciaires, arrêtés à 3'000 francs, sont mis à la charge des recourants.
 
3. Le présent arrêt est communiqué au mandataire des recourants, à la Commune de Bagnes, au Conseil d'Etat du canton du Valais et au Tribunal cantonal du canton du Valais, Cour de droit public.
 
Lausanne, le 18 août 2015
 
Au nom de la Ire Cour de droit public
 
du Tribunal fédéral suisse
 
Le Président : Fonjallaz
 
Le Greffier : Alvarez
 
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