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Informationen zum Dokument  BGer 1C_739/2013  Materielle Begründung
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BGer 1C_739/2013 vom 17.06.2015
 
{T 0/2}
 
1C_739/2013
 
 
Arrêt du 17 juin 2015
 
 
Ire Cour de droit public
 
Composition
 
MM. les Juges fédéraux Merkli, Juge présidant,
 
Karlen, Eusebio, Chaix et Kneubühler.
 
Greffier : M. Alvarez.
 
 
Participants à la procédure
 
Fondation suisse pour la protection et l'aménagement du paysage (FSPAP),
 
recourante,
 
contre
 
A.________ SA,
 
représentée par Me Frédéric Delessert, avocat,
 
intimée,
 
Commune de Miège,
 
Conseil d'Etat du canton du Valais.
 
Objet
 
autorisation de construire, qualité pour recourir d'une organisation de protection de la nature, art. 24 ss LAT, 12 et 18 ss LPN.
 
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton du Valais, Cour de droit public, du 12 juillet 2013.
 
 
Faits :
 
A. L'entreprise A.________ SA est propriétaire de la parcelle n° ccc du cadastre communal de Miège située au lieu-dit Planige. Ce bien-fonds, d'une superficie de 20'998 m 2, est classé en zone de plan de quartier obligé H20 selon le plan d'affectation des zones (ci-après: PAZ), adopté par l'assemblée communale le 15 avril 1982 et approuvé par le Conseil d'Etat du canton du Valais le 4 juillet 1982, et selon le règlement communal des constructions et des zones (ci-après: RCCZ), dont la dernière version a été adoptée le 28 février 2005 et homologuée par le Conseil d'Etat le 13 octobre suivant.
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B. Le 1 er juin 2011, A.________ SA a requis l'autorisation de construire sur ce terrain treize villas d'appartements ainsi que des places de stationnement souterraines.
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C. Agissant par la voie du recours en matière de droit public, la FP demande au Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt du 12 juillet 2013 et de retourner le dossier au Tribunal cantonal pour qu'il statue sur le fond. Elle requiert en outre l'octroi de l'effet suspensif.
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Considérant en droit :
 
1. Le recours est dirigé contre une décision finale prise en dernière instance cantonale limitée aux questions de la recevabilité et de la qualité pour recourir; sur le fond, la contestation porte sur une autorisation de construire. Le recours est dès lors recevable comme recours en matière de droit public au sens des art. 82 ss LTF.
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1.1. La recourante, en tant qu'organisation d'importance nationale habilitée à déposer un recours en matière de droit public (art. 12 LPN en relation avec l'art. 1 de l'ordonnance relative à la désignation des organisations habilitées à recourir dans les domaines de la protection de l'environnement ainsi que de la protection de la nature et du paysage [ODO; RS 814.076] et le ch. 13 de son annexe), est particulièrement touchée par l'arrêt attaqué qui confirme l'irrecevabilité de son recours formé devant le Conseil d'Etat; elle peut se prévaloir d'un intérêt digne de protection à se voir reconnaître la légitimation active (cf. arrêt 1C_408/2008 du 16 juillet 2009 consid. 1.2, non publié in ATF 135 II 328). Dans ces conditions, la FP a la qualité pour recourir selon l'art. 89 al. 1 et al. 2 let. d LTF. Les autres conditions de recevabilité du recours en matière de droit public sont au surplus réunies, de sorte qu'il y a lieu d'entrer en matière.
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1.2. A titre de mesure d'instruction, la recourante demande au Tribunal fédéral de procéder à une inspection locale. Il n'y a pas lieu de donner suite à cette requête, le Tribunal fédéral s'estimant suffisamment renseigné pour trancher, sur la base du dossier, les points litigieux. Elle requiert également l'édition des dossiers du Conseil d'Etat et du Tribunal cantonal. Cette requête est satisfaite, ces autorités ayant déposé leurs dossiers (cf. art. 102 al. 2 LTF).
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2. En début de mémoire, la recourante présente sa propre version des faits. Une telle argumentation, dans la mesure où elle s'écarte des faits constatés dans l'arrêt attaqué ou les complète, sans qu'il soit indiqué que ceux-ci seraient manifestement inexacts ou arbitraires, est irrecevable, le Tribunal fédéral n'étant pas une instance d'appel (ATF 136 II 101 consid. 3 p. 104 s.; 135 II 313 consid. 5.2.2 p. 322).
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3. Dans un chapitre intitulé "existence d'une tâche fédérale", la recourante rappelle déduire sa qualité pour recourir des art. 24 à 24d LAT en relation avec l'art. 12 LPN. Elle soutient que la planification de la commune de Miège, en particulier la zone constructible du secteur de Planige, contreviendrait à l'art. 24 LAT et développe à cet égard une importante argumentation de fond.
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La cour cantonale ayant ainsi reconnu, au degré de la vraisemblance, l'existence d'une tâche fédérale (cf. ATF 123 II 5 consid. 2c p. 7 s.), il est superflu, à ce stade, de s'arrêter sur les critiques de fond portant sur les art. 24 ss. LAT; l'examen doit se limiter à la question de la tardiveté de ces griefs.
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4. La recourante soutient qu'elle ne disposait d'aucune voie de droit pour s'opposer au PAZ, respectivement au plan de quartier, lors de leur adoption, dès lors que ce droit de recours n'aurait été consacré qu'ultérieurement par la jurisprudence. Dans ses observations du 24 janvier 2014, elle affirme par ailleurs que son droit d'agir ne saurait lui être dénié au motif qu'elle n'est pas intervenue en 2007 dans le cadre de la procédure d'autorisation de construire une première villa sur la parcelle en cause.
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4.1. Entrés en vigueur le 1er juillet 2007 (RO 2007 2701), les al. 3 et 4 de l'art. 12c LPN prévoient que si une organisation a omis de formuler des griefs recevables contre un plan d'affectation à caractère décisionnel, ou si ces griefs ont été rejetés définitivement, l'organisation ne peut plus les faire valoir dans une procédure ultérieure (al. 3). Cette règle s'applique également aux oppositions et recours formés contre des plans d'affectation en vertu du droit cantonal (al. 4).
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4.2. La cour cantonale a retenu que l'exclusion de principe du contrôle préjudiciel d'une planification dans le cadre d'une procédure ultérieure a été consacrée par la jurisprudence (ATF 106 Ia 383 précité) antérieurement à l'affectation de la parcelle n° ccc à la zone constructible, d'une part, ainsi qu'à la mise à l'enquête du plan de quartier (ayant fait l'objet d'une publication au Bulletin officiel du canton du Valais le 5 décembre 1986), d'autre part. Dans ces circonstances, la recourante aurait dû se rendre compte, à l'époque de l'adoption de ces plans, qu'en ne les attaquant pas elle courrait le risque de ne plus pouvoir le faire dans le cadre d'une procédure subséquente.
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4.2.1. Le caractère exceptionnel du contrôle incident de la planification trouve sa justification dans la nécessité d'assurer la stabilité des plans dans la mesure commandée par l'art. 21 LAT et de garantir ainsi aux particuliers, mais également aux autorités qui doivent par exemple réaliser des réseaux d'équipement (art. 19 al. 2 LAT) ou mettre en oeuvre d'autres prescriptions en relation avec l'utilisation du sol, une certaine sécurité juridique dans ce domaine (cf. ATF 120 Ia 227 consid. 2b p. 231 s.). Par ailleurs, l'intervention précoce - au stade de la planification - des organisations habilitées à recourir s'impose également afin d'assurer la coordination entre la protection de l'environnement et l'aménagement du territoire (cf. Rapport du 27 juin 2005 de la Commission des affaires juridiques du Conseil des Etats relatif à l'initiative parlementaire portant sur la simplification de l'examen d'impact sur l'environnement et prévention d'abus grâce à une définition plus précise du droit de recours des organisations, FF 2005 5041 p. 5053).
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4.2.2. Lors de la mise à l'enquête du plan de quartier litigieux, par publication officielle du 5 décembre 1986, la jurisprudence avait déjà reconnu aux organisations d'importance nationale la qualité pour agir à l'encontre d'une autorisation de construire sur la base de l'art. 24 LAT, confirmant que cette disposition renferme une tâche fédérale (cf. ATF 112 Ib 70 précité du 12 mars 1986). Le Tribunal fédéral n'avait toutefois pas encore confirmé que la violation de l'art. 24 LAT pouvait être invoquée dans le cadre de l'élaboration d'une planification. Dans ces circonstances particulières, faute de pratique établie, on ne pouvait raisonnablement exiger de la recourante - spécialisée dans la protection de la nature et du paysage, mais non dans la règlementation technique de l'aménagement du territoire - qu'elle agisse à l'encontre de cette planification.
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4.2.3. En définitive, les éléments dont se prévaut la recourante commandaient d'admettre la recevabilité du recours au Conseil d'Etat. En confirmant l'irrecevabilité de ce recours, la cour cantonale a violé le droit fédéral, en particulier l'art. 12 LPN.
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5. Selon la recourante le secteur de Planige renfermerait un biotope dont la protection relèverait de l'accomplissement d'une tâche fédérale.
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5.1. L'art. 12 al. 1 let. b et al. 2 LPN confère la qualité pour recourir contre les décisions des autorités fédérales ou cantonales aux organisations actives au niveau national qui se vouent à la protection de la nature, à la protection du paysage, à la conservation des monuments historiques ou à des tâches semblables, dans les domaines du droit visés depuis dix ans au moins par leurs statuts. La fondation est reconnue comme association d'importance nationale qui se voue à la protection de l'environnement, de la nature et du paysage (cf. ch. 13 de l'annexe à l'ODO). A ce titre, elle a en principe la qualité pour agir, en tant qu'elle allègue que la décision litigieuse est susceptible de porter atteinte aux intérêts de la nature et du paysage. L'habilitation prévue par l'art. 12 al. 1 LPN concerne toutefois exclusivement le recours contre des décisions prises dans l'accomplissement de tâches de la Confédération selon les art. 78 al. 2 Cst. et 2 LPN; l'art. 12 LPN est en effet inclus dans le chapitre premier de cette loi, intitulé "Protection de la nature et du paysage lors de l'accomplissement de tâches de la Confédération" (ATF 138 II 281 consid. 4.4 p. 286 s.; 120 Ib 27 consid. 2c p. 30; arrêt 1C_621/2012 du 14 janvier 2014 consid. 2.2 in DEP 2014 251 p. 255).
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5.2. Devant le Tribunal fédéral, la recourante prétend qu'un biotope d'importance régionale, à tout le moins locale, au sens de l'art. 18b LPN, se serait développé dans le secteur considéré. A cet égard, elle se prévaut de ses propres observations effectuées sur le site, durant l'été 2012. Elle aurait, à cette occasion, mis en évidence la présence d'espèces végétales figurant à l'annexe 1 de l'ordonnance sur la protection de la nature (OPN; RS 451.1). Elle rapporte également - sans toutefois produire de pièce à l'appui de son affirmation - les propos du Dr B.________ qui confirme la valeur biologique du site.
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5.3. A l'examen du dossier, on constate qu'au stade du dépôt du recours devant le Conseil d'Etat, la recourante ne s'est pas prévalue de l'existence d'un tel biotope ni pour fonder sa qualité pour agir ni en tant que grief de fond. Dans son écriture introductive d'instance, la fondation invoque l'importante valeur paysagère du site, grief qui ne saurait toutefois se confondre avec celui tiré de l'existence d'un biotope spécifique, lequel fait l'objet de dispositions particulières dans la LPN (art. 18 ss LPN). Ce n'est que dans le cadre de sa réplique devant le Conseil d'Etat que la recourante a fait valoir le développement de prairies sèches et d'une flore digne d'intérêt pour fonder sa qualité pour agir.
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6. Les considérants qui précèdent conduisent à l'admission partielle du recours, dans la mesure où il est recevable. L'arrêt attaqué est réformé en ce sens que le recours du 27 juin 2012 au Conseil d'Etat est recevable concernant l'éventuelle violation des principes fédéraux d'aménagement du territoire (cf. consid. 4.2.3); le recours est en revanche rejeté s'agissant des griefs tirés de la présence d'un biotope digne de protection (cf. consid. 5.3), le résultat auquel était parvenue la cour cantonale étant confirmé par substitution de motifs. La cause est renvoyée au Tribunal cantonal pour nouvelle décision sur le fond au sens des considérants ou renvoi au Conseil d'Etat pour que ce dernier statue lui-même. Compte tenu de l'issue de la cause devant le Tribunal fédéral, les frais judiciaires sont partagés par moitié entre les parties, la commune de Miège en étant exemptée (art. 66 al. 4 LTF). La recourante, qui a agi sans avocat, n'a pas droit à des dépens; en revanche, elle versera une indemnité de dépens réduite à l'intimée représentée par un mandataire professionnel (art. 68 al. 2 LTF).
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 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
 
1. Le recours est partiellement admis dans la mesure où il est recevable. L'arrêt attaqué est réformé en ce sens que le recours au Conseil d'Etat est recevable en tant qu'il est fondé sur la violation des règles fédérales d'aménagement du territoire. La cause est renvoyée au Tribunal cantonal du canton du Valais pour nouvelle décision dans le sens des considérants.
 
2. Le recours est rejeté pour le surplus.
 
3. Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis pour moitié à la charge de la recourante et pour moitié à la charge de l'intimée.
 
4. Une indemnité de 1'000 fr. est allouée à l'intimée à titre de dépens, à la charge de la recourante.
 
5. Le présent arrêt est communiqué à la recourante, au mandataire de l'intimée, à la Commune de Miège, au Conseil d'Etat du canton du Valais, au Tribunal cantonal du canton du Valais, Cour de droit public, et à l'Office fédéral de l'environnement, Division Droit.
 
Lausanne, le 17 juin 2015
 
Au nom de la Ire Cour de droit public
 
du Tribunal fédéral suisse
 
Le Juge présidant : Merkli
 
Le Greffier : Alvarez
 
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