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Informationen zum Dokument  BGer 5A_218/2014  Materielle Begründung
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BGer 5A_218/2014 vom 25.06.2014
 
{T 0/2}
 
5A_218/2014
 
 
Arrêt du 25 juin 2014
 
 
IIe Cour de droit civil
 
Composition
 
MM. les Juges fédéraux von Werdt, Président,
 
Herrmann et Schöbi.
 
Greffière : Mme Gauron-Carlin.
 
 
Participants à la procédure
 
A.________,
 
recourante,
 
contre
 
B.________,
 
représenté par Me Ivan Zender, avocat,
 
intimé.
 
Objet
 
droit de garde (mesures provisionnelles),
 
recours contre l'arrêt de la Cour des mesures de protection de l'enfant et de l'adulte du Tribunal cantonal du canton de Neuchâtel du 10 février 2014.
 
 
Faits :
 
A. C.________, née hors mariage en 2009, est la fille de A.________ (1979) et de B.________ (1977), lequel a reconnu sa fille le 12 février 2010.
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B. Par requête du 11 septembre 2013 à l'Autorité de protection de l'enfant et de l'adulte (ci-après: APEA), le père a requis des mesures superprovisionnelles urgentes sans audition des parties tendant à ce que la garde exclusive de l'enfant lui soit attribuée, à ce que le retour immédiat de l'enfant à D.________ soit ordonné et à ce que le droit de visite de la mère soit fixé, dès le retour en Suisse de l'enfant et de la mère.
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B.a. Par ordonnance de mesures superprovisionnelles du 12 septembre 2013, le Président de l'APEA, statuant d'urgence sans citation des parties, a attribué à titre provisoire au père la garde exclusive de l'enfant et a fixé à la mère un délai de 15 jours pour prendre position par écrit. Le 20 septembre 2013, le Président a retiré l'effet suspensif à un éventuel recours contre cette décision.
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B.b. Après que la mère se soit prononcée par écrit et après avoir tenu audience, le Président de l'APEA, par décision de mesures provisionnelles du 11 décembre 2013, a confirmé l'ordonnance de mesures superprovisionnelles du 12 septembre 2013, attribuant au père la garde exclusive de l'enfant et retirant l'effet suspensif.
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B.c. Par arrêt du 10 février 2014, la Cour des mesures de protection de l'enfant et de l'adulte du Tribunal cantonal du canton de Neuchâtel a rejeté le recours et confirmé l'ordonnance de mesures provisionnelles du Président de l'APEA du 11 décembre 2013.
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C. Par acte du 13 mars 2014, remis à la Poste suisse en copie le 14 mars 2014 et en original le 15 mars 2014, A.________ interjette un recours en matière civile au Tribunal fédéral. Elle conclut principalement à ce que l'incompétence des autorités neuchâteloises soit constatée, subsidiairement, à l'annulation de l'arrêt entrepris. Au préalable, la recourante sollicite le bénéfice de l'assistance judiciaire pour la procédure fédérale et requiert que l'effet suspensif soit accordé à son recours.
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D. Par ordonnance du 7 avril 2014, le Président de la IIe Cour de droit civil du Tribunal fédéral, a constaté que le délai de recours était respecté et au surplus, tenant compte des circonstances particulières de la cause, rejeté la requête présentée par la mère.
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Considérant en droit :
 
 
Erwägung 1
 
1.1. L'arrêt entrepris, qui statue en mesures provisionnelles sur l'attribution du droit de garde d'un enfant né hors mariage, est une décision prise en application de normes de droit public dans une matière connexe au droit civil, à savoir en matière de protection de l'enfant (art. 72 al. 2 let. b ch. 6 LTF; arrêts 5A_744/2013 du 31 janvier 2014 consid. 1; 5A_939/2012 du 8 mars 2013 consid. 1.1). La question soumise au Tribunal fédéral est de nature non pécuniaire, de sorte que le recours est ouvert indépendamment de la valeur litigieuse (arrêts 5A_366/2010 du 4 janvier 2011 consid. 1.1; 5D_41/2007 du 27 novembre 2007 consid. 2.3). Par ailleurs, le recours a été interjeté dans le délai (art. 42 al. 5 et 100 al. 1 LTF; 
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1.2. Le recours en matière civile des art. 72 ss LTF étant une voie de réforme (art. 107 al. 2 LTF), le recourant ne doit pas se borner à demander l'annulation de la décision attaquée; il doit également, sous peine d'irrecevabilité, prendre des conclusions sur le fond du litige. Les conclusions réformatoires doivent de surcroît être déterminées et précises, c'est-à-dire indiquer exactement quelles modifications sont demandées (arrêt 5A_623/2011 du 20 février 2012 consid. 1.2). Exceptionnellement, des conclusions indéterminées et imprécises suffisent lorsque la motivation du recours ou la décision attaquée permet de comprendre d'emblée la modification requise (ATF 134 III 235 consid. 2 p. 236 s.; arrêt précité 5A_359/2011 consid. 1.2.1 
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2. Dès lors que la décision attaquée statue sur des mesures provisionnelles au sens de l'art. 98 LTF (ATF 133 III 393 consid. 5 p. 396), le Tribunal fédéral dispose d'un pouvoir d'examen limité, seule la violation des droits constitutionnels pouvant être invoquée. Le Tribunal fédéral n'examine en outre les griefs de violation de droits constitutionnels que s'ils ont été invoqués et motivés ("principe d'allégation", art. 106 al. 2 LTF), à savoir expressément soulevés et exposés de manière claire et détaillée (ATF 133 IV 286 consid. 1.4 p. 287). Le recourant qui se plaint de la violation d'un droit fondamental ne peut donc se borner à critiquer la décision attaquée comme il le ferait en instance d'appel, où l'autorité de recours jouit d'une libre cognition; il ne peut, en particulier, se contenter d'opposer sa thèse à celle de l'autorité cantonale, mais doit démontrer ses allégations par une argumentation précise (ATF 134 II 349 consid. 3 p. 351 s.; 133 II 396 consid. 3.2 p. 400; arrêt 5A_99/2011 du 22 septembre 2011 consid. 2.1).
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3. En raison du déplacement et de la présence effective de l'enfant en Espagne, le litige revêt un caractère international. Le Tribunal fédéral, saisi d'un recours en matière civile, doit contrôler d'office la question du droit applicable, selon la loi du for, à savoir la loi sur le droit international privé (LDIP; ATF 137 III 481 consid. 2.1 p. 483; 135 III 259 consid. 2.1 p. 261; 133 III 37 consid. 2 p. 39), sous réserve des traités internationaux (art. 1 al. 2 LDIP). S'agissant de la réglementation du droit de garde, la question du droit applicable se résout selon la Convention concernant la compétence, la loi applicable, la reconnaissance, l'exécution et la coopération en matière de responsabilité parentale et de mesures de protection des enfants, conclue à La Haye, le 19 octobre 1996 (CLaH96, RS 0.211.231.011; art. 1 al. 1 let. b et art. 15 à 22 CLaH96), laquelle a été signée et ratifiée tant par la Suisse que par l'Espagne. En vertu de l'art. 15 CLaH96, dans l'exercice de la compétence qui leur est attribuée par les dispositions du chapitre II de la Convention, les autorités des Etats contractants appliquent en principe leur droit (art. 15 al. 1 et 21 al. 1 CLaH96; Paul Lagarde, La nouvelle convention de La Haye sur la protection des mineurs, in Revue critique de droit international privé n° 86, 1997, p. 230). En l'occurrence, dans la mesure où les autorités helvétiques sont compétentes pour connaître du présent litige, le droit suisse est donc applicable.
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4. Le recours a principalement pour objet la compétence des tribunaux du canton de Neuchâtel pour statuer sur l'attribution du droit de garde de l'enfant de parents non-mariés.
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4.1. S'agissant de la compétence 
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4.2. La CLaH96 a notamment pour objet de déterminer l'Etat dont les autorités ont compétence pour prendre des mesures tendant à la protection de la personne ou des biens de l'enfant, singulièrement pour prononcer des mesures portant sur le droit de garde et les relations personnelles (art. 1 al. 1 let. a, 3 let. b et 5 à 14 CLaH96; arrêt 5A_40/2014 du 17 avril 2014 consid. 4.2).
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4.3. En l'espèce, il n'est pas contesté que jusqu'à l'altercation parentale du 3 août 2013 ayant conduit la mère à se rendre seule avec sa fille en Espagne, l'enfant avait toujours vécu avec ses deux parents à D.________ et que la garde de l'enfant était attribuée aux deux parents, selon la convention du 29 avril 2010, ratifiée le 23 août 2010 par l'autorité tutélaire pour valoir décision et effectivement exercée conjointement par ceux-ci. La décision unilatérale de la mère de demeurer en Espagne après son séjour pour les vacances, sans le consentement du père, viole ainsi son droit de garde partagé, attribué par décision judiciaire. Le non-retour en Suisse de l'enfant après le 17 août 2013 doit donc être qualifié d'illicite au sens de l'art. 7 al. 2 CLaH96.
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4.4. Concernant la compétence du Président de l'APEA, le droit suisse applicable à la cause ( 
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5. La recourante reproche à l'autorité précédente d'avoir versé dans l'arbitraire (art. 9 Cst.), en tant que la décision querellée retient, sur la base du document rédigé par la police grecque et traduit au dossier, que la mère et la fille ont quitté la Grèce pour l'Espagne uniquement pour des vacances. La recourante soutient que le document en question mentionne " [l]a plaignante manifesta son souhait de retourner dans son pays avec sa fille mineure, avec le consentement [du père]". Selon elle, la version, retenue par l'autorité, d'un départ en vacances après l'agression est inconcevable, s'agissant d'un document écrit, établi officiellement, qui atteste de l'accord du père à ce que la mère retourne dans son pays. La mère soutient que la cour cantonale a procédé à une interprétation insoutenable de cette pièce, dès lors que, d'une part, il ne s'agit pas d'un voyage ou d'un déplacement, mais d'un retour, à savoir de la constitution d'un domicile en Espagne depuis le 4 août 2013 puisqu'il est destiné à durer, et que, d'autre part, il ne s'agit pas non plus d'une décision unilatérale, mais d'une volonté approuvée par le père. La recourante affirme qu'en constatant à tort l'illicéité du non-retour de l'enfant, partant en refusant de constater que la fille avait sa résidence habituelle en Espagne, l'autorité précédente est parvenue à un résultat choquant (art. 9 Cst.) consistant à admettre la compétence des autorités de D.________, en violation de l'art. 30 Cst.
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5.1. En critiquant l'interprétation que la cour cantonale a effectuée d'une pièce du dossier, dont le vice aurait pour conséquence un résultat choquant, la recourante soulève le grief d'appréciation arbitraire (art. 9 Cst.) des faits et preuves.
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5.2. En l'occurrence le document dont se prévaut la recourante expose que la mère est autorisée par le père à "retourner dans son pays avec sa fille mineure", ainsi que l'a effectivement constaté la cour cantonale, laquelle a aussi précisé que l'objet de l'accord était imprécis. Il apparaît en effet qu'il n'est nulle part fait mention d'une durée, de l'absence de retour en Suisse ou d'un établissement définitif. Ledit document ne permet donc pas de déduire autre chose que le fait que le père a approuvé le départ de l'enfant avec la mère en Espagne le soir du 3 août 2013. La recourante, en s'arrêtant sur le texte littéral, en particulier le verbe "retourner" - qui résulte d'ailleurs de la traduction du texte original rédigé en grec -, omet de tenir compte de l'ensemble des éléments établis par la cour cantonale. Elle occulte le raisonnement de celle-ci qui retient que le document officiel de la police grecque ne définit pas précisément l'objet de l'accord, que ce texte n'évoque aucune durée de séjour en Espagne, qu'il était prévu que les parties passent la fin de leurs vacances dans ce pays et que le vol retour était prévu le 17 août 2013. Il apparaît en définitive que le terme "retourner" a été examiné et pris en considération par l'autorité précédente, mais interprété à la lumière de toutes les circonstances d'espèce. L'autorité précédente n'a pas versé dans l'arbitraire (art. 9 Cst.) en retenant que le consentement du père au déplacement de l'enfant en Espagne n'avait été donné qu'au regard d'un séjour temporaire, pour la durée initiale des vacances, et non aux fins d'un établissement définitif de sa fille auprès de la mère, dans ce pays.
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5.3. Quant à la violation de l'art. 30 Cst. qui résulterait de l'interprétation arbitraire des preuves, elle est uniquement alléguée par la recourante, qui n'explicite pas plus avant sa critique, ne se réfère pas à un alinéa précis de cette disposition, ni n'expose en quoi l'arrêt entrepris contreviendrait à cette norme. Compte tenu de l'exigence de motivation des griefs de nature constitutionnelle, la prétendue violation de l'art. 30 Cst. est d'emblée irrecevable (art. 106 al. 2 LTF
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6. La recourante reproche également à l'autorité précédente de ne pas avoir examiné la situation à la lumière des documents qu'elle a présentés, desquels il ressort principalement qu'elle s'est fait agresser par le père le 3 août 2013; elle lui fait grief d'avoir au contraire fait prévaloir les déclarations du père, violant ce faisant le principe de la bonne foi. Elle se plaint que sa cause n'a pas été traitée équitablement, ainsi que le lui garantit l'art. 29 Cst.; la recourante relève en particulier que la cour cantonale a relativisé l'épisode du 3 août 2013 en Grèce, en indiquant dans la décision querellée que l'agression dont elle s'estime être victime ne revêtait nullement la gravité que la mère entendait lui prêter. Le raisonnement des juges précédents, selon lequel "le fait que le père ait spontanément admis l'agression démontre qu'il n'a rien à cacher, d'autant qu'il a également fait état d'un épisode plus ancien et lui aussi apparemment sans gravité" démontrerait, selon elle, que l'autorité précédente n'a pas été impartiale.
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6.1. La recourante se prévaut de l'art. 29 al. 1 Cst. garantissant l'égalité des armes et de traitement, tel que ce principe découle du droit à un procès équitable. Tel qu'il est ancré à l'art. 29 al. 1 Cst., le principe d'égalité des armes requiert que chaque partie se voie offrir une possibilité raisonnable de présenter sa cause dans des conditions qui ne la placent pas dans une situation de net désavantage par rapport à son adversaire (ATF 122 V 157 consid. 2b p. 163 s.).
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6.2. En l'espèce, contrairement à l'opinion exprimée dans le recours, la cour cantonale ne viole pas la garantie d'un procès équitable du seul fait qu'elle accueille les conclusions et/ou les moyens de preuve d'une partie et rejette ceux de l'autre, dès lors que les parties ont toutes deux participé à la procédure; à cet égard, la recourante a été en mesure de déposer des observations et des offres de preuves et a été représentée par son avocate lors des audiences, ce qu'elle ne conteste d'ailleurs pas. En tant qu'elle reproche à l'autorité précédente la manière dont celle-ci a établi les faits en appréciant les divers moyens de preuves, notamment d'avoir relativisé la gravité de l'agression du 3 août 2013, la recourante s'en prend en réalité à l'appréciation des faits et des preuves, sous l'angle de l'arbitraire (art. 9 Cst.). Or, il lui appartenait de soulever clairement ce grief également au sujet de l'agression du 3 août 2013, si elle entendait contester l'appréciation de cet événement, ce qu'elle n'a pas fait. Au demeurant, la recourante, bien qu'elle cite les pièces produites qui auraient été prétendument mal appréciée ou écartées à tort, n'expose pas en quoi l'issue du litige serait différente si la gravité de l'altercation parentale du 3 août 2013 avait été reconnue, notamment à la lumière du fait que la décision, rendue à titre provisionnel, retient que "que les violences soient avérées ou non, le départ subi en Espagne n'a vraisemblablement pas contribué à un développement harmonieux de l'enfant". Par conséquent, le grief de la violation de son droit à un procès équitable (art. 29 al. 1 Cst.), voire - autant qu'il est recevable ("principe d'allégation", art. 106 al. 2 LTF) - le grief d'appréciation arbitraire des faits et preuves (art. 9 Cst.), doivent être rejetés.
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7. En définitive, le recours en matière civile doit être rejeté, dans la mesure de sa recevabilité. Vu cette issue - prévisible - de la procédure, la requête d'assistance judiciaire de la recourante pour la procédure devant la cour de céans ne saurait être agréée (art. 64 al. 1 LTF). Les frais judiciaires sont mis à la charge de la recourante qui succombe (art. 66 al. 1 LTF). Il y a lieu d'octroyer une indemnité de dépens à l'intimé uniquement pour ses déterminations sur la requête d'effet suspensif, dès lors qu'il n'a pas été invité à se déterminer sur le fond.
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Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
 
1. Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.
 
2. La demande d'assistance judiciaire de la recourante est rejetée.
 
3. Les frais judiciaires, arrêtés à 1'500 fr., sont mis à la charge de la recourante.
 
4. La recourante versera à l'intimé la somme de 200 fr. à titre de dépens pour la procédure devant le Tribunal fédéral.
 
5. Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour des mesures de protection de l'enfant et de l'adulte du Tribunal cantonal du canton de Neuchâtel.
 
Lausanne, le 25 juin 2014
 
Au nom de la IIe Cour de droit civil
 
du Tribunal fédéral suisse
 
Le Président :  La Greffière :
 
von Werdt  Gauron-Carlin
 
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