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Informationen zum Dokument  BGer 1C_540/2014  Materielle Begründung
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BGer 1C_540/2014 vom 05.01.2015
 
{T 0/2}
 
1C_540/2014
 
 
Arrêt du 5 janvier 2015
 
 
Ire Cour de droit public
 
Composition
 
MM. les Juges fédéraux Fonjallaz, Président,
 
Karlen et Chaix.
 
Greffier : M. Alvarez.
 
 
Participants à la procédure
 
A.________, représenté par Me Yves Hofstetter, avocat,
 
recourant,
 
contre
 
Office fédéral des migrations, Quellenweg 6, 3003 Berne.
 
Objet
 
annulation de la naturalisation facilitée,
 
recours contre l'arrêt du Tribunal administratif fédéral, Cour III, du 2 octobre 2014.
 
 
Faits :
 
A. A.________, ressortissant tunisien né le 4 octobre 1977, est entré en Suisse le 7 novembre 2001 au bénéfice d'une autorisation de séjour pour formation. Le 26 février 2004, il a épousé B.________, ressortissante suisse née le 16 octobre 1954.
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B. Le 31 août 2008, A.________ a quitté la commune de Lausanne, dans laquelle les époux étaient domiciliés, à destination de Chypre, ce dont l'ODM a été informé le 10 février 2010. Interpelée à ce propos par l'office, B.________ a fait savoir, par lettre du 18 juillet 2011, qu'elle était divorcée de l'intéressé depuis le 24 mai 2010, que ce dernier s'était remarié et qu'il vivait à Prilly. Elle a de même indiqué ne pas l'avoir accompagné à l'étranger car ce séjour ne devait durer que quelques mois et qu'elle ne souhaitait ni quitter son travail ni s'éloigner de son fils et de sa mère malade.
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C. Après avoir recueilli l'assentiment des autorités compétentes des cantons de Genève et Berne, l'ODM a prononcé, par décision du 11 septembre 2013, l'annulation de la naturalisation facilitée.
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D. Agissant par la voie du recours en matière de droit public, A.________ demande au Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt du Tribunal administratif fédéral du 2 octobre 2014.
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Considérant en droit :
 
1. Dirigé contre la décision du Tribunal administratif fédéral qui confirme l'annulation de la naturalisation facilitée accordée au recourant, le recours est recevable comme recours en matière de droit public (art. 82 al. 1 let. a et 86 al. 1 let. a LTF). Le motif d'exclusion de l'art. 83 let. b LTF n'entre pas en ligne de compte, dès lors qu'il s'agit en l'espèce de naturalisation facilitée et non pas de naturalisation ordinaire. Pour le surplus, le recourant a la qualité pour recourir au sens de l'art. 89 al. 1 LTF et les conditions formelles de recevabilité sont remplies, de sorte qu'il y a lieu d'entrer en matière.
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2. Le recourant produit à l'appui de son écriture plusieurs pièces nouvelles qui ne se trouvent pas au dossier. Elles sont irrecevables (art. 99 al. 1 LTF).
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3. Dans un premier grief, le recourant soutient que la décision annulant sa naturalisation facilité serait intervenue au-delà du délai de prescription prévu par l'art. 41 LN.
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3.1. L'art. 41 al. 1bis LN, entré en vigueur le 1er mars 2011 (RO 2011 347), prévoit que la naturalisation ou la réintégration peut être annulée dans un délai de deux ans à compter du jour où l'office a pris connaissance des faits déterminants, mais au plus tard huit ans après l'octroi de la nationalité suisse. Un nouveau délai de prescription de deux ans commence à courir après tout acte d'instruction communiqué à la personne naturalisée. Les délais sont suspendus pendant la procédure de recours.
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3.2. Le Tribunal administratif fédéral a constaté que l'ancien délai de cinq ans n'était pas échu lors de l'entrée en vigueur de la novelle, le 1er mars 2011. Il a ensuite retenu - ce qui n'est pas contesté - que le délai relatif de deux ans a commencé à courir le 18 juillet 2011, lorsque l'ODM a été informé du divorce et du second mariage du recourant. Les juges précédents ont toutefois estimé que ce délai avait été interrompu, conformément à l'art. 41 al. 1bis 2ème phr. LN, par l'acte du 20 juin 2012 invitant le recourant à se déterminer sur l'annulation de sa naturalisation envisagée par l'ODM.
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4. Sur le fond, le recourant reproche au Tribunal administratif fédéral d'avoir à tort nié l'existence d'une communauté conjugale effective et stable lors de la signature de la déclaration de vie commune. Il soutient que l'autorité inférieure serait parvenue à cette conclusion par des déductions erronées. En d'autres termes, les juges précédents se seraient livrés à une appréciation arbitraire des preuves.
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4.1. En matière d'appréciation des preuves et d'établissement des faits, il y a arbitraire lorsque l'autorité n'a manifestement pas compris le sens et la portée d'un moyen de preuve, si elle ne prend pas en compte, sans raison sérieuse, un élément de preuve propre à modifier la décision ou lorsqu'elle tire des constatations insoutenables des éléments recueillis, ce qu'il appartient au recourant de démontrer par une argumentation répondant aux exigences de l'art. 42 al. 2 LTF, respectivement de l'art. 106 al. 2 LTF (ATF 137 I 58 consid. 4.1.2 p. 62).
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4.2. Conformément à l'art. 41 al. 1 LN, l'ODM peut, avec l'assentiment de l'autorité du canton d'origine, annuler la naturalisation ou la réintégration obtenue par des déclarations mensongères ou la dissimulation de faits essentiels.
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4.2.1. Pour qu'une naturalisation facilitée soit annulée, il ne suffit pas qu'elle ait été accordée alors que l'une ou l'autre de ses conditions n'était pas remplie; il faut qu'elle ait été acquise grâce à un comportement déloyal et trompeur. S'il n'est point besoin que ce comportement soit constitutif d'une escroquerie au sens du droit pénal, il est nécessaire que l'intéressé ait donné sciemment de fausses informations à l'autorité ou qu'il l'ait délibérément laissée dans l'erreur sur des faits qu'il savait essentiels (ATF 135 II 161 consid. 2 p. 165; 132 II 113 consid. 3.1 p. 115 et les arrêts cités). Tel est notamment le cas si le requérant déclare vivre en communauté stable avec son conjoint alors qu'il envisage de se séparer une fois obtenue la naturalisation facilitée; peu importe que son mariage se soit ou non déroulé jusqu'ici de manière harmonieuse (arrêts 1C_256/2012 du 22 novembre 2012 consid. 3.2.1; 1C_406/2009 du 28 octobre 2009 consid. 3.1.1 et l'arrêt cité).
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4.2.2. La notion de communauté conjugale suppose non seulement l'existence formelle d'un mariage, mais encore une véritable communauté de vie des conjoints; tel est le cas s'il existe une volonté commune et intacte de ceux-ci de maintenir une union conjugale stable; une séparation survenue peu après l'octroi de la naturalisation constitue un indice de l'absence de cette volonté lors de l'obtention de la citoyenneté suisse (ATF 135 II 161 consid. 2 p. 165; 130 II 482 consid. 2 p. 484; 128 II 97 consid. 3a p. 98).
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4.3. En l'espèce, la déclaration commune a été signée le 6 mai 2008 et la naturalisation facilitée octroyée le 3 juillet 2008. Après le départ du recourant pour Chypre, le 31 août 2008, les époux ont cessé toute vie commune jusqu'au divorce, prononcé le 24 mai 2010. Moins de trois mois plus tard, le 7 août 2010, le recourant a épousé une ressortissante helvétique, d'origine tunisienne. L'enchaînement rapide de ces événements est de nature, conformément à la pratique, à fonder la présomption de fait selon laquelle le recourant et sa première épouse ne formaient pas une union stable au sens de l'art. 27 LN, lors de la signature de la déclaration de vie commune, respectivement lors de la décision de naturalisation (cf. notamment arrêts 1C_674/2013 du 12 décembre 2013 consid. 3.3; 1C_172/2012 du 11 mai 2012 consid. 2.2; 1C_472/2011 du 22 décembre 2011 consid. 2.1.3). Bien que le recourant parle de "soi-disant présomption", il ne la critique pas en tant que telle. Il convient dès lors de déterminer s'il parvient à la renverser.
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4.4. Le recourant soutient principalement que la séparation serait intervenue à l'initiative de sa première épouse qui ne se sentait pas en mesure de le rejoindre en Tunisie. Il estime qu'il s'agit d'un événement extraordinaire propre à renverser la présomption de fait sur laquelle le Tribunal administratif fédéral a fondé son raisonnement.
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4.5. C'est ainsi sans violer le droit fédéral, en particulier l'art. 41 LN, que le Tribunal administratif a confirmé l'annulation de la naturalisation facilitée octroyée au recourant.
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5. Sur le vu des considérants qui précèdent, le recours doit être rejeté dans la mesure de sa recevabilité aux frais du recourant qui succombe (art. 65, 66 al. 1 et 5 LTF).
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Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
 
1. Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.
 
2. Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge du recourant.
 
3. Le présent arrêt est communiqué au mandataire du recourant, à l'Office fédéral des migrations et au Tribunal administratif fédéral, Cour III.
 
Lausanne, le 5 janvier 2015
 
Au nom de la Ire Cour de droit public
 
du Tribunal fédéral suisse
 
Le Président : Fonjallaz
 
Le Greffier : Alvarez
 
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