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Informationen zum Dokument  BGer 5A_866/2013  Materielle Begründung
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BGer 5A_866/2013 vom 16.04.2014
 
{T 0/2}
 
5A_866/2013
 
 
Arrêt du 16 avril 2014
 
 
IIe Cour de droit civil
 
Composition
 
MM. et Mme les Juges fédéraux von Werdt, Président, Escher et Herrmann.
 
Greffière: Mme Gauron-Carlin.
 
 
Participants à la procédure
 
Mme A. X.________,
 
représentée par Me Alain Dubuis, avocat,
 
recourante,
 
contre
 
M. B. X.________,
 
représenté par Me Miriam Mazou, avocate,
 
intimé.
 
Objet
 
modification des mesures provisionnelles (divorce, droit de garde et contribution d'entretien),
 
recours contre l'arrêt du Juge délégué de la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud du 10 octobre 2013.
 
 
Faits:
 
A. Mme A.X.________ (1975) et M. B.X.________ (1976) se sont mariés le 6 mai 2005. Deux enfants sont issus de leur union : C.________, née en 2006, et D.________, né en 2009.
 
A.a. Par prononcé de mesures protectrices de l'union conjugale du 6 juillet 2010, le Président du Tribunal civil de l'arrondissement de Lausanne a notamment attribué la garde des enfants à la mère, fixé le droit de visite du père à défaut d'entente entre les parents, et arrêté la contribution due par le père pour l'entretien des siens à 5'630 fr., dès le 1
 
A.b. Le 4 novembre 2010, le père a requis la modification des mesures protectrices de l'union conjugale, concluant à ce que la garde des enfants lui soit confiée et à ce que la mère contribue à l'entretien des enfants, subsidiairement à l'extension de son droit de visite.
 
A.c. Statuant sur l'appel de chaque partie le 22 mars 2011, le Juge délégué de la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud a ratifié la convention passée à l'audience du 21 mars 2011 tendant notamment à la modification de l'exercice du droit de visite du père.
 
B. Le 26 novembre 2012, la mère a déposé une demande unilatérale en divorce et conclu notamment à l'attribution de la garde des enfants, ainsi qu'au versement d'une contribution d'entretien en faveur d'elle-même et des enfants.
 
B.a. Vu les nombreux actes de procédure, le Président du Tribunal d'arrondissement a exigé des parties le dépôt d'un mémoire reprenant l'ensemble des mesures provisionnelles requises. La mère a conclu à ce que la garde des enfants continue de lui être attribuée et au versement par le père d'une contribution de 5'600 fr. pour l'entretien d'elle-même et des enfants, dès le 1
 
B.b. Par ordonnance de mesures provisionnelles du 21 août 2013, le Président du Tribunal d'arrondissement a notamment attribué la garde des enfants conjointement à la mère et au père, astreint chacune des parties à supporter les frais d'entretien des enfants pour la période de garde et ordonné aux parties d'entreprendre un suivi thérapeutique.
 
B.c. Statuant par arrêt du 10 octobre 2013, envoyé aux parties le 12 novembre 2013, le Juge délégué de la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal a rejeté les appels des parents et confirmé l'ordonnance de mesures provisionnelles du 21 août 2013, sous réserve de l'injonction de suivi thérapeutique qui a été supprimée.
 
C. Par acte du 15 novembre 2013, Mme A.X.________ exerce un recours en matière civile au Tribunal fédéral tendant principalement à l'annulation de l'arrêt attaqué et au renvoi de la cause à l'autorité précédente, subsidiairement à la réforme de l'arrêt entrepris, en ce sens que la garde des enfants lui est attribuée, sous réserve du droit de visite du père, celui-ci étant astreint à contribuer à l'entretien d'elle-même et des enfants par le versement d'un montant indexé de 5'600 fr. par mois, dès le 1 er décembre 2012, et condamné à supporter les charges de l'ancien domicile conjugal. Au préalable, la mère sollicite l'effet suspensif à son recours.
 
D. Par ordonnance du 27 novembre 2013, le Président de la IIe Cour de droit civil du Tribunal fédéral a octroyé l'effet suspensif au recours.
 
 
Considérant en droit:
 
1. L'arrêt entrepris portant sur l'attribution du droit de garde des enfants mineurs, ainsi que sur le versement d'une contribution d'entretien pour la famille, à titre de mesures provisionnelles pour la durée de la procédure de divorce (art. 276 CPC), est une décision finale (art. 90 LTF; ATF 134 III 426 consid. 2.2 p. 431) en matière civile au sens de l'art. 72 al. 1 LTF, de nature non pécuniaire dans son ensemble (arrêts 5A_556/2013 du 7 octobre 2013 consid. 1.1; 5A_13/2013 du 11 février 2013 consid. 1 et les références), prise sur recours par un tribunal supérieur statuant en dernière instance cantonale (art. 75 al. 1 et 2 LTF). Le recours a en outre été interjeté dans le délai (art. 100 al. 1 LTF) et la forme (art. 42 LTF) prévus par la loi, par une partie ayant pris part à la procédure devant l'autorité précédente et ayant un intérêt digne de protection à l'annulation ou à la modification de la décision attaquée (art. 76 al. 1 LTF). Au regard de ces dispositions, le recours en matière civile est recevable.
 
2. Les mesures protectrices de l'union conjugale demeurent en vigueur au-delà de l'ouverture de la procédure de divorce; une fois ordonnées, elles peuvent toutefois être modifiées par le juge des mesures provisionnelles (arrêts 5A_933/2012 du 17 mai 2013 consid. 5.2; 5A_547/2012 du 14 mars 2013 consid. 4.2). La décision attaquée tendant à la modification des mesures protectrices de l'union conjugale prononcées avant l'ouverture de l'action en divorce porte donc sur des mesures provisionnelles au sens de l'art. 98 LTF (ATF 133 III 393 consid. 5.1 p. 396, 585 consid. 3.3 p. 587). La partie recourante ne peut par conséquent dénoncer que la violation de ses droits constitutionnels. Le Tribunal fédéral n'examine de tels griefs que s'ils ont été invoqués et motivés par le recourant ("principe de l'allégation", art. 106 al. 2 LTF), c'est-à-dire s'ils ont été expressément soulevés et exposés de manière claire et détaillée (ATF 134 I 83 consid. 3.2 p. 88 et les arrêts cités). Le recourant ne peut ainsi pas se borner à critiquer la décision attaquée comme il le ferait en instance d'appel; il ne saurait se contenter d'opposer son opinion à celle de la juridiction précédente, mais doit démontrer ses allégations par une argumentation précise (ATF 134 II 349 consid. 3 p. 351 s.; 133 II 396 consid. 3.2 p. 400). Les critiques de nature appellatoire sont irrecevables (ATF 133 III 589 consid. 2 p .591 s.).
 
3. Le recours de la mère a pour objets l'attribution du droit de garde des enfants, ainsi que l'entretien de ceux-ci et d'elle-même, à titre provisionnel durant la procédure de divorce.
 
3.1. Une fois ordonnées, les mesures provisionnelles ne peuvent être modifiées par le juge qu'aux conditions de l'art. 179 CC (par renvoi des art. 137 al. 2 aCC et 276 al. 1 CPC; arrêts 5A_933/2012 du 17 mai 2013 consid. 5.2; 5A_547/2012 du 14 mars 2013 consid. 4.2). Le juge prononce les modifications commandées par les faits nouveaux et rapporte les mesures prises lorsque les causes qui les ont déterminées n'existent plus. La modification des mesures provisionnelles ne peut être obtenue que si, depuis leur prononcé, les circonstances de fait ont changé d'une manière essentielle et durable, notamment en matière de revenus, à savoir si un changement significatif et non temporaire est survenu postérieurement à la date à laquelle la décision a été rendue, si les faits qui ont fondé le choix des mesures provisoires dont la modification est sollicitée se sont révélés faux ou ne se sont par la suite pas réalisés comme prévus (arrêts 5A_400/2012 du 25 février 2013 consid. 4.1; 5A_883/2011 du 20 mars 2012 consid. 2.4). S'agissant toutefois de la réglementation du droit de garde et de visite, il suffit que le pronostic du juge sur les effets des relations personnelles entre le parent auquel la garde n'a pas été confiée et l'enfant se révèle erroné et que le maintien de la réglementation actuelle risque de porter atteinte au bien de l'enfant (arrêt 5A_120/2013 du 23 mai 2013 consid. 2.1.1, dans le cadre de la modification du jugement de divorce). Ainsi, il faut surtout garder à l'esprit que le fait nouveau est important et suffisant pour modifier le jugement lorsqu'un tel changement apparaît comme nécessaire pour répondre au bien de l'enfant (arrêt 5A_101/2011 du 7 juin 2011 consid. 3.1.1 et les références).
 
 
3.2.
 
3.2.1. En appel, le Juge délégué de la Cour d'appel civile a rappelé que le Tribunal fédéral s'était récemment interrogé sur le point de savoir si l'absence de consentement des deux parents au maintien de la garde alternée était suffisante pour refuser l'exercice en commun de cette prérogative, notamment à la lumière des art. 8 et 14 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme (CEDH). L'autorité précédente a cependant exposé l'avis divergeant d'un auteur ( PHILIPPE MEIER, Résumé de jurisprudence (filiation et tutelle) mars à juin 2012, 
 
3.2.2. Enfin, le Juge délégué a jugé raisonnable d'exiger de chaque partie qu'elle assume l'entier des frais d'entretien des enfants lorsqu'elle les a auprès d'elle, sans contribution de l'autre parent, hormis la participation par moitié aux dépenses extraordinaires. S'agissant des " questions pécuniaires ", outre l'entretien des enfants, l'autorité précédente a expressément confirmé la solution du Président du Tribunal d'arrondissement. Celui-ci avait alors jugé qu'il n'y avait pas lieu de revenir sur le principe du " clean break " consacré dans les décisions de mesures protectrices de l'union conjugale, la mère possédant une capacité de travail plus importante que celle qu'elle réalise et a rappelé que celle-ci avait conclu en mesures protectrices de l'union conjugale à l'attribution du domicile conjugal moyennant qu'elle supporte la totalité des charges s'y rapportant, en sorte qu'il n'y avait pas lieu de reconsidérer cette question qui relevait désormais de la liquidation du régime matrimonial. Le Juge délégué a en outre explicitement réitéré à la mère qu'elle pourrait désormais augmenter son taux d'activité lucrative à un taux correspondant à celui du père et ainsi réaliser des revenus équivalents à ce dernier.
 
4. Dans une première critique, la recourante soulève la violation de son droit d'être entendue (art. 29 Cst.), en raison de l'absence de motivation concernant, d'une part, de ses conclusions tendant à l'octroi d'une contribution d'entretien pour elle-même et, d'autre part, de la prise en charge par le père des frais de l'ex-domicile conjugal. Elle expose que la décision querellée ne traite aucunement de ces deux problématiques et affirme ignorer pour quelle raison ses deux prétentions ont été écartées, en sorte qu'elle n'a pas pu faire valoir ses moyens sur ces questions dans le cadre du présent recours. La mère soutient que l'autorité précédente a " oublié " de se prononcer sur ces deux aspects, dès lors qu'elle a rejeté son appel en bloc.
 
4.1. Le droit à une décision motivée participant de la nature formelle du droit d'être entendu (ATF 127 V 431 consid. 3d/aa p. 437 s.; 104 Ia 201 consid. 5g p. 212 ss), sa violation conduit à l'annulation de la décision attaquée, indépendamment des chances de succès du recours sur le fond (ATF 135 I 279 consid. 2.6.1 p. 285; 127 V 431 consid. 3d/aa p. 437), de sorte que ce grief doit être examiné en premier (ATF 137 I 195 consid. 2.1 p. 197; 124 I 49 consid. 1 p. 50).
 
4.2. En l'occurrence, force est de constater que la décision querellée contient une argumentation concernant l'entretien de la famille et les charges de l'ex-domicile conjugal, bien que la motivation soit peu explicitée, l'autorité précédente ayant essentiellement renvoyé aux considérations du premier juge qu'elle a fait siennes. En tant qu'elle se plaint de l'absence de motivation quant à sa conclusion relative aux charges de l'ex-domicile conjugal, la recourante se méprend, puisque le Juge délégué a confirmé la motivation du premier juge, qu'il a au demeurant retranscrite dans son arrêt. S'agissant de la contribution d'entretien entre époux, la recourante a manifestement été en mesure d'attaquer le raisonnement de la décision querellée qui retient, qu'elle est en mesure d' " étendre son activité lucrative à un taux correspondant à celui du père et réaliser de la sorte des revenus équivalents " à celui-ci ( 
 
5. Dénonçant dans un second grief une application arbitraire (art. 9 Cst.) des règles en matière d'attribution du droit de garde des enfants mineurs au cas d'espèce, la recourante reproche à l'autorité précédente d'avoir prononcé un droit de garde alterné malgré son opposition à ce mode de garde.
 
5.1. Dans sa réponse du 4 avril 2014, le père procède à une analyse de la jurisprudence citée par la recourante et en conclut qu'il n'est pas arbitraire d'instaurer un droit de garde alterné, nonobstant l'opposition ferme de l'un des parents. Il soutient que les deux expertises du SUPEA sont valables et indiquent toutes deux que la garde partagée serait profitable aux enfants. L'intimé conclut ainsi au rejet du grief d'arbitraire (art. 9 Cst.) dans la fixation du droit de garde.
 
5.2. Selon l'art. 176 al. 3 CC relatif à l'organisation de la vie séparée, auquel renvoie l'art. 276 al. 1 CPC, lorsque les époux ont des enfants mineurs, le juge ordonne les mesures nécessaires, d'après les dispositions sur les effets de la filiation (art. 273 ss CC); il peut notamment confier l'autorité parentale à un seul des parents (art. 297 al. 2 CC) ou, à plus forte raison, lui attribuer le droit de garde des enfants. La garde alternée est la situation dans laquelle les parents exercent en commun l'autorité parentale, mais se partagent la garde de l'enfant de manière alternée pour des périodes plus ou moins égales (arrêt 5A_69/2011 du 27 février 2012 consid. 2.1 et les références). L'instauration d'une garde alternée s'inscrit dans le cadre de l'exercice conjoint de l'autorité parentale (art. 133 al. 3 CC; arrêt 5A_69/2011 précité consid. 2.1), laquelle constitue une exception au principe de l'attribution de l'autorité parentale exclusivement à l'un des parents (art. 133 al. 1 CC) et n'est prononcée que pour autant que cela soit compatible avec le bien de l'enfant et que les parents soumettent à la ratification du juge une convention prévoyant l'autorité parentale conjointe et/ou une garde alternée. Ainsi, même dans le cas où les parents requièrent conjointement le maintien de l'exercice en commun de la garde après le divorce et soumettent à la ratification du juge une convention, l'admissibilité d'un tel accord doit être appréciée sous l'angle du bien de l'enfant et dépend essentiellement des circonstances du cas particulier, telle que la capacité de coopération des parents (arrêts 5A_196/2013 du 25 septembre 2013 consid. 4.1 
 
5.3. Selon la jurisprudence constante, la garde conjointe suppose l'accord des deux parents à ce mode de garde et consacre l'intérêt de l'enfant comme critère principal. En l'occurrence, il ressort de l'expertise du SUPEA, vu les capacités éducatives des parties jugées équivalentes et bonnes, que les médecins ne veulent pas favoriser l'un des parents et refusent implicitement de se prononcer sur l'attribution de la garde à l'un exclusivement. Le complément d'expertise du SUPEA rapporte qu'il n'existe aucune " contre-indications à l'attribution de la garde alternée " pour les enfants, lesquels " semblent présenter des ressources psychoaffectives et des capacités pour pouvoir affronter les changements et les transitions qu'implique une garde alternée " ( 
 
6. Vu ce qui précède, le recours est admis, la décision attaquée annulée et la cause renvoyée à l'autorité précédente pour instruction et nouvelle décision au sens des considérants. Les frais judiciaires sont mis à la charge de l'intimé, qui a conclu au rejet du recours et de la requête d'effet suspensif (art. 66 al. 1 LTF). Une indemnité à payer à titre de dépens à la recourante est mise à la charge de l'intimé (art. 68 al. 1 LTF).
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
 
1. Le recours est admis, la décision attaquée est annulée et la cause est renvoyée à l'autorité précédente pour instruction et nouvelle décision.
 
2. Les frais judiciaires, arrêtés à 2'500 fr., sont mis à la charge de l'intimé.
 
3. L'intimé versera à la recourante la somme de 3'000 fr. à titre de dépens pour la procédure devant le Tribunal fédéral.
 
4. Le présent arrêt est communiqué aux parties et au Juge délégué de la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud.
 
Lausanne, le 16 avril 2014
 
Au nom de la IIe Cour de droit civil
 
du Tribunal fédéral suisse
 
Le Président: von Werdt
 
La Greffière: Gauron-Carlin
 
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