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Informationen zum Dokument  BGer 1C_33/2013  Materielle Begründung
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BGer 1C_33/2013 vom 19.05.2014
 
{T 0/2}
 
1C_33/2013
 
 
Arrêt du 19 mai 2014
 
 
Ire Cour de droit public
 
Composition
 
MM. les Juges fédéraux Fonjallaz, Président, Aemisegger, Merkli, Karlen et Chaix.
 
Greffier: M. Kurz.
 
 
Participants à la procédure
 
A.________,
 
B.________,
 
C.________,
 
tous les trois représentés par Me Pierre Louis Manfrini, avocat,
 
recourants,
 
contre
 
Grand Conseil de la République et canton de Genève,
 
Communauté genevoise d'action syndicale (CGAS),
 
D.________, tous les deux représentés par Me Christian Dandres, avocat,
 
intimés,
 
Objet
 
validité de l'initiative populaire IN 151 "Pour un renforcement du contrôle des entreprises. Contre la sous-enchère salariale",
 
recours contre la décision du Grand Conseil
 
de la République et canton de Genève du 30 novembre 2012.
 
 
Faits:
 
A. Le 28 mars 2012, le Conseil d'Etat du canton de Genève a constaté l'aboutissement de l'initiative populaire cantonale IN 151 intitulée "Pour un renforcement du contrôle des entreprises. Contre la sous-enchère salariale". Lancée par la Communauté genevoise d'action syndicale (CGAS), cette initiative a pour but d'augmenter le nombre de contrôles des entreprises (notamment en doublant le nombre de contrôleurs de l'Office cantonal de l'inspection et des relations du travail - OCIRT) et de créer une inspection des entreprises. L'initiative comporte les modifications suivantes à la loi genevoise sur l'inspection et les relations du travail (ci-après: LIRT, RS/GE J 1 05) :
 
Art. 2, al. 4, 5, 6 et 7 (nouveaux)
 
4 L'office produit et publie chaque année un rapport d'activité.
 
5 L'office est suffisamment doté en personnel. Il bénéficie d'au moins 1 inspecteur pour 10 000 emplois afin d'effectuer les tâches prévues aux chapitres II et IV, à l'exclusion de celles prévues au chapitre IVA.
 
6 L'inspection des entreprises est chargée des missions que lui confie la présente loi.
 
7 L'inspection des entreprises et l'office échangent les informations dont ils disposent et qui sont nécessaires à l'accomplissement des tâches qui leur sont confiées par la présente loi, à l'exception de celle prévue à l'article 39F, alinéa 1, lettre d. L'inspection des entreprises peut collaborer avec les commissions paritaires des conventions collectives.
 
Art. 2A  Inspection des entreprises (nouveau) 
 
1 L'inspection des entreprises est composée de représentants des travailleurs. Le Conseil d'Etat nomme les membres de l'inspection des entreprises, sur proposition de la Communauté genevoise d'action syndicale. Le nombre d'inspecteurs est fixé par voie réglementaire et doit garantir le ratio de 1 inspecteur pour 10 000 emplois.
 
2 L'inspection des entreprises est autonome dans son fonctionnement et peut agir de son propre chef. Elle peut procéder à des investigations directes auprès des entreprises.
 
3 L'inspection des entreprises produit chaque année un rapport d'activités qu'elle publie et dans lequel elle fait état des infractions qu'elle a pu constater et des suites qui y ont été données.
 
4 L'inspection des entreprises agit comme instance de contrôle et de surveillance dans les champs prévus par la présente loi. Elle instruit les dossiers et peut inviter les entreprises à se conformer aux prescriptions légales en leur accordant un délai à cet effet, sauf danger imminent ou cas de force majeure. Si l'entreprise refuse de se conformer ou ne respecte pas le délai, l'inspection des entreprises communique le litige aux organes compétents pour qu'une décision soit rendue.
 
5 Les inspecteurs sont soumis au secret de fonction et disposent des moyens nécessaires pour mener à bien leur mission, soit notamment :
 
a)  accéder à toute heure aux locaux et aux installations des entreprises ainsi qu'à tout autre lieu de travail;
 
b)  interroger les travailleurs hors présence de l'employeur;
 
c)  consulter et se faire remettre tous documents et obtenir tous renseignements nécessaires à l'accomplissement de leur mission.
 
Art. 3, al. 1, 2 et 3 (nouvelle teneur)
 
1 L'office et l'inspection des entreprises sont chargés de contrôler, en collaboration avec les autres autorités et organismes concernés, les installations, l'organisation mise en place, ainsi que les mesures prises pour garantir la protection de la santé et la sécurité des travailleurs. Ils sont habilités à exiger des employeurs à cette fin tous documents et renseignements nécessaires, sous peine des sanctions prévues par le droit fédéral ainsi que par la présente loi.
 
2 L'office et l'inspection des entreprises sont chargés des tâches concernant la prévention des accidents et des maladies professionnels découlant du titre sixième de la loi fédérale sur l'assurance-accidents, du 20 mars 1981.
 
3 L'office et l'inspection des entreprises peuvent prescrire toutes les mesures dont l'expérience a démontré la nécessité, que l'état de la technique permet d'appliquer et qui sont adaptées aux conditions d'exploitation de l'entreprise.
 
Art. 4, al. 3bis, 5 et 6 (nouveaux)
 
3bis L'inspection des entreprises peut intervenir préalablement au sens de l'article 51 alinéa 1 de la loi sur le travail.
 
5 Lorsque l'office statue ou formule une invitation à se mettre en conformité, suite à une dénonciation, il informe dans un délai raisonnable le plaignant des démarches entreprises et lui notifie les décisions qui le concernent.
 
6 Ont qualité pour recourir contre les décisions prises en vertu de la présente loi les personnes visées à l'article 60 de la loi sur la procédure administrative, du 12 septembre 1985, ainsi que les associations d'importance nationale ou cantonale qui se vouent à la défense des intérêts des salariés ou des employeurs.
 
Art. 9, al. 1 (nouvelle teneur) 
 
1 Conformément à l'article 46 de la loi sur le travail, tout employeur doit pouvoir fournir à l'office et à l'inspection des entreprises en tout temps un état détaillé des horaires de travail et de repos effectués par chaque travailleur, sous peine des sanctions prévues par la loi sur le travail et par l'article 46 de la présente loi.
 
Art. 18, al. 2 (nouveau) 
 
2 Le conseil de surveillance du marché de l'emploi produit et publie chaque année un rapport d'activité.
 
Art. 19, al. 3bis (nouveau) 
 
3bis L'inspection des entreprises collabore avec l'observatoire dans la détection de l'existence, dans une branche économique ou une profession, d'une sous-enchère salariale abusive et répétée.
 
Art. 23, al. 2 (nouvelle teneur) et al. 5 (nouveau) 
 
2 Pour constater les usages, l'office se base notamment sur le calculateur des salaires développé par l'observatoire, les conventions collectives de travail, les contrats-types de travail, les résultats de données recueillies ou d'enquêtes menées auprès des entreprises, les travaux de l'observatoire, ainsi que sur les statistiques disponibles en la matière.
 
5 L'office produit et publie chaque année un rapport sur le respect des usages.
 
Art. 26, al. 1 (nouvelle teneur) 
 
1 Le département est compétent pour contrôler le respect des usages au sein des entreprises concernées. Cette compétence est exercée par l'office et par l'inspection des entreprises, sous réserve de l'alinéa suivant.
 
Art. 27, al. 2 et 3 (nouveaux) 
 
2 L'office collabore activement avec les commissions paritaires des conventions collectives notamment afin de les inciter et de les aider à mettre en place un contrôle effectif du respect des dispositions conventionnelles. Les commissions paritaires peuvent mandater l'office ou l'inspection des entreprises pour effectuer, sans frais, des missions de contrôle.
 
3 A la demande des parties à une convention collective de travail, en vigueur ou dénoncée, l'office effectue une enquête statistique sur les conditions de travail dans le secteur concerné par la convention.
 
Art. 35, al. 2 (nouvelle teneur)
 
2 L'office veille à la coordination des activités de contrôle menées par les différents organes compétents, notamment l'inspection des entreprises et les commissions paritaires, et leur donne les instructions prévues par l'article 14de la loi sur les travailleurs détachés.
 
Art. 36, al. 3 (nouvelle teneur)
 
3 Quel que soit le secteur, les annonces des travailleurs détachés sont tenues à disposition du conseil de surveillance et de l'inspection des entreprises.
 
Art. 37, al. 2 (nouvelle teneur)
 
2 Le contrôle des salaires minimaux établis par un contrat-type de travail, au sens de l'article 360a du code des obligations, est de la compétence du conseil de surveillance. Il délègue ce contrôle à l'office et à l'inspection des entreprises.
 
Art. 38, al. 1 (nouvelle teneur)
 
1 L'employeur est tenu de fournir à l'office et à l'inspection des entreprises tous les renseignements et documents demandés, sous peine des sanctions prévues par la loi sur les travailleurs détachés ainsi que par la présente loi.
 
Art. 39A, al. 3 (nouveau)
 
3 L'inspection des entreprises est habilitée à effectuer des contrôles.
 
Art. 39C, al. 2 (nouvelle teneur)
 
2 Elles sont tenues de donner suite aux requêtes de l'office et de l'inspection des entreprises et lui donnent connaissance des indices sérieux de travail au noir qu'elles relèvent dans le cadre de leurs opérations courantes.
 
Art. 39F, al. 2 (nouveau, l'al. 2 devenant l'al. 3)
 
2 Les contrôles concernant l'occupation de travailleurs étrangers en infraction aux dispositions du droit des étrangers ne peuvent être du ressort ni de l'inspection des entreprises, ni d'organisations privées.
 
Art. 43, al. 2 (nouveau, la disposition actuelle devenant l'al. 1)
 
2 Les ressources de l'inspection des entreprises sont constituées de jetons de présence dont le montant est fixé par le Conseil d'Etat.
 
Art. 44, al. 3, 4 et 5 (nouvelle teneur)
 
3 Lorsque les contrôles effectués révèlent des situations illicites, l'office et l'inspection des entreprises arrêtent les mesures nécessaires en impartissant des délais appropriés. Si, après avertissement, l'entreprise n'applique pas ces mesures, celles-ci sont appliquées d'office et à ses frais. Sont réservés les cas dans lesquels l'exécution forcée est impossible ou disproportionnée.
 
4 Toutefois, en cas de danger imminent, l'office et l'inspection des entreprises peuvent prendre immédiatement les mesures nécessaires. Ils en informent les intéressés dans les délais les plus courts.
 
5 L'office est habilité à requérir l'intervention de la gendarmerie pour la mise en oeuvre d'un moyen de contrainte. Dans les cas de force majeure, l'office et l'inspection des entreprises peuvent requérir l'intervention de la gendarmerie.
 
B. Dans son rapport du 22 juin 2012, le Conseil d'Etat a considéré qu'en dépit de la longueur du texte, celui-ci respectait le principe d'unité de la matière. En matière de travailleurs détachés (art. 35-38 LIRT), le droit fédéral exigeait une commission tripartite (art. 360b al. 1 CO), alors que l'inspection des entreprises instituée à l'art. 2A LIRT n'était composée que de représentants des travailleurs. Une telle composition, s'agissant d'une commission investie d'une tâche publique, heurterait en outre l'exigence d'impartialité découlant de l'art. 29 al. 2 Cst., de sorte que toutes les dispositions relatives à l'inspection des entreprises seraient contraires au droit fédéral, ainsi qu'au principe de proportionnalité. Sous l'angle de l'exécutabilité, la possibilité de conflits positifs de compétence entre l'OCIRT et l'inspection des entreprises ne constituait pas un motif d'invalidation. En définitive, toutes les dispositions en rapport avec l'inspection des entreprises devaient être invalidées, mais la partie restante de l'initiative pouvait en revanche être soumise au peuple. Le Conseil d'Etat préconisait la présentation d'un contre-projet. Dans son rapport du 12 novembre 2012, la Commission législative proposait également une invalidation partielle. Un rapport de minorité concluait à la validation totale de l'initiative.
 
Dans sa séance du 30 novembre 2012, le Grand Conseil a déclaré entièrement valide l'initiative et l'a renvoyée à la Commission de l'économie pour examen de sa prise en considération.
 
C. Agissant par la voie du recours en matière de droit public, A.________, B.________ et C.________, tous trois citoyens genevois, demandent au Tribunal fédéral d'annuler la décision du Grand Conseil du 30 novembre 2012 et d'invalider partiellement l'IN 151 en supprimant les articles 2 al. 6 et 7, 2A, 3 al. 1, 2 et 3, 4 al. 3bis, 9 al. 1, 19 al. 3bis, 26, ainsi que la mention "inspection des entreprises" figurant dans d'autres dispositions.
 
Le Grand Conseil conclut au rejet du recours et à la confirmation de sa décision. La Communauté genevoise d'action syndicale et D.________ concluent à l'irrecevabilité du recours, subsidiairement à son rejet. Les parties ont déposé de nouvelles observations, maintenant leurs motifs et conclusions.
 
 
Considérant en droit:
 
1. Selon l'art. 82 let. c LTF, le Tribunal fédéral connaît des recours qui concernent le droit de vote des citoyens ainsi que les élections et votations populaires. Cette disposition permet de recourir contre l'ensemble des actes affectant les droits politiques (ATF 138 I 171 consid. 1.1 p. 175 et les arrêts cités). Elle permet en particulier au citoyen de se plaindre de ce qu'une initiative populaire a été indûment soustraite au scrutin populaire, parce qu'elle a été déclarée totalement ou partiellement invalide par l'autorité cantonale chargée de cet examen (ATF 134 I 172 consid. 1).
 
La voie de l'art. 82 let. c LTF est également ouverte pour contester la décision, prise par l'autorité cantonale, de valider une initiative et de la présenter au vote populaire, pour autant que le droit cantonal charge l'autorité compétente de vérifier d'office la conformité des initiatives aux règles supérieures. Dans ce cas, le citoyen dispose d'une prétention à ce que ce contrôle obligatoire soit effectué correctement et à ce que le corps électoral soit dispensé de se prononcer, le cas échéant, sur des dispositions qui paraissent d'emblée contraires au droit matériel supérieur (ATF 128 I 190 consid. 1.3 p. 194). Il n'est pas contesté en l'occurrence que selon la constitution genevoise, le Grand Conseil est tenu d'effectuer un tel examen et de déclarer nulles les initiatives dont le contenu est manifestement non conforme au droit (art. 66 Cst./GE, dans sa teneur au moment du prononcé attaqué). Cela ouvre la voie du recours pour violation des droits politiques.
 
1.1. La qualité pour recourir appartient à toute personne à laquelle la législation cantonale accorde l'exercice des droits politiques, même si elle n'a aucun intérêt personnel à l'annulation de l'acte attaqué (ATF 138 I 171 consid. 1.3 p. 176; 134 I 172 consid. 1.3.3 p. 176; 128 I 190 consid. 1 p. 192). La qualité pour agir des recourants, électeurs dans le canton de Genève, est donc indiscutable.
 
1.2. Pour le surplus, le recours est formé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) contre une décision non susceptible d'un recours cantonal (art. 88 al. 2 LTF; ATF 138 I 171 consid. 1.2 p. 175). Contrairement à ce que soutiennent la CGAS et Alexander Pellizzari, le recours est suffisamment motivé au regard des exigences tant de l'art. 42 al. 2 LTF que de l'art. 106 al. 2 LTF, s'agissant des griefs de nature constitutionnelle (ATF 138 I 171 consid. 1.4 p. 176). Il y a donc lieu d'entrer en matière.
 
2. Les recourants soutiennent que l'art. 2A LIRT, tel que prévu par l'initiative, violerait les art. 7a de la loi sur les travailleurs détachés (LDét; RS 823.20), 360a et 360b CO, ainsi que l'art. 1a de la loi fédérale permettant d'étendre le champ d'application de la convention collective de travail (LECCT; RS 221.215.311). Il serait en effet contraire à ces dispositions de déléguer à l'inspection des entreprises des compétences que la législation fédérale confie expressément aux commissions tripartites instaurées par l'art. 360b CO. L'autonomie reconnue à l'inspection des entreprises serait également contraire à l'art. 42 al. 1 de la loi sur le travail dans l'industrie, l'artisanat et le commerce (LTr; RS 822.11).
 
2.1. D'une manière générale, une initiative populaire cantonale, quelle que soit sa formulation, doit respecter les conditions matérielles qui lui sont imposées. Elle ne doit, en particulier, rien contenir de contraire au droit supérieur, qu'il soit cantonal, intercantonal, fédéral ou international (ATF 133 I 110 consid. 4.1 p. 115 s.). En vertu du principe de la force dérogatoire du droit fédéral ancré à l'art. 49 al. 1 Cst., les cantons ne sont pas autorisés à légiférer dans les matières exhaustivement réglementées par le droit fédéral. Dans les autres domaines, ils peuvent édicter des règles de droit, pour autant qu'elles ne violent ni le sens ni l'esprit du droit fédéral et qu'elles n'en compromettent pas la réalisation (ATF 134 I 125 consid. 2.1 p. 128; 133 I 286 consid. 3.1 p. 290 et les arrêts cités).
 
L'existence ou l'absence d'une législation fédérale exhaustive constitue donc le premier critère pour déterminer s'il y a conflit avec une règle cantonale. Toutefois, même si la législation fédérale est considérée comme exhaustive dans un domaine donné, une loi cantonale peut subsister dans le même domaine si elle poursuit un autre but que celui recherché par le droit fédéral (ATF 133 I 110 consid. 4.1 p. 116 et la référence citée; cf. ATF 131 I 333 consid. 2.2 p. 336; ATF 125 I 431 consid. 3b/aa p. 434). Ce n'est que lorsque la législation fédérale exclut toute réglementation dans un domaine particulier que le canton perd la compétence d'adopter des dispositions complétives, quand bien même celles-ci ne contrediraient pas le droit fédéral ou seraient même en accord avec celui-ci (ATF 133 I 110 consid. 4.1 p. 116 et les arrêts cités).
 
2.2. Les premières mesures d'accompagnement à l'Accord du 21 juin 1999 sur la libre circulation des personnes (ALCP; RS 0.142.112.681) ont été adoptées le 8 octobre 1999. La LDét comporte différents instruments de lutte contre la sous-enchère salariale dont en premier lieu une nouvelle législation réglant le détachement de travailleurs dans le cadre de prestations de services transfrontaliers. Une révision du Code des obligations a également été opérée (art. 360a-f CO), portant sur les salaires minimaux; elle prévoit notamment la création de commissions tripartites dans chaque canton et à la Confédération, composées de représentants de l'Etat, des employeurs et des travailleurs et chargées de l'observation du marché du travail ainsi que de détecter des situations de sous-enchère salariale (art. 360b al. 1 et 2 CO); ces commissions peuvent proposer l'adoption par l'autorité compétente de contrats-types fixant un salaire minimum impératif (art. 360a et 360b al. 3 CO). Elles ont le droit d'obtenir des renseignements ou de consulter tout document nécessaire dans les entreprises (art. 360b al. 5 CO). Lorsqu'il existe une convention collective de travail, les commissions tripartites peuvent également, en cas de sous-enchère abusive et répétée, en demander l'extension (art. 1a LECCT). Les commissions tripartites ont ainsi une mission d'enquête dans le cadre de l'observation du marché du travail, ainsi qu'une mission de contrôle visant à assurer le respect des contrats-types fixant les salaires minimaux ( VEUVE, Les mesures d'accompagnement liées à l'extension de l'ALCP, in: Kaddous/Jametti Greiner, Accords bilatéraux II Suisse-UE, Bâle 2006, p. 849 ss, 861).
 
Après l'extension de l'ALCP aux nouveaux Etats membres de l'Union européenne, les mesures d'accompagnement ont fait l'objet d'une révision. Certaines modifications étaient souhaitables pour améliorer l'efficacité et renforcer les mesures d'accompagnement déjà en place. Le droit fédéral ne disait en effet rien sur l'organisation des contrôles et leur fréquence, et il était peu vraisemblable que les commissions tripartites procèdent in corpore à ces opérations. Divers modes de procéder étaient envisageables: la désignation d'une délégation ad hoc ou permanente, l'octroi de mandats à des tiers (commissions paritaires, fiduciaires) ou le recours aux inspecteurs du marché du travail, cette dernière solution présentant l'avantage de la professionnalisation et de la rapidité d'intervention (Message du Conseil fédéral concernant la loi fédérale révisant les mesures d'accompagnement à la libre circulation des personnes; FF 2004 p. 6187, 6195 s.). Quant au nombre d'inspecteurs, la référence serait de 1 pour 25'000 places de travail (avec une marge d'appréciation de plus ou moins 15'000). La révision des mesures d'accompagnement tend ainsi à l'engagement d'un nombre suffisant d'inspecteurs pour l'exécution des tâches des commissions tripartites (art. 7a LDét) ou par la facilitation de l'extension des conventions collectives de travail fixant des salaires minimaux (art. 2 ch. 3bis LECCT; sur l'ensemble de cette révision, cf. VEUVE, op. cit.).
 
Il résulte de ce qui précède que l'organisation du contrôle du marché du travail est du ressort des cantons. Ceux-ci sont chargés d'instituer leurs commissions tripartites (art. 360b CO) et les différents organes s'y rattachant. Ils disposent d'une grande liberté, notamment dans le mode de désignation des personnes chargées des contrôles effectifs.
 
2.3. Dans le canton de Genève, l'Office cantonal de l'inspection et des relations du travail (OCIRT) est chargé, de manière générale d'exercer les compétences du département cantonal de la solidarité et de l'emploi dans le cadre de l'application de la LIRT (art. 2 al. 3 LIRT). Il est notamment chargé d'effectuer les contrôles auprès des entreprises, d'intervenir et de prendre les mesures nécessaires pour rétablir l'ordre légal et d'infliger les sanctions (art. 1 du règlement d'application de la LIRT - RIRT). Les représentants de l'OCIRT sont notamment habilités à accéder aux locaux des entreprises, à interroger les travailleurs, à se faire remettre et consulter tous les documents nécessaires (art. 2 RIRT). La fonction de commission tripartite est assumée par le Conseil de surveillance du marché de l'emploi (CSME), chargé de l'observation et de la politique générale du marché du travail (art. 18 et 34 LIRT, art. 36 RIRT). L'Observatoire genevois du marché du travail (OGMT) est rattaché au Conseil de surveillance et assiste ce dernier dans ses tâches liées à l'application des mesures d'accompagnement. Ses compétences se répartissent entre l'office cantonal de la statistique, le Laboratoire d'économie appliquée de l'Université de Genève et l'OCIRT lui-même, qui est chargé des investigations directes auprès des entreprises (art. 21 al. 1 LIRT).
 
2.4. Dans le système prévu par l'initiative, l'inspection des entreprises dispose des mêmes moyens que l'OCIRT pour procéder à des investigations directes auprès des entreprises. Elle doit collaborer avec l'office (art. 2a al. 2 et 5 LIRT); elle peut inviter les entreprises à se conformer aux prescriptions légales - avec ou sans délai - et, en cas de refus, communique le cas aux organes compétents pour qu'une décision soit rendue (art. 2A al. 4 LIRT). Pour les initiants, il s'agit non seulement d'augmenter le nombre total d'inspecteurs (1 pour 10'000 employés alors que le ratio actuel serait de 1 pour 18'750), mais également d'accroître la participation des travailleurs dans le processus d'enquête, en assurant la transparence des démarches effectuées par l'OCIRT.
 
2.5. Les dispositions de droit fédéral invoquées par les recourants se limitent à des principes. L'art. 7a LDét prévoit la désignation d'un nombre suffisant d'inspecteurs, ce qui est précisément le but de l'initiative. La création de l'inspection des entreprises ne porte nullement atteinte aux compétences de la commission tripartite telles qu'elles résultent des art. 360b CO, 7 Ldét et 1a LECCT. Ces compétences sont clairement rappelées aux art. 18 ss LIRT, qui ne subit aucune modification sur ces points. En particulier, le CSME demeure seul habilité à mettre en oeuvre les mesures prévues aux art. 360a et 360b CO (art. 20 LIRT). Si le contrôle des salaires minimaux établis par contrat-type de travail se trouve désormais délégué à l'inspection des entreprises (art. 37 al. 2 LIRT) et si celle-ci bénéficie d'indépendance dans l'exécution de ses tâches, les compétences attribuées par la loi aux commissions tripartites demeurent en mains du CSME.
 
Comme cela est rappelé ci-dessus, aucune des dispositions de droit fédéral invoquées par les recourants ne pose d'exigence particulière s'agissant des entités chargées de l'exécution des contrôles proprement dits auprès des entreprises. Le droit fédéral n'impose pas en effet que l'ensemble des enquêtes et contrôles soit effectué par la commission tripartite in corpore, et admet dès lors que cette tâche soit déléguée à certains de ses membres, à des mandataires extérieurs ou à des inspecteurs du marché du travail. Le droit fédéral ne pose aucune restriction quant aux formes d'une telle délégation ou quant aux qualités des délégataires dans la mesure où ceux-ci sont nommés par le Conseil d'Etat qui pourra s'assurer de leurs compétences (art. 2A al. 1 LIRT); à l'instar des fonctionnaires de l'OCIRT, les inspecteurs sont soumis au secret de fonction (art. 2A al. 5 LIRT) et peuvent faire l'objet d'une révocation par l'autorité de nomination. Quant aux objections relatives à la composition de l'inspection des entreprises et en particulier au droit de proposition de la CGAS, elles seront examinées ci-dessous (consid. 3).
 
2.6. On peut certes se demander si l'institution d'un organisme de contrôle supplémentaire aux côtés de l'OCIRT et de l'OGMT est souhaitable. Le souci d'éviter la coexistence de structures parallèles est en effet évoqué dans le message de 2004 (FF 2004 6198 s'agissant de la lutte contre le travail au noir), mais il s'agit là d'une question d'opportunité, la coordination entre l'inspection des entreprises et l'OCIRT et les commissions étant au demeurant expressément prévue par l'initiative (cf. art. 2 al. 7 LIRT).
 
2.7. Les recourants invoquent également en vain l'art. 79 al. 2 OLT1 (RS 822.111). Cette disposition impose notamment aux cantons de s'assurer que l'exécution des tâches légales est confiée à un nombre suffisant de personnes disposant de la formation nécessaire (let. a). L'accroissement du nombre de contrôleurs est précisément le but de l'initiative, et il appartiendra à l'autorité de nomination de s'assurer de la formation et des compétences suffisantes de ceux-ci. Les cantons doivent également s'assurer que les conditions d'engagement de ces personnes confèrent à leur activité la stabilité requise et garantissent leur indépendance (let. d). Cette dernière exigence - qui ne se confond pas avec celle d'impartialité traitée ci-dessous, consid. 3 - est assurée d'une part par la nomination par le Conseil d'Etat et, d'autre part, par l'autonomie qui est reconnue à l'inspection des entreprises en vertu de l'art. 2A al. 2 LIRT.
 
Telle qu'elle est instaurée par l'initiative, l'inspection des entreprises, simple auxiliaire de la commission tripartite chargée de l'exécution des mesures d'enquête et de contrôle, ne viole dès lors pas le droit fédéral. Il reste à savoir si cette entité est compatible avec les exigences d'impartialité déduites notamment de l'art. 29 Cst.
 
3. Les recourants estiment en effet que l'inspection des entreprises serait dotée de compétences d'instruction et disposerait de pouvoirs coercitifs équivalant à ceux d'une autorité administrative dotée d'un pouvoir décisionnel; elle serait ainsi soumise aux exigences constitutionnelles d'impartialité découlant des art. 29 al. 1 et 35 al. 2 Cst. ainsi qu'à l'article 79 al. 2 OLT1. Ces dispositions seraient violées dès lors que l'inspection des entreprises est composée uniquement de représentants des travailleurs.
 
3.1. L'art. 29 al. 1 Cst. dispose que toute personne a droit, dans une procédure judiciaire ou administrative, à ce que sa cause soit traitée équitablement. Selon la jurisprudence, ce droit permet notamment d'exiger la récusation des membres d'une autorité administrative dont la situation ou le comportement sont de nature à faire naître un doute sur leur indépendance ou leur impartialité; il tend à éviter que des circonstances extérieures à l'affaire ne puissent influencer une décision en faveur ou au détriment de la personne concernée. Il suffit que les circonstances donnent l'apparence de la prévention et fassent redouter une activité partiale. Cependant, seules des circonstances constatées objectivement doivent être prises en considération; les impressions purement individuelles d'une des personnes impliquées ne sont pas décisives (ATF 127 I 196 consid. 2b p. 198; 125 I 119 consid. 3b p. 123).
 
3.2. L'art. 10 de la loi fédérale sur la procédure administrative (PA; RS 172.021) concrétise pour la procédure devant les autorités administratives fédérales les exigences posées à l'art. 29 Cst. concernant l'impartialité. Les motifs de récusation de l'art. 10 PA s'appliquent non seulement à l'autorité qui est appelée à rendre une décision mais aussi à toute personne qui participe de manière non négligeable à la préparation de cette dernière, notamment dans un rôle d'instruction, ce qui se justifie particulièrement en matière administrative (ATF 119 V 456, consid. 5; Candrian, Introduction à la procédure administrative fédérale, 2013, p. 39, n° 55; Moor/Poltier, Droit administratif, vol. II, Les actes administratifs et leur contrôle, 3ème éd., Berne 2011, p. 273). Les mêmes règles peuvent être appliquées aux procédures administratives cantonales par le biais de l'art. 29 Cst. (ATF 132 II 485 consid. 4 p. 496; Moor/Poltier, loc. cit.).
 
3.3. De manière générale, les dispositions sur la récusation sont moins sévères pour les membres des autorités administratives que pour les autorités judiciaires. Contrairement à l'art. 30 al. 1 Cst., l'art. 29 al. 1 Cst. n'impose pas l'indépendance et l'impartialité comme maxime d'organisation. En règle générale, les prises de position qui s'inscrivent dans l'exercice normal des fonctions gouvernementales, administratives ou de gestion, ou dans les attributions normales d'une autorité partie à la procédure, ne permettent pas de conclure à l'apparence de partialité et ne sauraient justifier une récusation, au risque sinon de vider de son sens la procédure administrative (ATF 125 I 209 consid. 8a p. 217 s.; 119 consid. 3f p. 124; arrêt 9C_499/2013 du 20 février 2014 consid. 5.2).
 
3.4. L'inspection des entreprises prévue par l'art. 2A de l'IN 151 ne semble pas disposer d'un pouvoir décisionnel en tant que tel. En effet selon le droit fédéral (et selon la teneur actuelle de la LIRT à laquelle l'initiative ne change rien), c'est à la commission tripartite qu'il appartient de proposer une extension d'une CCT ou l'adoption d'un nouveau contrat-type de travail. Les autres compétences décisionnelles sont exercées par l'OCIRT (cf. notamment art. 4 LIRT). L'inspection des entreprises n'en dispose pas moins de pouvoirs d'instruction étendus. Elle est autonome dans son fonctionnement et peut agir de son propre chef (art. 2A al. 2 LIRT); elle dispose de larges pouvoirs d'investigation (art. 2A al. 5, 9 al. 1, 38 al. 1 LIRT) : elle peut accéder à toute heure aux locaux, interroger les travailleurs hors la présence de l'employeur, se faire remettre et consulter tous documents. L'employeur est tenu de fournir les renseignements et documents demandés, sous peine de sanctions (art. 38 al. 1 LIRT). L'inspection des entreprises peut aussi recourir à l'exécution forcée et l'intervention de la gendarmerie afin de mener à bien ses investigations (art. 44 LIRT); elle peut inviter les entreprises à se conformer aux prescriptions en leur accordant un délai, sauf danger imminent ou en cas de force majeure (art. 3 al. 3 LIRT), et formuler des recommandations (art. 3 al. 3 LIRT). Si une entreprise n'applique pas les mesures arrêtées par l'inspection des entreprises, celles-ci sont appliquées d'office et à ses frais (art. 44 al. 3 LIRT).
 
L'activité de l'inspection des entreprises apparaît ainsi comme le préalable nécessaire à la prise de décisions, puisque la commission tripartite doit se baser sur le travail d'inspection et d'enquête pour élaborer ses propositions ou conclure à une violation du droit. Si elle ne prend pas de décisions, l'inspection des entreprises collabore en tout cas activement au processus décisionnel. Elle dispose de pouvoirs d'investigation susceptibles de porter atteinte à la sphère privée, à la garantie de la propriété et à la liberté économique notamment. Ses pouvoirs sont assimilables en définitive à ceux d'une autorité d'instruction pénale. Elle doit ainsi se voir imposer les exigences d'impartialité consacrées à l'art. 29 Cst.
 
3.5. En l'occurrence, le but de la création de l'inspection des entreprises est d'augmenter le nombre et l'efficacité des contrôles auprès des entreprises afin de constater les infractions au droit du travail tels notamment les cas de sous-enchère salariale ou les situations mettant en péril la santé et la sécurité des travailleurs. Il s'agit d'une activité clairement destinée à la protection des travailleurs. Selon les initiants, le mode de désignation prévue est expressément destiné à accroître la confiance des travailleurs dans les mécanismes de contrôle. Compte tenu de ce but, du fait qu'elle est composée exclusivement de représentants des travailleurs et que la CGAS dispose d'un droit de proposition exclusif, l'inspection des entreprises suscite une apparence de prévention incompatible avec les exigences rappelées ci-dessus.
 
Le fait de réserver les postes d'inspecteurs aux seuls représentants des travailleurs présentés par un syndicat déterminé, apparaît également problématique sous l'angle de l'interdiction de l'arbitraire et de la discrimination. On ne voit pas en effet pour quelle raison les personnes non soutenues par la CGAS mais disposant des connaissances dans certains secteurs déterminés, ne pourraient pas être désignées comme inspecteurs. La question peut toutefois demeurer indécise, d'autant que le grief n'a pas été soulevé par les recourants.
 
3.6. Sur le vu de ce qui précède, le mode de désignation de l'inspection des entreprises, tel que prévu à l'art. 2A al. 1 de l'IN 151, apparaît contraire à l'art. 29 Cst. tant en raison de sa composition (exclusivement des représentants des travailleurs) qu'en raison du droit de proposition exclusif de la CGAS. Il y a lieu dès lors de rechercher si, comme le soutiennent les recourants, cela doit entraîner l'invalidité de l'ensemble des dispositions qui font mention de l'inspection des entreprises.
 
4. Aux termes de l'art. 66 al. 3 aCst./GE (disposition applicable lorsque le Grand Conseil a rendu sa décision), le Grand Conseil déclare partiellement nulle l'initiative dont une partie est manifestement non conforme au droit si la ou les parties qui subsistent sont en elles-mêmes valides. Cette possibilité découle aussi du principe selon lequel une initiative doit être interprétée dans le sens le plus favorable aux initiants, selon l'adage "in dubio pro populo". Elle apparaît également comme une concrétisation, en matière de droits populaires, du principe général de la proportionnalité (art. 36 al. 3 Cst.) qui veut que l'intervention étatique porte l'atteinte la plus restreinte possible aux droits des citoyens, et que les décisions d'invalidité soient autant que possible limitées en retenant la solution la plus favorable aux initiants. Ainsi, lorsque seule une partie de l'initiative paraît inadmissible, la partie restante peut subsister comme telle, pour autant qu'elle forme un tout cohérent, qu'elle puisse encore correspondre à la volonté des initiants et qu'elle respecte en soi le droit supérieur. L'invalidité d'une partie de l'initiative ne doit entraîner celle du tout que si le texte ne peut être amputé sans être dénaturé (ATF 134 I 172 consid. 2.1 p. 177 et la jurisprudence citée; arrêt 1C_659/2012 du 24 septembre 2013 consid. 6.2 publié in SJ 2014 I p. 1).
 
4.1. L'invalidation partielle est soumise à deux conditions, l'une subjective, l'autre objective. Il faut en premier lieu que l'on puisse raisonnablement admettre que les signataires auraient aussi approuvé la partie valable de l'initiative, si elle leur avait été présentée seule (ATF 125 I 21 consid. 7b p. 44). Il faut en second lieu qu'amputée de certaines parties viciées, les dispositions restantes représentent encore un tout assez cohérent pour avoir une existence indépendante et correspondre à l'objectif principal initialement visé par les initiants, tel qu'il pouvait être objectivement compris par les signataires (ATF 130 I 185 consid. 5 p. 202). Tel est le cas lorsque la partie restante de l'initiative forme un tout homogène qui suit la direction donnée par l'initiative complète, de sorte que l'initiative ne soit pas dépouillée de son contenu essentiel (ATF 125 I 21 consid. 7b p. 44 arrêt 1C_659/2012 du 24 septembre 2013 consid. 6.2 publié in SJ 2014 I p. 1).
 
4.2. En l'occurrence, l'initiative apparaît contraire au droit supérieur dans la mesure où le mode de nomination des membres de l'inspection des entreprises n'est pas admissible. Les recourants ne prétendent pas qu'elle poserait problème sur d'autres points. Dès lors, conformément aux principes rappelés ci-dessus, il y a lieu de n'invalider que la première phrase de l'art. 2A al. 1 LIRT ("L'inspection des entreprises est composée de représentants des travailleurs") ainsi que la deuxième partie de la deuxième phrase ("sur proposition de la Communauté genevoise d'action syndicale"). Ainsi redéfini, l'art. 2A al. 1 LIRT donnerait compétence au Conseil d'Etat de nommer les membres de l'inspection des entreprises, sans autres précisions, ce qui permettrait la nomination d'une entité neutre dans le respect des exigences d'impartialité et d'indépendance dont se prévalent les recourants. Le cas échéant, le règlement d'application pourrait fixer les principes applicables à la désignation. Le ratio d'un inspecteur pour 10'000 emplois serait également maintenu.
 
L'ensemble des dispositions restantes pourrait demeurer, pour autant que cela forme un tout cohérent et corresponde encore à la volonté des initiants.
 
4.3. L'initiative populaire IN 151 est intitulée "Pour le renforcement du contrôle des entreprises. Contre la sous-enchère salariale". Selon l'exposé des motifs, le nombre d'inspecteurs de l'OCIRT serait de 1 pour 18'750 emplois. En 2010, 1169 contrôles auraient été effectués dans les entreprises de sorte qu'au mieux, une entreprise sur 40 aurait été contrôlée. Le but de l'initiative est ainsi de renforcer la quantité et la qualité des contrôles en doublant le nombre d'inspecteurs de l'OCIRT et en créant l'inspection des entreprises pourvues elles aussi d'un inspecteur pour 10'000 emplois. L'initiative vise aussi un renforcement de la transparence et de la coordination notamment par la publication des rapports de l'OCIRT et de l'inspection du travail. Elle vise enfin à encourager les parties à une CCT à procéder au contrôle de son respect. Tous ces buts peuvent être atteints par la création d'une inspection des entreprises, quel que soit le mode de désignation de ses membres. Les dispositions restantes de l'initiative représentent non seulement un tout homogène et cohérent, mais correspondent à l'objectif principal initialement visé par les initiants, qui est de lutter efficacement contre la sous-enchère salariale (ATF 130 I 185 consid. 5 p. 202). Il ne fait guère de doute que les auteurs de l'initiative et les signataires de celle-ci préféreraient une invalidation portant sur le seul mode de nomination de l'inspection des entreprises, plutôt qu'une suppression pure et simple de cette entité. Une telle invalidation partielle est ainsi conforme au principe de la proportionnalité.
 
5. Les recourants estiment enfin que les moyens d'inspection prévus à l'art. 2A al. 5 LIRT porteraient une atteinte disproportionnée à la liberté économique des employeurs (art. 27 et 94 Cst.). En réalité, ils s'en prennent également sur ce point à la composition de l'inspection des entreprises. Ils ne remettent pas en cause l'intérêt public à une augmentation des contrôles auprès des entreprises, ni les moyens d'investigation dont disposent déjà les instances de contrôle en vertu du droit fédéral et de la LIRT actuelle (art. 3 al. 1 LIRT). Dans la mesure où le grief principal concernant le mode de nomination de l'inspection des entreprises a été admis, l'argumentation des recourants devient sans objet sur ce point.
 
6. Sur le vu de ce qui précède, le recours doit être admis partiellement. L'art. 2A al. 1 LIRT est invalidé en ce qui concerne sa première phrase ("L'inspection des entreprises est composée de représentants des travailleurs") ainsi que la deuxième partie de la deuxième phrase ("sur proposition de la Communauté genevoise d'action syndicale"). Le recours est rejeté pour le surplus. Les recourants et les intimés obtiennent chacun partiellement gain de cause, de sorte que les dépens peuvent être compensés. Conformément à l'art. 66 al. 1 LTF, les frais judiciaires sont mis pour moitié à la charge des recourants, et pour moitié à la charge des intimés.
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
 
1. Le recours est admis partiellement et la décision du Grand Conseil genevois du 30 novembre 2012 est réformée: l'initiative IN 151 est partiellement invalidée en ce sens que la première phrase de l'art. 2A LIRT ("L'inspection des entreprises est composée de représentants des travailleurs") ainsi que la deuxième partie de la deuxième phrase (..."sur proposition de la Communauté genevoise d'action syndicale"...) sont annulées. Le recours est rejeté pour le surplus.
 
2. Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis pour moitié à la charge des recourants et pour moitié à la charge solidaire des intimés Communauté genevoise d'action syndicale et D.________. Il n'est pas alloué de dépens.
 
3. Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des parties et au Grand Conseil de la République et canton de Genève.
 
Lausanne, le 19 mai 2014
 
Au nom de la Ire Cour de droit public
 
du Tribunal fédéral suisse
 
Le Président: Fonjallaz
 
Le Greffier: Kurz
 
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