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Informationen zum Dokument  BGer 4A_87/2013  Materielle Begründung
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BGer 4A_87/2013 vom 22.01.2014
 
{T 0/2}
 
4A_87/2013
 
 
Arrêt du 22 janvier 2014
 
 
Ire Cour de droit civil
 
Composition
 
Mmes et M. les Juges fédéraux Klett, Présidente, Kolly, Hohl, Kiss et Niquille.
 
Greffier: M. Piaget.
 
 
Participants à la procédure
 
X.________ SA en liquidation, représentée par
 
Me Philippe Gobet,
 
recourante,
 
contre
 
1. Z.________, représentée par Me Alain Maunoir,
 
2.  Masse en faillite de X.________ SA,
 
intimées.
 
Objet
 
contrat de bail,
 
recours contre l'arrêt de la Cour de justice du canton de Genève, Chambre des baux et loyers, du 21 janvier 2013.
 
 
Faits:
 
A. Par contrat conclu le 4 avril 2001, A.________ SA a cédé à B.________ SA, moyennant un loyer annuel de 40'000 fr., l'usage de la parcelle n° ... de la Commune de V.________ (Genève) dont elle était propriétaire et qui était destinée à l'exploitation d'une installation de lavage et de triage du gravier.
 
Le bail a été conclu pour une durée initiale de quinze ans échéant le 31 décembre 2015.
 
Le 1er janvier 2006, B.________ SA aurait cédé à X.________ SA, pour le même loyer annuel, l'usage de la même parcelle. L'existence et la validité de ce contrat sont litigieuses. Ce " bail " a été conclu pour une durée initiale de dix ans échéant le 31 décembre 2015.
 
A la suite de la faillite de A.________ SA, Z.________ a acquis la parcelle n° ... de la Commune de V.________ lors d'une vente aux enchères forcées organisée par l'office des faillites le 24 mars 2009.
 
Le 1er mars 2010, X.________ SA et la société C.________ SA, ont conclu un contrat de sous-location, pour un loyer annuel de 40'000 fr., portant sur l'usage de cette même parcelle. Ce contrat a pris effet le jour de la signature et fut conclu pour une durée indéterminée tant que l'accord au transfert de bail n'aurait pas été obtenu ou, en cas de refus du propriétaire de délivrer cet accord, tant qu'il n'aurait pas été constaté par un jugement définitif que le propriétaire pouvait se prévaloir de justes motifs pour s'opposer au transfert du bail.
 
Le 9 mars 2010, Z.________ a déposé au Tribunal de première instance de Genève une demande de revendication dirigée contre X.________ SA, concluant à l'évacuation de la parcelle. Le 1er juin 2010, X.________ SA a informé Z.________ de l'existence du contrat de sous-location conclu avec C.________ SA et a sollicité le transfert de son contrat de bail en faveur de C.________ SA. Z.________ a contesté que X.________ SA puisse être au bénéfice d'un contrat de bail sur tout ou partie de la parcelle n° ... de la Commune de V.________.
 
B. Par requête déposée à la Commission de conciliation en matière de baux et loyers le 8 octobre 2010, X.________ SA a demandé qu'il soit dit et constaté qu'elle est titulaire des droits découlant du bail conclu initialement entre A.________ SA et B.________ SA et à ce que le transfert du contrat de bail soit autorisé en faveur de C.________ SA avec effet au 1er juillet 2010.
 
Non conciliée, la cause a été introduite devant le Tribunal des baux et loyers le 4 février 2011 et il a été procédé à divers actes d'instruction.
 
Par courrier du 6 décembre 2011, Z.________ a sollicité la suspension de la procédure en application de l'art. 207 LP pour le motif que la faillite de X.________ SA a été prononcée par jugement du Tribunal de première instance du 17 octobre 2011.
 
Statuant par jugement du 16 décembre 2011, le Tribunal des baux et loyers a affirmé que la suspension de plein droit de l'art. 207 LP n'entrait pas en ligne de compte; il a toutefois rectifié la qualité de partie de X.________ SA en " X.________ SA en faillite ", laissant entendre que l'office des faillites avait désormais qualité pour représenter la masse en faillite, un délai déterminé lui étant fixé pour fournir ses déterminations.
 
Par acte envoyé au greffe de la Cour de justice le 1er février 2012, X.________ SA en liquidation, par ses organes sociaux (ci-après: la société faillie), a formé, en son propre nom, un recours partiel contre ce jugement. Elle a soutenu qu'elle était en droit de poursuivre le procès en lieu et place de sa masse en faillite.
 
C. X.________ SA en liquidation, par ses organes sociaux, exerce un recours en matière civile et un recours constitutionnel subsidiaire au Tribunal fédéral contre l'arrêt cantonal du 21 janvier 2013. Soutenant que la décision attaquée est une décision partielle (art. 91 LTF), qu'elle viole les art. 204 et 207 LP, ainsi que les art. 9 et 29a Cst., elle conclut à son annulation et à ce qu'il soit dit, sous suite de frais et dépens, que la procédure doit se poursuivre avec X.________ SA en liquidation, et non pas avec sa masse en faillite. La recourante demande également d'annuler tout acte de procédure que le Tribunal des baux aurait exécuté suite à son jugement du 16 décembre 2011 et d'écarter tout acte de procédure émanant de la masse en faillite de X.________ SA.
 
Z.________ (ci-après: l'intimée) conclut au rejet du recours pour autant qu'il soit recevable avec suite de frais et dépens. Elle sollicite, avec pièces à l'appui, que la recourante soit astreinte à déposer des sûretés d'un montant de 4'000 fr. en garantie de ses dépens.
 
L'office des faillites s'en rapporte à justice sur les conclusions déposées par l'avocat de la recourante, rappelant que celui-ci n'agit ni pour le compte de la masse en faillite, ni pour celui de l'office des faillites. La masse en faillite ajoute qu'elle n'a pas repris pour son compte les obligations contractuelles liant ou ayant lié la société faillie.
 
La recourante a répliqué et l'intimée a renoncé à dupliquer.
 
 
1.
 
1.1. Le Tribunal fédéral examine d'office la recevabilité des recours (ATF 137 III 417 consid. 1).
 
1.2. Devant le juge de première instance, l'intimée a sollicité la suspension de la procédure en application de l'art. 207 LP en raison de la faillite de la société recourante. Le juge a rejeté la demande de suspension (ch. 1 du dispositif). Cette partie du jugement n'a cependant pas fait l'objet d'un recours à la Chambre des baux et loyers. Celle-ci n'a pas examiné ce point.
 
1.3. L'art. 740 al. 5 CO restreint de façon drastique les compétences des organes sociaux en cas de faillite, la liquidation ayant en principe lieu par l'administration de la faillite. Les organes sociaux ne conservent le pouvoir de représenter la société que dans la mesure où leur intervention est encore nécessaire, en vue de la liquidation de la société (art. 740 al. 5 CO; ATF 117 III 39 consid. 3b p. 42; 88 III 28 consid. 2a p. 34 s., 68 consid. 2c p. 77 ss; CHRISTOPH STÄUBLI, in Basler Kommentar, Obligationenrecht II, 3e éd. 2008, no 11 ad art. 740 CO).
 
1.3.1. Si le droit litigieux n'appartient effectivement pas à la masse en faillite (cf. art. 204 al. 1 LP), la société faillie peut alors (par ses organes sociaux) en disposer, également en procédure (cf. note au JdT 1994 II p. 16; EMIL HENZE, Der Konkurs der Aktiengesellschaft nach schweizerischem Recht, Berne 1923, p. 64 s.; BASIL FELLMANN, Der Konkurs der Gesellschaft mit beschränkter Haftung und ihrer Mitglieder nach schweizerischem Recht, Fribourg 1947, p. 91). Titulaire du droit, elle conserve ainsi également la faculté de conduire le procès ( 
 
1.3.2. Dans l'hypothèse inverse (droit litigieux appartenant à la masse en faillite), le débiteur failli - titulaire du droit, mais ne pouvant plus en disposer, également en procédure - ne pourra retrouver sa faculté de conduire le procès (dans lequel il est demandeur) que si la masse en faillite renonce à le poursuivre et qu'aucun créancier ne demande la cession du droit d'agir selon l'art. 260 LP (ATF 68 III 163; cf. arrêt 2C_303/2010 du 24 octobre 2011 consid. 2.4.2; ). Il n'importe à ce sujet que le failli soit une personne physique ou une personne morale. Dans ce dernier cas également, même si l'hypothèse apparaît plutôt théorique, la société faillie, qui continue d'exister malgré sa dissolution (ATF 117 III 39 consid. 3b p. 41 s.), retrouve sa faculté de conduire le procès ( WOHLFAHRT/MEYER, in Basler Kommentar, Bundesgesetz über Schuldbetreibung und Konkurs II, 2e éd. 2010, nos 20 et 32 ad art. 207 LP; HENZE, op. cit., p. 64 s.; FELLMANN, p. 91).
 
1.3.3. Il ne résulte pas de la position de l'administration de la faillite, ni d'ailleurs des constatations cantonales, que la seconde assemblée des créanciers aurait pris la décision de renoncer au procès, ni qu'un créancier aurait demandé la cession des droits de la masse (cf. art. 260 LP) ou, en cas de liquidation sommaire, que la décision aurait été prise par voie de circulation (sur ces questions de compétence: Romy, op. cit., no 16 ad art. 207 LP). Il ne s'agit donc pas de se demander si la société faillie, par ses organes sociaux, a retrouvé sa capacité procédurale (cf. supra consid. 1.3.2), mais exclusivement de savoir si elle a fait valoir un droit n'appartenant pas à la masse à l'ouverture de la faillite (cf. supra consid. 1.3.1).
 
1.4. La recourante soutient que la décision attaquée a pour effet de mettre fin à la procédure à l'égard d'une partie en cause au sens de l'art. 91 let. b LTF.
 
Il n'est pas douteux que l'administration de la masse en faillite, dans la perspective de la cour cantonale, a la faculté de conduire le procès. La question de savoir si le transfert, de la société faillie (par les organes sociaux) à l'administration de la faillite (agissant alors comme organe officiel de la masse en faillite), de la faculté de conduire le procès (  Prozessführungsbefugnis) représente une véritable substitution de parties (  Parteiwechsel ) est plus délicate (parlant de " substitution de parties " de manière générale dans le cas de l'ouverture d'une faillite: ATF 134 III 366 consid. 5.1.1 p. 371, qui ne traite toutefois pas explicitement de la problématique posée dans le cas d'espèce).
 
La question peut rester indécise en l'espèce, le but poursuivi par l'art. 91 let. b LTF ouvrant la voie du recours immédiat dans les circonstances d'espèce, indépendamment de la question de savoir si une partie est à proprement parler remplacée par une autre. Certes, la société faillie demeure titulaire du droit litigieux, mais ses organes sociaux ne peuvent plus agir pour elle. Cela étant, elle est exclue de la procédure, au moins jusqu'à la décision de la masse de renoncer à poursuivre le procès (cf. ATF 131 I 57 consid. 1.1 p. 60; arrêt 4A_215/2009 du 6 août 2009 consid. 1.1).
 
L'arrêt cantonal est une décision partielle au sens de l'art. 91 let. b LTF.
 
1.5. Si les conclusions ne tendent pas au paiement d'une somme d'argent déterminée, le Tribunal fédéral fixe la valeur litigieuse selon son appréciation (art. 51 al. 2 LTF). L'arrêt entrepris ne s'est pas prononcé sur la question de la valeur litigieuse. En l'espèce, le litige portant sur l'existence et le transfert d'un bail qui prévoit un loyer annuel de 40'000 fr. et arrivant à échéance le 31 décembre 2015, il n'est en l'espèce pas douteux que la valeur litigieuse minimale de 15'000 fr. requise en matière de droit du bail par l'art. 74 al. 1 let. a LTF est atteinte.
 
1.6. Selon l'art. 76 al. 1 LTF, a qualité pour former un recours en matière civile quiconque a pris part à la procédure devant l'autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire (let. a), est particulièrement touché par la décision attaquée et a un intérêt digne de protection à son annulation ou sa modification (let. b, dans sa teneur en vigueur depuis le 1er janvier 2011 [RO 2010 1739], l'arrêt attaqué ayant été rendu après cette date, cf. art. 132 al. 1 LTF).
 
1.7. Pour le reste, le recours est dirigé contre un arrêt rendu en matière civile (art. 72 al. 1 LTF) par un tribunal supérieur statuant sur recours en dernière instance cantonale (art. 75 LTF). Il est en principe recevable, puisqu'il a été déposé dans le délai (art. 45 al. 1, 48 al. 1 et 100 al. 1 LTF) et la forme (art. 42 LTF) prévus par la loi.
 
1.8. Le recours peut être interjeté pour violation du droit, tel qu'il est délimité par les art. 95 et 96 LTF. Il peut donc également être formé pour violation d'un droit constitutionnel (ATF 136 I 241 consid. 2.1 p. 247; 136 II 304 consid. 2.4 p. 313).
 
1.9. Le Tribunal fédéral conduit son raisonnement juridique sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut s'en écarter que si les faits ont été établis de façon manifestement inexacte - ce qui correspond à la notion d'arbitraire (ATF 137 I 58 consid. 4.1.2 p. 62; 137 II 353 consid. 5.1 p. 356) - ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF).
 
 
2.
 
2.1. La cour cantonale déclare le recours irrecevable en tant qu'il a été formé par la société, après l'ouverture de sa faillite, par l'intermédiaire de ses organes sociaux.
 
2.2. Citant un auteur, la recourante tente encore de démontrer que le transfert d'un bail par le locataire sortant n'a aucun enjeu financier ( MICHEL BISE, La faillite du bailleur, in 11e Séminaire sur le droit du bail, 2000, op. cit., p. 12). Elle laisse ainsi entendre que la requête visant à obtenir le transfert n'influe pas sur la composition de la masse active ou passive. Cette affirmation tombe à faux et l'argument se révèle d'emblée sans consistance.
 
2.3. C'est à bon droit que le Tribunal des baux a rectifié la raison sociale de la faillie (cf. art. 159 al. 1 let. c ORC) et, en vertu de l'art. 740 al. 5 CO et des art. 204 et 240 LP, considéré que seule la masse en faillite, représentée par l'administration de la masse en faillite avait la faculté de continuer la procédure.
 
3. La recourante invoque une violation de la garantie de l'accès au juge (art. 29a Cst.). Elle allègue qu'elle est privée de la faculté de continuer le procès, ce qui constituerait une violation de l'art. 29a Cst. " dès lors que la privation de cette faculté ne peut trouver sa justification dans les effets de l'ouverture de la faillite ".
 
4. Il résulte des considérations qui précèdent que le recours en matière civile doit être rejeté dans la mesure où il est recevable.
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
 
1. Le recours constitutionnel subsidiaire est irrecevable.
 
2. Le recours en matière civile est rejeté dans la mesure où il est recevable.
 
3. Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge de la recourante et seront prélevés sur les avances effectuées.
 
4. La recourante versera à Z.________ une indemnité de 2'500 fr. à titre de dépens, laquelle sera prélevée sur les sûretés fournies.
 
Il n'est pas alloué de dépens à la masse en faillite de X.________ SA.
 
5. Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour de justice du canton de Genève, Chambre des baux et loyers.
 
Lausanne, le 22 janvier 2014
 
Au nom de la Ire Cour de droit civil
 
du Tribunal fédéral suisse
 
La Présidente: Klett
 
Le Greffier: Piaget
 
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